Présidence
La commission poursuit l'examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2019 (M. Joël Giraud, rapporteur général)
Article 7 : Aménagement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM
La commission examine les amendements identiques I-CF904 de M. Jean-René Cazeneuve, I-CF957 de M. Michel Castellani, I-CF1093 de Mme Christine Pires Beaune et I-CF1376 de M. Olivier Gaillard.
L'article 7 vise à sécuriser les délibérations des exécutifs locaux et, en contrepartie, mettre à la charge des collectivités territoriales les dégrèvements faisant suite à une contestation des usagers – c'est de plus en plus fréquent – en cas d'écart entre le produit de la taxe et les dépenses réelles. L'amendement I-CF904 tend à préciser qu'une disproportion de 15 % est admise.
Il est important de définir précisément la notion de « taux manifestement non disproportionné », le Conseil d'État considérant que seule est admise une disproportion limitée. Je vous propose également par mon amendement I-CF957 de préciser à l'article 1520 du code général des impôts qu'une disproportion de 15 % est admise entre le produit de la taxe et les dépenses.
On a constaté ces dernières années que de nombreuses jurisprudences fragilisent la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) en annulant des taux votés, ce qui met en difficulté le financement du service public. L'amendement I-CF1093 vise à mieux sécuriser les délibérations des exécutifs locaux en définissant la notion, qui fait débat à l'heure actuelle, de taux manifestement non disproportionné par rapport au montant des dépenses.
Comme les précédents, l'amendement I-CF1376 vise à sécuriser les délibérations des exécutifs locaux devant la multiplication des jurisprudences.
Sur le fond, je ne suis pas très favorable à l'idée d'autoriser, par la loi, les collectivités territoriales à fixer un taux de dépense sans lien avec le budget annexe concerné. Reste qu'un problème de jurisprudence se pose de manière de plus en plus pressante et qu'il convient d'harmoniser un peu les choses, ce qui me conduit à donner un avis de sagesse sur tous ces amendements.
La commission adopte les amendements.
Puis elle est saisie des amendements identiques I-CF385 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, I-CF303 de M. Jean-Pierre Vigier, I-CF497 de Mme Véronique Louwagie et I-CF946 de M. Michel Castellani.
L'amendement I-CF497 va dans le même sens : le produit de la taxe perçu par les collectivités ne pourra être supérieur de 15 % aux dépenses engagées pour le service de collecte et de traitement des déchets. Cela permettra de sécuriser la situation.
Je vous propose de retirer ces amendements car ils ont été satisfaits par ceux que nous venons d'adopter.
Les amendements sont retirés.
La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements I-CF500 et I-CF506 de Mme Véronique Louwagie, les amendements identiques I-CF964 de M. Michel Castellani, I-CF992 de M. Jean-René Cazeneuve et I-CF1375 de M. Olivier Gaillard, ainsi que l'amendement I-CF1094 de Mme Christine Pires Beaune.
L'amendement I-CF500 vise à clarifier les dépenses couvertes par la TEOM, afin de rendre la situation plus compréhensible pour les collectivités territoriales et d'assurer davantage de cohérence avec les autres dispositions législatives et réglementaires. Le I-CF506 est un amendement de repli.
Les alinéas 5 à 8 de l'article 7 visent à préciser la nature des dépenses finançables par la TEOM. Or, la rédaction de l'alinéa 6 me paraît insuffisante. Je vous propose par l'amendement I-CF964 de clarifier la situation, notamment afin de permettre la prise en compte du coût complet, qui intègre non seulement les coûts directs des prestations de service mais aussi un certain nombre de coûts indirects : nous viserons ainsi les dépenses réelles de fonctionnement.
J'ai déposé l'amendement I-CF992 dans le même esprit. Il s'agit d'avoir une vision du coût complet en intégrant une partie des coûts de gestion communs.
L'amendement I-CF1375 vise aussi à prendre en compte les coûts indirects qui ne sont pas couverts par les recettes non fiscales.
Il s'agit, là aussi, de sécuriser la situation. La rédaction du projet de loi me paraît insuffisamment précise au regard de la jurisprudence : mon amendement I-CF1094 propose donc de faire apparaître clairement que le périmètre de la taxe pourra comprendre les coûts indirects.
Ces amendements visent à apporter des précisions d'ordre réglementaire sur le périmètre concerné, ce qui ne me paraît pas très orthodoxe. Par ailleurs, même si la lisibilité de certains textes n'est pas toujours optimale, vos demandes me paraissent satisfaites. Je préférerais donc que vous ayez une réponse du ministre en séance : les explications fournies seront inscrites au compte rendu et pourront rassurer tout un chacun. Toutes ces raisons me conduisent à vous proposer de retirer vos amendements à ce stade.
Les amendements I-CF500, I-CF506, I-CF992, I-CF1375 et I-CF1094 sont retirés.
La commission rejette l'amendement I-CF964.
Puis elle examine les amendements identiques I-CF468 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1095 de Mme Christine Pires Beaune.
L'alinéa 10 de l'article 7 met à la charge des collectivités le dégrèvement de la taxe consécutif à la constatation, par une décision de justice ayant force de valeur jugée, de l'illégalité des délibérations prises par une collectivité, fondée sur la circonstance que le produit de la taxe et, par voie de conséquence, son taux sont disproportionnés par rapport au montant des dépenses. L'État justifie ce transfert par la volonté de ne plus faire peser sur le budget de l'État les conséquences de l'illégalité des délibérations des collectivités ; cela peut s'entendre, à ceci près que les délibérations sur les budgets locaux sont soumises à un contrôle de légalité par les préfectures et que l'État perçoit par ailleurs des frais de gestion sur la TEOM... Cet alinéa 10 ne me paraît pas pertinent et je propose, par mon amendement I-CF468, de le supprimer.
L'article 7 est bienvenu car il permettra de sécuriser la perception de la TEOM. Cela étant, faire supporter aux collectivités territoriales les conséquences de ces procédures juridiques ne me paraît pas une bonne idée. Pour commencer, l'État perçoit des frais de gestion, notamment pour payer les dégrèvements dont il est question ; ensuite, toutes les délibérations des collectivités sont soumises au contrôle de légalité ; qui plus est, les collectivités ne sont bien souvent informées qu'à la fin des procédures, auxquelles elles ne sont pas du tout associées. C'est le Trésor public qui perçoit les recettes et engage les actions. Il serait fort de café de faire payer ensuite les collectivités... Mon amendement I-CF1095 propose donc de supprimer l'alinéa 10.
Nous avons adopté des amendements autorisant une disproportion maximale de 15 %, qui était déjà tolérée par la jurisprudence. Supprimer l'alinéa 10 reviendrait à aller trop loin : si la disproportion dépasse 15 %, cela relève tout de même de la responsabilité des collectivités concernées. J'émets donc un avis défavorable.
Il y a un contrôle de légalité : si des recours conduisent à une annulation, c'est qu'il y a eu un dysfonctionnement de ce service public qui est de la responsabilité de l'État. J'ai hésité sur cette question, mais je pense que Mme Louwagie a raison. Il faut ajouter à cela que l'État perçoit, de mémoire, 8 % de la TEOM au titre des frais de gestion, alors que son coût de recouvrement est pratiquement nul, dans la mesure où la TEOM est recouvrée en même temps que la taxe foncière sur les propriétés bâties. L'État fait des bénéfices importants sur les frais qu'il perçoit. Il n'y a pas à faire payer aux collectivités les conséquences d'une défaillance d'un contrôle qui lui incombe.
Comme l'a dit Christine Pires Beaune, l'article 7 est bienvenu, car il s'inscrit dans le cadre de la feuille de route pour l'économie circulaire et fait partie d'un dispositif d'ensemble, avec la taxe générale sur les activités polluantes. Les collectivités territoriales savent que la TEOM sert normalement à financer le service public de gestion et de prévention des déchets. Elles peuvent appliquer cette taxe ou la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM). Quand on fait le choix de la TEOM, on doit normalement appliquer la redevance spéciale qui concerne les déchets assimilés aux déchets ménagers, c'est-à-dire les déchets des entreprises ne faisant pas l'objet de sujétions techniques particulières. Il peut y avoir eu, dans certains cas, un financement pour ces déchets via la TEOM, ce qui explique qu'il y ait une disproportion, mais c'est à la collectivité de mettre en place la redevance spéciale : cela relève de sa compétence, sans qu'il y ait un contrôle particulier de l'État sur ce point. L'alinéa 10 est donc justifié. Par ailleurs, l'article 7 est équilibré, puisque sa première partie sécurisera le dispositif.
J'entends bien ces arguments, mais il ne s'agit pas de remettre en cause l'article 7 : les amendements seulement concernent l'alinéa 10, qui correspond à une disposition bien spécifique. Je suis également choquée que l'on s'assoie un peu sur le contrôle de légalité qui est réalisé par les préfectures : c'est une remise en cause des procédures existantes, et il pourrait y en avoir d'autres par la suite. Il faut faire attention à ne pas créer une sorte de jurisprudence qui pourrait nuire aux collectivités. Par ailleurs, c'est l'État perçoit des frais de gestion et ce sont les collectivités qui paient... Il faut être cohérent.
Comme Mme Louwagie vient de le souligner, l'État perçoit un financement à ce titre – il est de 3,6 % du produit de la TEOM – et il a une obligation de résultat. L'État ne peut pas à la fois percevoir un financement pour réaliser un service et se défausser du problème si ce service est défaillant. Du reste, dans ses négociations avec l'Association des maires de France (AMF), qui est vent debout sur ce sujet, le Gouvernement a laissé entendre que la porte n'était pas fermée : le rapporteur général nous a signifié une fin de non-recevoir, mais je pense qu'un amendement gouvernemental pourrait être déposé – en tout cas je l'espère. Mais cela signifierait, une fois de plus, qu'on ne veut pas laisser le Parlement faire son travail, quitte à venir dans un second temps avec un amendement gouvernemental...
Je vais plaider dans le sens contraire : on ne peut pas se faire l'avocat de la libre administration des collectivités territoriales et demander dans le même temps à l'État d'intervenir systématiquement pour les protéger. Par ailleurs, ce n'est pas la légalité de la taxe qui est en question, mais son montant, c'est-à-dire l'adéquation entre le coût du service et le montant perçu : or cela relève bel et bien de la responsabilité des collectivités territoriales, qui sont chargées de fixer les taux.
Je maintiens mon avis défavorable. On verra bien si le Gouvernement souhaite modifier les dispositions dont nous parlons. Je me repose sur l'excellente argumentation que Bénédicte Peyrol a développée, en ajoutant que cette mesure est la contrepartie tout à fait logique de l'abaissement de 8 à 3 % des frais d'assiette, de recouvrement, de dégrèvement et de non-valeurs au titre des trois premières années au cours desquelles est mise en oeuvre la part incitative de la TEOM – faute de quoi, il pourrait y avoir effectivement un problème pour les comptes des collectivités territoriales. Par ailleurs, je suis d'accord avec ce qu'a dit Jean-René Cazeneuve en ce qui concerne la libre administration des collectivités territoriales. Chacun connaît notre volonté d'évoluer vers davantage d'automaticité et d'immédiateté afin que les maires n'aient plus à attendre le tampon du contrôle de légalité et le blanc-seing de l'administration que certains d'entre nous ont connus en tant que maires. Nous ne sommes plus dans cette logique.
La commission rejette les amendements.
La commission est ensuite saisie des amendements identiques I-CF471 de Mme Véronique Louwagie et I-CF1096 de Mme Christine Pires Beaune.
L'amendement I-CF471 est un amendement de repli : il s'agit d'éviter aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de subir rétroactivement une mesure qui n'existait pas lors du vote des délibérations invalidées par le juge : le dispositif prévu à l'alinéa 10 ne sera applicable qu'aux délibérations adoptées à compter de 2019.
L'amendement I-CF1096 répond au même souci en proposant de décaler dans le temps l'application de l'alinéa 10 : la mesure ne s'appliquera qu'aux délibérations adoptées à partir de 2019. Les procédures en cours ne seront donc pas concernées.
L'alinéa 16 de l'article 7 prévoit déjà que le dispositif s'appliquera aux délibérations prises à compter du 1er janvier 2019. Il n'y aura donc pas de rétroactivité, et je vous propose donc de retirer ces amendements.
Les amendements sont retirés.
Puis la commission examine les amendements identiques I-CF508 de Mme Véronique Louwagie et I-CF789 de M. M'jid El Guerrab.
L'article 7 tend à revoir le taux des frais de gestion et de recouvrement perçus par le Trésor public lorsque la TEOM comporte une part incitative. Le résultat est qu'il y aura deux taux différents malgré l'existence d'un traitement commun : le taux sera de 3 % si la TEOM intègre une part incitative et de 8 % dans les autres cas, ce qui me paraît un peu complexe. Mon amendement I-CF508 permettra de simplifier le dispositif.
Plus de 550 millions d'euros sont prélevés chaque année par le Trésor public au titre de la gestion de la TEOM pour les collectivités territoriales. Une réduction de 5 points des frais de gestion et de recouvrement conduirait à un allégement de la fiscalité locale de plus de 300 millions d'euros. Diminuer les frais de gestion dans le seul cas où la TEOM intègre une part incitative, comme le propose le Gouvernement, est loin de répondre au problème : cela ne concernerait qu'une minorité des collectivités territoriales finançant la gestion des déchets via la TEOM, et qui plus est à titre temporaire. Je vous propose plutôt un alignement sur les frais de gestion et de recouvrement applicables à la taxe foncière sur les propriétés bâties, qui fait d'ailleurs l'objet d'un traitement commun. Cela permettra de répondre à une préoccupation qui est notamment celle de l'Association nationale des collectivités, des associations et des entreprises pour la gestion des déchets, de l'énergie et des réseaux de chaleur.
J'estime qu'il faut s'en tenir à ce que propose le Gouvernement, à savoir un avantage consenti aux communes en contrepartie de l'instauration d'une part incitative de TEOM, même si cela conduit, en effet, à deux taux différents. Si l'on crée une incitation, c'est parce que l'évolution n'est pas facile. Je souhaite que l'on réserve l'avantage aux collectivités qui s'engagent dans cette voie. J'émets donc un avis défavorable.
J'ai une question pour le rapporteur général : le taux des frais de gestion est-il de niveau législatif ou réglementaire ?
La commission rejette les amendements.
Elle est ensuite saisie des amendements identiques I-CF509 de Mme Véronique Louwagie et I-CF791 de M. M'jid El Guerrab.
Je vous propose un amendement de repli par rapport aux précédents. Entre la dimension incitative et la simplification, il faut faire des choix, et je regrette qu'ils ne se portent pas toujours vers la simplification... Mon amendement tend à supprimer la limite d'application dans le temps de la réduction des frais de gestion. Je rappelle que le taux est déjà de 3 % pour d'autres taxes, notamment la taxe foncière sur les propriétés bâties.
On peut discuter du nombre d'années, mais il ne me paraît pas du tout raisonnable d'appliquer une mesure incitative sans aucune limitation de durée. Par conséquent, avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Puis la commission examine l'amendement I-CF386 de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
Cet amendement adopté par la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire vise à renforcer l'incitation prévue par l'article 7 en étendant la durée d'application de la diminution des frais d'assiette, de recouvrement et de dégrèvement : il s'agira des cinq premières années pendant lesquelles la part incitative de la TEOM sera appliquée. Il restera une limitation dans le temps, comme le rapporteur général le souhaite, mais l'allongement de la durée durant laquelle les collectivités territoriales bénéficieront d'un taux réduit constituera une incitation plus forte et permettra d'accompagner davantage les collectivités.
La proposition de la commission du développement durable me paraît tout à fait raisonnable : le caractère incitatif de la mesure est préservé et il reste une limitation dans le temps, fixée à cinq ans. Pour avoir connu les affres dans lesquels on est plongé quand on met en place ce genre de dispositif, je pense que cette durée est raisonnable, ce qui me conduit à émettre un avis favorable.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 7 modifié.
Après l'article 7
La commission est saisie des amendements identiques I-CF512 de Mme Véronique Louwagie et I-CF792 de M. M'jid El Guerrab.
Mon amendement I-CF512 tend à promouvoir le tri en introduisant une incitation dans la tarification des déchets des entreprises assimilés aux déchets ménagers et dont le service public assure la collecte. Nous émettrons un signal positif grâce à cet encouragement : il est important d'inciter les entreprises à trier leurs déchets à la source en clarifiant les coûts et en mettant en valeur les efforts réalisés.
Je ne suis pas très favorable à ces amendements : il me semble que les collectivités territoriales auront des difficultés pour vérifier que les produits de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères incitative (TEOMI) sont exclusivement affectés aux dépenses de collecte et de traitement des déchets non ménagers. En attendant les explications que le Gouvernement pourrait donner en séance, j'émets un avis défavorable à ce qui me semble une complexification du dispositif.
Je ne comprends pas vraiment ce qui nous est proposé. La création de la TEOMI permet un financement pour les déchets assimilés, c'est-à-dire ceux des entreprises ne faisant pas l'objet d'une sujétion technique particulière – sinon, c'est un autre mode de gestion, dont la collectivité n'est pas en charge. Je crois donc que ces amendements sont satisfaits.
Nous pourrons en discuter en séance, mais j'ai pour l'heure du mal à comprendre : d'un côté le rapporteur général répond que ces amendements pourraient être difficiles à appliquer, de l'autre Mme Peyrol affirme qu'ils sont satisfaits.
Je vais essayer de mieux l'expliquer. Il s'agit de donner aux collectivités territoriales la possibilité d'appliquer une part incitative sur les déchets non ménagers : on leur laissera une latitude pour faire la promotion d'un tel dispositif.
Ce que défendent nos collègues est-il aujourd'hui possible ? Il semble que ce soit le cas. Ces amendements sont donc inutiles, à moins que vous ne les redéposiez en séance dans le seul but d'avoir une confirmation. Mais il faudrait tout de même corriger la rédaction : « les ordures ménagères peuvent d'appliquer une part incitative » n'est pas très français. C'est comme si l'on disait : « c'est moi que je t'aime »...
La commission rejette les amendements.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF1458 du président Éric Woerth.
Cet amendement concerne les « impôts de production », domaine dans lequel nous faisons bien peu de choses. Je vous propose de commencer à réduire un impôt de production majeur, à savoir la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), qui est une part de l'ancienne taxe professionnelle. Le montant de la CVAE progresse largement et s'élève aujourd'hui à 17,65 milliards d'euros. Elle nuit à la compétitivité de nos entreprises, en particulier celles qui sont industrielles. Or le pouvoir d'achat dépend de leur compétitivité. Nous devons donc entamer la réduction de la CVAE en modifiant son barème, étant entendu que ce sera une opération neutre pour les finances des collectivités territoriales. Cette proposition me semble tout à fait essentielle.
C'est un sujet qui représente, en effet, plus de 2 milliards d'euros pour l'État. Un groupe de travail a été chargé de réfléchir à la répartition de la CVAE, et il me semble qu'il conviendrait au préalable d'aller au bout de cette démarche. Par ailleurs, nous serons saisis d'un projet de loi relatif à la fiscalité locale au printemps 2019 : toutes les réflexions sur la CVAE seront possibles dans ce cadre. Il serait préférable d'en débattre à ce moment-là. Enfin, le coût de cet amendement pour les finances publiques – 2 milliards d'euros – me conduit à émettre un avis tout à fait défavorable...
Évidemment, ce sont des sujets importants : la CVAE représente plus de 17 milliards. Mais le Gouvernement dépense beaucoup d'argent par ailleurs... C'est donc une question de choix : soit on choisit la compétitivité, soit on ne la choisit pas...
Ce choix de la compétitivité suppose de reconsidérer de grands impôts de production, dont la CVAE. Contrairement à la cotisation foncière des entreprises, liée à la territorialisation et qui a donc un autre impact sur les collectivités, la CVAE est un impôt national qui se répartit en pluie fine sur les territoires : de ce fait, l'État peut facilement la compenser – vous l'avez d'ailleurs fait pour la taxe d'habitation. Pourquoi ne le feriez-vous pas pour la CVAE ?
Vous avez raison, monsieur le président : les entreprises rencontrent d'importantes difficultés du fait des taxes de production qui mettent leur compétitivité en péril – la comparaison avec nos voisins européens le souligne. Il faut restaurer leur compétitivité : c'est indispensable pour redynamiser notre économie et notre croissance, mais également permettre à nos entreprises d'être performantes sur la scène internationale et européenne et d'y évaluer dans des conditions de concurrence équivalentes.
Nous devons agir sur les coûts de production. Or la fiscalité locale et les taxes pèsent lourdement sur la valeur ajoutée des entreprises. Il faut faire en sorte que leurs marges s'améliorent. C'est l'objet de cet amendement.
Bien sûr, on diminue les dépenses. Comment avez-vous fait pour la taxe d'habitation, mon cher collègue ? C'est trop simple ! Il n'y a jamais l'argent pour les amendements de l'opposition, mais on en trouve toujours pour ceux de la majorité... C'est un jeu classique. Pourtant, les amendements de la majorité, ou les décisions du Gouvernement, coûtent beaucoup plus cher.
Je tiens à rappeler que nous avons pris l'engagement collectif de revoir les impôts qui touchent la production au cours des quatre prochaines années. Les discussions avec les industriels ont souligné l'importance de réformer en priorité la CVAE et la contribution sociale de solidarité des sociétés. L'exonération de charges sociales sur les heures supplémentaires avait été annoncée : nous la mettons en oeuvre en septembre 2019. Les impôts de production sont dans notre liste de priorités. Cette réforme n'est pas enterrée ; nous ne cherchons pas à l'éviter, nous cherchons à la mener quand les finances publiques le permettront. Nous avons pris des engagements extrêmement forts vis-à-vis de l'industrie, notamment sur les brevets ou le suramortissement des investissements dans la robotique ou la digitalisation, qui répondent aux besoins d'investissement des différentes industries de notre pays.
Mais il y a urgence, vous le savez, madame de Montchalin. La situation de notre commerce extérieur, tout comme notre compétitivité, se dégrade. Les impôts de production représentent presque 80 milliards d'euros. Or c'est avec les gros impôts qu'il faut jouer, et non avec les petits, sinon cela n'a aucun effet.
Les propos d'Amélie de Montchalin montrent bien, une fois de plus, que le Gouvernement et sa majorité ne vont pas dans le sens du développement de la compétitivité de nos entreprises. La manière dont cet amendement est traité en est la parfaite illustration... Le décalage entre le discours et les actes est criant.
Notre discussion de ce matin est tout à fait légitime. Mais, Amélie de Montchalin l'a rappelé, ne perdons pas de vue le sens de la politique que mène cette majorité pour les entreprises. Dès le premier projet de loi de finances, nous avons pris des décisions fortes en matière de fiscalité : l'impôt sur les sociétés est passé de 33 à 25 % et nous avons réformé la fiscalité du capital afin de mieux financer nos entreprises. Puis nous avons adopté les ordonnances relatives à la réforme du code du travail pour améliorer le dialogue social ; de même, les mesures que nous avons votées concernant le droit à l'erreur sont extrêmement favorables au monde des entreprises. Enfin, nous venons d'adopter le projet de loi relatif au plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) – Mme la présidente Olivia Gregoire nous en dira peut-être un mot.
Le présent projet de loi de finances nous permet de poursuivre dans cette voie, en transformant le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse de charges. Je vous rappelle que les entreprises ne paieront plus de charges sur le SMIC l'année prochaine. Je ne suis pas d'accord avec vous : les entreprises comprennent parfaitement la politique que nous menons en leur faveur ; elles comprennent également notre volonté de cohérence et de stabilité fiscale et réglementaire. Sans doute faut-il aller plus loin, cette discussion n'est pas illégitime, mais ne laissez pas penser que les entreprises et leur compétitivité ne sont pas servies par la majorité !
La baisse de charges sur les bas salaires n'interviendra au plus tôt qu'au mois d'octobre et ne vise qu'à compenser la transformation du CICE. Quant à l'impôt sur les sociétés (IS), il baisse, mais le barème a été voté sous François Hollande... Et cette baisse est largement annulée par la transformation du CICE en cotisations sociales la première année, vous le savez bien. Nous avons du reste présenté des amendements pour neutraliser cet effet IS. Vos affirmations peuvent elles aussi prêter à contestation.
Mes propos vont dans la droite ligne de ceux de Stanislas Guerini. Nous avons déjà engagé un effort non négligeable en matière de baisse des impôts de production, auquel vous devriez être sensible. Au cours de l'année, si vous additionnez les mesures concernant le Fonds national d'aide au logement (FNAL), celles relatives aux plans d'épargne groupe, au forfait social ou aux taxes additionnelles, nous aurons atteint 1 milliard d'euros de baisse des impôts de production. Il faut considérer toutes ces actions de façon globale : Stanislas Guerini a bien exposé toutes les mesures que nous avons prises pour restaurer la compétitivité des entreprises et nous avons également à coeur, tout comme vous, de travailler sur les impôts de production qui les entravent.
Je partage l'analyse du rapporteur général sur la CVAE. Une mission est en cours sur sa répartition ; elle s'interroge également sur son assiette. Son montant est très erratique et les collectivités n'ont aucune visibilité sur cet impôt. Avant de modifier la CVAE, attendons à tout le moins les conclusions de cette mission.
Par ailleurs, nous avons beaucoup fait pour la compétitivité au cours des dernières années : CICE, pacte de responsabilité, etc., ce qui représente un effort de l'ordre d'une vingtaine de milliards d'euros pour le budget 2019. À un moment, il faut peut-être savoir lever le pied...
Je me réjouis des propos de Mme de Montchalin et de M. Guerini : ils laissent entendre que vous seriez enclins à favoriser un dispositif similaire à celui que nous proposons et à prendre en compte le poids de ces impôts sur la compétitivité des entreprises. J'entends les propos de Mme Gregoire ; la majorité et le Gouvernement se satisfont de ce qui a déjà été fait pour la diminution des coûts de production. Mais le retard par rapport à nos voisins est tel que je ne suis pas sûre que 1 milliard d'euros suffira pour restaurer la compétitivité de nos entreprises.
Enfin, pour diminuer les coûts de production, il faut réduire les dépenses publiques ! Sans un travail de réduction des dépenses publiques, jamais vous ne réussirez, jamais nous ne réussirons à diminuer les coûts de production des entreprises. Or vous ne faites rien de ce côté-là.
Permettez-moi un petit point de promotion d'une initiative que nous avons prise collectivement : je veux parler des études que nous avons commandées aux instituts économiques. Je vous invite à consulter la note de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) relative à l'impôt sur les sociétés, communiquée récemment par le président de la commission des finances. Elle montre qu'une réforme des impôts de production reste effectivement un objectif à poursuivre, en soulignant, comme l'a dit le rapporteur général, l'importance d'une vision territoriale. On y trouve également des chiffres inédits sur la polarisation de l'impôt sur les sociétés. L'étude actuellement menée sur les aspects territoriaux de la CVAE pourrait utilement être complétée par cette vision territoriale de l'impôt sur les sociétés : les effets cumulés de l'un et de l'autre influent considérablement sur la capacité de chacun de nos territoires à produire de l'emploi et à se développer. Dans ce débat, que nous n'avons aucun problème à poursuivre, les éléments de l'OFCE sont extrêmement éclairants.
Certes, mais vous repoussez sans arrêt le dialogue et les décisions concernant ce type d'impôt, d'où mon amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine en discussion commune les amendements identiques I-CF398 de la commission du développement durable, I-CF740 de M. Matthieu Orphelin et I-CF1328 de M. Bruno Millienne, ainsi que les amendements I-CF1182 de Mme Amélie de Montchalin et I-CF742 de M. Matthieu Orphelin.
Les amendements I-CF398, I-CF740 et I-CF742 visent à faire évoluer la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM), afin de lutter contre l'artificialisation des sols. En un peu plus de trente ans, ce phénomène a doublé en France. Vous connaissez les conséquences environnementales de ce phénomène et ses « surconséquences », inondations et autres.
Ces trois amendements proposent de rendre la taxe plus intelligente. La TASCOM existe depuis 1972 et était calculée à l'époque en fonction du nombre de mètres carrés et du chiffre d'affaires des surfaces commerciales concernées. Depuis, elle n'a pas connu d'évolution. Les amendements I-CF398 et I-CF740 proposent de mettre en place progressivement un bonus-malus suivant une idée très simple : les commerces de centre-ville ou centre-bourg verront leur taxe baisser tandis que les grandes surfaces qui « consomment » du sol naturel verront la leur augmenter progressivement.
L'amendement I-CF742 est un amendement de repli : il ne modifie pas la taxe pour les surfaces existantes et se contente d'appliquer un malus uniquement pour les nouvelles surfaces. Il s'agit à la fois de lutter contre l'artificialisation des sols mais également de favoriser les commerces de centre-ville et de centre-bourg.
L'amendement I-CF1328 est identique aux deux premiers. Pour les établissements situés en centre-bourg, le taux de cette taxe serait minoré de 5 % dès le 1er janvier 2019, 20 % en 2020, 30 % en 2021 et 50 % en 2022 ; pour les établissements situés à l'extérieur d'un centre-bourg, il serait majoré de 5 % dès le 1er janvier 2019, 20 % en 2020, 50 % en 2021 et 100 % en 2022.
L'amendement I-CF1182 vise à engager une réflexion pour mieux contrôler l'artificialisation des sols. Pour le moment, cet amendement n'a pas encore fait l'objet d'une concertation avec l'AMF et les collectivités territoriales concernées. Nous souhaitons faire évoluer les mécanismes d'aménagement, d'urbanisme et, donc, de fiscalité locale, afin d'inciter les maires et les décideurs locaux à prendre en compte cette problématique.
Le dispositif est identique à celui prévu par l'amendement I-CF742 de notre collègue M. Orphelin, le bonus-malus ne concernant que les nouvelles constructions de surfaces commerciales, afin d'avantager fiscalement les commerces de centre-ville par rapport à ceux de périphéries qui s'installent sur des sols préalablement non bétonnés.
Je partage votre objectif commun de lutte contre l'artificialisation des sols, ainsi que votre soutien aux commerces de centres-villes et de centres-bourgs, alors que la grande distribution s'installe en périphérie des villes.
Cela étant, les tarifs et majorations applicables à la TASCOM ont fortement augmenté depuis 2011 : le rendement de la taxe est passé de 600 millions d'euros en 2011 à 1,2 milliard d'euros en 2017. Le dispositif proposé par le premier amendement de Matthieu Orphelin conduirait à des majorations supplémentaires de 200 % en 2022, auxquelles s'ajouterait la « surmajoration » de 50 % de l'État. Une hausse aussi massive exige à tout le moins d'engager une concertation avec les acteurs concernés ; or celle-ci n'a pas eu lieu.
Par ailleurs, ces amendements n'abordent pas le problème de l'équité fiscale entre e-commerce et magasins physiques. Certains amendements tentent d'y répondre en incluant les entrepôts, mais ceux-ci ne sont pas toujours dédiés au e-commerce : il faut donc être prudents. Au demeurant, ce système de malus risque plutôt de renforcer le e-commerce au détriment des magasins physiques traditionnels.
Je vous propose que ce débat ait lieu dans le cadre plus large du projet de loi de finances pour les collectivités locales dont nous serons saisis début 2019. Je suggère aux auteurs de tous ces amendements de bien vouloir les retirer ; dans le cas contraire, mon avis sera défavorable.
L'idée est intéressante. Mais si l'on s'oriente dans cette direction, un travail préalable et approfondi est indispensable. : le rapporteur général vient d'évoquer quelques-uns des problèmes posés par ces amendements. Depuis qu'elle a été affectée aux collectivités locales à l'occasion de la réforme de la taxe professionnelle, la TASCOM s'est envolée. Dès lors qu'elle est affectée aux collectivités locales, la question de sa compensation va se poser. À iso-fiscalité, si elle diminue d'un côté et augmente de l'autre, les collectivités doivent continuer à bénéficier des mêmes recettes.
En outre, la TASCOM porte sur les surfaces commerciales, et non sur les entrepôts. Or le e-commerce se développe à partir d'entrepôts... L'Île-de-France a mis en place une taxe sur les bureaux, qui n'existe nulle part ailleurs. Cette taxe a été étendue aux surfaces commerciales, mais également aux entrepôts. Nous tentons de la moduler davantage pour toucher plus fortement les installations de type Amazon. Mais, comme le disait le rapporteur général, tous les entrepôts ne sont pas dédiés au e-commerce. C'est donc extrêmement difficile. Un sujet aussi complexe ne peut être traité aussi rapidement. Lançons plutôt une mission d'information et rédigeons un rapport, car l'idée est intéressante.
La TASCOM a déjà fait l'objet d'amendements du MoDem en séance publique. C'est un sujet récurrent, qu'il faut traiter de façon globale. Pour commencer, l'artificialisation renvoie aux documents d'urbanisme déjà établis, qui peuvent engendrer des taxes très importantes si on les module en conséquence. Il serait également intelligent de travailler sur la refonte des taxes sur les friches et mieux les articuler avec la TASCOM. Je suis d'accord avec le rapporteur général, ces points devront être traités dans le cadre du prochain projet de loi de finances pour les collectivités locales.
Nous faisons de la fiscalité en zigzag... Lorsque nous avons révisé les valeurs locatives, nous sommes arrivés à l'exact inverse de ce que nous voulions : nous avons aggravé la pression fiscale sur les commerces de centre-ville et allégé de 20 à 30 % celle des grandes surfaces de périphérie ! Rédigeons un rapport, menons une mission sur le sujet, mais ne votons pas des amendements à la sauvette !
Nous parlons ici plus d'urbanisme que de fiscalité. Nous aurions pu évoquer ce sujet dans le cadre du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN). On pourrait imaginer travailler sur un texte dédié à l'urbanisme commercial – car c'est là que se pose la difficulté –, et une fois arrêtée notre vision sur l'urbanisme commercial, voir comment taxer. Mais déposer un amendement en projet de loi de finances pour régler un problème d'urbanisme en catimini ne me paraît pas être la bonne solution.
Les arguments développés par les promoteurs de ces amendements sont vertueux : il faut effectivement lutter contre l'artificialisation des sols – peut-être aurait-il fallu commencer à le faire il y a une dizaine d'années. Mais aujourd'hui, les commerces de centre-ville et ceux de périphérie doivent faire face à un nouvel acteur : le e-commerce. Nous devons être attentifs à ne pas déstabiliser les commerces qui participent à la vie de nos territoires et à bien prendre en compte ce nouvel arrivant. Cela mérite une étude plus approfondie.
Je rejoins le rapporteur général. Nous allons bientôt procéder à la refonte de la fiscalité locale ; cessons de faire de la fiscalité au coup par coup et privilégions une vision globale. En outre, si votre objectif de lutte contre l'artificialisation des sols est louable, la création de surfaces commerciales n'est responsable que de 5 % de l'augmentation de l'artificialisation des sols au cours des dix dernières années. Ce n'est donc pas la cause majeure de cette artificialisation.
Enfin, votre dispositif prévoit un malus et un bonus. Mais les surfaces commerciales de centre-ville de moins de 400 mètres carrés sont déjà exonérées de TASCOM. Autrement dit, vous ne faites qu'alourdir une des taxes payées par les entreprises en France...
Un des amendements propose d'étendre la TASCOM aux entrepôts, et donc à l'économie numérique. Nous souhaitons donc préserver le commerce local, comme certains s'en sont inquiétés.
Vous parlez d'une réforme globale. Parlons-en ! Globalité financière tout d'abord : certes, le rapporteur général l'a indiqué, la TASCOM a fortement augmenté en 2012 et 2013. Mais, souvenez-vous, à cette époque, nous débattions également du CICE et nous ne voulions ni le spécialiser ni le conditionnaliser. Deux secteurs ont été particulièrement bénéficiaires alors qu'ils n'étaient pas spécialement visés : la banque et les grandes surfaces. Quand la TASCOM a été augmentée, elle nous a permis de récupérer environ la moitié du CICE, l'autre moitié bénéficiant directement aux grandes surfaces. Enfin, Charles de Courson l'a rappelé, nous avons également énormément favorisé les grandes surfaces extérieures aux centres-villes à l'occasion de la révision des valeurs locatives... L'augmentation que nous proposons ne gomme donc ni l'avantage du CICE ni celui lié à la réforme de la taxe foncière.
Parlons également globalité écologique : vous demandez un rapport, mais n'oublions pas celui du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qui vient de sortir. Tous les aspects sont liés : énergie, pollutions, ressources naturelles, biodiversité... Réforme globale, d'accord, mais dans toute sa globalité.
On n'a de cesse de répéter que le Parlement doit évaluer et se projeter, mais on continue à déposer au détour d'un texte sans jamais en mesurer l'incidence. Selon une note qui nous a été transmise, ces amendements représenteraient la bagatelle de 500 millions d'euros !
Lise Magnier l'a justement souligné : ces nouvelles dispositions n'auront aucun impact positif sur le commerce de centre-ville, car les commerces de moins de 400 mètres carrés sont déjà exonérés. Connaissez-vous beaucoup de surfaces de plus de 400 mètres carrés qui se créent dans les petites villes ? C'est du rêve organisé ! Faisons en sorte d'imaginer un outil performant pour combattre ce fléau.
Enfin, le président de la commission des finances sera probablement de mon avis, une réforme globale de la fiscalité locale doit être engagée. Alors, de grâce, ne commençons pas à partir dans tous les sens et essayons de travailler de façon coordonnée !
Comme l'a dit Amélie de Montchalin, ces amendements – notamment celui du groupe La République en Marche – sont un appel au Gouvernement, qui a pris des engagements forts en matière de lutte contre l'artificialisation des sols. L'objectif « zéro artificialisation nette » des sols est inscrit dans le Plan biodiversité de juillet 2018. Ce débat avait effectivement commencé l'année dernière dans l'hémicycle ; nous appelons à l'accélérer.
Par ailleurs, je suis un peu déçue ; vous n'êtes pas allés au bout de la lecture du rapport sur la fiscalité environnementale que j'ai présenté il y a deux semaines, dans lequel je renvoyais aux travaux du Comité pour l'économie verte, qui rassemble l'ensemble des parties prenantes. Pour votre parfaite information, ce comité a créé un groupe de travail qui se penche sur l'articulation de la réglementation et de la fiscalité en matière d'artificialisation.
Je le répète : l'objectif de mon amendement I-CF1182 est d'initier une réflexion plus globale dans la perspective du futur projet de loi de finances pour les collectivités locales, comme nous y encouragent MM. Pupponi et Vigier ou Mme Magnier. Cette réflexion doit effectivement englober l'urbanisme commercial et veiller à la cohérence des mécanismes afin de sortir du zigzag dénoncé par M. de Courson – les bonnes intentions pouvant engendrer des effets néfastes. Nous souhaitons travailler dans une optique d'évaluation.
Je retire notre amendement, mais redis notre intention de travailler en amont et de manière transpartisane sur le sujet afin d'ouvrir un débat, en concertation avec les élus locaux. Il s'agit d'un sujet extrêmement important, de ressources qui représente près de 1 milliard d'euros pour les communes et qui constituera donc un des piliers du projet de loi de finances pour les collectivités locales dont nous débattrons au premier trimestre 2019.
Au risque de ne pas aller dans le même sens que mes collègues, au nom du MoDem, je ne retirerai pas l'amendement I-CF1328. Je vois que l'on prend beaucoup de précautions avec les entreprises – on a le droit –, mais beaucoup moins avec les citoyens. Nous ne les avons pas consultés ni évalué les impacts qu'aurait l'augmentation de la taxe intérieure de consommation sur les produits pétroliers de la façon dont on nous demande de le faire ce matin pour les entreprises...
La lutte contre l'artificialisation des sols, qui est un des axes du Plan biodiversité 2018, est très importante. Je ne reviendrai pas sur le rapport du GIEC.
Par ailleurs, les amendements déposés concernent aussi les sociétés de e-commerce, puisque les entrepôts sont visés.
Je ne regrette pas d'avoir déposé ces amendements car ils ont permis d'engager un débat utile et important. Je retiens que la quasi-totalité des intervenants partagent le constat et soulignent l'importance de l'évolution de la TASCOM pour favoriser les commerces de centre-bourg et inclure le e-commerce. Je note votre engagement d'une réflexion transpartisane sur le sujet avec tous les acteurs et retire donc les amendements, pour les discuter avec le Gouvernement la semaine prochaine. Si nous aboutissons lors du projet de loi de finances pour les collectivités locales, soit en trois mois, nous aurons été bons ! Je retire les amendements I-CF398, I-CF740 et I-CF742, ainsi que les suivants.
L'inspection générale des finances (IGF) a récemment rédigé un rapport non public sur le sujet. Je vais officiellement en demander communication afin qu'il nourrisse notre réflexion préalable à l'examen du projet de loi de finances pour les collectivités locales début 2019.
Les amendements I-CF398, I-CF740, I-CF1182 et I-CF742 sont retirés.
La commission rejette l'amendement I-CF1328.
Les amendements identiques I-CF399 de la commission du développement durable et I-CF744 de M. Matthieu Orphelin ayant été retirés, la commission rejette l'amendement identique, I-CF1329 de M. Bruno Millienne.
La commission examine en discussion commune les amendements identiques I-CF400 de la commission du développement durable et I-CF1330 de M. Bruno Millienne, ainsi que l'amendement I-CF743 de M. Matthieu Orphelin.
Nous en avons déjà parlé. L'amendement I-CF1330 vise à appliquer les mêmes règles aux établissements de stockage et de logistique servant à la vente de biens à distance et fermés au public. Il vise donc notamment les lieux de stockage du e-commerce.
Les amendements I-CF400 et I-CF743 sont retirés.
La commission rejette l'amendement I-CF1330.
Article 8 : Renforcement de la composante de la taxe générale sur les activités polluantes relative aux déchets
La commission est saisie de quatre amendements de suppression, I-CF26 de M. Marc Le Fur, I-CF205 de Mme Marie-Christine Dalloz, I-CF275 de M. Jean-Pierre Vigier et I-CF290 de M. Patrick Hetzel.
L'article 8 porte sur la hausse de la composante de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) relative aux déchets. Nous savons qu'un tiers des déchets ne sont pas recyclables. Nous allons donc pénaliser des collectivités sans qu'il n'y ait de lien avec leurs contraintes et leurs obligations portant sur l'élimination des déchets polluants qui ne peuvent pas être recyclés.
Cibler les gestionnaires de déchets, qui n'ont pas d'influence sur la conception des produits mis sur le marché et leur consommation me paraît injuste, inadapté et inefficace. Je vous propose donc par mon amendement I-CF205 de supprimer purement et simplement ce dispositif.
Mon amendement I-CF290 vise également à supprimer l'article 8, car cette mesure va nécessairement affecter les services publics locaux de gestion des déchets. Cet article relève plutôt d'un dispositif punitif.
Cet article rationalise la composante déchets de la TGAP afin d'inciter les apporteurs de déchets à privilégier les opérations de recyclage. L'article 59, qui sera examiné en seconde partie et qui concerne la baisse de la TVA sur le recyclage, constitue la seconde branche du dispositif.
Si les tarifs de l'enfouissement et de l'incinération sont revus, l'assiette elle aussi est largement remaniée. Vous soulignez qu'il est impossible de recycler près d'un tiers des déchets ménagers, mais l'article 8 sort précisément de l'assiette de la taxe des déchets dont la valorisation est impossible, afin de ne pas faire injustement supporter le coût de la TGAP, à son taux maximal, aux apporteurs.
Cet article vise donc à faire internaliser les externalités environnementales en matière de déchets ; il traduit la feuille de route pour une économie circulaire, présentée par le Premier ministre en mai 2018. Cette nouvelle trajectoire permet également de se conformer au paquet européen « économie circulaire » de mai 2018.
Actuellement, le faible prix du stockage au regard des prix des filières de recyclage ou de valorisation n'incite pas l'orientation des flux de déchets vers ces filières, alors que la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte a fixé un objectif de réduction de moitié des déchets non dangereux inertes entre 2010 et 2025 ; nous sommes aussi très loin des pratiques en vigueur chez nos principaux voisins européens.
La dernière trajectoire de TGAP, instaurée par la loi de finances rectificative pour 2016, s'inscrit dans ce sens, mais reste limitée puisqu'elle a fait évoluer le niveau de stockage de base de 40 euros la tonne en 2016 à 48 euros la tonne en 2025.
Cette mesure constitue un signal écologique important en direction des filières de gestion des déchets, je suis donc défavorable à toutes les modifications qui seront proposées à cet article, à l'exception d'un seul amendement, proposé par M. Mattei et concernant un double assujettissement, qui recevra un avis de sagesse de ma part – il porte sur le déplacement des déchets des anciennes décharges.
Il y a cinq ans, le précédent gouvernement avait souhaité augmenter la composante de la TGAP portant sur l'incinération des déchets. Aucune étude d'impact n'avait été faite sur l'évolution de la TEOM, et nous l'avions obligé à réaliser cette évaluation. Nous nous sommes rendu compte que cette mesure entraînait une augmentation considérable de la TEOM – je garde en tête le montant global national de 250 millions d'augmentation. Le Gouvernement a dû faire marche arrière, car cela aurait été insupportable pour le contribuable local. Comme l'ont très bien dit nos collègues, il n'existe pas d'alternatives à l'incinération pour un certain nombre de déchets.
Monsieur le rapporteur général, existe-t-il une étude d'impact sur l'évolution de la TEOM ? Je vois bien que dans les tableaux d'évolution, on prend la précaution d'envisager – comme toujours – une augmentation très faible en 2019 et 2020, puis cela part en flèche à partir de 2021... Ce n'est pas une bonne manière de travailler. Nous ne pouvons pas voter ce type de dispositif sans une étude d'impact précise sur la TEOM qu'auront à payer les contribuables.
Les dispositions TEOM, la TGAP déchets et la TVA mentionnée par le rapporteur général résultent de travaux menés dans le cadre de la feuille de route économie circulaire, notamment l'atelier 4 « financement de l'économie circulaire ». Autrement dit, tout cela s'est fait en concertation.
Il est vrai qu'aujourd'hui, nous ne savons pas recycler certains déchets, qui vont directement en incinération et en stockage. Mais justement, la TGAP fait partie des taxes incitatives qui sont là pour engager l'innovation et trouver des solutions pour le recyclage de ces déchets.
Par ailleurs, il faut considérer la feuille de route pour l'économie circulaire dans son ensemble ; des entreprises se sont volontairement engagées pour travailler à l'éco-conception des produits, afin qu'ils incluent des matières recyclées, mais aussi qu'ils soient plus facilement recyclables. Il faut considérer la globalité du sujet ; depuis dix ans ou vingt ans, on nous répète que certains déchets ne sont pas recyclables, c'est une réalité, mais à un moment donné, il faut innover pour trouver des solutions.
Se pose toutefois la question des refus de tri qui, sur le plan économique, pourrait porter préjudice à la réforme, car ils ne rendraient pas le recyclage plus compétitif que l'incinération et le stockage. Il s'agit de déchets qui sont bien passés par un centre de recyclage, mais où ils ont été refusés, et qui sont redirigés en stockage et en incinération ; de ce fait, ils subiront l'augmentation de TGAP.
Comme l'a dit Gilles Carrez, quelqu'un devra bien payer cette taxe : ce sera le contribuable final. On ne peut pas dire que l'on va réduire la taxe d'habitation parce qu'elle pénalise un certain nombre de foyers, et augmenter les taxes sur la collecte, que tout le monde paie.
Que l'on augmente la taxe, d'accord, mais est-ce le contribuable final qui doit payer à la fin ? En quoi est-il responsable ? Ce n'est pas de sa faute si l'on ne trouve pas les bons déchets, ce n'est pas de sa faute si l'on ne fait pas la bonne collecte, et pourtant, il doit payer sans discuter. Je suis d'accord avec vos propositions, mais socialement, est-il normal de faire supporter l'addition au contribuable local ? Puisque nous devons réformer la fiscalité locale, mettons-nous autour de la table pour trouver une solution dans les six mois, comme vous le proposez ; mais voter cette mesure sans savoir combien paieront ceux à qui la charge finira par incomber ne semble pas raisonnable.
Sans incitations, les collectivités ont du mal à imposer de nouvelles normes. Je pense à la taxation au poids : sans incitation financière, c'est impossible. L'augmentation de la TGAP va permettre aux collectivités d'envisager cette part incitative sous une autre forme, et de mettre en place ce qui est le plus efficace, c'est-à-dire le calcul au poids.
Il y a un problème de philosophie qui dépasse le simple cadre de la TGAP. Tous nos concitoyens sont favorables à l'économie circulaire et aux axes écologiques, mais il ne faut pas que cela se traduise systématiquement par une hausse de la fiscalité : après la hausse du prix du carburant, la contribution climat-carbone qui va détériorer le pouvoir d'achat, et maintenant les ordures... Si à chaque fois que l'on dit « écologie », les gens pensent « matraque », c'est vraiment le plus mauvais service à rendre... Il faut arrêter avec ces mesures qui visent à faire avancer très rapidement la société alors que nous n'avons pas de solution de repli. Nous avons fait la même chose dans le domaine de l'agriculture et bien d'autres. Cela ne changera pas la société, mais cela viendra contraindre la vie des Français au jour le jour. On met la charrue avant les boeufs.
Je rejoins les propos de François Pupponi, nous sommes tous d'accord : il faut des mesures pour lutter pour la transition énergétique et contre le changement climatique, mais dans ce cas précis, les victimes sont toutes désignées, ce sont nos concitoyens. Il y a une forte contradiction dans le discours de la majorité : on prétend vouloir baisser les impôts, mais dans le même temps les prix du carburant flambent, particulièrement dans les territoires ruraux ; et maintenant, ce sont les taxes d'enlèvement des ordures ménagères qui explosent... Les gens qui ont de petits revenus sont totalement asphyxiés. On va entrer un peu plus tard en hiver, cela nous permettra peut-être de faire quelques économies, mais dans mon secteur, je connais des gens qui ne vont chauffer qu'une seule pièce en hiver, car ils n'ont pas les moyens de faire mieux ; or cette fiscalité punitive les frappe de plein fouet. Il faut travailler sur ces questions ; nous présenterons des amendements sur la taxation des transactions financières qui permettront de trouver des moyens d'accompagnement. Faute de quoi, les petites gens vont se prendre cette mesure en pleine face.
La TGAP fait partie des nombreuses taxes écologiques qui, malheureusement, sont de plus en plus souvent perçues par nos concitoyens comme une fiscalité punitive. La part incitative dans la fiscalité écologique reste très modeste, très limitée, ce qui les conforte dans l'idée que c'est une fiscalité de rendement dont l'affectation fait l'objet d'une bataille entre l'État et les collectivités locales.
Monsieur le rapporteur général, nous verrons certes en seconde partie le cadeau fiscal en faveur des collectivités, mais ce cadeau ne dépassera pas 50 millions d'euros alors que la réforme de la TGAP telle qu'elle nous est proposée représente, sur la trajectoire, 400 à 900 millions d'euros. Les proportions ne sont pas du tout les mêmes et, en fin de compte, ce sera le contributeur final qui paiera.
Nous avons à l'évidence un problème global à propos de la dotation aux collectivités et la manière dont le Gouvernement leur sous-traite l'austérité.
D'un autre côté, je ne vois pas comment nous pourrions continuer plus longtemps sans nous donner tous les moyens de faire en sorte qu'une tonne recyclée coûte moins cher qu'une tonne incinérée. Ce n'est pas possible. Peut-être que la taxation va toujours punir les mêmes, mais nous devons considérer le problème écologique qui nous est posé. Même si la politique globale suivie n'est pas bonne vis-à-vis des collectivités, mais je ne vois pas d'autre moyen, à un moment donné, que de taxer plus lourdement l'incinération et tous les déchets non triés.
Prenons l'exemple de l'incinérateur d'Issy-les-Moulineaux ; la publicité faite dans les villes est payée par l'organisme qui en est le propriétaire... Il n'a même pas intérêt à améliorer le recyclage, puisque c'est plus rentable pour lui d'incinérer. Cette situation n'est plus supportable, et l'article 8 est nécessaire dans la situation actuelle. Nous ne voterons pas ces amendements de suppression.
Je suis d'accord avec M. Coquerel et je trouve qu'un certain nombre de nos collègues manquent de courage. Ils partent du principe que nous ne pouvons pas changer les comportements, et que tout ce qui pourrait être trié l'est déjà. Nous savons que ce n'est pas vrai, il reste une marge de manoeuvre extrêmement importante.
Effectivement, monsieur Carrez, ce texte laisse du temps : l'augmentation significative se fera sentir au bout de trois ans. Dans le dialogue entre les citoyens et les collectivités territoriales, il faut que les citoyens fassent pression sur les collectivités. Les collectivités territoriales vont bénéficier de la baisse de la TVA et de la TEOM ; elles ont donc aujourd'hui les moyens pour se préparer et mener ce travail.
Quelqu'un sait-il comment l'État traite ses déchets ? Les collectivités locales ont toujours bon dos, mais comment l'État est-il incité à mieux trier et recycler ses déchets ?
L'État a des obligations plus fortes. Certains de nos collègues ont voté la loi pour la transition énergétique et pour la croissance verte ; elle crée des obligations beaucoup plus importantes pour l'État en matière de recyclage des déchets et de tri que pour les autres institutions, les entreprises, etc. Aujourd'hui, l'État met en place les dispositifs nécessaires et les tris par flux.
Permettez-moi d'ajouter un élément au débat, trop souvent oublié. M. Coquerel a parlé des dotations aux collectivités ; je veux parler des éco-organismes, et du combat que mène le Gouvernement en la matière. Les éco-organismes ont été pensés pour mettre en place la responsabilité élargie du producteur, qui pèse sur les metteurs en marché de produits qui vont finir comme des déchets.
Non, justement, parce que leurs adhérents sont les metteurs en marché, qui vont payer une éco-contribution pour tous les produits qu'ils mettent sur le marché. L'éco-organisme a pour fonction de financer les collectivités territoriales qui mettent en place la collecte sélective et le recyclage des déchets. Cet argent est disponible, les collectivités peuvent le solliciter. Nous pouvons accentuer la pression sur ces éco-organismes pour mettre en place des barèmes d'éco-modulation beaucoup plus incitatifs.
Merci madame Peyrol. Ce n'est pas sur ce sujet que la parole vous avait été donnée.
L'État aussi devrait être soumis à une TGAP, avec impossibilité évidemment de la répercuter sur le contribuable.
Beaucoup de collègues ont dit combien l'augmentation de la TGAP allait être pénalisante pour nos concitoyens, soumis à de très nombreuses taxes. Je voudrais souligner aussi qu'elle serait très pénalisante pour les collectivités organisatrices de la collecte et du traitement. En particulier, elle va mettre à mal la relation de confiance entre ces collectivités et les usagers.
Très souvent, ces collectivités ont arrêté des trajectoires de hausse de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM) ; par nos décisions, nous mettons cette trajectoire à mal, ce qui altère la confiance entre les collectivités et les contribuables.
Je souhaite intervenir pour un rappel au Règlement, monsieur le président : je ne voudrais pas laisser l'impression que vous coupez la parole à nos collègues féminines, et qu'il existe une discrimination en la matière.
Il n'y a aucune discrimination, monsieur Dufrègne peut en témoigner... J'ai interrompu Mme Peyrol qui s'était déjà exprimée à plusieurs reprises, et qui ne figurait pas dans la liste des orateurs. J'essaie juste de faire en sorte que nous terminions demain à 13 heures.
Aujourd'hui, à peu près un tiers des déchets produits en France ne dispose d'aucune filière de recyclage. C'est un fait, on peut le regretter, mais il s'impose. Faire supporter cette carence à nos concitoyens ne paraît pas acceptable, il est totalement injuste de leur faire payer l'absence de dispositif alternatif.
M. Cazeneuve voudrait inviter les citoyens à mettre la pression sur les collectivités. Je ne peux pas entendre cela : vous créez une ponction financière sur nos concitoyens pour qu'ils mettent la pression sur nos collectivités. Non, il n'est pas envisageable d'envisager une telle ponction financière sur les concitoyens au seul motif qu'il manque des alternatives dans les dispositifs de recyclage.
Pourquoi nous est-il proposé de voter cette hausse de TGAP ? L'objectif est de réduire de 10 % et d'augmenter la part valorisée, avec un objectif fixé à 60 % en 2025. C'est très bien, mais quelle est l'inspiration philosophique de cet article ? C'est encore une illustration du jacobinisme dans lequel nous sommes plongés depuis des années. Chez nous, pourquoi progressons-nous ? Car nous avons des REOM incitatives.
Cette augmentation de 250 millions d'euros pèsera pour l'essentiel sur les ménages : 200 millions pour les ménages, 50 millions pour les entreprises. Cela représente 6 euros par famille. Ce qui ne convient pas, c'est la centralisation. Il y aurait une logique si on donnait cet argent aux collectivités locales gestionnaires, ou à leurs syndicats de gestion des ordures ménagères. Sinon, cela ne marchera jamais : il faut responsabiliser à la base, et cette mesure ne le prévoit pas. Si cette mesure se faisait au niveau local, cela pourrait fonctionner, et cela inciterait les élus et nos concitoyens à faire des efforts. L'erreur est que cette recette ira à l'État, pas à ceux qui gèrent.
La vision d'une fiscalité écologique qui vient punir les ménages est souvent liée au fait qu'elle doit normalement se substituer à d'autres logiques fiscales. L'incitation écologique ne doit pas venir abonder, mais se substituer.
Je dis aux collègues qui rouspètent aujourd'hui à propos de la fiscalité écologique qu'ils ont bien raison de soutenir la baisse progressive, sur trois ans et pour 80 % des ménages, de la taxe d'habitation.
Mais personne n'a expliqué ce que l'on fiscalisera lorsque la cause aura disparu... C'est le problème de la fiscalité verte.
Il existe déjà un dispositif qui permet de responsabiliser ceux qui déposent leurs déchets : ce sont les refus de collecte. Or selon un rapport récent, les collectivités territoriales n'ont pas pu les mettre en place, notamment en habitat vertical. J'imagine ce que signifierait à Paris un refus de collecter les ordures ménagères !
Il ne faudrait pas que l'augmentation de cette taxe n'améliore rien. Les refus de collecte ne se paieront pas, pour des raisons sanitaires. J'appelle l'attention du rapporteur général et de Mme Peyrol : si cette mesure a pour objet de créer une recette fiscale non affectée au budget de l'État, je peux le comprendre, mais n'espérez pas une amélioration du tri. Dans l'habitat collectif ancien, il n'est pas possible d'installer les containers et les collectivités refusent de les laisser sur les trottoirs, parce qu'ils s'enflamment.
Je comprends l'idée, mais tout cela est très théorique, et je crains que cette mesure ne change rien, si ce n'est de créer une taxe en plus.
J'ai déposé un amendement, que nous examinerons tout à l'heure, et qui porte aussi sur cette question.
Je partage l'avis de nombreux collègues : nous aboutissons à une politique punitive pour les collectivités locales. L'objectif de cette augmentation de la TGAP est d'améliorer le traitement des déchets qui ne sont pas éliminés, ce qui est louable, mais finalement, ce sont les collectivités qui vont se retrouver à supporter cette augmentation et vont la répercuter sur les contribuables sans distinguer ceux dont le comportement est vertueux des autres. Il est regrettable que cette augmentation pèse sur l'ensemble des administrés, alors que les administrés et les entreprises ne sont pas incités à être plus vertueux. C'est pourquoi je proposerai moi aussi de supprimer cette hausse de la TGAP.
Il n'est qu'à aller voir dans les services de gestion des déchets : la réalité, c'est que les taxes sur les ordures ménagères ont augmenté ces dernières années malgré tous les efforts de tri et de recyclage, du fait de l'augmentation de la TGAP. Les dispositifs de reversement pour ceux qui trient ou qui revalorisent cités par nos collègues de La République en Marche représentent peanuts à côté de l'augmentation de la TGAP.
Et je suis surpris, alors que l'on prétend se soucier des collectivités locales, que l'on ne cherche pas d'abord à savoir ce qu'elles en pensent, et si elles sont preneuses d'une telle augmentation de la TGAP. Il faut imaginer un dispositif vertueux, qui les responsabilise. C'est tout le contraire qui est fait ; nous pourrions montrer un peu plus d'égards à l'endroit nos communes.
Mon amendement CF1249 propose d'instituer une franchise de TGAP sur la partie qui n'est pas recyclable.
La question des déchets est devenue capitale : ce n'est plus un produit au bout de la chaîne économique dont personne ne voulait s'occuper. Cela amène à revisiter toute la logique économique pour sortir d'une économie linéaire, y compris l'extraction des matières premières, des minerais, du pétrole, des forêts – avec les conséquences sur l'exploitation dont on discute par ailleurs –, des transports, des échanges commerciaux internationaux... C'est un sujet global qui amène à revoir totalement notre modèle économique.
Je proposerai avec d'autres collègues une franchise de TGAP sur la partie dont nous débattons ici, qui n'est pas recyclable aujourd'hui, mais dont j'espère qu'elle le sera demain ; nous avons des outils pour le faire.
Cela permettra de combler en partie le déséquilibre qui existe aujourd'hui entre l'économie qui sera permise par la baisse de TVA sur les matières recyclables, d'à peu près 80 millions et non 50 millions, et l'augmentation de TGAP, à hauteur de 300 millions, et non pas 500 millions comme cela a été dit. Il reste un écart que l'on peut combler pour que cette fiscalité ne soit pas une fiscalité de rendement, mais un équilibre. Il faudra sans doute aller plus loin, et je ne pense pas qu'il faille diminuer la TGAP, elle est au niveau nécessaire pour avoir un effet incitatif. En revanche, on peut améliorer un peu les recettes pour aller au-delà de 80 millions d'euros.
Si nous voulons être cohérents, et si une partie des déchets n'est pas recyclable, il faut substituer la partie de franchise sur la TGAP que l'on dit « aval », en fin de chaîne, par une TGAP « amont », tout au début de la chaîne, par le biais des fameuses REP, les responsabilités étendues du producteur. Pour être cohérent et prendre en compte l'écologie, il ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain, et plutôt que de tout supprimer, il faut une franchise, et une taxe TGAP « amont ».
On répète que les citoyens encaissent la hausse de la TGAP et la contribution carbone, mais qui est responsable de cet état de fait ? C'est l'affaire de tous, pas simplement de l'État, mais aussi des collectivités locales. Si les élus locaux prennent de bonnes décisions, ils peuvent mettre en place de l'économie circulaire. Dans la collectivité d'où je viens, il n'y aura pas d'impact de la hausse de la TGAP, car nous pratiquons l'économie circulaire et il n'y a pratiquement pas de mise en décharge ni d'incinération.
On peut comprendre ces mesures, qui incitent à améliorer le recyclage, mais elles nous renvoient au problème de l'acceptabilité de la fiscalité écologique. Parce qu'elle est indirecte et qu'elle ne tient pas compte des revenus des ménages, elle se heurte au mur des réalités sociales. Cela pose un problème, d'autant qu'elle n'est pas redistribuée vers les ménages fiscalisés.
Dans beaucoup d'EPCI et de collectivités, on a annoncé qu'en triant mieux, on paierait moins cher. C'est en tout cas le message qui a souvent été transmis. Or si les choses ne se traduisent pas ainsi au final, cela peut poser des problèmes pédagogiques.
Beaucoup de collectivités sont engagées et ont créé des incinérateurs, souvent très coûteux, avec des modèles économiques derrière. Quel impact cette mesure pourrait avoir sur ces investissements ?
Rappelons de quoi il est question : en 2025, l'impact financier de la mesure sera de 57 millions d'euros pour les entreprises et de 210 millions pour les collectivités par an. C'est une mesure incitative, mais elle n'est pas aussi importante que l'on veut bien le dire. La progressivité n'est pas aussi dramatique, même si je dois à l'honnêteté de dire que tout cela n'exclut pas une augmentation de la fiscalité locale destinée à compenser cette hausse de la TGAP.
Moi qui suis frontalier, il me suffit de voir ce qui se passe du côté de la région Piémont voisine pour constater que mes voisins paient le triple de ce que je paie. Et elle est plus développée qu'on veut le croire de ce côté de la frontière...
Comme je l'ai dit dès le départ, j'émets un avis défavorable à l'ensemble des amendements de suppression.
La commission rejette les amendements identiques.
La commission examine les amendements identiques I-CF613 de M. Thibault Bazin et I-CF645 de Mme Véronique Louwagie.
Vous dites vouloir rationaliser, monsieur le rapporteur général, mais vous omettez les stockages de déchets non autorisés.
Mon amendement I-CF613 vise à mentionner explicitement les installations de stockage de déchets non autorisées dans l'assiette du volet « déchets » de la TGAP, ce qui facilitera l'action des préfets pour sanctionner et dissuader les acteurs négligents ou ayant recours à des pratiques illégales. On y verra la justification d'une fiscalité punitive à l'encontre de ceux qui abusent.
L'article 8 vise « toute personne exploitant une exploitation soumise à autorisation ». Donc, le tarif mentionné dans l'article 266 nonies du code des douanes est bien applicable aux installations non autorisées. Avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF387 de la commission du développement durable.
Cet amendement prévoit un abattement de TGAP de 50 % pour la valorisation énergétique à haut rendement des refus de tri provenant de centres de tri performants. Il permet d'accompagner l'essor des centres de tri dont les capacités de traitement vont augmenter dans les prochaines années.
Cet amendement ne vise que la valorisation énergétique des refus de tri, dans la mesure où ces résidus ont un haut pouvoir calorifique et où il convient de respecter la hiérarchie des modes de traitement, c'est-à-dire que la mise en décharge doit, dans tous les cas, être évitée. Il ne visera par ailleurs que les centres de tri pour lesquels le tri atteindra un certain niveau de performance, ce niveau étant défini par arrêté après concertation avec l'ensemble de la profession.
Tout en comprenant la philosophie de cet amendement, je souligne que les installations thermiques qui réalisent une valorisation de plus de 65 % bénéficient déjà du taux de TGAP le plus faible de l'ensemble des installations. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie en discussion commune de l'amendement I-CF1249 de M. Éric Alauzet, et des amendements identiques I- CF113 de M. Vincent Descoeur, I-CF315 de Mme Véronique Louwagie, I-CF456 de M. Jean-Pierre Vigier, I-CF818 de M. Michel Castellani et I-CF1108 de Mme Christine Pires Beaune.
L'amendement I-CF1249 vise à instaurer une franchise de TGAP sur la partie non recyclable des déchets. En baissant le coût de la TGAP, on rapprochera le delta entre l'avantage aux collectivités et aux usagers contribuables sur la baisse de TVA sur le recyclable.
Parallèlement, puisque l'on est au bout de la chaîne, qu'on ne peut pas faire grand-chose et que c'est l'usager contribuable qui finit par en supporter la charge, il faut remonter la chaîne économique et aller vers le metteur sur le marché, qui met en service des produits non recyclables, pour appliquer une TGAP amont. Ainsi, le consommateur sera face à ses responsabilités avec le metteur sur le marché.
L'amendement I-CF113 porte sur des déchets qui n'ont aucune filière de recyclage, et vise à rappeler que les collectivités n'ont aucune prise sur la conception de ces produits, ni sur leur mise sur le marché, ni sur leur consommation. L'objectif est d'accorder aux collectivités une franchise correspondant à cette part de déchets résiduels inévitables.
L'amendement I-CF315, qui est de repli, propose d'instaurer une franchise correspondant à la part des déchets résiduels inévitables pour lesquels il n'existe pas pour l'heure de filière de recyclage. Ce serait une mesure intéressante, qui prendrait en compte une fiscalité incitative et la situation où il n'existe pas d'alternative actuelle. Elle permettrait de ne pas faire peser une charge trop importante sur nos concitoyens.
Comme ceux de mes collègues, mon amendement I-CF456 vise à accorder aux collectivités une franchise correspondant à la part des déchets résiduels inévitables.
Nous restons dans la même logique : sur les 568 kg de déchets produits par un habitant chaque année, 184 ne disposent d'aucune filière de recyclage, et doivent être nécessairement traités dans les installations de stockage et de traitement thermique. Et les collectivités se retrouvent à devoir payer la TGAP pour l'élimination de ces déchets, ce qui est injuste dans la mesure où il n'existe aucune alternative. Mon amendement I-CF778 vise donc à accorder aux collectivités une franchise correspondant à cette part de déchets résiduels inévitables. Nous appelons à une fiscalité incitative.
L'amendement I-CF1108 est identique et il a déjà été parfaitement défendu. J'ajoute simplement qu'on tient compte des déchets qui ne sont pas recyclables, mais qu'on exclut de cette franchise les déchets qui pourraient l'être prochainement, notamment les jouets, les jeux, les articles de sport, etc.
J'ai le sentiment que la mise en place d'une telle franchise serait très complexe. Et au-delà, je crains qu'elle n'incite à privilégier, pour cette part de déchets exonérée, des solutions d'élimination les moins écologiques. Par exemple, pourquoi recourir à un incinérateur aux normes ISO 50001 permettant une valorisation énergétique importante, alors que l'on peut stocker si la taxe n'est pas là pour orienter les comportements ? Je suis défavorable à l'ensemble de ces amendements.
La commission rejette l'amendement I-CF1249.
Puis elle rejette successivement les amendements identiques I-CF113, I-CF315, I-CF456, I-CF818 et I-CF1108.
Elle est alors saisie de l'amendement I-CF440 de Mme Véronique Louwagie.
Le présent amendement permet aux unités de valorisation énergétique de contribuer à atteindre l'objectif fixé par la loi de transition énergétique pour la croissance verte en multipliant par cinq de la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid à l'horizon 2030. Il vous propose d'exonérer ces unités de TGAP dans le respect de la hiérarchie des déchets.
Défavorable. Ce serait là encore contre-productif, dans la mesure où cela n'inciterait pas les installations de valorisation à rechercher le meilleur taux possible.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF621 de Mme Émilie Bonnivard.
Je ne me suis pas exprimée tout à l'heure pendant la discussion des amendements de suppression, mais je considère que la méthode imposée par l'article 8 n'est pas acceptable, ou du moins qu'elle ne correspond pas à ce que nous souhaitons. On fait payer les contribuables d'abord, et on voit ensuite si l'objectif fixé par l'article est atteint : ce faisant, on rompt avec le principe pollueur-payeur. Et les débats ne m'ont pas permis de conclure à une adéquation entre l'objectif de l'article et l'augmentation de la taxe pour les contribuables.
Toutes les explications sont dans la feuille de route pour l'économie circulaire ; avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est alors saisie en discussion commune des amendements I-CF1140 de Mme Valérie Rabault, I-CF437 et I -CF467 de Mme Véronique Louwagie, ainsi que I-CF1161 de Mme Valérie Lacroute.
Notre amendement I-CF440 vise à corriger la trajectoire proposée. Les augmentations de TGAP prévues entre 2019 et 2025 semblent en effet dissymétriques : l'augmentation est de 8 % pour les installations non autorisées, mais de 171 % pour les installations réalisant une valorisation énergétique de plus de 75 % du biogaz capté ! Il nous semblerait plus cohérent d'inverser la trajectoire. J'ajoute qu'au moment où l'on demande aux collectivités de réduire leurs charges de fonctionnement et de contractualiser pour rester dans la limite de 1,2 % d'augmentation par an, il paraît curieux de leur mettre sur le dos de nouvelles charges.
Actuellement, la TGAP fonctionne comme une taxe essentiellement punitive. Il vous est proposé de compléter le dispositif par un volet incitatif : mon amendement I-CF437 créerait une réfaction de TGAP pour les collectivités qui sont parvenues à atteindre l'objectif de réduction de stockage affiché par le Gouvernement.
L'amendement I-CF467 va dans le même sens en proposant de maintenir une réfaction incitative pour les installations de stockage des déchets valorisant 75 % du biogaz.
L'amendement I-CF1161 poursuit le même objectif. Il s'agit ici d'endiguer la hausse de la TGAP, bien trop rapide par rapport à la capacité réelle et pratique des collectivités à réduire l'élimination des déchets, et qui sera forcément répercutée chez les contribuables.
Ou bien ces amendements sont orthogonaux à la trajectoire prévue pour la TGAP, ou bien ils mettent l'accent sur des secteurs qui ont des taux de valorisation importants où, de toute façon, c'est le taux de TGAP le moins important qui s'applique ; ce qui me conduit à leur opposer à tous un avis défavorable.
Il est tout de même très curieux que la trajectoire que vous proposez dans cet article reprenne des augmentations qui sont de 8 % pour les installations non autorisées – sur lesquelles il est du reste permis de s'interroger –, et de 171 % pour toutes les installations qui font de la valorisation énergétique avec un degré de performance écologique assez important... Je sais bien que le point de départ n'est pas le même, mais il y a de quoi se poser des questions !
Disons les choses telles qu'elles sont : il n'y a pratiquement plus d'installations non autorisées.
Monsieur le rapporteur général, j'entends ce que vous dites. Mais si vous voulez vraiment dissuader les installations non autorisées, augmentez leur TGAP de 1 000 %, pas de 8 % ! Et ne taxez pas aussi lourdement celles qui font du recyclage à 75 %. Cela me paraît logique.
Monsieur le rapporteur général, il serait important que vous puissiez nous donner d'ici la séance des chiffres sur le nombre d'installations non autorisées. À vous entendre, c'est parce qu'il n'y a plus beaucoup d'installations que la trajectoire n'est pas importante. Ce qui laisse tout simplement entendre que l'on est sur une taxe de rendement.
Pourquoi taxer quelque chose qui n'est pas autorisé ? Si une installation n'est pas autorisée, il faut la fermer. Mais là, on sait que qu'elles sont illégales, qu'elles existent, alors on décide de les taxer – et encore, pas trop lourdement. Mais qu'attend l'État pour faire fermer des installations non autorisées et qui, accessoirement, polluent ? Ou c'est légal, ou cela ne l'est pas !
La commission rejette successivement les amendements I-CF1140, I-CF437, I-CF467 et I-CF1161.
Elle examine l'amendement I-CF454 de Mme Véronique Louwagie.
Cet amendement va dans le même sens que les précédents. Il propose de maintenir une réfaction incitative pour les installations de valorisation énergétique réalisant une valorisation énergétique performante au sens de la directive de la Communauté européenne.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement I-CF470 de Mme Véronique Louwagie.
Cet amendement va toujours dans le même sens. Il propose de faire profiter du taux réduit de la TGAP stockage les installations de stockage qui participent à la valorisation à 75 % du biogaz.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF766 de M. Jean-Paul Mattei.
Cet amendement vise à résoudre le problème posé par les anciennes décharges fermées depuis plusieurs années lorsque les déchets qu'elles renferment doivent être déplacés vers une autre installation de stockage, par exemple en raison d'un risque écologique.
Il est donc proposé d'élargir les cas d'exemption du paiement de cette taxe prévus à l'article 266 nonies du code des douanes lorsque les déchets concernés par le transfert y ont déjà été assujettis, ou bien ont été stockés avant la création de ladite taxe afin de purger les procédures de recouvrement en cours.
Il s'agit de l'amendement que je citais au tout début de mon exposé, sur lequel j'annonçais émettre un avis de sagesse. En effet, c'est souvent la collectivité qui assume les coûts liés à ces déplacements dans la mesure où il n'y a plus d'exploitant. L'exonération de TGAP pour ces déchets, qui ont déjà été assujettis ou l'auraient été s'ils avaient été déposés après la création de la TGAP, me semble légitime.
La commission adopte l'amendement.
Enfin, elle adopte l'article 8 modifié.
Après l'article 8
La commission examine en discussion commune l'amendement I-CF389 de la commission du développement durable, qui fait l'objet du sous-amendement I-CF1457 de Mme Lise Magnier, et l'amendement I-CF746 de M. Matthieu Orphelin.
L'amendement I-CF389 concerne les hydrofluorocarbures (HFC), qui sont utilisés pour le fonctionnement de nombreux équipements, notamment les appareils frigorifiques, les pompes à chaleur, les aérosols, et certains climatiseurs. Ce sont de puissants gaz à effet de serre – ils représentent un peu plus de 5 % des émissions de gaz à effet de serre en France –, hautement nocifs, et proscrits à l'échelle européenne – le processus est en cours.
Notre amendement I-CF389 prévoit, d'une part, la création d'un mécanisme de suramortissement qui permet aux acteurs de s'équiper dès 2019 en se procurant des équipements alternatifs à l'utilisation de ces fluides, d'autre part, la mise en place d'une taxe à partir de 2021.
L'idée est d'instituer un dispositif qui soit le plus adapté possible aux acteurs économiques concernés, lesquels ont d'ailleurs été consultés.
Mon amendement I-CF746 a le même objet : il s'agit de concrétiser un engagement du Gouvernement pris dans le cadre du Plan climat en mettant en place un dispositif de type bonus-malus, avec un mécanisme de suramortissement des investissements – il faut promouvoir le remplacement des machines qui fonctionnent avec des fluides HFC, car les technologies existent d'ores et déjà – et une taxe sur les HFC, qui sera très légère en 2019 et qui augmentera progressivement au cours des années. C'est une fiscalité intelligente.
Je tiens à vous préciser que les pays qui ont mis en place des dispositifs équivalents comme le Danemark ou l'Espagne, ont vu diminuer les quantités de HFC utilisés : au Danemark, par exemple, elles ont été divisées par trois en quelques années.
Je partage la philosophie de ces amendements. Cela étant, les entreprises sont déjà mises à contribution à travers des hausses de fiscalité ; je pense, entre autres, à la suppression de l'avantage fiscal sur le gasoil non routier. Ces mesures ont un coût assez élevé. C'est la raison pour laquelle je vous appelle à retirer vos amendements pour les redéposer en séance, pour discuter au banc avec le ministre sur ce sujet particulier que sont les gaz à HFC.
Moi aussi. L'an dernier, le Gouvernement s'était engagé à proposer un dispositif dans le PLF 2019. Or, pour l'instant, ce n'est pas le cas.
Ces amendements sont un peu l'exemple d'une stratégie de politique environnementale incohérente. Vous en serez bientôt à demander aux Français d'arrêter de se chauffer ! C'est grosso modo ce que l'on est en train d'expliquer ici : on ne peut plus se chauffer au fuel, le gaz, ce n'est pas bien non plus ; le chauffage au bois, cela libère des particules fines ; et maintenant, on se rend compte que la technologie qui est à l'origine des pompes à chaleur, ce n'est pas bien non plus !
C'est complètement illogique. Un certain nombre de contraintes pèsent sur les HFC. En particulier, un mécanisme européen sur les HFC en train de faire exploser les prix, entraînant une mutation technologique. Mais je ne suis pas d'accord avec M. Orphelin : cette mutation technologique n'est pas encore mûre, elle seulement est en train de se mettre en place. Laissons-la se mettre en place ! La régulation du marché de la matière au niveau européen est suffisante. Le coût de production de ces pompes à chaleur, qui sont tout de même des outils de la transition énergétique, a déjà suffisamment augmenté.
Je pense que ces amendements sont parfaitement inutiles, voire illogiques : ils vont écarter de modes de chauffage qui permettront demain d'accélérer la transition énergétique un certain nombre de Français durant les deux ou trois prochaines années. Ce sera parfaitement improductif.
Nous avons déjà eu ce débat l'année passée. Un des arguments qui avait été retenu était qu'il ne fallait pas aller vers une « sur-réglementation » française par rapport à certains dispositifs européens. C'est une règle que nous devons garder à l'esprit, pour ne pas risquer de mettre en difficulté nos propres entreprises et nuire à notre compétitivité.
Concernant cette taxe sur les HFC qui affecte, notamment, les entreprises frigorigènes, je crois qu'il faut faire attention pour deux raisons.
D'abord, en 2017, 75 % des frigoristes ont augmenté de 200 % leur tarif sur le gaz HFC, et 95 % l'ont augmenté de plus de 150 %. Et ces augmentations de tarif liées au règlement européen qui impose des quotas se répercutent évidemment sur le prix des équipements. J'ai reçu une entreprise de ma circonscription, qui m'a expliqué qu'on était en train de tuer lentement et sûrement son modèle économique !
Ensuite, quelles sont les alternatives aux HFC ? Je vous renvoie à l'une des conclusions d'une étude menée par l'ADEME, l'Alliance Froid Climatisation Environnement et UNICLIMA sur le sujet : « Beaucoup d'alternatives mettent en jeu des fluides plus ou moins inflammables, dont la mise en oeuvre requerra une mise en conformité des normes, notamment en matière de sécurité ».
C'est bien de vouloir supprimer ces gaz ; mais se pose alors la question de la transition et de l'alternative. Je vous le répète, ce n'est pas en faisant disparaître les acteurs économiques et en les punissant parce qu'ils ont péché par le gaz ou je ne sais quelle autre source de carbone que vous les convertirez. À un moment donné, il vaut mieux parler à l'intelligence que faire une clé de bras pour convaincre les gens d'évoluer vers un nouveau modèle.
Qu'il faille réduire les HFC, tout le monde en est d'accord. Mais il faut alors trouver des produits de substitution qui soient moins néfastes.
L'année dernière, lorsque l'on a favorisé le développement du gaz dans les transports, notamment les transports de marchandises, on s'est heurté au problème des frigos. D'après ce que l'on nous a expliqué, il existe aujourd'hui des technologies de substitution, mais à des coûts très élevés – je vous renvoie à l'audition d'Air Liquide. Et dans les hôpitaux, on n'a pas de produits de substitution.
Il faut donc être empirique. En appliquant les mêmes règles à tout le monde, y compris dans les secteurs où la substitution n'est pas possible, si ce n'est à des coûts extrêmement élevés, vous risquez de tuer et de délocaliser un certain nombre d'activités. Donc, faisons attention. On cite un pays dans l'Union européenne : mais à ma connaissance, il n'y a pas d'accord européen sur l'élimination progressive des HFC.
Voilà pourquoi je trouve ces amendements sont imprudents et insuffisamment balisés.
D'abord, le secteur de la santé est exclu de ces amendements. C'est évolution par rapport à l'année dernière.
Ensuite, on pourrait ne conserver que la partie sur le suramortissement, et préparer un nouvel amendement pour la séance. Car les technologies sont là, et sont déjà effectives. Qui plus est, ce sont des entreprises de chez nous qui les proposent.
Le dispositif de suramortissement pourrait éventuellement être mis en place pour 2019. Quoi qu'il en soit, il faut avancer sur le sujet. Je précise qu'on ne vise que les frigos, les grandes surfaces, toutes les grandes installations frigorifiques, mais pas les réfrigérateurs des particuliers.
Il faut envoyer un signal politique pour montrer qu'on croit à ces solutions. Je ne comprends toujours pas que l'on fasse preuve d'autant d'attentisme en la matière. Pourquoi remettre sans cesse à demain cette transition écologique quand les solutions sont là et qu'elles ne demandent qu'à être déployées ? J'ai entendu l'argument sur l'inflammabilité des fluides de substitution. Mais nous avons aujourd'hui à notre disposition des technologies qui utilisent des fluides non inflammables. Je vous invite à venir les voir ensemble.
J'irai dans le sens des propos de mon collègue Matthieu Orphelin : effectivement, les produits substitutifs existent. Il n'y a donc pas de problème technologique, et le suramortissement permettra de pallier les coûts d'investissement.
Par ailleurs, l'amendement que je propose a fait l'objet d'une concertation avec les acteurs économiques, notamment ceux de la grande distribution, qui saluent ce dispositif en deux temps.
J'ajouterai que la France a pris des engagements internationaux sur le sujet, avec les accords de Kigali et le règlement européen sur les quotas de HFC, et que d'autres pays comme l'Espagne et le Danemark ont d'ores et déjà adopté le dispositif que nous vous proposons aujourd'hui.
Enfin, je ne l'avais pas précisé, mais l'usage médical est exclu de cet amendement. De la même manière, le secteur des transports frigorifiques n'est pas non plus concerné : nous visons uniquement les installations fixes, de manière à ne pas trop exposer des secteurs soumis à une forte concurrence internationale.
La commission rejette le sous-amendement I-CF1457, puis l'amendement I-CF389.
Enfin, elle rejette l'amendement I-CF746.
Elle examine alors, en discussion commune, les amendements identiques I-CF110 de M. Vincent Descoeur et I-CF1015 de M. Michel Castellani, les amendements identiques I-CF306 de Mme Véronique Louwagie, I-CF816 de M. Michel Castellani et I-CF1107 de Mme Christine Pires Beaune, l'amendement I-CF1081 de M. Paul-André Colombani, les amendements identiques I-CF390 de la commission du développement durable et I-CF1357 de Mme Sarah El Haïry, ainsi que les amendements I-CF313 de Mme Véronique Louwagie, I-CF817 de M. Michel Castellani et I-CF975 de Mme Sabine Rubin.
Mon amendement I-CF110 concerne toujours les déchets n'ayant pas de filière de recyclage, et à la gestion desquels ne contribuent pas ceux qui les commercialisent, contrairement ceux qui mettent sur le marché des produits couverts par une filière et qui sont logiquement mis à contribution par le biais de la REP. Je propose de mettre en place une TGAP amont sur ces produits non couverts par la REP, ce qui aurait pour intérêt de ne plus taxer aveuglément les gestionnaires des déchets, qui ne sont pas responsables de la non-recyclabilité des produits, et de mettre à contribution ceux qui produisent et mettent en marché ces produits non recyclables.
Près du tiers des déchets ménagers des Français est composé de produits, hors biodéchets, n'ayant pas de filière de recyclage. Mon amendement I-CF1015 vise donc à instaurer une TGAP amont de 0,03 euro par unité sur les produits non fermentescibles et non couverts par la responsabilité élargie. Cela permettrait de mettre fin à une situation injuste en cessant de taxer aveuglément des gestionnaires de déchets qui ne sont pas responsables de la non-recyclabilité des produits. J'ajoute que ces recettes pourraient être consacrées au développement de l'économie circulaire, et que cette TGAP amont concernerait des entreprises importantes. Même logique et même commentaire pour l'amendement I-CF816.
L'objectif de l'amendement I-CF1107 est de mettre en place cette fameuse taxe amont pour les produits qui n'ont pas de filière de recyclage. Il a déjà été largement défendu.
Comme ceux de mes collègues, mon amendement I-CF1081 vise à créer une TGAP amont, pour les émetteurs sur le marché de produits qui n'entrent pas dans les filières de recyclage. Cela inciterait à développer l'économie circulaire, et soulagerait les collectivités qui, elles, paient en assurant la collecte et le traitement.
L'objectif de l'amendement I-CF390 est de responsabiliser en amont les producteurs d'objets manufacturés non recyclables, dont nous avons parlé tout à l'heure, et de ne pas faire supporter uniquement aux contribuables citoyens et aux collectivités le coût de cette collecte et du traitement des déchets, mais bien de travailler en amont sur l'éco-conception et sur des produits recyclables au maximum.
Cet amendement I-CF1357 est dans la continuité des explications qui ont été présentées. C'est vraiment une éco-contribution, qui a vocation à traiter la problématique en amont et favoriser les produits qui ont vocation à être recyclés. C'est dans l'esprit de l'article 8.
L'amendement I-CF313 va dans le même sens que ceux qui ont été présentés précédemment pour créer une TGAP en amont, mettre fin à cette situation un peu inique que nous avons décriée ici en arrêtant de taxer les gestionnaires des déchets qui ne sont pas responsables de la non-recyclabilité des produits, et lancer un signal prix sur l'amont.
L'amendement I-CF817 s'inscrit exactement sur la même ligne, la même logique, le même type d'amendement que l'amendement I-CF1015 et l'amendement I-CF816 que je viens de présenter.
Il y a quelque temps, en séance publique, mon collègue Ruffin avait expliqué que l'Assemblée, à titre d'exemple, devrait arrêter d'utiliser les produits à usage à usage unique. Quoi qu'il en soit, il n'y a pas de raison que les seules personnes ou les seules entités pénalisées soient les gestionnaires des déchets de plastique et encore moins les citoyens. Il nous semble donc nécessaire que les industriels qui fabriquent ces produits en plastique soient eux aussi pénalisés : pas moins de 360 millions de tonnes sont produites chaque année et chaque minute, et 80 à 120 tonnes de déchets finissent en mer.
Voilà pourquoi nous demandons la mise en place d'une éco-contribution sur ces produits extrêmement nocifs, à la charge de ceux qui les fabriquent. Tel est l'objet de l'amendement I-CF975.
Je tiens à rappeler que la TGAP amont a été exclue par la feuille de route pour l'économie circulaire. Qui plus est, tout cela ne peut pas tourner, étant donné que vous prévoyez des exonérations qui sont liées au niveau du chiffre d'affaires, ce qui est parfaitement anticonstitutionnel. Ce seul motif fait que vos amendements ne peuvent pas prospérer. Il s'agit d'un service rendu : mettre en face la notion de chiffre d'affaires n'a pas de pertinence et constitue même une rupture d'égalité au sens du Conseil constitutionnel. Avis défavorable sur tous les amendements.
Sur ce sujet aussi, il faut avoir une vision globale. Lors de l'examen de l'article 8, nous avons discuté du principe d'une franchise pour ces fameux déchets qui ne sont pas recyclables, afin de les exonérer de la TGAP dite aval, tout au bout de la chaîne. On ne cesse de nous répéter que l'on finit toujours par subir les choses, sans rien pouvoir y faire. En ce cas, remontons en amont dans la chaîne économique, comme nous le proposons avec ces amendements, pour toucher le producteur et le consommateur, et non plus le contribuable. Il faut garder cette idée à l'esprit de remplacer une TGAP aval subie par une TGAP amont vertueuse, dans l'économie circulaire.
Pour revenir sur l'argumentation de M. Coquerel, je voulais rappeler que, dans le cas des plastiques, il existe déjà un éco-organisme, Citeo. Ses éco-modulations ne sont peut-être pas à la hauteur, mais il existe. Par ailleurs, pour tous les déchets non recyclables que l'on veut imposer, il a été acté, dans le cas de la feuille de route pour l'économie circulaire, que deux nouvelles REP devaient se mettre en place à destination d'une masse importante de déchets non recyclables que sont les jouets et les matériels de sport. Cela fait des années et des années que l'on remet le sujet de la TGAP amont sur la table ; mais de nombreuses études montrent que ce n'est peut-être pas le meilleur dispositif. Je ne dis pas qu'il ne faut pas traiter le sujet, mais attendons de voir ce que donneront ces deux nouvelles REP avant de nous intéresser aux autres déchets que l'on ne sait pas recycler aujourd'hui. Il faut intervenir aussi bien en amont qu'en aval, comme nous le faisons dans ce PLF.
Je trouve toujours étrange de parler d'amont et d'aval à propos de l'économie circulaire, Il n'y a pas que l'économie qui est circulaire, la fiscalité l'est aussi. À chaque fois qu'on taxe le haut, au motif d'épargner le citoyen, l'effet de ruissellement finit toujours par répercuter l'effet de la taxe sur le contribuable... Ne vous laissez pas convaincre par votre propre argumentaire : à la fin, c'est bel et bien le contribuable du bas qui paiera.
Je ne suis pas tout à fait dans la ligne de ce que vient de dire Julien Aubert. Même s'il y a effectivement une répercussion, une telle mesure est plus juste qu'une taxation aval sur tous les contribuables. Par ailleurs, je voudrais demander au rapporteur général s'il peut réexpliquer son argument anticonstitutionnel que je n'ai pas saisi.
Tous ces amendements proposent un dispositif d'exonération des entreprises réalisant un chiffre d'affaires de moins de 1 million d'euros. Ce qui risque d'être considéré par le Conseil constitutionnel comme une rupture d'égalité devant l'impôt, dans la mesure où une catégorie serait exonérée de la taxe. C'est le principal obstacle juridique à l'adoption de ces amendements, quand bien même j'en partage la philosophie.
La commission rejette les amendements identiques I-CF110 et I-CF1015, puis les amendements identiques I-CF306, I-CF816 et I-CF1107, l'amendement I-CF1081, les amendements identiques I-CF390 et I-CF1357, ainsi que, successivement, les amendements I-CF313, I-CF817 et I-CF975.
Article additionnel après l'article 8 : Exclusion de la liste des biocarburants ouvrant droit à l'exonération l'huile de palme
La commission en vient à l'examen, en discussion commune, de l'amendement I-CF980 de Mme Sabine Rubin, des amendements identiques I-CF993 de M. Michel Castellani et I-CF1077 de M. Paul-André Colombani, de l'amendement I-CF1084 de M. Paul-André Colombani et des amendements identiques I-CF391 de la commission du développement durable, qui fait l'objet du sous-amendement I-CF1460 de M. Charles de Courson, I-CF177 de M. Marc Le Fur et I-CF1331 de M. Bruno Millienne.
L'extension des plantations de palmiers à huile et de soja constitue l'une des causes majeures de la déforestation et de la dégradation des écosystèmes. Malheureusement, leur consommation est en hausse croissante dans les carburants. Le Parlement européen a voté l'interdiction des importations d'huile de palme utilisées par les biocarburants à partir de 2021, alors qu'en France on a donné un feu vert à la raffinerie Total de La Mède, qui importera 300 000 tonnes d'huile de palme par an, soit 10 % de la consommation totale d'huile de palme en Europe pour les biocarburants en 2016.
Il est donc difficilement compréhensible, à l'heure où les émissions de gaz à effet de serre ne cessent de croître, y compris en France où ils ont augmenté de 5 %, alors que, selon les accords de Paris, nous devrions en être à moins de 3 % par an, de continuer à considérer positivement l'inclusion de l'huile tant de palme que du soja parmi les biocarburants. C'est pourquoi nous proposons que soient exclus de la liste des biocarburants ouvrant droit à l'exonération de la TGAP le soja et l'huile de palme.
Je propose de compléter le huitième alinéa du III de l'article 266 quindecies du code des douanes, relatif aux biocarburants, par les mots : « Sont exclus de cette liste l'huile de palme et le soja. » L'exploitation des palmiers à huile est une catastrophe et une cause majeure de déforestation. C'est pourquoi il convient de limiter les incitations à l'importation de ces matières premières agricoles, qui, en réalité, subventionnent indirectement la destruction d'écosystèmes. Nous ajoutons le soja de façon à ne pas créer de discrimination avec l'huile de palme, essentiellement produite en Indonésie et en Malaisie.
L'amendement I-CF1077 est le même que celui de M. Castellani. Il ne faut en effet pas perdre de vue que le soja, qui est massivement cultivé en Amérique du Sud, produit les mêmes effets que les palmiers à huile. L'amendement I-CF1084 est un amendement de repli.
L'amendement I-CF391 vise à supprimer la niche fiscale dont bénéficie l'huile de palme, dont on connaît les effets dévastateurs dans la déforestation. Nous proposons que les crédits qui seraient générés par cette suppression soient réalloués, en seconde partie du projet de loi de finances, au développement de l'agriculture.
Si je suis tout à fait d'accord sur l'huile de palme, qui vient massivement d'Indonésie et de Malaisie, où l'on déforeste à tour de bras – une disposition a d'ailleurs été prise par le Parlement européen, qui va exactement dans la même direction –, n'oublions pas qu'une bonne partie du soja utilisé dans les biocarburants est cultivé en France, en particulier dans les unités produisant du diester. Pour vous donner des ordres de grandeur, plus d'un tiers du diester serait produit à partir d'huile de palme importée, dans l'unité Total située sur les bords de l'étang de Berre, dont nous avons déjà longuement parlé.
S'agissant du bioéthanol, le biocarburant produit à partir de blé, d'oléoprotéagineux, de céréales ou encore de betteraves, on a franchi les 15 % de production par le biais d'un sous-produit de ce qui est utilisé pour oxygéner le gazole, ce qui est un énorme problème. Mais sortons le soja de ce dispositif.
Je vais aller dans le même sens que Charles de Courson. Mon amendement I-CF1331 vise à exclure de la liste des biocarburants ouvrant droit à l'exonération l'huile de palme, mais pas le soja produit en France.
Je précise qu'il ne s'agit pas d'une niche fiscale, mais d'une liste, prévue par arrêté, qui inclut ou non l'huile de palme dans les biocarburants qui ouvrent le droit à une réduction de prélèvement. Des travaux sont en cours au niveau européen ; la révision de la directive sur les énergies renouvelables vient d'aboutir à un plafonnement de la consommation des matières premières contribuant à la déforestation à partir de 2019 ; elle devra être réduite progressivement jusqu'à disparaître totalement en 2030. Je vous propose de nous inscrire dans ce processus européen : une interruption brutale et totale risquerait de nous mettre en difficulté vis-à-vis des règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et de celles de l'Union européenne qui viennent d'être modifiées il y a très peu de temps. Je vous suggère donc de retirer vos amendements ; sinon, avis défavorable.
Nous atteignons les limites du droit européen, qui serait opposable à notre mesure, que, si j'ai bien compris, monsieur le rapporteur, vous trouvez de bons sens. Face au fléau de l'émission des gaz à effet de serre, il faut être capables de prendre les décisions qui conviennent, d'autant que Total importe de l'huile de palme que nos agriculteurs ne peuvent produire : non seulement il s'agit d'une concurrence déloyale sur un produit hautement émetteur de gaz à effet de serre, qui ne devrait pas faire partie des biocarburants, mais en plus, nous la favorisons en minorant le taux de TGAP ! Cette situation n'est plus supportable.
J'ai accepté tout à l'heure de soutenir l'article 8 en dépit de tous ses défauts, parce que j'ai estimé que, à un moment donné, la lutte pour l'environnement doit passer avant toute autre préoccupation. Je ne comprends donc pas comment on peut opposer le droit européen à une mesure salvatrice et nécessaire.
Je tiens à préciser qu'il ne s'agit pas d'interdire un produit au niveau européen, mais d'enlever l'huile de palme de la liste des biocarburants bénéficiant d'une exonération. Ce qui dégagerait des crédits supplémentaires qui pourraient être réaffectés dans la bioagriculture.
C'est presque insupportable d'importer de l'huile de palme pour fabriquer du bioéthanol et sauver la raffinerie Total de La Mède, alors que cela vient concurrencer le secteur du sucre et de la betterave, en utilisant la mélasse à partir de laquelle on produit aussi du bioéthanol. Depuis la suppression des quotas sucre, on a besoin de valoriser la betterave par le biais du bioéthanol. Tout ce qui peut contrarier l'importation d'huile de palme me va très bien.
Faisons attention. L'huile de palme est utilisée dans le biocarburant, mais aussi dans d'autres domaines qui ne font pas l'objet du débat. La question qui est posée en droit communautaire, ce n'est pas l'élimination, sur laquelle tout le monde est d'accord, mais la vitesse d'élimination. Monsieur le rapporteur général, nos amendements sont-ils euro-compatibles ? Il me semble que l'on peut aller plus vite que ce qu'a prévu le Parlement européen. Si vous me dites l'inverse, nous aurons un petit problème sur le glyphosate, qui pose la même question juridique...
Je ne peux pas vous dire que vos amendements sont euro-incompatibles. En revanche, il y a des processus en cours à l'OMC et dans l'Union européenne qu'il faut respecter. Cela étant, comprenez que, philosophiquement, la pression que vous proposez de mettre sur ce genre d'utilisation de produits ne me déplaît pas. Je vais donc changer mon avis en un avis de sagesse, de façon que la discussion ait lieu avec le ministre au banc sur un produit dont je connais les effets nocifs.
Je remercie M. le rapporteur général pour ses propos et reconnais qu'il y a des contradictions dans le traitement de l'importation de soja. En revanche, il est difficile d'imaginer que l'on puisse conserver une fiscalité favorable à l'importation de l'huile de palme, quand on sait les ravages que la surexploitation de ce produit entraîne dans certains pays du Sud.
Je tiens à préciser que je donne un avis de sagesse à l'amendement I-CF391 de la commission du développement durable, sous-amendé par le sous-amendement I-CF1460 de Charles de Courson, qui vise à remplacer l'huile de palme par les produits à base d'huile de palme. La discussion aura donc lieu en séance sur cette base. Je suggère aux auteurs des autres amendements de les retirer.
La commission rejette l'amendement I-CF980, puis les amendements identiques I-CF993 et I-CF1077, et l'amendement I-CF1084.
Elle adopte le sous-amendement I-CF1460, puis les amendements identiques I-CF391, I-CF177 et I-CF1331, sous-amendés.
Après l'article 8
La commission examine l'amendement I-CF988 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement a trait aux pesticides et, plus particulièrement, au glyphosate. Je ne reviens pas sur le débat qui nous a opposés, lorsque nous avons demandé l'interdiction, de fait, dans les trois ans, du glyphosate et non pas seulement un objectif. Il faudrait imposer un taux de redevance dissuasif sur ces substances, de façon à les rendre plus coûteuses à l'emploi.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement I-CF979 de Mme Sabine Rubin.
Cet amendement vise à déplafonner la redevance des plus gros consommateurs d'eau. Il est anormal que ceux qui consomment le plus d'eau, et qui sont souvent les plus susceptibles de la polluer, ne soient pas soumis à une progressivité continue de leur paiement. L'idée est de fixer des seuils en deçà desquels la redevance ne peut être fixée, en lieu et place des plafonds existants.
Votre idée, monsieur Coquerel, est loin d'être absurde. Mais se tiennent actuellement les Assises de l'eau. Une première salve de mesures a été annoncée par le Premier ministre, concernant les institutions, notamment les agences de l'eau. Une deuxième salve inclut la refonte des redevances portant sur l'eau. Je ne suis pas loin de partager votre point de vue mais, dans la mesure où un travail est en cours sur la refonte totale des redevances, je pense qu'il serait bon de retirer votre amendement ; sinon, j'émettrai un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Article 9 : Suppression de taxes à faible rendement
Suivant l'avis défavorable du rapporteur général, la commission rejette les amendements identiques I-CF261 de M. Jean-Pierre Vigier et I-CF566 de M. Marc Le Fur.
Elle en vient ensuite aux amendements identiques I-CF821 de M. Thibault Bazin et I-CF1146 de M. François Pupponi.
Les bailleurs sociaux ont dû supporter la baisse drastique des aides personnalisées au logement. Pour leur permettre de continuer à investir, le Gouvernement les a encouragés à vendre leur parc, avec un objectif de 40 000 logements par an. La loi ELAN leur facilitera, en ce sens, les ventes en bloc. En parallèle, une taxe sur les ventes de logements HLM avait été mise en place en loi de finances pour 2018, en vue d'une plus grande contribution au FNAL, par le biais d'une contribution à la Caisse de garantie du logement locatif social, censée être calculée dès le second semestre 2018, sur la base des ventes réalisées en 2017. Or, dans la mesure où il y a eu peu de ventes en 2017, il y aura peu de recettes. M. le ministre, Gérald Darmanin, voulant supprimer les taxes à faible rendement, il serait pertinent de supprimer celle-ci dont la collecte sera plus coûteuse que le rendement.
Je précise qu'il n'y aura pas de perte de recettes pour l'État, puisque ce sont les bailleurs qui paieront différemment. Nous supprimerions une taxe sans pour autant pénaliser le budget de l'État.
Avant de pouvoir dire qu'une mesure est inefficiente et qu'elle rapporte peu, encore faut-il qu'elle soit mise en oeuvre. Or son décret d'application n'a même pas six mois d'existence. Laissons-la vivre : nous reposerons la question une fois qu'elle aura vécu. Avis défavorable.
La commission rejette ces amendements.
Puis elle examine les amendements identiques I-CF822 de M. Thibault Bazin et I-CF1147 de M. François Pupponi.
Monsieur le rapporteur général, je vous ai entendu, mais je crois qu'il y a un problème de timing : la loi ELAN n'a pas encore été votée au Sénat, et ne le sera que le 16 octobre. Les ventes ne pourront vraiment avoir lieu que dans quelques mois. Le volume des ventes s'élève aujourd'hui à moins de 10 000 par an, ce qui correspond à un rendement extrêmement faible. Il serait opportun de préciser, par le biais de cet amendement, que cette taxe ne sera applicable qu'à compter du 1er janvier 2019. Ceux qui la calculent aujourd'hui, aussi bien les bailleurs que l'administration, rencontrent des soucis.
Le décret est paru, mais il s'avère très compliqué à mettre en oeuvre, voire inapplicable. Les acteurs concernés n'arrivent pas à appliquer le texte. Ils sont prêts à payer, mais rien ne sert de les obliger à remplir des documents dans tous les sens sur une année, pour une taxe qui ne rapporte rien et qui nous prend la tête... Les acteurs sont prêts à payer ce qu'ils doivent, mais pas à passer six mois à remplir des documents qui ne rapporteront rien. Ce décret est juste inapplicable !
S'agissant du timing de la loi ELAN, les conclusions de la commission mixte paritaire (CMP) seront adoptées le 16 octobre.
Je maintiens mon argument de la relative nouveauté du décret. Je vous propose d'avoir cette discussion en séance. Mais, en tout état de cause, il ne nous appartient pas de supprimer une mesure qui vient d'être mise en oeuvre dans une loi dont la CMP a été de surcroît conclusive. Avis défavorable.
Je ne suis pas certain que cette mesure ait un lien avec la CMP de la loi ELAN : le décret est plus ancien. Par ailleurs, je voudrais rassurer le rapporteur général : il est déjà arrivé de supprimer dans l'hémicycle des mesures qui venaient tout juste d'entrer en vigueur, sans faire bouger un cheveu de la majorité. Si cela peut marcher pour d'autres dispositifs, pourquoi pas pour celui-ci ? Enfin, la meilleure manière d'avoir un débat dans l'hémicycle avec le ministre, c'est de supprimer le dispositif : cela obligera les services de Bercy à expliquer en quoi il est effectivement productif, quel est son coût de perception, quel est son rendement attendu. D'après les chiffres que nous avons, on parle de quelques milliers de logements sur l'année. Il faut voir le grand chamboule-tout qui est en train de frapper les offices HLM, qui ont autre chose à faire que décrypter un décret mal écrit et essayer de percevoir une taxe sur quelques centaines d'unités.
Étant donné qu'elle est compliquée à mettre en oeuvre et qu'elle ne rapportera rien en 2018, nous vous proposons de ne l'appliquer qu'à partir de 2019, lorsque la loi ELAN entrera en vigueur et accélérera les mutations. Il n'est pas question de la supprimer. Les bailleurs paieront ce qu'ils doivent en 2018, et la taxe ne s'appliquera qu'en 2019. Mais si vous voulez compliquer les choses, allons-y !
La commission rejette ces amendements.
Elle passe ensuite à l'examen des amendements I-CF129, I-CF107 et I-CF108 de Mme Lise Magnier.
Ces amendements visent à supprimer une taxe à faible rendement sur les navires de plaisance et de sport d'une certaine catégorie : elle n'a rapporté que 82 500 euros sur les 10 millions d'euros escomptés. C'est donc clairement une taxe à faible rendement.
Sans vouloir faire de jeu de mots, si vous aviez bien lu le rapport d'informations sur l'application des mesures fiscales, vous auriez la réponse : c'est une taxe qui est plus que jeune et dont l'administration fiscale a souligné qu'elle n'avait pas encore atteint son régime de croisière, si j'ose dire... De surcroît, cette taxe a fait l'objet de telles résistances que beaucoup de procédures de recouvrement forcé sont en cours auprès de redevables indélicats. Laissez-la vivre... Avis défavorable.
Laissez-la mourir plutôt ! Elle ne rapporte rien. Les yachts de grand tonnage ont tout simplement changé leur immatriculation. Voilà un nouvel exemple que trop d'impôt tue l'impôt ! Dans deux ans, vous constaterez que la situation n'aura pas changé. Et s'il faut que nos fonctionnaires courent après les yachts...
.. qui se sont délocalisés, pour aller dans les ports italiens ou ailleurs, quelle situation de fous ! Pourquoi ne pas faire en plus une exit tax sur les yachts ?
Vous nous confirmez, monsieur le rapporteur général, que cette taxe est, en plus, très compliquée à recouvrer, puisque l'on va devoir passer par des procédures de recouvrement forcé. Elle va donc nous coûter donc plus cher que ce qu'elle rapportera. Je maintiens mon amendement pour la supprimer.
Monsieur le rapporteur général, pour compléter votre réponse, il faudrait peut-être que vous nous disiez les conséquences que cette taxe a eues sur les ports de plaisance en France. Pour ce que j'en sais, certains bateaux n'ont plus voulu les fréquenter et ont préféré aller en Italie, notamment parce que ce pays a baissé ses taxes sur les carburants. Non seulement nous sommes en train de ne pas recouvrer un impôt, mais surtout de faire fuir des gens qui fréquentaient ces ports et ne les fréquentent plus.
Pour répondre à la première question, il n'y a pas eu de modifications relatives aux immatriculations, mais simplement des contribuables qui ont refusé de payer. Quant à la seconde question, je n'ai pas de réponse. Néanmoins, je crois que supprimer cette taxe serait donner raison à des contribuables indélicats qui nous mènent en bateau...
Je m'étonne de voir François Pupponi, avec lequel j'ai partagé un bout de chemin idéologique, défendre le dumping fiscal... Par ailleurs, cette mesure venait accompagner, l'année dernière, en toute cohérence, nos mesures de suppression de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).
Monsieur Guerini, il semblerait que vous n'ayez pas bien compris, quand vous étiez plus jeune, ce que l'on vous a expliqué. Quand on vote un impôt, qui n'entraîne pas de recettes et qui, en plus, pénalise des activités économiques, on réfléchit pour savoir si l'on a vraiment eu raison. Et si l'on s'aperçoit que l'on a eu tort, on change ! Il faut être lucide sur ce que l'on fait, y compris sur ses propres erreurs. Le ministre de l'intérieur, pardon, l'ancien ministre de l'intérieur a même appelé à un peu d'humilité...
M. Saïd Ahamada, rapporteur spécial pour les affaires maritimes, présentera des amendements sur le droit annuel de francisation et de navigation, et l'administration dit vouloir travailler à une réforme d'ampleur sur tout le droit de la francisation. Cette question qui mérite en effet un toilettage, une réorganisation et surtout de l'efficacité, cet impôt ayant montré ses limites.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement I-CF59 de M. Sébastien Leclerc.
Cet amendement vise à exclure les véhicules de collection de la taxe dite « taxe à l'essieu ». Or je précise que la taxation est diminuée si un véhicule ne circule pas suffisamment : de fait, les véhicules de collection ne sont pas nécessairement soumis à une taxation.
Au vu de ces éclaircissements, je vous propose de retirer cet amendement. À défaut, j'y suis défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission en vient à l'amendement I-CF1318 de M. Daniel Labaronne.
Cet amendement vise à supprimer la redevance pour obstacle sur les cours d'eau qui concerne toute personne possédant un ouvrage constituant un obstacle continu joignant les deux rives d'un cours d'eau. Elle n'est pas due lorsque le dénivelé est inférieur à 5 mètres et pour les cours d'eau dont le débit moyen est inférieur à 0,3 mètre cube par seconde.
Eu égard à la complexité du dispositif, à ses modalités de perception et au très faible rendement de ladite redevance, un rapport de l'Inspection générale des finances avait recommandé sa suppression.
En outre, en raison du montant réduit des sommes perçues, les effets incitatifs de cette redevance pour réduire les entraves au cours d'eau ne sont pas atteints.
Dans le grand mouvement de suppression des petites taxes, et l'IGF ayant donné son aval à la suppression de la redevance, j'émets un avis favorable. Mais comme il s'agit d'une taxe perçue par les agences de l'eau, il conviendra de prévoir une compensation.
Cette redevance ne concerne pas les propriétaires d'ouvrages faisant partie d'installations hydroélectriques assujetties à la redevance pour prélèvements sur la ressource en eau.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement I-CF1236 de M. Éric Coquerel.
Entre 2001 et 2012, le nombre de sans domicile fixe a augmenté de 50 %, pour atteindre 140 000 personnes dont 30 % d'enfants ; la crise du logement, entre les mal-logés, les sans-abri, et ceux qui sont contraints d'être hébergés chez un tiers, touche près de 3 millions de personnes en France. Or, dans le même temps, l'Institut national de la statistique et des études économiques a relevé un accroissement du nombre de logements vacants de 25 % : en 2016, on en comptait près de 2,8 millions, soit plus de 8 % de l'ensemble des logements en France métropolitaine.
Si l'on veut que cette situation cesse, il faut pénaliser beaucoup plus fortement ceux qui laissent ces logements vacants, souvent pour des raisons spéculatives. C'est la raison pour laquelle nous proposons d'augmenter drastiquement le taux de taxe sur les logements vacants (TLV).
Si je demeure un des zélateurs de la TLV et de la taxe d'habitation sur les logements vacants, qui est à l'initiative des collectivités locales, j'indique que le mécanisme de la TLV a été encadré par une décision du Conseil constitutionnel de 1999.
Je suis défavorable à votre amendement, même si l'objectif d'assurer la fluidité locative est louable. J'ajoute que ces dispositifs sont appelés à être revus dans le cadre de la réforme de la taxe d'habitation. L'examen du texte sur les finances des collectivités locales sera donc l'occasion de réfléchir à un équivalent de TLV particulièrement efficace en termes de fluidité locative.
Je maintiens mon amendement car une fois de plus l'argument avancé est que cette question sera traitée plus tard par le Gouvernement – s'il y en a un d'ailleurs. Je vous propose de ne pas attendre et d'adopter dès à présent cette mesure jugée utile.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF1056 de M. Benjamin Dirx.
La contribution sur les revenus locatifs est applicable aux revenus tirés de la location de locaux professionnels ou d'habitation situés en France dans des immeubles achevés depuis plus de quinze ans au 1er janvier de l'année d'imposition.
Initialement applicable à l'ensemble des bailleurs, la liste de ses redevables s'est progressivement restreinte, les personnes physiques en ayant été exclues à compter du 1er janvier 2006 ; cette taxe est due uniquement par les personnes morales ou par les organismes sans but lucratif.
Dans un rapport de 2014, l'Inspection générale des finances publiques en proposait déjà la suppression : cette taxe ne concernait plus que vingt redevables pour une recette estimée à 180 000 euros.
Nous proposons donc la suppression de cette contribution, dont les recettes qu'elle génère ainsi que le nombre de redevables sont somme toute assez limités.
Effectivement, cette taxe a fait l'objet d'une demande de suppression lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2015. Mais à l'époque, la rapporteure générale du budget, Mme Valérie Rabault, avait démontré que le rendement était très supérieur aux estimations et que le rapport de 2014 comportait des erreurs. Je m'en tiens donc à ce qu'elle avait dit alors, et je donne un avis défavorable à la suppression de cette contribution.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement I-CF1316 de M. Daniel Labaronne.
Cet amendement propose de supprimer la taxe sur les ordres annulés dans le cadre d'opérations à haute fréquence prévue par les dispositions du code général des impôts, qui visait à encadrer, voire à limiter la pratique des activités de trading à haute fréquence.
Il s'avère que ce dispositif est très largement contourné puisque la rédaction actuelle du texte permet aux entreprises concernées de contourner en partie le dispositif en réalisant des opérations à haute fréquence d'une durée juste supérieure à une demi-seconde ou en s'organisant pour que le montant des ordres annulés ou modifiés n'excède pas en une seule journée le seuil de 80 % visé par le code général des impôts.
Au regard du faible rendement de cette taxe, inférieur à 100 000 euros, et à l'existence de moyens de contournement qui la rendent de fait inopérante, je propose de la supprimer.
Supprimer cette taxe serait un très mauvais signal politique. En revanche, la question devra être abordée en séance publique, cette taxe n'étant pas efficace à cause de l'aspect réglementaire qu'il conviendra d'améliorer.
Monsieur le rapporteur général, au vu de votre âge je pensais que vous n'étiez plus naïf depuis longtemps ! Chacun sait que cette taxe est idéologique, que les ministres de l'économie n'y ont jamais été favorables et que les textes d'application l'ont vidé de tout sens. Je m'étonne de tant de naïveté...
Nous sommes là exactement dans le travail que nous cherchons à faire : ne pas avoir de posture idéologique sur les petites taxes, mais les évaluer.
M. Labaronne démontre que cette taxe a un rendement faible. Mais le but n'est pas nécessairement de la supprimer : il s'agit de voir si l'on peut la rendre cohérente avec ses objectifs de politique publique initiaux, à savoir, comme l'a dit le rapporteur général, qu'elle fonctionne.
Lors de la remise du rapport sur les finances durables devant la Commission européenne, à Bruxelles, le 22 mars dernier, réunion à laquelle participait d'ailleurs le Président de la République, la question des horizons des investisseurs a été posée. Le rallongement des horizons de manière réglementaire, prudentielle, a été arrêté en tant qu'objectif, et il a été indiqué que ce genre de taxe n'était pas là pour dissuader des comportements mais qu'ils étaient nocifs au bon fonctionnement des marchés financiers. Il n'est donc pas question de revenir sur l'objectif, mais bien de faire fonctionner une taxe. Nous voyons là que l'évaluation précise et profonde permet de mettre en valeur les inefficiences de politiques publiques.
Passer 10 minutes à discuter de la suppression ou non d'une taxe qui rapporte 100 000 euros prouve que la France est un pays très conservateur. Souvent, on ne nous indique que le produit d'une taxe. Or ce qui m'intéresse, c'est de savoir quel est son coût de perception. Par exemple, la TVA est un impôt qui rapporte beaucoup et qui ne coûte pas cher, l'impôt sur le revenu rapporte trois fois moins alors qu'il coûte plus cher. Quant à l'ex-ISF, il coûtait très cher pour un rendement très faible. C'est donc à partir du coût de perception et du produit de la taxe que l'on peut voir si cette taxe a du sens d'un point de vue économique. Mais il me paraît très difficile de passer demain d'un rendement de 100 000 euros à plusieurs millions d'euros.
La commission rejette l'amendement.
Elle étudie ensuite l'amendement I-CF1243 de M. Daniel Labaronne.
Cet amendement vise à simplifier le droit fiscal en supprimant les droits d'enregistrement sur les mutations à titre onéreux de meubles corporels en raison notamment de leur faible rendement – 70 000 euros – et des inégalités de traitement qu'ils entraînent.
Outre le faible rendement de ces taxes, seules les cessions par actes notariés ou soumises volontairement à formalités par l'acquéreur sont susceptibles de faire l'objet de ce droit d'enregistrement. Or les autres cessions portant sur ces mêmes objets et effectuées par accord verbal ou par acte sous seing privé ne sont pas soumises à la perception de ce droit. Il en résulte une distorsion de traitement à laquelle il conviendrait de mettre fin.
Avis favorable, pour les deux motifs qui viennent d'être cités, la distorsion étant, me semble-t-il, l'élément le plus important.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement I-CF1169 de Mme Amélie de Montchalin.
Nous poursuivons ce travail d'exploration extrêmement intéressant de nos archives et profondeurs fiscales...
Il se trouve que certains impôts ou en tout cas certains droits sont appliqués aux entreprises lorsqu'elles assurent des actes plutôt quotidiens de leur vie. Lorsque vous augmentez le capital, lorsque vous prolongez une société, lorsque vous augmentez le capital en incorporant des bénéfices, lorsque vous changez de régime fiscal ou lorsque vous faites des fusions, des droits extrêmement modiques – de l'ordre de 300 à 500 euros par opération – s'appliquent aux sociétés ayant un capital d'au moins 225 000 euros.
Nous souhaitons, par souci de cohérence avec le projet de loi PACTE, retirer un frein à la croissance d'entreprises que constituent tous ces petits frais qui n'ont pas d'incidence sur le budget de l'État mais qui affectent lourdement sur le plan administratif la croissance et la vie quotidienne des entreprises.
J'ai un doute quant aux droits pesant sur le changement de régime fiscal de la société. Lorsque vous changez de régime fiscal, votre dossier est transféré, ce qui entraîne un coût pour l'administration fiscale. Ne faudrait-il pas inciter les entreprises qui peuvent tentées par l'optimisation à ne pas changer incessamment de régime fiscal ?
Ces droits fixes qui existent dans les opérations de restructuration nécessitent souvent la formalité dite de l'enregistrement, qui donne date certaine. En supprimant cette taxe, il faut prendre garde à ne pas supprimer la formalité qui peut donner date certaine dans certaines opérations. Je sais bien que l'on est dans un processus de simplification, mais il faut réfléchir à l'effet domino qu'une telle décision pourrait avoir.
Ce que vient de dire M. Mattei est important. J'avais cru comprendre que l'enregistrement était gratis. Est-ce bien le cas ?
Avec le présent amendement et le précédent, on touche au principe des droits d'enregistrement, c'est-à-dire à un acte fait soit par des particuliers, soit par des entreprises, qui a une date certaine et une valeur juridique. C'est ce principe que l'on est en train de mettre en cause. Avant d'adopter de telles mesures, réfléchissons à ce que sont les droits d'enregistrement.
Avec la mesure que nous proposons, les actes continueront d'être faits, et ils ont une valeur juridique. Quand une entreprise augmente son capital, elle ne le fait pas d'un claquement de doigts, un certain nombre de procédures et d'enregistrements sont nécessaires.
Ce que nous souhaitons, c'est envoyer aux entreprises qui font des actes quotidiens de leur vie qui peuvent se faire par des décisions formalisées en interne en conseil d'administration, par des déclarations au fisc, etc. le signal qu'elles n'auront plus de droits à payer, car cela nous semble aller dans le sens contraire des réformes que nous voulons faire.
On pourrait considérer que cela entre dans les frais de gestion de l'administration générale.
C'est un principe : quand il y a enregistrement, il y a paiement de droits. Dès lors que l'on remet en cause l'application de droits d'enregistrement pour certains, il y a rupture d'égalité. En effet, il est proposé que les entreprises, celles qui ont le plus de capitaux, ne paient plus de droits, tandis que le contribuable lambda, lui, continuera à payer les droits d'enregistrement pour le plus petit acte notarié.
Madame de Montchalin, a-t-on une idée du montant que représentent l'ensemble de ces droits ?
L'exposé sommaire fait état de « droits dus sur les actes relatifs à la vie des sociétés et assimilés ». Il s'agit donc bien de sociétés existantes, précision qu'il conviendrait d'ajouter. Par ailleurs qu'entend-on par « actes relatifs à la vie des sociétés » ? Est-ce l'évolution du capital, la dissolution ?
Madame Louwagie, comme vous le savez, nous manquons terriblement ici d'éléments de chiffrage, et à ce jour il n'est pas possible d'avoir une idée précise du montant en jeu.
Si l'on considère que le débat n'est pas mûr aujourd'hui, je suis prête à retirer l'amendement et à le redéposer en séance publique en vue d'obtenir une réponse du ministre. Il n'y a pas de raison de polémiquer sur ce sujet, nous essayons seulement de clarifier les choses, et de simplifier la vie des entreprises. La discussion a montré qu'il est nécessaire de retravailler sur cette question. Je retire donc cet amendement.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement I-CF39 de Mme Émilie Bonnivard.
Une fois n'est pas coutume, cet amendement vise à maintenir une taxe, en l'occurrence le paiement d'un droit fixe par les opérateurs de jeux ou de paris en ligne dans certains cas, notamment lors du dépôt d'une demande d'agrément ou d'une demande de renouvellement d'agrément.
Le rendement de cette taxe s'élève à 700 000 euros, ce qui peut paraître faible, mais le signal est éloquent : les opérateurs de jeux et de paris en ligne ne sont peut-être pas les organismes qui ont le plus besoin d'un allégement de leur fiscalité. À titre de comparaison, je rappelle que l'année dernière on a supprimé une aide au départ en vacances, autrement dit un dispositif important d'aide publique, qui représentait un montant de 400 000 euros pour le budget de l'État.
Sans vouloir défendre le « tripot en ligne », je constate que cette taxe a été créée dans le seul objectif de constituer une barrière à l'entrée sur ce marché d'acteurs ne présentant pas des gages de sérieux suffisants. Entre-temps, la loi « Hamon » a imposé des contraintes extrêmement fortes à ce type d'activité, ce que je trouve légitime. De ce fait, une disposition qui avait été prévue pour assainir le secteur se trouve contrecarrée par des conditions d'entrée des opérateurs de paris en ligne extrêmement strictes et contrôlées.
C'est pourquoi, j'émets, à mon grand regret, un avis défavorable sur votre amendement et que je m'en tiens à la proposition du Gouvernement.
Je suppose que les futurs acquéreurs de La Française des jeux bénéficieront de la suppression de ces droits. C'est donc un deuxième cadeau qui leur est fait...
La commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement I-CF1160 de Mme Amélie de Montchalin.
Il s'agit de supprimer la taxe sur les friches commerciales instaurée par le collectif budgétaire de 2006. Si nous reconnaissons volontiers que l'objectif de cette taxe est louable, elle est particulièrement inefficace puisqu'elle n'est utilisée que par un peu plus de soixante communes pour un montant de 400 000 euros environ. Nous proposons donc de la supprimer, pour des raisons de collecte et de recouvrement notamment, et de la compenser pour les communes qui en bénéficient.
Je suis un peu gêné par cet amendement, parce que j'ai demandé les chiffres actualisés : or il se trouve que cette taxe a connu un développement récent extrêmement important puisqu'en 2018 ce sont au total 920 communes qui l'ont mise en place, directement ou via leur EPCI de rattachement. Si l'on regarde les délibérations de ces communes, on s'aperçoit que l'instauration de cette taxe est fortement liée à sa politique sur les locaux commerciaux vacants qui deviennent nombreux dans certains secteurs et qui sont liés au développement du e-commerce.
Nous ne sommes donc plus du tout dans les conditions du rapport de l'IGF de 2014, puisque les communes ou les EPCI délibèrent les uns après les autres pour la mettre en place. Je vous suggère donc de retirer votre amendement, afin que nous puissions nous appuyer sur des chiffres de 2018, qui sont très différents de ceux de l'IGF.
La remarque du rapporteur général est pertinente. J'entends la nécessité d'actualiser les chiffres, mais même avec un nombre de communes bien plus important et un rendement plus élevé, nous pouvons engager une réflexion sur ce type de fiscalité. Je retire l'amendement et je le représenterai en séance publique avec de nouveaux chiffres. Cela dit, je maintiens que la taxe sur les friches commerciales n'est pas la plus pertinente, même si elle bien plus plébiscitée qu'auparavant.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie, en présentation commune, des amendements I-CF130 et I-CF131de Mme Lise Magnier.
Contrairement à Mme de Montchalin, je n'ai pas fait d'exploration fiscale : j'ai seulement repris le projet de loi de finances de 2018, par lequel cette majorité a décidé de créer deux taxes de faible rendement et que je propose de supprimer.
L'année dernière, en commission des finances, je m'étais opposé à la création de ces deux taxes parce que je ne comprenais pas leur objet et le périmètre en était tel que le recouvrement de ces taxes ne pouvait qu'être supérieur à leur produit.
Je ne peux donc être que favorable à la suppression de la taxe sur la recherche d'hydrocarbures qui a failli ne jamais voir le jour ainsi qu'à la suppression de sa soeur, la taxe sur la recherche de gîtes géothermiques.
Je suis, moi aussi, favorable à ces amendements. Nous devrions adopter une méthodologie afin de connaître systématiquement, pour chaque taxe, le produit et le coût de recouvrement.
Tout à l'heure, on a eu le cas d'une taxe latente dont le coût de recouvrement est nul, mais qui peut être plus ou moins utilisée au fil des ans. Par exemple, pourquoi supprimer la taxe sur les friches commerciales qui n'est pas utilisée mais qui ne coûte rien, et qui pourra servir peut-être dans dix ans ? À mon avis, ce qui nous manque, c'est de savoir comment a évolué le produit. Ces éléments méthodologiques nous permettraient de comparer d'une année sur l'autre toutes ces taxes que l'on met dans le même sac en considérant qu'elles ont un faible rendement alors qu'elles n'ont pas les mêmes caractéristiques ni les mêmes composantes de construction.
J'apprécie que le rapporteur général nous dise qu'une taxe créée en 2018 peut disparaître en 2019...
À la lecture de l'amendement, on voit qu'il ne s'agit pas de supprimer une taxe mais de la remplacer par une autre puisqu'il est écrit que « la perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et par la création d'une taxe additionnelle ».
Je l'ai bien compris ; reste que la compensation dont bénéficieront certaines communes se fait au détriment d'autres. Et pour certaines communes, ce n'est pas rien !
Je suis persuadé que le Gouvernement vous entendra et qu'il lèvera le gage. En tout cas, nous y veillerons.
La commission adopte successivement ces amendements.
Puis elle étudie l'amendement I-CF40 de Mme Émilie Bonnivard.
C'est un amendement de cohérence. Dans le texte, l'abrogation de la taxe appelle l'abrogation des dispositions relatives à son régime d'imposition.
Je pense que votre amendement est déjà satisfait : il propose de supprimer les articles dont la suppression est proposée. Je vous demande donc de le retirer. Je ne comprends pas très bien...
Je le maintiens parce qu'il y a là un vrai biais que les services devraient examiner précisément.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement I-CF919 de M. Laurent Saint-Martin.
Il s'agit d'un amendement d'appel qui vise à sensibiliser le rapporteur général sur la taxe sur les huiles végétales.
Comme l'ensemble des petites taxes que nous ciblons, elle est complexe et elle crée un problème de compétitivité pour les entreprises concernées. Le dernier recensement de l'IGF fait état de 600 redevables environ, qui sont des producteurs, des fabricants ou des importateurs. Le coût de production d'une boîte de sardines à l'huile d'une marque française, produite en France est bien plus élevé que celui d'une boîte de sardines à l'huile importée. Il y a donc là un vrai problème de compétitivité pour nos entreprises, et pas seulement un problème de complexité de recouvrement. Il faudra vraiment repenser la fiscalité sur les huiles, qui est vraiment pénalisante pour les producteurs et les importateurs.
Je suis d'accord avec vous en ce qui concerne le caractère pénalisant de cette taxe. Cela dit, sachant que son produit, qui s'élève à 139 millions d'euros, est affecté directement au régime des prestations sociales des non-salariés agricoles, il faudra avoir une discussion en séance publique pour savoir comment rebudgétiser ces 139 millions d'euros. C'est la raison pour laquelle, en 2014, l'IGF recommandait son maintien et non sa suppression.
Sachant que cette caisse subit déjà la suppression de la taxe sur les farines avec compensation, je souhaite avoir les mêmes engagements du Gouvernement sur la compensation de la taxe sur les huiles. L'affaire devra être résolue à trois partenaires : l'auteur de l'amendement, le Gouvernement et le rapporteur général. Si l'on me garantit que les 139 millions d'euros seront bien réaffectés, j'y serai favorable.
Sous la précédente législature, j'avais présidé une mission d'information sur la taxation des produits agroalimentaires, dont notre collègue Razzy Hammadi était le rapporteur. Nous avions proposé de supprimer certaines taxes – dont celles sur les farines et sur les huiles – qui représentaient environ 600 millions d'euros au total. À l'époque, Valérie Rabault, rapporteure générale de notre commission des finances, nous avait indiqué, à juste titre, qu'il était difficile de déplacer 600 millions d'euros au cours d'un même exercice. Nous avions alors proposé d'intégrer ces suppressions dans le cadre d'un plan pluriannuel.
En tout cas, je me réjouis de la suppression de la taxe sur les farines cette année car c'était une revendication ancienne. Elle aussi était affectée aux prestations sociales, et plus précisément à la Mutualité sociale agricole (MSA). Nous pouvons donc trouver une solution pour la taxe sur les huiles, peut-être par le biais de la branche retraite, comme le suggère mon collègue Charles de Courson.
Rappelons qu'il existe cinq barèmes différents pour les huiles, en fonction de leur nature, et qu'à chacun d'eux correspondent deux tarifs, l'un pour les liquides et l'autre pour les solides. Et c'est l'huile d'olive, dont on vante les bienfaits pour la santé, qui se retrouve la plus taxée...
Je suis tout à fait favorable à la suppression de cette taxe comme à celle sur les farines. Cependant, la MSA nous a appris ce matin que, en l'état actuel des choses, aucune compensation n'est prévue. On pourrait le proposer dans un amendement, pour tâter le Gouvernement.
Pour rassurer Charles de Courson, je répète qu'il s'agit d'un amendement d'appel destiné à provoquer la discussion. J'ai bien conscience que les 140 millions ne sont pas compensés. Nous pourrions peut-être obtenir un engagement en séance : la taxe sur les farines serait supprimée cette année et celle sur les huiles le serait l'an prochain, avec un mécanisme de compensation budgétaire. Je retire mon amendement.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement I-CF1162 de Mme Amélie de Montchalin.
Cette fois-ci, on parle de la taxe sécurité qui, contrairement à ce que l'on pense, n'est pas une taxe affectée. Elle est fondée sur un mécanisme un peu curieux qui n'a pas fonctionné. Elle est effectivement levée sur des contributeurs d'activités privées de sécurité, mais le bénéficiaire est financé par une ligne budgétaire et non pas directement par l'affectation de cette taxe.
Mon amendement propose donc de supprimer une taxe qui ne fonctionne pas selon le mécanisme prévu initialement, mais en permettant au Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) d'en conserver le bénéfice budgétaire. L'idée n'est pas de le priver de ses ressources mais de baisser la pression fiscale supportée par ceux qui paient cette taxe qui n'est pas très efficace, puisqu'elle ne va même pas au bénéficiaire prévu à l'origine.
Pour cet amendement, je m'en remets à la sagesse de la commission.
Laurent Saint-Martin a raison de souligner le caractère assez curieux de cette taxe qui n'est pas affectée mais qui le devient, de fait, par le biais d'un mécanisme de subvention. J'observe néanmoins que sa suppression constituerait une perte de recettes de 30 millions d'euros pour l'État, versées par un secteur qui, disons-le, connaît une forte croissance.
Je ferais une remarque plus générale sur les centres techniques industriels (CTI), que devrait approuver Charles de Courson. Si une profession ressent le besoin d'avoir un centre d'appui, il serait peut-être mieux qu'elle en décide et s'organise elle-même plutôt que de passer par un système de taxe affectée. La remarque vaut pour le CNAPS. Le mécanisme fait transiter par le budget de l'État des moyens qui devraient être réglés par les professions elles-mêmes.
Et on prélève 30 millions : il reste donc 12 millions d'euros pour les recettes générales de l'État. Ne faudrait-il pas créer une contribution volontaire obligatoire et laisser la profession s'organiser ? Après tout, qu'elle finance son organisme !
Vous avez raison de souligner, monsieur le rapporteur général, que l'activité de cette profession croît. Le rendement de la taxe, lui, n'augmente pas ; elle permet de collecter environ 30 millions d'euros depuis 2012, dont 18 millions sont reversés – mais pas affectés – au CNAPS.
L'idée est de proposer à cette filière de s'organiser elle-même – comme vous le recommandez – et de supprimer cette taxe qui crée une pression fiscale de manière assez peu efficace sur les organismes concernés.
S'il y a une profession qu'il ne faut pas laisser s'organiser elle-même, c'est bien celle-là ! C'est une activité en plein développement. De tous côtés, on recourt à des sociétés privées de sécurité parce que la police nationale est de moins en moins présente et que les polices municipales ne peuvent pas suffire. Ces sociétés recrutent comme elles peuvent, avec toutes les dérives que l'on sait. Si un secteur économique nécessite de l'ordre, c'est bien celui-là.
À mon avis, il vaut mieux modifier cette taxe plutôt que de la supprimer, et financer un organisme public qui surveille ces sociétés afin d'éviter les dérives auxquelles nous sommes en train d'assister. La pire des choses serait de laisser ces sociétés se débrouiller entre elles. J'ai du mal à croire que ce secteur en plein développement échapperait à cette taxe. Je pense que ce secteur doit être contrôlé encore plus rigoureusement qu'à présent et qu'il ne faut surtout pas laisser cette affaire à une organisation interprofessionnelle.
Ce que vous soulevez n'est pas vraiment un problème de fiscalité. Reste qu'il est nécessaire de faire le ménage dans les petites taxes même si c'est visiblement difficile.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle examine l'amendement I-CF41 de Mme Émilie Bonnivard.
Par cet amendement, nous proposons le maintien du droit d'immatriculation des organismes de voyages et de séjours et nous voulons nous assurer que la recette sera bien versée à Atout France.
Au sein du groupement Atout France, une commission est chargée d'immatriculer les personnes physiques ou morales qui, dans le cadre de leur activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale, élaborent et vendent des forfaits touristiques, des services de voyage concernant le transport, le logement, la location d'un véhicule ou autres services de voyage. Cette mesure concerne également les personnes physiques ou morales qui émettent des bons ou coffrets permettant d'acquitter le prix de l'une de ces prestations.
Actuellement, cette immatriculation est renouvelable tous les trois ans et est subordonnée au versement de frais d'immatriculation dans la limite de 150 euros à la commission d'Atout France. La suppression de ces frais est programmée dans le PLF 2019, mais rien n'est prévu pour compenser la recette qui en découle pour Atout France.
En tant que rapporteure spéciale du budget du tourisme, je souhaite vérifier que les moyens dédiés à l'opérateur de l'État en charge du tourisme soient sauvegardés.
C'est la deuxième fois, madame la députée, que vous tentez de maintenir une taxe. J'ai bien compris qu'avec cet amendement d'appel vous voulez savoir où en est la compensation de la suppression de cette taxe pour Atout France. C'est le ministre qui détient la réponse : je vous propose de représenter cet amendement en séance afin qu'il puisse vous répondre au sujet de cette « affectation » de recettes indispensables au fonctionnement d'Atout France.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle passe à l'amendement I-CF1090 de M. Benoît Potterie.
Cet amendement propose de supprimer la taxe pour le développement des industries de l'horlogerie, de la bijouterie, de l'orfèvrerie et des arts de la table. Dans son rapport de 2014, l'IGF avait souligné le rendement modeste de cette taxe. Il avait alors été suggéré de la remplacer par une contribution volontaire de la part des entreprises. Cela peut sembler logique car il est douteux que l'État ait à intervenir directement en faveur de la promotion de ces acteurs économiques.
Je viens de m'exprimer d'une manière générale sur les CTI : je préférerais que les professions s'organisent elles-mêmes. Il ne faut pas agir par petits bouts, en choisissant un CTI plutôt qu'un autre. Même si je partage votre objectif, j'émets un avis défavorable à votre amendement et je plaide pour une réflexion globale sur le financement des CTI par autre chose que des taxes affectées.
Je pense que notre commission devrait se saisir de ce sujet récurrent. Les CTI sont nécessaires. Si une profession estime que ce n'est pas le cas, elle doit en tirer toutes les conséquences. La fiscalité doit suivre ce mouvement. Je serais assez favorable à ce que nous nous réunissions spécifiquement, sous la houlette de notre rapporteur général, sur ce problème général des CTI.
Ce serait en effet une bonne idée. Nous devons être très prudents et veiller à ne pas déstabiliser des filières organisées en fonction de certains sujets. Il nous arrive de regretter que les filières ne soient pas suffisamment organisées pour développer leurs exportations. Il vaut donc mieux les soutenir dans leurs actions plutôt que d'agir au cas par cas au risque de les déstabiliser.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine, en discussion commune, l'amendement I-CF1217 de M. Paul Molac et I-CF709 de M. Charles de Courson.
Mon amendement I-CF1217 a pour objet de supprimer le montant de la taxe due par les filières animales et destinée à l'Institut des corps gras (ITERG). En 2017, elle représentait 23 000 euros, soit seulement environ 3 % du montant global de la taxe fiscale affectée à l'ITERG, ce qui reste très négligeable.
De surcroît, cette mesure s'inscrit dans la continuité de la démission des acteurs de la filière animale du conseil d'administration de l'ITERG, qui rassemble désormais uniquement des acteurs de la filière oléagineuse.
M. Molac a dit d'essentiel. Pour votre information, les recettes fiscales de l'ITERG s'élèvent à 660 000 euros, dont l'essentiel provient de taxes sur les huiles industrielles et autres. La taxe sur les huiles animales ne représente que 23 000 euros, soit 3 % à 4 % du total. De plus, les représentants de la filière animale ont démissionné en bloc du conseil d'administration de l'ITERG, disant qu'ils n'étaient pas concernés par les travaux de l'Institut. Il serait cohérent de retirer ces 23 000 euros.
Je m'en remettrai à la sagesse de la commission concernant ces amendements, compte tenu des faibles montants en jeu pour la filière. Puisqu'ils ne sont pas identiques, je vous propose de vous mettre d'accord sur une rédaction commune.
Contrairement à moi, Paul Molac n'a pas précisé de date d'application. Je lui propose de cosigner le mien qui pourrait alors être adopté. Notre collègue Louwagie pourrait aussi le cosigner puisqu'elle avait proposé la suppression de cette taxe dans son rapport, il y a déjà deux ans.
Je suis d'accord pour retirer mon amendement et me rallier à celui de mon collègue de Courson.
L'amendement I-CF1217 est retiré.
La commission adopte l'amendement I-CF709.
Puis elle en vient à l'amendement I-CF132 de Mme Lise Magnier.
Pour continuer avec cette valse des petites taxes, je vous propose de supprimer la taxe additionnelle sur l'immatriculation des voitures de sport, disposant d'une puissance fiscale supérieure à 36 chevaux. Cela correspond à une très faible partie des véhicules en circulation.
Notre rapporteur général, lui-même, confiait récemment au journal Les Échos que « la direction de la législation fiscale a déclaré ne pas pouvoir apporter des éléments lui permettant d'indiquer le nombre de taxations réalisées et le produit des taxes collectées ».
Je crois qu'il est vraiment nécessaire de supprimer cette taxe.
En fait, en l'absence de chiffrage, on ne peut pas savoir combien rapporte cette taxe. De la même façon, ce n'est pas parce que la direction générale de l'urbanisme, de l'habitat et de la construction ne fait pas un suivi du dispositif « Pinel » que celui-ci coûte cher. J'attends d'avoir des chiffres pour donner un avis autre que défavorable à cet amendement. En outre, quel que soit ce montant, je pense que le moment n'est pas forcément bien choisi pour supprimer cette taxe : le signal pourrait être mal perçu.
Cette taxe produit le même effet que celle sur les yachts : une délocalisation des immatriculations. Des spécialistes de ces questions m'ont expliqué que les immatriculations se faisaient dans des pays étrangers, notamment quand les gens possèdent des sociétés.
Monsieur le rapporteur général, si cette taxe n'est pas chiffrée, c'est qu'elle n'est pas recouvrée. Elle ne sert donc à rien et il faut la supprimer.
Non, l'absence de chiffrage n'équivaut pas à absence de recouvrement et de rendement. Certains types de taxe ne sont pas identifiés, ce qui est assez incroyable. En outre, vous avez tous été témoins des problèmes que nous avons eus avec les certificats d'immatriculation des véhicules. Compte tenu des éléments qui nous manquent sur les certificats d'immatriculation, on ne peut pas avoir de chiffres cohérents. Attendons d'avoir des chiffres cohérents.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 9 modifié.
Article 10 : Fusion des taxes sur la publicité audiovisuelle
La commission examine l'amendement I-CF1229 de M. Éric Coquerel.
La publicité envahit de plus en plus notre quotidien, y compris par le biais d'affiches grand format sur les monuments de nos villes ou d'écrans lumineux et vidéo dans les métros. C'est une agression, une incitation au consumérisme dont nous pourrions nous passer. Il faudrait à tout le moins la réglementer de manière beaucoup plus forte et, en attendant, la taxer de manière plus importante.
Or le taux de cette taxe sur la publicité croît jusqu'à 311 millions d'euros puis décroît progressivement au-delà de ce seuil. Autrement dit, les plus gros messages publicitaires et donc les plus gros annonceurs sont proportionnellement moins pénalisés que les plus petits. Cela témoigne d'une curieuse vision de l'égalité devant la loi et du caractère progressif qu'une telle taxe devrait avoir. En outre, c'est une incitation à faire toujours plus de publicité et à envahir nos murs, nos écrans, nos radios et nos têtes.
Par cet amendement, vous souhaitez augmenter le taux des deux tranches marginales de l'impôt prévu par le présent article.
Cet article a été pensé pour assurer une neutralité fiscale aussi bien pour le budget de l'État que pour les annonceurs. D'après mes calculs, la courbe d'imposition est progressive. Elle n'est que très faiblement régressive au-delà de 1 milliard d'euros de recettes publicitaires, un montant d'imposition qu'aucun opérateur ne paie en France.
Mon avis est donc défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 10 sans modification.
Après l'article 10
La commission est saisie de l'amendement I-CF1073 de M. Dimitri Houbron.
Cet amendement concerne la vente en l'état de futur achèvement (VEFA), un type de contrat de plus en plus utilisé par les bailleurs sociaux. Cependant, certains d'entre eux utilisent les vertus de ce contrat – comme le fait que les collectivités ne sont pas autorisées à analyser le projet en amont – de manière trop intensive. Concrètement, certains bailleurs sociaux, qui devaient initialement acheter une portion d'un projet après l'obtention d'un permis de construire, profitent des largesses du système VEFA pour s'arroger une part plus importante, voire l'intégralité, du projet immobilier.
L'objectif de cet amendement est de limiter ces pratiques qui peuvent engendrer l'acquisition de logements non conformes aux normes par des bailleurs sociaux. Il s'agit, d'une part, de limiter l'achat des locaux dans un immeuble par les bailleurs sociaux dans le cadre d'un contrat de type VEFA, et, d'autre part, de taxer tout dépassement de cette limite par les bailleurs sociaux.
Cet amendement est inspiré de remontées de terrain où les élus manifestent leur impuissance face à ce phénomène qui affaiblit l'offre qualitative de logements sociaux.
Je ne suis pas insensible à vos arguments sur les dysfonctionnements et les abus que vous soulignez, mais je ne crois pas que la solution soit de limiter les achats et d'infliger des taxes.
Pour avoir été très longtemps un élu local, je sais que les VEFA permettent de pallier le manque de logements sociaux et d'autres types de locaux : j'ai moi-même construit en VEFA des maisons de service public. Il ne faudrait pas que votre dispositif compromette l'utilité de cet outil. Je suis donc défavorable à votre amendement pour des raisons de fond. En outre, votre dispositif présente un risque d'inconstitutionnalité pour incompétence négative dans la mesure où vous renvoyez la définition des redevables, de l'assiette et du taux de la taxe à un décret alors que cela relève de la loi. Je vous invite donc à retirer cet amendement qui pose vraiment un problème juridique.
Je ne le retirerai pas. Le recours à un décret offrirait une marge de manoeuvre en matière de limite et de taxation. Le dispositif me semblait plutôt équilibré.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle passe à l'amendement I-CF654 de M. Jean-Paul Dufrègne.
Vous venez de supprimer beaucoup de taxes. Par le biais de cet amendement, nous vous proposons d'en renforcer une.
La loi de finances pour 2017 prévoyait l'élargissement de l'assiette de la taxe sur les transactions financières (TTF) aux transactions infrajournalières, constituant une avancée attendue et largement saluée par la société civile.
Mais, préférant dérouler le tapis rouge en vue d'attirer banquiers et financiers sis outre-Manche et inquiets du Brexit, la majorité a fait sauter cette disposition au cours des discussions budgétaires de 2018.
Il est ici proposé de la rétablir, considérant l'impérieuse nécessité de mettre un terme à la surchauffe de la planète finance et de dégager des ressources budgétaires pour les véritables priorités de notre temps : la transition écologique, l'aide aux pays les moins avancés, la lutte contre l'exclusion sociale. Soyons cohérents avec ce qui a été dit ce matin.
Cet amendement est déposé depuis 2014 et nous en avons discuté l'an dernier. Nous nous heurtons à un problème technique concernant les transactions infrajournalières, dites intra-day. Lors d'une table ronde où j'avais convié tous les organismes non gouvernementaux, il est apparu que personne n'était vraiment attaché à cette taxation des opérations intra-day : tout le monde sait qu'elle ne rapporte pas grand-chose, en raison d'un problème d'assiette. Pour les organismes non gouvernementaux, l'important est que les moyens consacrés à l'aide publique au développement continuent d'augmenter. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle en vient à l'amendement I-CF657 de M. Jean-Paul Dufrègne.
M. le rapporteur général nous dit que la taxe ne rapporte pas grand-chose parce que l'assiette n'est pas assez large. Eh bien, je vous propose d'élargir à nouveau cette assiette, en l'appliquant aux entreprises dont la capitalisation boursière dépasse 500 millions d'euros, alors que le seuil est actuellement fixé à 1 milliard d'euros. Si cette mesure était adoptée, elle permettrait de renforcer le produit auquel vous faisiez allusion.
Cet amendement va devenir un marronnier mais, d'une certaine manière, il est important que les marronniers soient plantés en automne... Songez quand même à une chose : en abaissant le seuil, vous incluez énormément de petites et moyennes entreprises et d'entreprises de taille intermédiaire parfaitement françaises et vous les fragilisez. Avis défavorable comme l'année dernière et les années précédentes.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine les amendements identiques I-CF656 de M. Fabien Roussel et I-CF843 de Mme Sabine Rubin.
Après avoir cherché à élargir l'assiette, nous vous proposons par notre amendement I-CF656 d'augmenter le taux de la TTF, en le faisant passer de 0,3 % à 0,5 %. Peu importe que ces amendements soient appelés marronniers ou autrement. Quand on veut faire participer ceux en ont les moyens pour relever les grands défis auxquels notre planète est confrontée, on ne rencontre pas forcément un grand engouement. Il est très inquiétant que certains soient privilégiés dans ce domaine.
À travers l'amendement I-CF843, nous faisons une proposition raisonnable qui fait d'ailleurs consensus au sein de nombreuses ONG, comme Oxfam, Coalition PLUS et autres : faire passer de 0,3 % à 0,5 % la TTF, en s'alignant ainsi sur le taux des Britanniques. Cela permettrait de dégager 1 milliard d'euros de recettes supplémentaires qui pourraient être directement affectées à l'aide publique au développement, à la lutte contre le changement climatique, pour la santé mondiale et la solidarité internationale. On voit tout l'intérêt de prendre sur la finance au profit du codéveloppement.
Je fais partie de ceux qui ont voté l'augmentation du taux de 0,2 % à 0,3 %. Quand on regarde l'étude d'Euronext qui a suivi, on s'aperçoit que cela s'est traduit par un transfert à l'étranger de 24 % des volumes échangés à Paris... Et à croire la même étude, le transfert atteindrait 46 % si la TTF était portée à 0,5 %. Il faut donc rester prudent. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Membres présents ou excusés
Réunion du mercredi 10 octobre 2018 à 9 heures
Présents. - M. Saïd Ahamada, M. Éric Alauzet, M. Julien Aubert, M. Jean-Noël Barrot, Mme Émilie Bonnivard, M. Jean-Louis Bourlanges, M. Jean-Louis Bricout, Mme Émilie Cariou, M. Gilles Carrez, M. Michel Castellani, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Jean-René Cazeneuve, M. Philippe Chassaing, M. Éric Coquerel, M. François Cornut-Gentille, M. Charles de Courson, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Olivier Damaisin, Mme Dominique David, M. Benjamin Dirx, M. Jean-Paul Dufrègne, Mme Stella Dupont, M. M'jid El Guerrab, Mme Sarah El Haïry, Mme Sophie Errante, M. Nicolas Forissier, M. Olivier Gaillard, M. Joël Giraud, Mme Perrine Goulet, M. Romain Grau, Mme Olivia Gregoire, M. Stanislas Guerini, Mme Nadia Hai, M. Patrick Hetzel, M. Alexandre Holroyd, M. Christophe Jerretie, M. François Jolivet, M. Daniel Labaronne, Mme Valérie Lacroute, M. Mohamed Laqhila, M. Michel Lauzzana, M. Vincent Ledoux, M. Marc Le Fur, M. Fabrice Le Vigoureux, Mme Véronique Louwagie, Mme Marie-Ange Magne, Mme Lise Magnier, M. Jean-Paul Mattei, Mme Amélie de Montchalin, Mme Cendra Motin, Mme Catherine Osson, M. Xavier Paluszkiewicz, M. Hervé Pellois, Mme Valérie Petit, Mme Bénédicte Peyrol, Mme Sylvia Pinel, Mme Christine Pires Beaune, M. François Pupponi, Mme Valérie Rabault, M. Xavier Roseren, M. Laurent Saint-Martin, M. Jacques Savatier, M. Benoit Simian, Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas, M. Jean-Pierre Vigier, M. Philippe Vigier, M. Éric Woerth
Excusés. - M. Jean-François Parigi, M. Olivier Serva
Assistaient également à la réunion. - M. Jean-Félix Acquaviva, Mme Ericka Bareigts, M. Thibault Bazin, M. Paul-André Colombani, Mme Josiane Corneloup, M. Vincent Descoeur, M. Jean-Baptiste Djebbari, M. Dimitri Houbron, M. Gilles Lurton, M. Sylvain Maillard, M. Bruno Millienne, M. Paul Molac, M. Matthieu Orphelin, M. Rémy Rebeyrotte, Mme Laurianne Rossi, Mme Maina Sage, M. Raphaël Schellenberger, M. Vincent Thiébaut, Mme Isabelle Valentin, M. Arnaud Viala
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