La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé l'examen des crédits relatifs à la justice (no 2301, annexe 29 ; no 2306, tomes IV et V ), s'arrêtant à l'amendement no 659 .
Nous en venons à une discussion thématique sur les amendements no 659 et suivants, qui portent sur la lutte contre les violences faites aux femmes. Je propose que leurs auteurs les présentent successivement, avant que la commission, puis le Gouvernement, ne donnent leur avis sur chacun d'eux.
Je suis saisie de deux amendements, nos 659 et 657 , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
La parole est à M. Aurélien Pradié, pour les soutenir.
J'accepte volontiers de défendre en même temps ces deux amendements, mais les suivants portent sur des thèmes différents et je préférerais qu'ils ne fassent pas l'objet d'une présentation commune.
Il s'agit de tirer les conséquences des débats parlementaires qui se sont tenus il y a quelques jours au sein de notre assemblée et de l'adoption, à l'unanimité, de la proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille. Notre responsabilité, aujourd'hui, est tout aussi lourde, puisque nous devons faire en sorte que les moyens budgétaires mobilisés seront à la hauteur de l'ambition que nous avons défendue dans la proposition de loi. Chaque étape est en effet essentielle.
Les amendements nos 659 et 657 visent à appeler l'attention de la représentation nationale sur la nécessité de renforcer les moyens des juges aux affaires familiales, les JAF.
Vous avez, madame la garde des sceaux, annoncé la création de nouveaux postes de magistrats, mais pas un seul poste supplémentaire de juge aux affaires familiales n'est prévu. Vous nous l'avez confirmé lors de votre audition en commission et nous ne pouvons que le déplorer. Il convient donc de déployer des moyens supplémentaires pour renforcer leur présence.
L'édifice de protection des femmes est en effet fondé, dans notre pays, sur le juge civil, c'est-à-dire le juge aux affaires familiales. Je ne reprendrai pas le débat que nous avons eu le 15 octobre, mais je soulignerai simplement qu'il nous faudra tôt ou tard – le plus tôt sera le mieux, selon moi – en venir à une juridiction spécialisée dépassant le seul cadre civil et pénal. Pour le moment, nous avons fait le choix du juge civil.
Avec le renforcement des ordonnances de protection, nous faisons le pari optimiste que de plus en plus de femmes demanderont à bénéficier de cette mesure et seront protégées. Il est absolument capital qu'elles reçoivent une réponse à la hauteur de l'ambition portée par le texte. Ces deux amendements d'appel vous invitent donc, madame la garde des sceaux, à porter une attention particulière et déterminée au déploiement de moyens supplémentaires pour les juges aux affaires familiale.
L'urgence n'est peut-être pas telle qu'il faille agir dès cette année, mais il le faudra manifestement l'année prochaine. En tout état de cause, il faut y réfléchir dès maintenant.
Sur l'amendement no 662 , je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Il en est de même de l'amendement no 653 , à l'initiative du même groupe.
Les scrutins sont annoncés dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. Patrick Hetzel, rapporteur spécial de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l'avis de la commission.
Ces amendements, qui n'ont pas été examinés par la commission, soulèvent une question importante, dans le prolongement de la proposition de loi que M. Pradié a défendue lui-même, avec plusieurs de ses collègues, et qui a été adoptée.
Ils posent une question légitime, mais j'ai noté avec intérêt que M. Pradié les a qualifiés d'amendements d'appel. La procédure parlementaire nous oblige en effet à réduire les crédits sur certains postes pour compenser de nouvelles dépenses. En l'occurrence, l'amendement no 659 conduirait à redéployer 51 millions d'euros du programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice » vers le programme 166 « Justice judiciaire », et l'amendement no 657 une vingtaine de millions d'euros. Les mesures proposées auraient donc pour effet de restreindre la capacité d'action de l'administration centrale, et plus spécifiquement du secrétariat général, à hauteur de 70 millions au total, ce qui est problématique.
Il n'en reste pas moins nécessaire, pour le Gouvernement, de tirer les conséquences de l'adoption de la proposition de loi. Vous avez d'ailleurs annoncé, madame la ministre, que la chancellerie prendrait des mesures afin que le texte soit appliqué aussitôt sa promulgation, qui devrait intervenir, souhaitons-le, l'année prochaine. De ce point de vue, les amendements d'appel sont donc tout à fait légitimes. C'est pourquoi je m'en remets à leur sujet à la sagesse de l'Assemblée.
La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour donner l'avis du Gouvernement.
Monsieur le député Pradié, comme je l'ai déjà dit, je serai extrêmement attentive à ce que la proposition de loi que vous avez défendue et à laquelle nous avons apporté notre soutien se traduise en mesures concrètes.
Nous souhaitons, tout comme vous, développer l'usage de l'ordonnance de protection, mais je ne pense pas qu'il soit nécessaire, au moment où nous parlons, d'accroître, par une mesure immédiate, le nombre de juges aux affaires familiales. Deux raisons m'incitent à le penser.
La première tient à l'évolution générale du nombre de magistrats, puisque le projet de budget pour 2020 prévoit cent postes supplémentaires. Certes, ces nouveaux magistrats seront affectés à d'autres priorités de politique judiciaire, la protection des mineurs et la lutte contre la délinquance financière. Il n'en demeure pas moins le nombre de vacances de postes se réduit globalement dans les juridictions. Elles représentent aujourd'hui moins de 1 %, elles sont donc frictionnelles, ce qui donne aux juges davantage de latitude dans les fonctions qu'ils exercent et ce qui leur permet de mieux prendre en charge les dossiers qui leur sont soumis.
Je pense par ailleurs, et c'est la deuxième raison que je souhaitais faire valoir, qu'il ne s'agit pas tant d'une question numérique que d'une question d'organisation. À l'instar du tribunal de Créteil, nous souhaitons développer les procédures d'urgence pour le traitement des violences faites aux femmes.
Je serai néanmoins très attentive à ce que nous ayons, à l'avenir, la capacité de conduire la politique de lutte contre les violences au sein de la famille que nous appelons tous de nos voeux.
Pour toutes ces raisons, j'émets, à ce stade, un avis défavorable.
Nous avons voté un texte de loi qui va dans le bon sens et dont nous savons tous qu'il constitue une grande avancée pour notre société, mais nous ne nous donnons pas les moyens de le mettre en oeuvre !
Il s'agirait d'un problème d'organisation et non de moyens… Je crains, madame la ministre, que vos explications ne hérissent les juges aux affaires familiales !
Actuellement, quand on saisit un juge aux affaires familiales, il faut trois mois, au mieux, pour obtenir une date d'audience, et six à huit mois dans le pire des cas. Même pour une ordonnance de protection, il n'est pas rare que la décision soit rendue plus d'un mois après l'audience, parce qu'il n'y a pas assez de magistrats et que chacun d'eux est surchargé de dossiers.
Le problème n'a rien à voir avec les vacances de postes – nous l'avons dit dès la discussion sur la loi de programmation et de réforme pour la justice. Il vient du fait qu'il n'y a pas assez de postes ouverts pour répondre à la demande.
La proposition de loi tend à créer une nouvelle demande en faveur d'une intervention urgente de la justice, et prévoit des délais de traitement extrêmement courts, mais les moyens de l'appliquer ne sont pas alloués. Si rien ne change, nous pourrons considérer que nous avons voté ce texte pour nous donner bonne conscience et que rien ne sera fait pour le mettre en application. C'est extrêmement dommage !
J'ai bien noté vos propos, madame la ministre : vous serez très attentive à ce que le texte soit bien appliqué l'année prochaine. Permettez-moi toutefois de resituer la question.
Aujourd'hui, les ordonnances de protection représentent un volume marginal dans notre pays. Nous le savons tous, cet outil est très peu utilisé au regard du nombre de violences faites aux femmes. Certaines juridictions ne l'utilisent même pas du tout – 10 % d'entre elles n'ont jamais délivré une telle ordonnance. Or malgré ce faible volume, il faut tout de même plus d'un mois et demi pour les délivrer. C'est parce qu'il est nécessaire d'intervenir beaucoup plus rapidement que nous avons fixé, dans la proposition de loi, un délai incompressible de six jours.
Si les JAF ne sont déjà pas capables de faire mieux que de délivrer une ordonnance de protection dans un délai d'un mois et demi, ils auront le plus grand mal, demain, à tenir le délai de six jours ! C'est d'autant plus vrai que le volume des ordonnances à délivrer sera plus important : l'adoption de la proposition de loi va provoquer un appel d'air, d'ailleurs tout à fait souhaitable, quand les femmes concernées constateront que cette procédure peut vraiment les protéger.
Ces juges devront donc décider vite, mais aussi décider bien. Or l'ordonnance de protection est, si vous me permettez un tel raccourci, une procédure quasi-pénale pourtant confiée – c'est une singularité de l'organisation de notre justice – à des juges civils, dont ce n'est pas le coeur de métier. Il faudra donc parmi les JAF des juges quasiment spécialisés pour décider vite et bien.
Bien sûr, nous n'observerons peut-être pas dès l'année prochaine une bousculade au portillon, mais il est certain que dès l'année suivante, des problèmes se poseront qui exigerons des moyens humains supplémentaires. Au-delà des besoins de réorganisation, au-delà des choix de priorité que pourraient faire les JAF, la question se posera dès 2021. Si des moyens supplémentaires ne sont pas prévus, les délais que nous, la représentation nationale, avons fixés par la loi, ne seront pas tenables.
J'ai entendu, madame la ministre, votre conclusion. Je m'en souviendrai, nous nous en souviendrons tous dès l'année prochaine car les JAF doivent être une priorité dans le prochain budget de la justice.
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
La réponse de Mme la ministre me pousse à intervenir parce qu'elle m'a à la fois surpris et énormément déçu. L'hémicycle résonne encore du débat que nous avons eu il y a deux semaines sur la proposition de loi de M. Pradié relative aux violences conjugales et de la belle unanimité qui s'est dégagée autour cette grande cause, mais bien évidemment. Mais tout le monde l'avait dit au cours de la discussion du texte : celui-ci devra trouver une traduction concrète, ce qui suppose que soient prévus les moyens judiciaires nécessaires à son application, sans quoi il ne sera qu'un voeu pieu. Or la proposition de loi prévoit que l'ordonnance de protection devra être délivrée en six jours, contre un délai moyen de quarante-cinq jours aujourd'hui.
Vous dites, madame la ministre, que les amendements de M. Pradié sont des amendements d'appel. Vous pourriez lui répondre que, s'il est difficile d'accéder à sa demande dans ce projet de budget, l'importance de la cause et l'ampleur des moyens nécessaires pour appliquer la loi lorsqu'elle sera définitivement adoptée et promulguée exigent de s'y pencher à nouveau à l'avenir. Mais votre réponse, c'est qu'il n'y a pas de problème relatif aux effectifs, uniquement des questions d'organisation. Mais à qui peut-on faire croire cela, à quel justiciable et à quelle juridiction ? Nous devons nous retrouver cette semaine au tribunal de grande instance de Bobigny : je suppose que vous ne pourrez pas tenir le même propos devant son personnel, qui manque de tout et avant tout – et cruellement – d'effectifs.
Et vous savez bien qu'elle n'est pas la seule. Si nous voulons nous donner des moyens à la hauteur de l'ambition que nous nous sommes donnée en adoptant presque unanimement cette proposition de loi, il faudra traiter la question des effectifs des juges aux affaires familiales.
En commission, j'avais déjà souligné que parmi les créations de postes de magistrat prévues en 2020 – cent au total – , aucune ne concernait les juges aux affaires familiales. En effet, il est prévu soixante-dix juges pour enfants et trente juges contre la délinquance financière. Vous m'aviez alors répondu, madame la ministre, que le délai de six jours pour statuer sur l'ordonnance de protection serait de toute façon tenu parce que le sujet sera prioritaire pour les juges aux affaires familiales. Mais la masse de travail restera identique ! Elle va même s'accroître s'il y a davantage d'ordonnances de protection, ce que nous souhaitons, car cela prouverait que ce circuit court permet à davantage de femmes victimes de violences d'aller au commissariat et d'obtenir plus rapidement la protection de la justice. Mais comment prétendre, dans ces conditions, que cela pourra se faire avec le même nombre de magistrats ?
Au tribunal de grande instance de Lille, je constate déjà une crise des vocations pour devenir juge aux affaires familiales. Le métier est déjà difficile aujourd'hui, les délais déjà compliqués à tenir, et vous allez rajouter de la souffrance là où il y en a déjà beaucoup. En répondant aux mêmes questions qu'aujourd'hui, vous m'avez dit vous-même, madame la ministre, que l'effectif cible ne correspondait pas nécessairement aux besoins. Dès lors, le fait que l'on finisse, de budget en budget, par l'atteindre ne signifie pas que tout va bien se passer. Vous nous dites : « Ne vous inquiétez pas. Dormez sur vos deux oreilles. » Mais ce n'est pas possible.
Il est pénible de voter des textes de loi avant de se rendre compte que l'on n'aura pas les moyens de les appliquer.
Nous allons générer de la frustration dans un domaine où s'est pourtant manifestée une unanimité sur l'ensemble des bancs.
Madame la ministre, vous avez fait mine de ne pas comprendre, tout à l'heure, quand je vous ai dit que le programme 166 « Justice judiciaire » n'augmentait par rapport à l'année dernière que de 0,32 % !
C'est le chiffre qui figure dans le projet annuel de performance pour 2020. Est-ce cela, une ambition ? La réponse est non.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je salue l'engagement de notre collègue Pradié, qui a rallié, on peut le dire, la totalité des bancs de cet hémicycle autour de sa proposition. C'est suffisamment rare pour être souligné. En votant cette proposition de loi, nous avons donné un signal à la société, à savoir que l'État, de façon ferme et claire, prend sous sa protection les personnes qui sont violentées au sein d'un couple. Mais en ne se donnant pas les moyens nécessaires, on passerait à côté du sujet. Au printemps dernier, lors de la discussion la loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice, nous avions évoqué la nécessité de faire plus et rendez-vous avait été pris pour l'automne. Nous y sommes, madame la garde des sceaux !
Ainsi, à propos du dépôt de plainte électronique, lorsque nous avions souligné les difficultés qu'éprouvent certains justiciables face à un écran, vous aviez répondu que cette procédure permettrait justement de faciliter le dépôt de plainte et de donner à la victime davantage de possibilités de se faire entendre. Le signal donné au printemps était donc celui d'une meilleure prise en considération des victimes de violences conjugales, et il a été confirmé il y a quinze jours encore par le vote de la proposition de loi. Mais si à aucun moment les moyens ne suivent, si le nombre de juges aux affaires familiales n'est pas augmenté, ne serait-ce que dans la proportion relativement modeste prévue par ces amendements, c'est un contre-signal qui est ainsi envoyé, une véritable contre-politique, alors que nous étions tous d'accord pour prendre un nouvel élan. Je le regrette vraiment.
Le système de la carte judiciaire électoraliste est sans doute plus important !
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. Dimitri Houbron, rapporteur pour avis de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Je ne comptais pas prendre la parole, mais je vois que le débat se fige sur les juges aux affaires familiales.
Il faut peut-être rappeler que la question des violences conjugales ne repose pas sur l'ordonnance de protection et sur le travail des JAF, l'un des premiers acteurs judiciaires à y être confrontés étant le procureur.
Exclamations sur les bancs des groupes LR et GDR.
Mais si, mon cher collègue. Car c'est le parquetier qui a l'opportunité des poursuites et qui peut prendre des mesures coercitives à l'encontre de l'auteur des violences.
Nouvelles exclamations sur les mêmes bancs.
L'objectif de votre proposition de loi était louable, raison pour laquelle tous les collègues, y compris dans la majorité, ont voté en sa faveur : développer le recours à l'ordonnance de protection, un beau dispositif insuffisamment utilisé. Sur ce point, nous sommes d'accord, mais affirmer qu'il n'y a pas assez de JAF et que la question des violences conjugales ne repose que sur ce problème d'effectifs, c'est mettre en exergue un faux problème et cibler le débat sous un angle polémique qui n'a pas lieu d'être aujourd'hui.
Exclamations sur les bancs des groupes LR, GDR et FI.
Nous avons aussi déposé d'autres amendements sur d'autres sujets, monsieur le rapporteur pour avis !
La polémique, elle porte sur le fait que la loi ne sera pas appliquée !
Je rappelle à M. le député Bernalicis et à M. le député Savignat que la réforme ne sera pas appliquée à effectifs constants.
Évidemment puisqu'il y en aura moins, du moins là on ne vote pas convenablement !
Je le redis ici clairement : le budget de la justice me permet d'augmenter le nombre de magistrats dans les juridictions.
Il n'augmentera que dans les ressorts politiquement compatibles avec la majorité !
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Cela se ressent vraiment sur le terrain : les juridictions bénéficiant d'un nombre plus important de magistrats éprouvent moins de difficultés qu'auparavant. Le travail des juges aux affaires familiales se trouvera ainsi soulagé par le seul fait que les postes en vacance dans d'autres services auront été pourvus.
Par ailleurs, quand une organisation adaptée est mise en place, la réponse judiciaire peut être plus rapide. J'ai ainsi en tête l'exemple du tribunal de Créteil, plusieurs fois cité, y compris par M. Pradié, qui s'est organisé pour traiter dans l'urgence ces questions de violences conjugales. L'augmentation du nombre de magistrats et une organisation adaptée sont donc les deux facteurs qui nous permettront de répondre aux exigences de la loi.
Pour conclure, quand vous dites, monsieur le député Pradié, que vous vous en souviendrez, rassurez-vous : je m'en souviendrai tout autant que vous et je n'ai pas l'habitude de faire des promesses qui ne soient pas suivies d'effet.
Rires sur les bancs du groupe FI.
Vous promettiez une augmentation des crédits de 5 % par an il y a six mois !
Je verrai donc, dans le budget pour 2021, s'il est nécessaire d'augmenter le nombre de magistrats.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – M. Patrick Mignola applaudit également.
Ces amendements successifs portent tous sur le même sujet, les violences au sein des familles. Mais si vous les avez lus, monsieur le rapporteur pour avis, et pas simplement survolés, vous savez qu'il n'y est pas seulement question des JAF. Ici, il s'agit de la formation des magistrats.
En effet, la formation est l'un des rares domaines, au sein de la mission « Justice », pour lesquels les crédits sont en baisse. Or la formation de tous les magistrats à la question des violences conjugales constitue un sujet important. En préparant le texte de la proposition de loi, j'ai en effet pu constater que si, bien souvent, les gendarmes et les policiers ne sont pas parfaitement au fait des situations, c'est aussi, parfois, le cas des magistrats.
Quant aux juges aux affaires familiales, une attention particulière devra être portée à leur formation, car ils vont avoir entre leurs mains des outils nouveaux. On sait ainsi que dans plus de 80 % des cas – vous vous en souvenez sûrement, monsieur le rapporteur pour avis, en raison du degré d'attention dont vous avez fait preuve lors de l'examen de la proposition de loi – , les juges aux affaires familiales n'utilisent que le quart des compétences qui leur sont attribuées par la législation en vigueur. Ils nous ont dit bien souvent, lors des auditions, à quel point ils ignorent la plénitude des possibilités que leur offre la loi.
La proposition de loi a corrigé le problème, mais il faut aller plus loin en prévoyant de former ces magistrats, y compris s'agissant des procédures spécifiques et des délais à respecter. Il est donc proposé ici d'augmenter les crédits de formation pour pouvoir les consacrer plus particulièrement aux juges aux affaires familiales et aux procureurs de la République. En effet, et contrairement à ce que vous dites, monsieur le rapporteur pour avis, la voie pénale, c'est-à-dire celle du parquet, n'est pas la voie principale en matière de protection judiciaire des femmes, car dans un grand nombre de cas, elles ne déposent pas plainte – ou bien, si elles le font, il n'y est pas donné suite. Nous avons en outre constaté que la plupart du temps, les parquets ne s'associent pas à la procédure civile alors qu'ils pourraient le faire de droit. Il est donc nécessaire de former non seulement les juges aux affaires familiales mais aussi les magistrats du parquet qui vont eux aussi, quand notre proposition de loi sera définitivement adoptée, disposer de prérogatives nouvelles, notamment pour imposer, en cas de refus de l'intéressé, le port du bracelet antirapprochement ou l'obligation de soins.
Voilà pourquoi il semble de bon sens de veiller à ce que les crédits de formation ne baissent pas, mais au contraire augmentent, et qu'ils soient singulièrement dédiés à ceux qui auront demain à traduire concrètement, sur le terrain, la loi que nous aurons votée ici.
M. Raphaël Schellenberger applaudit.
Je vous propose de poursuivre l'appel de tous les amendements avant de donner la parole à M. le rapporteur spécial et à Mme la garde des sceaux. Vous avez défendu, monsieur Pradié, les amendements nos 663 et 662 . Vous avez la parole pour défendre l'amendement no 656 , que vous pouvez présenter communément, si vous en êtes d'accord, avec les amendements nos 654 et 653 .
Madame Bourguignon, je vois que vous semblez fâchée que nous souhaitions nous organiser avec méthode. Si tel est le cas, vous pouvez sortir boire une tisane et arrêter de râler.
Protestations sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.
Je vous en prie, chers collègues, calmez-vous ! Monsieur le député, je demanderai l'avis du rapporteur spécial ainsi que celui du Gouvernement sur les amendements nos 663 et 662 . En contrepartie, il faudra vous montrer plus rapide dans vos prises de parole. Je vous rappelle en effet que nous devons terminer l'examen des crédits de la mission « Justice » avant d'entamer une autre mission budgétaire ce soir. Je dois donc veiller à l'organisation des débats.
Nous discutons des violences faites aux femmes : c'est une question importante !
Ces deux amendements n'ont pas fait l'objet de discussions en commission des finances. Je m'exprimerai donc à titre personnel.
La question de la formation est effectivement centrale et mérite d'être posée. Si nous considérons que la lutte contre les violences faites aux femmes doit constituer une préoccupation majeure, notamment pour le ministère de la justice, cela doit se traduire dans les faits. Pour ma part, je rejoins mon collègue Pradié. J'ai d'ailleurs cosigné ces amendements, considérant que le sujet était d'importance, et que l'on ne pouvait pas, dans cet hémicycle, prendre des décisions qui ne seraient pas suivies des moyens budgétaires correspondants.
Il est donc nécessaire de savoir comment ces moyens seront fléchés. Les deux amendements diffèrent par les montants mis en jeu : l'amendement no 663 vise à consacrer un budget de 15 millions d'euros à la formation, là où l'amendement no 662 constitue un amendement de repli, puisqu'il tend à n'y dédier que la moitié de cette somme dans le budget pour 2020.
J'émets un avis de sagesse sur ces deux amendements, et j'estime qu'il importe que le Gouvernement prenne position sur cette question.
La formation est une question clef : nous nous accordons tous sur ce point. C'est la raison pour laquelle des évolutions importantes sont apportées en la matière, depuis plusieurs mois, en lien avec l'École nationale de la magistrature – l'ENM.
S'agissant d'abord de la formation initiale, de nombreuses actions spécifiques sont programmées, notamment concernant l'ordonnance de protection. Ces formations sont obligatoires pour tous les auditeurs de justice, qui les suivent donc de manière systématique. Au-delà, lorsque les auditeurs se spécialisent comme juge aux affaires familiales, comme substitut du procureur de la République – c'est la question que vous posiez – ou comme juge d'application des peines, ils reçoivent un complément de formation sur ce sujet. Nous tentons donc réellement de répondre à votre demande, d'abord de manière générale, puis, lorsque les magistrats choisissent les fonctions qu'ils auront à assumer, de manière spécifique.
Pour ce qui est de la formation continue, nous avons développé, depuis le mois d'octobre, un vaste plan de formation déconcentrée, avec de kits pédagogiques adaptés – d'une qualité remarquable – et des fiches « réflexes » précisant pour chaque magistrat les actions à accomplir. Ces modules sont, à ma connaissance, extrêmement appréciés.
Enfin, nous mettons en place des modules de formation continue transversaux à plusieurs corps de la fonction publique – je songe notamment aux magistrats et aux policiers. Ce point me semble également important.
Vous avez par ailleurs évoqué la question budgétaire. Le budget de la formation est fixé à 155 millions d'euros. Il est vrai qu'il apparaît en baisse en raison d'ajustements techniques, mais, dès qu'un besoin est identifié, la direction des services judiciaires délègue bien évidemment les crédits nécessaires à l'ENM. Il n'y a donc pas de difficultés budgétaires concernant la formation.
Je conclurai, monsieur Pradié, en vous disant que, moi non plus, je n'aime pas la tisane.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Vous n'aimez surtout pas les circonscriptions qui ne votent pas pour La République en marche !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Mes chers collègues, monsieur Schellenberger, s'il vous plaît !
La parole est à M. Ugo Bernalicis.
Il paraît que la camomille a certaines vertus calmantes : je la recommande vivement ! Je comprends que certains collègues, dont la présence a été exigée spécifiquement sur ce thème afin que leur groupe soit majoritaire, puissent trouver ce débat pénible, mais ils devront le subir jusqu'au bout.
Reprenons : vous annoncez 100 créations de postes de magistrats pour l'année 2020 – nous sommes bien d'accord sur ce point, madame la garde des sceaux. Vous nous avez présenté, en commission des lois, la ventilation suivante : les 100 postes de magistrats créés incluent soixante-dix juges pour enfants et trente magistrats spécialisés dans la lutte contre la délinquance financière – soit aucun juge aux affaires familiales. Il n'est pas besoin d'avoir fait Saint-Cyr ou des études de comptabilité pour comprendre ce raisonnement purement mathématique.
Vous affirmez qu'en allouant des renforts aux juges pour enfants et à la lutte contre la délinquance financière, par le jeu d'un mécanisme de réorganisation interne, les juges aux affaires familiales auront moins de dossiers à traiter et pourront se concentrer sur les ordonnances de protection. Qui pensez-vous convaincre avec de tels arguments ? Rendez-vous au tribunal de grande instance de Lille pour tenter d'expliquer aux juges des affaires familiales qu'ils auront moins de travail à l'avenir ! Je vous mets au défi de leur faire cette démonstration. Personnellement, je n'en suis pas capable.
Je pourrais, il est vrai, contester le raisonnement de mes collègues siégeant sur les bancs de la droite selon lequel il faudra bien « trouver le pognon » quelque part. Je pense par exemple qu'on pourrait le trouver en ne construisant pas 7 000 places de prison supplémentaires – à moins qu'ils en souhaitent 6 000 ou 5 000, peu importe.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LR.
Sur ce point, nous serons en désaccord. En revanche, nous nous rejoignons pour constater que les moyens sont insuffisants pour atteindre les objectifs affichés.
Quand à l'argument de l'ajustement technique représentant 5 % du budget de la formation, on se pince pour le croire ! Des ajustements techniques conduisant à une baisse de 5 %, on s'en passerait !
Nous ne sommes pas ici pour parler de tisane, mais des violences psychologiques et physiques faites aux femmes.
« Très bien ! sur les bancs du groupe LR. – Applaudissement sur plusieurs bancs des groupes LaREM et SOC.
Nous avons adopté, en 2010, une grande loi contre toutes les violences faites aux femmes, et avons constaté que, selon les départements et les situations, cette loi ne s'appliquait pas de la même façon, soit pour des raisons budgétaires, soit pour des raisons de formation.
Nous avons voté, quasiment à l'unanimité, en faveur de la proposition de loi de notre collègue Aurélien Pradié. Il me semble normal, lorsque nous discutons du budget de la nation, que nous donnions à voir notre volonté de concrétiser cette loi contre la violence faite aux femmes dans les moyens budgétaires dédiés à la formation et à la création de postes. Si nous ne le faisons pas, nous perdrons toute crédibilité.
Nous avons créé, avec cette loi, un espoir parmi les femmes et les associations qui luttent au quotidien. Si, à travers le vote de ce budget, nous leur disons : « circulez, il n'y a rien à voir », nous découragerons ces femmes de porter plainte et d'obtenir justice. Je vous demande donc d'écouter les arguments de notre collègue Aurélien Pradié et de voter en faveur de ces amendements.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LR, UDI, SOC et FI.
Le temps de quelques heures de débat dans cet hémicycle, nous avons, madame la garde des sceaux, appris à nous respecter mutuellement.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Vous savez, sur l'échelle des insultes, je ne crois pas que la tisane se classe dans la plus haute catégorie…
Peut-être, mais c'était une remarque sexiste ! Vous n'auriez pas parlé ainsi à un homme !
Je veux dire, madame Bourguignon, que nous avons passé des heures à examiner une proposition de loi dont nous savions – je sais, madame la garde des sceaux, que vous ne l'avez jamais ignoré – qu'elle nécessiterait des moyens complémentaires pour être mise en application.
Nous avons débattu d'une série d'amendements portant sur l'augmentation du nombre de juges aux affaires familiales. Ce sujet sera fondamental, tôt ou tard. Il devrait à mon sens être traité dès cette année, mais s'il doit ne l'être que l'année prochaine, soit.
Nous en sommes à maintenant à veiller à ce que les magistrats déjà en poste bénéficient d'une formation spécifique et renforcée. Il s'agit donc, par ces amendements, de corriger la baisse de crédits de formation, qui n'est pas un ajustement technique, madame la garde des sceaux, puisqu'elle représente plus de 5 % du budget !
Nous avons un problème. Il tient à l'incohérence totale des discours qui sont tenus. J'entends ce que vous dites, madame la garde des sceaux – le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse l'affirme lui aussi souvent, sur d'autres sujets : en cours d'exercice budgétaire, vous pourrez mobiliser les crédits supplémentaires dont vous auriez besoin. Mais je vous demande de mobiliser dès à présent des crédits supplémentaires de formation, même si vous ne le faites pas à la hauteur des montants évoqués dans mes amendements, car nous savons que nous en aurons besoin.
Quand bien même ils ne seraient pas immédiatement nécessaires, une telle décision serait un signal : elle répondrait à un souci de cohérence, et elle constituerait ce second geste que nous devons faire, après celui que nous avons esquissé en adoptant la proposition de loi. Ce débat n'a rien de délirant ou de démesuré : il est simplement raisonnable.
Voilà pourquoi je souhaite que nous examinions les amendements de manière disjointe, car le sujet le nécessite et l'impose.
L'amendement no 663 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 107
Majorité absolue 54
Pour l'adoption 39
Contre 68
L'amendement no 662 n'est pas adopté.
Nous en venons à un sujet plus essentiel encore : celui du financement des bracelets antirapprochement. Nous avons déjà eu ce débat dans l'hémicycle et en commission. J'ai consulté les déclarations faites par les uns et les autres, et notamment par l'exécutif, pour tenter de comprendre quel était son engagement financier précis sur ce sujet. Il se trouve que les chiffres ne concordent pas exactement. La secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes parle de 7 millions d'euros, le Premier ministre évoque 5 millions d'euros, et vous avez avancé, madame la garde des sceaux, le chiffre de 5,5 millions d'euros. Ayant plutôt tendance à croire en la rigueur de vos calculs qu'en ceux de la secrétaire d'État, je me baserai sur un montant de 5,5 millions d'euros à mobiliser.
La proposition de loi visant à agir contre les violences faites aux femmes sera examinée par le Sénat le 6 novembre et a toutes les chances d'entrer en application en début d'année prochaine. Il faudra donc, dès cette date, mobiliser des moyens pour acheter des bracelets, mais également pour déployer le dispositif, et notamment s'équiper en logiciels et développer les techniques d'ingénierie nécessaires.
Je vous ai donc interrogée très précisément en commission des lois, madame la garde des sceaux, sur la localisation précise de ces 5,5 millions d'euros dans le budget. Vous vous étiez engagée à me fournir une réponse complète. Je ne l'ai toujours pas reçue. Je renouvelle donc ma demande en séance, car votre engagement, que je ne remets pas en doute, ne suffit pas à éclairer la représentation nationale : le sujet est trop important. Nous devons savoir où sont précisément budgétés les 5,5 millions d'euros que vous entendez mobiliser.
Ma seconde question porte sur la ventilation de cette somme entre l'acquisition des bracelets eux-mêmes et l'utilisation des techniques d'ingénierie nécessaires.
Après vous avoir interrogée en commission et après l'avoir fait à nouveau ici, j'ose espérer que j'obtiendrai une réponse, non par obsession de vouloir vous piéger, mais parce qu'un engagement pris devant quelque député que ce soit doit être tenu.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR. – M. Jean-Louis Bricout applaudit également.
Sur l'amendement no 124 , je suis saisie par le groupe UDI, Agir et indépendants d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?
Comme vient de l'indiquer M. Pradié, ils posent la question de l'application du dispositif des bracelets antirapprochement, destinés à renforcer la protection des victimes de violences conjugales.
Vous avez indiqué, madame la garde des sceaux, que vous souhaitiez rendre très rapidement ces bracelets disponibles, mais on ne trouve aucune information à ce propos dans le bleu budgétaire. Ces amendements sont donc légitimes, car ils posent une vraie question : lorsqu'un dispositif est adopté et que, de surcroît, le Gouvernement a fait des annonces au sujet de son application, il convient de savoir comment il sera financé. J'émets donc évidemment, sur ces trois amendements, un avis favorable.
Le dispositif BAR, ou bracelet antirapprochement, sera mis en oeuvre en 2005. Je m'y suis engagée devant vous et nous en avons discuté longuement à l'occasion de l'examen de la proposition de loi.
Le déploiement de ce dispositif sera paramétré, dans une première mise en oeuvre, sur la base de 1 000 mesures pour le territoire national, comme j'ai déjà eu l'occasion de l'expliquer devant vous. Le dispositif sera développé et géré par l'administration pénitentiaire, déjà chargée du placement des personnes sous surveillance électronique mobile, dispositif très proche de celui dont il est ici question.
Au moment où je parle, monsieur Pradié, nous sommes en train de définir très précisément le cahier des charges et les modalités d'application du dispositif par l'administration pénitentiaire. Le texte dont vous êtes à l'initiative n'ayant pas été définitivement adopté, l'administration pénitentiaire travaille à la rédaction des marchés en avance de phase. C'est pourquoi il m'est très difficile de vous donner un chiffre absolument certain, même si j'estime en effet à environ 5,5 millions d'euros le coût de ce déploiement.
Ce coût sera pris en charge par le programme 107, « Administration pénitentiaire », et non par le programme 101, qui finance les téléphones grave danger.
Dans le cadre des mouvements de fin de gestion de l'exercice budgétaire 2019, nous avons décidé de reporter 5 millions d'euros de crédits sur l'exercice 2020, où cette enveloppe sera consacrée au bracelet antirapprochement et uniquement à cela. Vous pourrez en trouver la traduction dans le budget lorsque nous aurons fini l'exercice 2020.
Pour récapituler, nous évaluons à 5,5 millions d'euros la mise en place de ce dispositif pour 1 000 mesures. Il sera financé sur le programme 107 grâce à des reports de crédits pour 2019. Voilà pourquoi, à ce stade, j'émets un avis défavorable sur ces amendements.
Si je comprends bien, vous n'allez pas faire d'avenant au marché actuel et allez passer un nouveau marché, sur le programme 101, pour un dispositif qui existe déjà…
… et qui, concrètement, dans le monde réel, sera géré par l'administration pénitentiaire.
Ce n'est pas clair. Où sont les 5 millions d'euros ? Pourquoi n'en trouve-t-on pas de trace écrite dans le projet annuel de performance, qui détaille pourtant le coût précis de toutes sortes d'actions spécifiques ? J'ose espérer que sa rédaction a tenu compte des discussions parlementaires entourant la proposition de loi de M. Pradié.
Je n'interviendrai pas sur le fond, mais plutôt sur la forme : je trouve particulièrement désolant que M. le rapporteur spécial nous donne trop souvent son avis personnel, et non pas celui de la commission.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
En effet, alors que, sur plusieurs amendements, l'avis de la commission des finances était défavorable, il a exprimé un avis inverse. Je trouve dommage qu'il ne se montre pas plus honnête sur ce point.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Vives protestations sur les bancs des groupe LR et GDR.
Cher collègue, j'ai clairement indiqué, à propos de ces trois amendements, que je n'émettais un avis favorable qu'à titre personnel. Ils n'ont en effet pas été examinés par la commission des finances.
Non. Celui qui a été examiné est le no 124, que nous n'avons pas encore évoqué. Lorsque vous remettez en cause un rapporteur spécial, soyez au moins sûr de vos informations !
Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je confirme que ces amendements ne sont pas passés devant la commission, puisque je ne les ai déposés que pour la séance publique. Si vous le permettez, monsieur le rapporteur pour avis, revenons au fond, qui vous passionnera certainement plus que la forme.
Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse. Il n'y a aucune suspicion dans mon propos, mais je constate qu'elle contredit les éléments que vous m'avez communiqués en commission, lorsque, interrogée deux fois sur le même sujet, vous m'avez répondu que ces 5 millions ne seraient pris non sur le programme « Administration pénitentiaire », mais sur le programme « Justice judiciaire ».
Je tiens mes notes à votre disposition, et vos collaborateurs, qui ont négligé de me transmettre les informations que je réclamais, auront sûrement le souvenir de celles qu'ils vous ont communiquées en commission et que vous nous avez livrées.
La question est trop grave pour que nous puissions demeurer dans l'imprécision. À quels types de reports allez-vous recourir pour financer le déploiement des bracelets antirapprochement ?
Encore un détail : 5 millions d'euros, c'est approximativement, en effet, la somme nécessaire pour lancer le marché d'acquisition du matériel pour 1 000 mesures. En revanche, cela ne permettra pas de couvrir le développement des applications informatiques dont l'administration pénitentiaire va devoir se munir. Il y aura donc un trou dans le financement.
Je vous réclame donc, madame la garde des sceaux, un engagement encore plus précis. Il ne s'agit pas que de nous rassurer, moi et la représentation nationale, mais de conforter celles et ceux qui nous écoutent et qui espèrent que la proposition de loi que nous avons adoptée se traduira par des actes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
À ce moment, M. le rapporteur spécial et M. le rapporteur pour avis échangent de vifs propos au banc des commissions.
Monsieur le rapporteur pour avis, vous n'avez pas à me mettre en cause de la sorte. C'est inacceptable ! Quand on se trompe, on se tait !
La parole est à Mme la présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Madame la présidente, je demande une suspension de séance de cinq minutes pour permettre à chacun de reprendre ses esprits. Le climat est absolument insupportable, notamment entre les deux rapporteurs.
Vives protestations sur les bancs des groupe LR et LT.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt-cinq, est reprise à vingt-deux heures trente.
La séance est reprise.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 124 .
… car c'est bien mon amendement qui a été déposé et débattu en commission, et qui a fait l'objet du malheureux hiatus, désormais derrière nous, entre les deux rapporteurs. La question est cependant la même que celle qu'a très bien évoquée M. Pradié : il s'agit d'isoler, dans le projet de loi de finances pour 2020, des crédits destinés à la mise en place des bracelets antirapprochement.
Ce matin, Mme la secrétaire d'État chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes a assisté, comme vous le savez, madame la garde des sceaux, à la remise des conclusions des onze groupes de travail oeuvrant dans le cadre du Grenelle des violences conjugales. Les 70 à 80 propositions qui y sont formulées feront l'objet d'une annonce globale par le Premier ministre, sans doute le 25 novembre prochain. Plusieurs d'entre elles nécessiteront l'engagement de crédits encore non identifiés, en vue d'une application à partir de 2020.
Même si je peux le comprendre, je ne vois pas l'intérêt d'attendre des reports de crédits alors que nous pourrions, en votant ces amendements, nous doter dès à présent de la capacité financière nécessaire – d'autant que d'autres mesures potentiellement budgétivores apparaissent tout aussi indispensable – , exprimant ainsi la même unanimité que celle dont nous avons fait preuve en adoptant la proposition de loi de Mme Pradié et que nous manifesterons, j'en suis sûr, au moment de voter les dispositions inspirées du Grenelle.
Une telle confusion envoie un message négatif ; c'est ce qu'a voulu dire Mme Buffet tout à l'heure, et je suis sensible à cet argument. Face à un grave problème de société, nous avons collectivement envoyé un message de solidarité nationale – et je suis fier d'y avoir participé. Le Premier ministre a engagé, avec l'ensemble du Gouvernement et des parlementaires, des chantiers importants. Le signal contradictoire que nous envoyons ce soir, en se contentant d'envisager des crédits qui ne figurent pas vraiment dans le projet de budget, nuit à la qualité du message que nous avons envoyé au préalable. J'insiste donc simplement pour que ces 5,5 millions d'euros – puisque telle était votre estimation – soient réellement disponibles.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI-Agir sur plusieurs bancs des groupes FI et GDR.
Que les choses soient claires, qu'il n'y ait pas la moindre ambiguïté : je m'exprime évidemment en tant que rapporteur spécial de la commission des finances. Il en est toujours ainsi dans la mesure où, lorsqu'on parle d'un budget, la commission au fond qui s'exprime est la commission des finances.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR, LT et FI.
Si l'amendement a été examiné par la commission, je donne l'avis de celle-ci ; dans le cas contraire, je donne un avis personnel – et je prends systématiquement le soin de le préciser.
Si un collègue considère qu'une erreur est commise, il suffit de le dire – personne n'est infaillible. Mais attaquer ex abrupto quelqu'un qui fait son travail consciencieusement, ce n'est pas très sérieux. C'est pourquoi je me permets ici de rappeler nos règles, qui sont claires.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Ceci étant dit, j'en viens au fond. La commission des finances a examiné l'amendement de M. Dunoyer – comme il l'a d'ailleurs rappelé lui-même. J'avais insisté à cette occasion sur la légitimité de son propos et indiqué que j'émettais pour ma part un avis de sagesse, mais la commission l'a finalement repoussé.
J'émets, comme la commission, un avis défavorable. Je ne vois pas du tout en quoi nous envoyons un signal négatif. Nous envoyons au contraire un signal absolument positif puisque la volonté de mettre en place le bracelet antirapprochement émane non seulement des députés mais aussi du ministère de la justice, qui en assure le financement à hauteur de 5,5 millions. Je le dis clairement devant vous, en précisant que cette somme sera prélevée sur le programme 107. Nous recruterons du personnel à cet effet et prendrons en charge les dépenses nécessaires, ce dont vous trouverez évidemment la trace dans l'exécution du budget. L'engagement pour le bracelet antirapprochement est donc fort et ferme.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Ce dont nous discutons depuis tout à l'heure, c'est de notre capacité à faire appliquer une loi avec la même unanimité que celle dont nous avons fait preuve au moment de la voter – autrement dit, à passer de l'intention aux actes. C'est important pour la crédibilité de la représentation nationale.
Lorsque nous avons débattu des dispositions de la proposition de loi relatives au bracelet antirapprochement, tout le monde s'est référé à l'exemple espagnol. Dans ce pays plus petit que le nôtre, le gouvernement avait déboursé, en deux ans, 15 millions d'euros pour appliquer cette mesure. Et tout le monde s'est félicité du succès que l'Espagne a rencontré en matière de lutte contre les violences faites aux femmes.
Avec cet amendement, il s'agit de prendre des mesures à la hauteur des ambitions de la proposition de loi que nous avons votée, en prévoyant dès 2020, mais aussi pour les années suivantes, des moyens bien identifiés. La majorité ayant refusé de le faire, il nous semblerait bon qu'au minimum, le bracelet antirapprochement fasse l'objet d'un engagement financier visible.
Madame la ministre, lors de l'audition en commission, vous avez dit, à propos du montant des crédits consacrés aux actions de lutte contre les violences faites aux femmes en 2019 : « Il était sans doute moindre. Je ne suis pas en mesure de vous le dire, mais je m'engage à vous donner une réponse précise sur ce point. Je précise que le dispositif Téléphone grave danger relève du programme 101. » Jusqu'ici, tout va bien. « Quant au bracelet anti-rapprochement, qui sera financé à hauteur de 5 millions, il relève à la fois du programme 101 et du programme consacré au développement numérique du ministère », c'est-à-dire le programme 310. Jusqu'à présent, on a parlé du programme 107. J'aimerais donc bien savoir comment, sur cette question, on peut errer d'une semaine à l'autre du programme 101 au programme 107 en passant par le programme 310 !
À titre personnel – et mon groupe fera sans doute de même – je n'attendrai pas la loi de règlement, en mars 2021, pour savoir si vous avez correctement exécuté le budget 2020 et si vous avez bien affecté 5 millions à cette mesure. Nous aimerions entendre des engagements plus précis et plus concrets sur ce point. Sachant que, comme vous l'avez dit, il existe déjà un marché concernant le placement sous surveillance électronique mobile, allez-vous conclure un avenant ? Créer un nouveau marché ? Nous aimerions obtenir des réponses concrètes.
Madame la ministre, ne laissez pas le moindre doute s'installer sur ce sujet. Je le dis sans volonté de vous piéger mais avec celle de comprendre, tant il existe des écarts entre les annonces de la secrétaire d'État, vos propos en commission et vos propos ici même. Vous nous dites aujourd'hui clairement que le montant de 5 millions sur lequel vous vous êtes engagée ne figurera pas dans le projet de budget puisque ce sont des crédits de report – dont personne aujourd'hui ne connaît l'ampleur – qui alimenteront éventuellement ce dispositif absolument essentiel.
Votre réponse n'est à la hauteur de la situation ni d'un point de vue politique ni d'un point de vue budgétaire. J'ai regardé attentivement quels avaient été les reports dans le programme 107 entre 2019 et 2020 : il n'y a eu aucun, puisqu'il a manqué 450 millions d'euros entre les autorisations d'engagement et les crédits de paiement.
Devant une telle somme d'imprécisions, nous sommes conduits, vous le comprendrez, à vous demander solennellement d'inscrire dans votre projet de budget la ligne nécessaire. Le montant n'est tout de même pas colossal : 5 millions d'euros, pour financer une mesure voulue par la représentation nationale et que vous vous êtes engagée à appliquer.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 127
Nombre de suffrages exprimés 127
Majorité absolue 64
Pour l'adoption 49
Contre 78
L'amendement no 124 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 125
Majorité absolue 63
Pour l'adoption 47
Contre 78
L'amendement no 653 n'est pas adopté.
Madame la ministre, vous avez indiqué il y a quelques instants que les 5 millions d'euros serviraient à la fois au financement du matériel et au recrutement du personnel chargé de son emploi. Là, nous ne sommes plus d'accord. Si on établit une comparaison avec l'Espagne, et si vous vous fixez comme objectif la mise à disposition de mille bracelets, la somme de 5 millions ne suffira pas à couvrir la procédure de lancement du marché permettant l'achat de ces bracelets et le recrutement du personnel chargé de déployer le dispositif – à moins que certains, au sein du personnel de vos administrations, restent aujourd'hui inoccupés…
Ces deux amendements visent donc à appeler votre attention sur la nécessité d'inscrire les crédits nécessaires non seulement pour acquérir les bracelets, mais aussi pour développer les outils techniques indispensables à leur usage.
Me référant aux propos tenus tout à l'heure par M. Ugo Bernalicis, je précise que ces amendements sont très directement inspirés de ce que vous nous avez dit en commission. Vous aviez alors indiqué qu'une partie des crédits devait être réattribuée aux dispositifs informatiques du Gouvernement. Depuis tout à l'heure, vous évoquez le programme « Administration pénitentiaire » mais sans nous parler de crédits supplémentaires pour l'action informatique ministérielle du programme 310. Là encore, il existe un écart assez considérable entre les propos que vous avez tenus en commission et ce que vous venez de dire. Ces amendements que nous proposons vous permettront de mettre en conformité vos paroles et vos actes.
Ces amendements n'ayant pas été débattus en commission des finances, je m'exprimerai à titre personnel. Les arguments avancés ont du sens. En outre, les sommes envisagées sont tout à fait raisonnables. Il faut désormais se préoccuper de l'application de la mesure, c'est la raison pour laquelle j'émets un avis favorable.
Se référant à l'exemple espagnol, M. Peu parlait d'une somme de 15 millions d'euros en deux ans, ce qui correspond à environ 7 millions par an. Je vous propose un montant de 5 millions d'euros sur une première année. Il faut être clair sur ce point, monsieur Pradié : comme je vous l'ai dit, ce montant doit être affiné puisque le dispositif législatif n'est pas voté, que le cahier des charges est en cours de rédaction et que nous allons bientôt passer les marchés.
Pour répondre à M. Bernalicis, les bracelets antirapprochement relèveront du programme 107, « Administration pénitentiaire », qui finance déjà les placements sous surveillance électronique mobile. Nous élaborerons donc très vraisemblablement un avenant pour modifier les marchés actuels.
Le dispositif est presque prêt, mais il demande à être affiné. Je m'engage absolument à y consacrer 5,5 millions d'euros dans le budget de 2020 : je ne puis vous dire mieux à ce stade, pour les raisons que je viens d'exposer, à savoir une loi non adoptée, des marchés qui ne sont pas encore passés et – j'aurais dû commencer par là – un cahier des charges qu'il faut encore préciser. Rien de plus logique, d'ailleurs, puisque nous coconstruisons le dispositif. Je le répète : je m'engage à y consacrer 5,5 millions.
Cette somme permettra assurément l'acquisition du matériel, et nous financerons le recrutement de 1 000 agents de surveillance de l'administration pénitentiaire, lesquels seront spécialement formés aux dispositions dont nous parlons.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Vous pouvez mieux faire, madame la ministre, en inscrivant, dans le cadre de cette discussion budgétaire, ces 5 millions d'euros dans le budget de la nation. Pardon d'y insister une dernière fois : je n'y vois toujours pas assez clair, non parce que je remettrais votre parole en cause, mais parce qu'il faut bien que nous nous y retrouvions tous.
Tout à l'heure, vous avez parlé de personnels dévolus à la surveillance ; je vous parlais, moi, de personnels nécessaires à la mise en oeuvre du dispositif : non seulement les bracelets, c'est-à-dire l'équipement installé sur les compagnons violents, mais aussi les logiciels d'alerte, partant toute l'ingénierie nécessaire pour savoir où remonte l'information. C'est là une pratique très différente de celle à laquelle la justice est habituée avec le bracelet électronique : elle suppose, ou un prestataire extérieur, ou le développement d'une capacité interne.
De ce point de vue, 5,5 millions d'euros ne suffiront jamais à l'acquisition des bracelets, au déploiement des dispositifs d'ingénierie et au recrutement du personnel de surveillance. Jamais de la vie ! Les quelque 7 millions d'euros que l'Espagne a consacrés au dispositif couvraient les 1 000 mesures d'acquisition des dispositifs et le déploiement de l'ingénierie, en interne ou en provenance des prestataires. Il manque donc 2,5 millions !
Les fameux reports dont vous parliez, si l'on compare l'exercice budgétaire de cette année avec celui de l'an dernier, on ne les voit presque pas : nulle trace, même, d'un début d'engagement des 5 millions d'euros que je réclame ! Vous comprenez donc que, ne sachant où ces reports interviendront, je puisse m'inquiéter.
Vous comprenez aussi, je suppose, que la représentation nationale ne puisse se satisfaire, lorsqu'elle vote un budget, d'engagements sur d'hypothétiques reports, quelle que soit par ailleurs votre bonne volonté : nous voulons nous prononcer sur des crédits clairement identifiés. Je ne comprends donc toujours pas pourquoi vous n'accédez pas à ma demande, qui me semble d'une banalité et d'une évidence déconcertantes.
La parole est à M. Aurélien Pradié, pour soutenir l'amendement no 664 .
C'est le dernier d'une longue série. Parmi les dispositifs que nous avons renforcés à travers la proposition de loi figure celui qui permet au juge aux affaires familiales de proposer un accompagnement sanitaire et psychologique à l'auteur des violences : sanitaire, parce que l'on sait que, dans 12 % des cas, les auteurs de violences sont sujets à des addictions à l'égard de l'alcool ou de stupéfiants divers et variés ; psychologique, parce que l'on sait aussi qu'il faut intervenir, dès le départ, sur l'auteur des violences autant que sur les victimes.
Si l'auteur des violences refuse les soins, c'est le juge pénal qui pourra les lui imposer ; auquel cas on entre dans le schéma de l'obligation de soins. Or les moyens dévolus à cette obligation, fondus dans un programme assez vaste, n'augmentent pas par rapport à l'an dernier. Le présent amendement vise donc à les rehausser de 12 %, notamment pour assurer une traduction budgétaire des objectifs fixés par la proposition de loi.
Là encore, je ne fais que me caler sur ce dernier texte, que nous avons adopté à l'unanimité. Il n'y a donc pas sujet à polémique : lorsque notre assemblée vote des dispositions législatives, la moindre des choses est de voter aussi, quelques jours après qu'elle l'eut fait, les moyens budgétaires qui leur correspondent.
Cet amendement n'ayant pas non plus été débattu en commission, je m'exprimerai, une fois encore, à titre personnel.
Très clairement, l'amendement de notre collègue Pradié est en cohérence avec la proposition de loi adoptée par notre assemblée il y a deux semaines, la somme considérée, 432 000 euros, ne posant par ailleurs guère de problèmes budgétaires ; c'est pourquoi j'y suis personnellement favorable.
Il est certain que des obligations de soins peuvent être prononcées dans des cadres différents, notamment lors d'un suivi sociojudiciaire. Pour financer ces mesures, nous disposons d'une enveloppe, suffisamment large, dévolue aux frais de justice. Je ne vois donc pas pourquoi il nous faudrait dissocier ces frais en les inscrivant sur des lignes différentes : ils sont tous inclus dans le programme dédié, lequel répond par ailleurs aux obligations visées par votre proposition de loi, monsieur Pradié. Avis défavorable.
L'amendement no 664 n'est pas adopté.
La parole est à M. Philippe Dunoyer, pour soutenir l'amendement no 125 .
Cet amendement s'inscrit dans le sillage d'un de ceux que j'avais déposés sur la proposition de loi de M. Pradié : il visait tout simplement à empêcher l'auteur présumé de violences de faire traîner la délivrance d'une ordonnance de protection, par exemple en n'allant pas retirer sa convocation à l'audience à laquelle il est prié d'assister par le juge aux affaires familiales. Celui-ci, en effet, dispose de moyens divers pour adresser cette convocation – voie administrative, lettre recommandée avec accusé de réception que l'on n'est pas obligé d'aller retirer et, parfois, huissier.
L'amendement vise donc à permettre au JAF de convoquer systématiquement à l'audience, par voie d'huissier, l'auteur présumé des violences, en vue de délivrer l'ordonnance de protection.
Le montant de cette mesure, tout à fait pharaonique, s'élève à 50 000 euros, à rapporter aux 9,4 milliards de la mission et aux 500 millions du programme concerné. Cette mesure produirait des effets bien plus grands que ne le laisse supposer son coût, somme toute modique, puisqu'elle permettrait d'éviter de trop grandes pertes de temps dans des situations qui, sans forcément aller jusqu'aux drames que nous avons tous en tête, augmentent la pression sur les victimes et leurs enfants, et nuisent à la bonne administration de la justice.
Cet amendement vise à réduire les délais nécessaires à la remise des convocations adressées par le juge aux affaires familiales en vue de l'organisation d'une audience préalable à la délivrance d'une ordonnance de protection pour une personne affirmant être victime de violences.
À cette fin, l'amendement tend à financer la remise de cette convocation par voie d'huissier aux auteurs présumés de violences. Le financement de cette mesure donnerait lieu, comme M. Dunoyer vient de le préciser, à l'abondement des crédits du programme 166 par une somme de 50 000 euros, transférée depuis les crédits du programme 310.
La commission des finances a cru bon de repousser cet amendement. Toutefois, à titre personnel, j'y ai souscrit car il concerne un vrai sujet et n'a guère d'impact budgétaire : c'est plutôt un amendement d'appel à l'adresse du Gouvernement, pour lui demander de traiter le problème, comme l'ont souligné plusieurs collègues en commission, et comme vient encore de le rappeler M. Dunoyer.
Rapporteur spécial de la commission des finances, je me permets d'interpeller le Gouvernement à mon tour, car nous n'avons pas bien compris les motifs du rejet de l'amendement en commission : son adoption nous aurait permis de demander au Gouvernement qu'il nous explique comment améliorer les choses.
M. le rapporteur spécial a raison, la question n'est pas budgétaire. Mon avis défavorable tient simplement à la nécessité de conserver des voies de convocation différentes.
Tout d'abord, monsieur Dunoyer, votre proposition ne concerne que les saisies de la juridiction par voie de requête, lesquelles ne représentent que six cas sur dix. Dans quatre cas sur dix, en effet, la convocation se fait déjà sous la forme d'une assignation par voie d'huissier – et dès lors, la question ne se pose plus.
Il est selon nous nécessaire de maintenir la convocation par requête, car c'est la solution la plus simple pour le justiciable, qui peut remplir le document avant de le déposer au greffe. Certaines juridictions, comme celle de Créteil, passent de manière assez systématique par voie d'huissier ; d'où l'intérêt de votre amendement.
Toutefois, rendre obligatoire la convocation par huissier exclurait de facto la possibilité d'une convocation par voie administrative. Or cette voie permet aux services d'enquête de remettre la convocation en mains propres ; utilisée en cas de danger imminent pour la sécurité de la personne concernée, elle est aussi très rapide puisque la convocation peut alors être délivrée dans la journée.
Il convient donc de réfléchir un peu plus avant à la proposition que vous faites : si elle vise à la rapidité, j'en conviens, elle ne doit pas, à mon sens, mettre fin à la convocation par voie administrative. À ce stade, l'avis est donc défavorable.
Pardonnez-moi, madame la ministre, mais je n'ai pas bien compris votre explication. La saisine peut se faire par requête ou par assignation, c'est entendu ; mais l'amendement, si je l'ai bien lu, vise la convocation de l'auteur présumé des faits. À cette fin, il prévoit une prise en charge par le budget de la justice, pour un montant epsilonesque. Cela paraît assez logique puisque, aux termes de la proposition de loi que nous avons adoptée, l'ordonnance de protection doit être délivrée dans un délai de six jours. Il est évident que, dans ce délai, la victime ne pourra obtenir ni une décision du bureau d'aide juridictionnelle, ni le concours d'un huissier, pour obliger l'auteur des faits à répondre à sa convocation.
La convocation peut être faite par voie administrative, j'entends bien ; mais quand tel n'est pas le cas, pourquoi se priver de la possibilité ici envisagée, laquelle, en rendant le système plus efficace et plus rapide, permettrait du même coup de soulager la victime ? Cette mesure me semble relever du bon sens ; elle rendrait tout simplement efficientes les dispositions que nous avons récemment votées.
Merci pour vos explications, madame la garde des sceaux. Lors de l'examen de la proposition de loi, l'un de mes amendements avait été rejeté au motif qu'il grevait le budget. J'ai donc attendu le projet de loi de finances pour proposer cet abondement de 50 000 euros, en le soutenant par d'autres arguments, qui tiennent davantage à des motifs juridiques ou d'organisation.
Puisque nous n'avons pas modifié le code civil en la matière, les différentes voies de convocation, je le rappelle, subsistent. La mesure que je propose ne serait qu'une liberté supplémentaire offerte au juge en fonction des situations – et assortie des moyens budgétaires correspondants – , l'enveloppe de 50 000 euros représentant, selon des estimations qu'il nous faut affiner, de 2 000 à 2 200 convocations par an.
Rien n'interdit au juge d'utiliser, en fonction des circonstances, une autre voie de convocation. C'est une réponse a posteriori à l'objection budgétaire qu'on m'avait apportée en discussion juridique. Je le regrette et je maintiens l'amendement.
En effet, madame la ministre, dans le cadre du débat budgétaire, on ne fait que flécher des sommes sans rien changer juridiquement. Les différentes voies de convocation restent toujours possibles : M. Dunoyer n'en fait pas une obligation, il souhaite simplement mettre l'accent sur la possibilité d'accélérer les procédures. L'argument consistant à dire qu'on ne veut pas en faire une voie exclusive ne tient pas dans le débat budgétaire. C'est pourquoi j'insiste une nouvelle fois sur la pertinence de l'amendement.
L'amendement no 125 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 736 .
C'est à nouveau un amendement d'appel. Le budget 2020 prévoit de créer soixante-dix emplois de juges des enfants et cent postes de greffiers dans les tribunaux pour enfants. Cependant cet effort restera vain s'il n'est pas accompagné d'une augmentation des postes de fonctionnaires. Ainsi, à Béziers, la situation est tendue car le TGI est actuellement obligé de supprimer une audience par mois faute de fonctionnaires pour assister le juge des enfants. Il est urgent d'apporter des solutions concrètes à ce problème pour rendre notre système judiciaire accessible à tous et opérationnel. C'est particulièrement crucial en matière de justice des mineurs pour lesquels il est si important d'être présenté rapidement à un juge.
Je n'ai rien à ajouter aux arguments qui viennent d'être présentés. Il s'agit d'un transfert de crédits à partir du budget de l'administration centrale du ministère de la justice. Nous en avons déjà débattu tout à l'heure ; je laisse donc le Gouvernement répondre. En tant que rapporteur, l'amendement n'ayant pas été débattu en commission, j'émets un avis de sagesse.
Madame la députée, j'ai déjà eu l'occasion de vous dire que pour accompagner le travail sur la prise en charge de l'enfance délinquante, le budget pour 2020 prévoit la création d'emplois supplémentaires : des magistrats, des greffiers, des postes à la protection judiciaire de la jeunesse. Ainsi, nous serons bien armés pour mener à bien la réforme, accélérer le traitement des dossiers et mieux répondre aux difficultés que rencontrent les tribunaux.
Par ailleurs, à ma connaissance, au moment où nous parlons, sur les soixante-six postes de fonctionnaires du tribunal de Béziers, seuls deux sont vacants – soit moins de 3 % de vacance d'emploi. Nous allons évidemment veiller à les pourvoir dans les meilleurs délais. Avis défavorable.
L'amendement no 736 n'est pas adopté.
Il porte sur les moyens pour l'accès au droit et à la justice, en diminution de 4 % par rapport à 2019. Les ressources extrabudgétaires de l'aide juridique, REBAJ, d'un montant total de 83 millions d'euros, étaient affectées au Conseil national des barreaux, CNB, afin d'être répartis entre les avocats ; désormais, elles seront affectées au budget de l'État, mais l'aide juridictionnelle ne recevra que 60,6 millions.
Par souci de transparence, je tiens à préciser que l'amendement nous est proposé par le Conseil national des barreaux, mais j'en apprécie la pertinence. En effet, l'aide juridictionnelle permet l'accès au droit ; quand on en connaît le plafond, on se rend compte que le dispositif n'est pas particulièrement généreux et ne garantit pas l'accès des plus précaires au droit. Nous devons veiller à ce que le budget de l'aide juridictionnelle soit au moins égal à celui de 2019, avec l'espoir de parvenir, dans la suite de la programmation budgétaire, à une augmentation de ces crédits indispensables pour garantir l'accès au droit des populations en difficulté financière.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 936 .
Madame la garde des sceaux, alors que vous aviez annoncé une réforme de l'aide juridictionnelle et que nous y avions travaillé avec ma collègue Naïma Moutchou, un véritable tour de passe-passe est réalisé. Jusqu'à présent, les REBAJ étaient affectées au CNB et représentaient 83 millions d'euros. Désormais, elles se retrouvent dans le budget de l'État et comme tout ce qui se retrouve dans le budget de l'État, elles passent à travers un tamis – dont les mailles sont assez serrées puisqu'elles laissent au passage, excusez du peu, 22,4 millions d'euros.
D'une part, une diminution de 13,4 millions anticipe une baisse importante de la dépense d'aide juridictionnelle, alors même que tous les professionnels, au-delà de quelques statistiques, disent que cela n'est pas près d'arriver. C'est d'autant plus improbable que nous souhaitons, grâce à la réforme que vous appeliez de vos voeux au printemps dernier, élargir la possibilité de bénéficier d'une aide juridictionnelle, qui permet l'accès à la justice du plus grand nombre, notamment des plus modestes.
D'autre part, 9 millions de droits de timbre se baladent sur un compte d'attente depuis maintenant cinq ans – cela commence à être long !
Nous souhaitons que le financement de l'aide juridictionnelle, plutôt que de subir une baisse importante, reste au moins égal à son niveau de 2019. Le présent amendement nous permet également de dénoncer le tour de passe-passe qui consiste à faire passer les REBAJ du CNB vers le budget de l'État.
À défaut d'empêcher ce nouveau rattachement, restons-en au moins aux 83 millions. « Rendez-nous l'argent », aurais-je – comme d'autres – tendance à vous dire !
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 715 .
Ma collègue a déjà souligné l'intérêt de maintenir le niveau des crédits de l'aide juridictionnelle. Le présent amendement propose de les abonder de 2,5 millions d'euros. En effet, les ressources jusque-là extrabudgétaires passent dans le budget de l'État, ce qui implique la constitution d'une réserve de précaution de 3 %, soit 2,5 millions – la somme même que l'amendement propose de réaffecter à l'aide juridictionnelle. Pour ne pas la prélever sur le programme 101 « Accès au droit et à la justice », nous espérons une levée du gage.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 935 .
Après le premier tour de passe-passe que nous venons de dénoncer – le passage des ressources de l'aide juridictionnelle de 83 à 60,4 millions, soit une perte de plus de 20 millions – , les REBAJ, désormais affectées au budget de l'État, subissent les foudres de la loi organique relative aux lois de finances qui oblige à mettre 3 % du budget de côté. Cela explique que 2,5 millions supplémentaires passent à la trappe ; au total, le budget de l'aide juridictionnelle est amputé de près de 25 millions dans le budget 2020. Par le présent amendement, nous souhaitons compenser au moins ces 2,5 millions de la réserve de précaution prévue à l'article 51 de la LOLF.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble des amendements en discussion commune ?
Tous portent sur l'aide juridictionnelle, qui relève du programme 101. Les crédits de cette action passent d'un peu plus de 423 millions d'euros à 484 millions en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. D'après le programme annuel de performances, ce dernier montant ne correspond pas à l'intégralité des ressources prévisionnelles. Il faut y ajouter un reliquat de 9 millions d'euros non versé au Conseil national des barreaux pour des raisons techniques et placé pour le moment sur un compte d'attente. Compte tenu de ces éléments, la dépense prévisionnelle est évaluée à 493,3 millions d'euros, en baisse de 13,4 millions par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale pour 2019. Il appartient à la ministre de la justice d'expliquer l'écart identifié par les auteurs des amendements nos 713 et 936 . Ils n'ont pas été examinés par la commission des finances, mais de mon point de vue, on peut débattre d'un nouvel abondement du programme 101 ; il faut que le Gouvernement s'exprime sur cette question qui fait l'objet d'alertes de la part des professionnels.
Quant aux amendements nos 715 et 935 , ils montrent bien qu'à partir du moment où le dispositif passe dans le budget de l'État, la LOLF s'applique et le tamis qu'évoquait M. Gosselin retient 2,5 millions d'euros qui sont autant de moins pour le CNB. Ces deux amendements poursuivent le même but que les deux précédents ; les arguments sont les mêmes, mais il s'agit cette fois de traiter au moins la question de la réserve de précaution, en lien avec l'évolution juridique. Je vais laisser le Gouvernement répondre. Les amendements en discussion commune n'ont pas été débattus en commission ; à titre personnel, j'émets un avis de sagesse.
Je serai un peu moins sage que M. le rapporteur spécial. Vous l'avez tous observé, mais je l'avais également souligné en commission : les crédits de l'aide juridictionnelle pour 2020 font l'objet d'une rebudgétisation qui concerne 83 millions d'euros de ressources affectées, mais ils n'augmentent que de 60,6 millions – et non de 60,4 millions. Les amendements en discussion commune visent à les abonder tout d'abord de 22,4 millions, pour qu'ils augmentent à due concurrence de la rebudgétisation, puis de 2,5 millions, pour tenir compte de la réserve de précaution.
Je rappelle que la rebudgétisation des taxes affectées répond à un souci de transparence : les crédits alloués à l'aide juridictionnelle seront désormais regroupés sous le budget du ministère de la justice. Comme je vous l'avais expliqué en commission, les crédits n'augmenteront en 2020 que de 60,6 millions d'euros par rapport à 2019, pour des raisons techniques. Cela ne signifie en rien une diminution de l'effort en faveur de l'aide juridictionnelle, mais résulte de deux paramètres qu'il convient de souligner.
D'une part, comme vous l'avez observé, le produit de la contribution pour l'aide juridique fait l'objet d'un apurement. Bloqué sur un compte d'attente, il sera réalisé d'ici la fin de l'année, apportant à l'aide juridictionnelle 9 millions de ressources supplémentaires.
D'autre part, nous avons constaté que la dépense, en 2018, n'avait été que de 464 millions d'euros, et pour tenir compte de l'évolution tendancielle de la dépense, nous avons réduit les crédits d'une vingtaine de millions.
Il n'en demeure pas moins qu'une enveloppe de 4,5 millions d'euros est prévue pour financer l'extension de la représentation obligatoire, et une autre de 5 millions d'euros pour développer la contractualisation avec les barreaux et financer notamment l'expérimentation de structures dédiées à la défense des personnes qui obtiennent l'aide juridictionnelle.
Il ne nous apparaît donc pas utile d'augmenter les crédits de 22 millions d'euros. Cela n'aurait pas d'effet sur les bénéficiaires de l'aide juridictionnelle. De même, il n'est pas nécessaire d'ajouter les crédits de la réserve de précaution parce que la dotation prévue en 2020 correspond à notre estimation du montant des dépenses. Si cela apparaissait nécessaire, nous pourrions ajuster ces crédits à la hausse en gestion. Voilà la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.
Je maintiens qu'il y a tout de même bien une baisse d'environ 25 millions d'euros. Je mets à part, effectivement, les 9 millions placés sur le compte d'attente – c'est un sujet un peu particulier, qui ne pose pas de difficulté. Pour le reste, je conteste votre évaluation de l'évolution des besoins de l'aide juridictionnelle. Elle est en contradiction avec la politique volontariste que nous souhaitons conduire. En outre, alors que des mesures en ce sens devaient être annoncées dans ce projet de budget, cette évaluation ne prend pas du tout en compte une éventuelle réévaluation des plafonds d'attribution de l'aide juridictionnelle.
Certes, les unités de valeur ont été réévaluées, il y a quelques années, au profit des avocats, mais il faudrait le faire de façon régulière. Il y avait ici la possibilité d'y procéder honnêtement, alors que nombre d'avocats, vous le savez très bien, travaillent en réalité à perte et, pour certains d'entre eux, rencontrent de grandes difficultés financières, notamment lorsqu'ils sont commis d'office.
Il ne s'agit pas pour moi de défendre la corporation, mais de dire clairement que ces auxiliaires de justice assument à leur compte des missions de service public qui devraient être prises en charge par le budget de l'État. Nous avions ici, avec ces 25 millions, la possibilité de le faire. C'est pourquoi je trouve votre refus très regrettable.
Je poursuivrai dans le sens des propos de M. Gosselin. C'est bien la première fois que j'entends dire que les crédits de l'aide juridictionnelle vont en définitive suffire à satisfaire les besoins. Le Conseil national des barreaux va apprécier ! Nous avons milité fortement, ces dernières années, pour que l'unité de valeur soit majorée, et elle l'a été, mais il fallait bien sûr poursuivre ce travail. Quand on connaît la situation des avocats commis d'office, d'une part, et d'autre part les difficultés des nombreuses personnes en situation précaire qui nous disent, dans nos permanences, qu'elles n'iront pas au tribunal parce qu'elles n'ont pas les moyens de se payer un avocat ; quand on connaît les plafonds actuels au-delà desquels on ne peut plus bénéficier à 100 % de l'aide juridictionnelle, on ne peut pas dire que l'on peut impunément diminuer ses crédits de plus de 20 millions d'euros…
C'est une erreur. L'accès au droit pose un vrai problème. On se pose la question du premier ressort, pas celle de l'appel, parce que les justiciables en situation précaire n'osent pas aller en appel, et encore moins solliciter un avocat près le Conseil d'État ou la Cour de cassation. Quand on parle de justice, on doit vraiment se poser la question de l'accès au droit. C'est pourquoi je considère que vous commettez une erreur majeure en diminuant les crédits du programme 101.
Il vise à augmenter les crédits affectés à la protection judiciaire de la jeunesse. Le Gouvernement met en valeur une augmentation de plus de 2,3 %, mais on peut se demander si elle est suffisante, compte tenu de la constante augmentation du nombre de poursuites engagées contre des mineurs, non seulement devant le juge des enfants, mais aussi devant le juge d'instruction, ce qui est le signe d'une évolution vers des actes plus graves. En effet, si les actes qu'ils commettent sont plus nombreux et plus graves, l'accompagnement des mineurs doit être renforcé en proportion.
Dans ce domaine, la création de vingt centres éducatifs fermés supplémentaires ne peut suffire à qualifier d'ambitieuse la politique de protection de la jeunesse. Les parcours individualisés de réinsertion ne sont une solution que si le taux d'encadrement des jeunes est suffisant pour permettre un traitement individualisé par des professionnels d'éducation, d'enseignement, d'orientation, notamment.
Le renforcement des moyens de la protection judiciaire de la jeunesse – PJJ – constitue évidemment un objectif sur lequel nous ne pouvons que nous accorder, et M. David et les cosignataires de l'amendement ont raison d'insister sur ce point.
En revanche – je m'exprime ici encore à titre personnel, puisque nous n'en avons pas débattu en commission – , l'amélioration du pilotage du ministère de la justice constitue évidemment aussi une nécessité. Vous savez que je ne suis pas toujours d'accord avec les orientations du Gouvernement, mais le présent projet de loi de finances prévoit un renforcement des crédits de la PJJ, avec notamment la création de quatre-vingt-quatorze emplois nouveaux en vue de l'application de la réforme de l'ordonnance de 1945.
Il me semblerait donc raisonnable d'évaluer d'abord l'exécution de la programmation pour 2020, afin de pouvoir émettre, pour 2021, un avis budgétaire en fonction de ce qui se sera effectivement passé l'année prochaine. J'aurais donc tendance, sur cet amendement, à procrastiner, mais cela n'engage que votre rapporteur spécial. Avis réservé, par conséquent, mais, là aussi, avis de sagesse.
J'ai déjà répondu tout à l'heure à ce sujet, sur lequel je suis en accord avec M. le rapporteur. Pour accompagner la réforme de l'ordonnance de 1945, donc la politique en faveur des jeunes, nous avons prévu, dans le budget pour 2020, des moyens supplémentaires pour la protection judiciaire de la jeunesse : quatre-vingt-quatorze éducateurs et des crédits supplémentaires qui se monteront à 10,5 millions d'euros, hors masse salariale. Ces crédits seront essentiellement fléchés vers le suivi en milieu ouvert.
Quant aux centres éducatifs fermés, la poursuite de cette politique ne m'empêche pas de souhaiter une diversification des mesures relatives à la justice des mineurs. Pour ces raisons, j'émets un avis défavorable.
J'exprimerai seulement un léger regret, madame la ministre : pour la réforme de la justice des mineurs, l'ordonnance a été prise, mais elle n'entrera en vigueur qu'après le débat sur sa ratification qui aura lieu dans cette assemblée. Or vous nous indiquez que, dans le budget pour 2020, des moyens ont déjà été prévus pour son application. À l'inverse, et bien que la proposition de loi visant à agir contre les violences au sein de la famille ait été adoptée – même si le texte fera l'objet d'une seconde lecture – , vous n'avez pas été en mesure de nous expliquer où l'on trouverait les moyens de sa mise en oeuvre. C'est un peu dommage, et je voulais vous exprimer ce regret au nom de mon groupe.
Pour répondre à l'avis réservé, ou de sagesse, du rapporteur spécial, la procrastination qu'il appelle de ses voeux pour cet exercice a en fait déjà été appliquée. Il suffit de rencontrer des représentants de la protection de la jeunesse pour se rendre compte qu'ils sont d'ores et déjà en situation de déficit d'effectifs chronique. Il est inutile d'attendre l'achèvement de la réforme de l'ordonnance de 1945 pour mesurer les efforts qui doivent être faits en faveur de la réinsertion des mineurs.
L'amendement no 310 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Louis Bricout, pour soutenir l'amendement no 443 .
Cet amendement d'appel vise à solliciter l'organisation d'assises nationales de la médecine légale et à obtenir des précisions sur la réforme évoquée dans le bleu budgétaire.
Le manque de praticiens est un fait, notamment dans les outre-mer. Pendant plusieurs années, et jusqu'en août 2019, un seul médecin légiste a ainsi exercé pour les deux territoires de la Martinique et de la Guadeloupe. C'est particulièrement insupportable pour les victimes, les familles et l'autorité judiciaire.
L'objet de cet amendement est donc de réintégrer pleinement la médecine légale dans l'organisation du système de santé, sans la soustraire pour autant à l'orbite judiciaire dont elle relève légalement.
Comme vient de l'indiquer M. Bricout, c'est un amendement d'appel puisque, budgétairement, nous parlons de 10 000 euros. La question de fond est celle du devenir de la médecine légale en France, et c'est effectivement un sujet préoccupant. M. Bricout a donc parfaitement raison, avec ses collègues, de poser la question, sur laquelle il serait important que le Gouvernement s'exprime. J'émets pour ma part un avis de sagesse, à titre personnel puisque l'amendement n'a pas été débattu en commission.
Si je ne suis pas favorable à l'amendement au sens budgétaire, parce que je n'en mesure pas bien, à ce stade, la pertinence, je dois en revanche vous indiquer que je suis absolument favorable à une révision du schéma directeur de la médecine légale.
Il faut évidemment que j'en parle avec ma collègue Agnès Buzyn, qui en est responsable, mais cette révision est tout à fait indispensable. Tel qu'il est conçu, le schéma ne répond pas à la réalité des besoins, notamment à celui de la proximité indispensable pour la prise en charge des victimes.
J'étais ce matin même à l'unité de médecine légale de Dax, et je mesure à quel point ce qui est expérimenté à Dax, ou à Bayonne, ou ailleurs encore, répond à de véritables besoins. Il n'est pas besoin d'inscrire 10 000 euros de crédits supplémentaires pour que nous nous engagions dans une véritable réforme, qui me semble indispensable. Mon avis est donc défavorable sur la forme, mais profondément favorable sur le fond.
L'amendement no 443 n'est pas adopté.
Ces amendements de M. Reda concernent les psychologues judiciaires experts qui, vous le savez, jouent un rôle clé dans notre système judiciaire puisque les magistrats leur confient des missions d'évaluation psychologique. L'amendement no 534 propose le recrutement de nouveaux psychologues judiciaires experts pour les affaires civiles, et le no 535 pour les affaires pénales.
Ils peuvent être considérés comme des amendements d'appel puisqu'ils visent à interroger le Gouvernement sur le financement du recrutement de psychologues judiciaires experts supplémentaires, lequel relève aujourd'hui des frais de justice.
J'émets un avis de sagesse sur ces amendements qui soulèvent une question légitime.
Je ne peux que partager l'objectif de recourir à davantage d'experts psychologues dans le cadre des enquêtes pénales. L'élargissement du champ du recours à des experts psychologues rend en effet parfois difficile la conduite des enquêtes en matière d'infractions sexuelles.
Toutefois, le choix de confier une mesure d'instruction à un expert relève, tant au civil qu'au pénal, de la liberté du magistrat ou de la juridiction chargée du dossier. Aussi, outre le fait que le montant indiqué dans l'amendement ne correspond aucunement au coût, charges comprises, d'un salaire annuel de psychologue, un tel recrutement d'experts, qui deviendrait en quelque sorte des agents publics du ministère, est sujet à discussion car il interroge le positionnement de ces personnes, en particulier leur indépendance et leur impartialité.
La proposition, au demeurant intéressante, n'est pas suffisamment documentée à ce stade et mérite d'être approfondie par les services du ministère afin d'être compatible avec notre politique. Mon avis est donc défavorable.
Ces deux amendements d'appel ont pour objet de systématiser le recueil d'éléments de personnalité sur la situation des prévenus dans toutes les procédures devant les tribunaux correctionnels afin d'éclairer au mieux le magistrat.
Ces amendements ont le mérite de la cohérence. Je laisse au Gouvernement le soin de répondre aux questions qu'ils posent. J'émets un avis favorable.
La loi de programmation 2018-2022 et de réforme de la justice a étendu les hypothèses de recueil obligatoire de renseignements sur la personnalité des prévenus afin de permettre aux juridictions de jugement de prononcer une peine mieux adaptée. Il s'agit d'un élément important de la nouvelle politique des peines qui entrera en vigueur à partir de mars prochain. Les moyens opérationnels nécessaires à cette nouvelle ambition sont déjà en place, notamment grâce à la création d'emplois dans les services d'insertion et de probation dont j'ai eu l'occasion de parler précédemment.
J'émets donc un avis défavorable aux amendements, qui me semblent déjà largement satisfaits.
Les crédits de la mission « Justice » sont adoptés.
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l'article 76. La parole est à Mme la garde des sceaux, pour soutenir l'amendement no 1092 .
Dans le cadre d'une expérimentation d'une durée de trois ans, l'article 31 de la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique autorise le juge des enfants à prononcer cumulativement le placement d'un mineur à l'aide sociale à l'enfance et une mesure d'action éducative en milieu ouvert exercée par le secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse, dérogeant ainsi à l'article 375-4 du code civil.
Le bilan de cette expérimentation est jugé positif. Cette double mesure permet notamment une prise en charge renforcée des mineurs dans les situations les plus complexes, notamment pour ceux qui reviennent de zones de conflits et sont particulièrement vulnérables du fait des traumatismes subis. Elle permet également de soutenir les services départementaux dans la prise en charge des enfants très perturbés.
En outre, l'attribution de ces mesures d'assistance éducative en milieu ouvert au secteur public de la PJJ assure leur financement par l'État et d'éviter toute charge supplémentaire pour les conseils départementaux.
L'amendement vise à pérenniser le pouvoir donné au juge d'ordonner cette double mesure très utile et à assurer la continuité des prises en charge déjà décidées.
Tout d'abord, une remarque sur la méthode : si le Gouvernement peut à tout moment déposer des amendements, il est regrettable que la commission n'ait pas pu débattre d'un tel sujet.
L'amendement vise à préserver la possibilité pour le juge des enfants de prononcer cumulativement le placement d'un mineur à l'aide sociale à l'enfance et l'application d'une mesure d'action éducative en milieu ouvert au sein du secteur public de la PJJ. À cette fin, il complète l'article 375-4 du code civil. Ces dispositions s'appliquent aujourd'hui dans le cadre d'une expérimentation qui prendra fin en février 2020. Je m'étonne que la chancellerie découvre incidemment ce problème.
Après avoir entendu les arguments du Gouvernement et lu l'exposé sommaire, il apparaît que le sujet ne doit pas être négligé. Compte tenu de l'intérêt de cette procédure et de son coût très limité pour la mission « Justice », j'émets, à titre personnel, un avis favorable.
L'amendement no 1092 est adopté.
La parole est à M. Patrick Hetzel, rapporteur spécial, pour soutenir l'amendement no 728 .
Je présente au nom de la commission des finances cet amendement qui est également cosigné par Dimitri Houbron, et qui tend à prolonger d'une année l'expérimentation relative à la tentative de médiation familiale préalable obligatoire – Mme la garde des sceaux s'est exprimée sur ce sujet il y a quelques instants. Je crois m'exprimer également au nom de M. le rapporteur pour avis en disant à quel point la prolongation de ce dispositif nous semble pertinente, car c'est un sujet consensuel, y compris entre les deux commissions…
Avis très favorable.
Je me réjouis de cet avis sur un amendement qui fait consensus entre les deux rapporteurs !
Sourires.
L'amendement no 728 est adopté.
La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour soutenir l'amendement no 849 .
Il est un dispositif qui est au coeur de la justice et qui en est une préoccupation constante : l'aide juridictionnelle. Elle garantit l'accès de tous les citoyens à la justice. Nous y sommes tous très attachés. C'est un bon dispositif, mais plus de trente après sa création, il est victime de son succès : un million de bénéficiaires et un budget d'un demi-milliard d'euros. Je ne critique évidemment pas cette évolution, surtout si elle est le signe d'une meilleure protection des droits et libertés dans notre pays. Mais je constate qu'elle se traduit par un engorgement des bureaux d'aide juridictionnelle et par un allongement des délais de traitement, donc des procédures, au détriment du justiciable.
La réforme de l'aide juridictionnelle est donc une exigence démocratique si l'on veut améliorer l'accès à la justice et n'exclure personne. C'est ce à quoi Philippe Gosselin et moi avons travaillé dans le cadre d'une mission d'information. Nous avons remis un rapport en juillet dernier qui est, si je peux me permettre, non pas un énième rapport sur le sujet, mais un ensemble de trente-cinq mesures très opérationnelles visant à faciliter l'accès à l'aide juridictionnelle, à la revaloriser au bénéfice des justiciables comme des auxiliaires de justice, et à en assurer le financement.
Tel est, en partie, l'objet de l'amendement que nous présentons. En effet, il reprend certaines de nos propositions afin de moderniser et adapter le dispositif à toutes les évolutions qu'il a connues.
Il vise notamment à introduire la notion de revenu fiscal de référence pour uniformiser l'appréciation de la condition de ressources ; à lancer l'instruction dématérialisée de la demande d'aide juridictionnelle, dans le prolongement du volet numérique de la loi de programmation ; à assouplir l'organisation des bureaux d'aide juridictionnelle en ayant le souci constant de maintenir un lieu de proximité dans chaque tribunal ; à améliorer le recouvrement des dépenses de l'État.
Ces mesures sont de nature à nous aider à atteindre notre objectif d'une justice plus inclusive. Le projet de loi de finances est l'occasion d'avancer sur le sujet.
M. Jean Terlier applaudit.
Je partage la nécessité d'une réforme d'ampleur du dispositif créé par la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Les arguments avancés dans l'exposé sommaire et dans le rapport coécrit par M. Gosselin et Mme Moutchou sont très convaincants. Toutefois, le projet de loi de finances ne me semble pas le cadre approprié dans la mesure où le sujet mérite un débat approfondi et dépasse les seules questions financières.
J'émets donc un avis réservé.
J'avais indiqué lors des débats sur la loi de programmation que je souhaitais mener un travail de fond sur l'aide juridictionnelle. Madame Moutchou, je vous remercie de contribuer à cette réflexion au travers du rapport que vous et Philippe Gosselin avez rendu et qui trouve ici une traduction.
J'ai décidé de lancer la construction du SIAJ – système d'information de l'aide juridictionnelle – qui permettra de déposer un dossier d'aide juridictionnelle en ligne. Votre amendement s'articule étroitement avec ce projet en le précisant, en le complétant et en faisant évoluer l'aide juridictionnelle dans le sens de la simplification.
Vous proposez ainsi de substituer, pour l'appréciation des ressources, le revenu fiscal de référence aux ressources fiscales de toute nature, ce qui permettra d'alléger le traitement de la demande par les bureaux d'aide juridictionnelle.
Votre amendement rend également possible le dépôt de la demande juridictionnelle par voie dématérialisée. C'est aussi un moyen de simplifier et de rendre accessible l'aide juridictionnelle, ce dont bénéficieront aussi les agents publics qui traitent un million de demandes par an. Évidemment, la saisine en ligne ne sera qu'une faculté et il sera toujours possible de déposer un dossier écrit dans tous les points d'accès.
Votre amendement tend aussi à faciliter le contrôle des demandes et leur subsidiarité. Il permet aux bureaux d'aide juridictionnelle de ne pas accorder l'aide lorsque l'action paraît manifestement abusive. Il systématise les échanges d'informations avec les sociétés d'assurance pour rendre plus effectif le principe de subsidiarité entre l'aide juridictionnelle et l'assurance de protection juridique. Il simplifie les conditions de retrait de l'aide pour garantir aux auxiliaires de justice la possibilité d'être rétribués par leurs clients lorsque ceux-ci disposent des ressources suffisantes. Enfin, il introduit davantage de souplesse dans l'organisation territoriale des bureaux d'aide juridictionnelle.
En résumé, toutes ces mesures me semblent aller dans le bon sens. Votre amendement propose une réforme de l'aide juridictionnelle ambitieuse mais progressive, dont les objectifs sont parfaitement atteignables. J'émets donc un avis favorable.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Je rappellerai, madame la garde des sceaux, que Naïma Moutchou et moi-même soumettons cet amendement en commun, lequel est le fruit d'un travail accompli en bonne intelligence permettant d'aboutir à une solution plutôt consensuelle à même de recueillir un très large assentiment.
Alors que nous nous apprêtons à mettre en musique une partie de la réforme de l'aide juridictionnelle, cet amendement fait suite au rapport que nous avons conjointement rédigé dans le cadre de la commission des lois – laquelle effectue, grâce notamment à sa présidente, attentive à nos demandes de missions, un travail important et transpartisan dont il convient de mesurer l'intérêt.
Il ne vous aura toutefois pas échappé que nous raisonnons ici à budget constant, étant donné les limites imposées par l'article 40 de la Constitution. Il conviendrait pourtant d'envoyer un signal fort s'agissant du relèvement des plafonds d'éligibilité. Nous pourrions retenir, comme plafond minimum, celui du SMIC net, même si cela se traduirait vraisemblablement par une dépense supplémentaire pour l'État. Il est à cet égard sans doute regrettable d'avoir rejeté les amendements, examinés plus tôt, visant à maintenir en l'état les ressources extrabudgétaires et de l'aide juridique.
Nous disposons, quoi qu'il en soit, d'un début de réforme de l'aide juridictionnelle, qui ne devra pas constituer un aboutissement et qui restera à prolonger.
Je tiens à saluer le travail effectué par nos deux collègues Naïma Moutchou et Philippe Gosselin, reprenant un certain nombre de préconisations déjà évoquées lors de nos débats relatifs aux crédits de la justice l'an dernier. Celles-ci portent notamment sur la modification des critères d'éligibilité – allant dans le sens d'une appréciation beaucoup plus juste de l'attribution de l'aide juridictionnelle – et sur la fameuse question de l'aide juridictionnelle pour les victimes de violences conjugales. Je connais l'attention que porte le ministère de la justice sur ce sujet et suis certain qu'il s'efforcera de trouver les solutions les plus pertinentes possibles pour apporter un véritable soutien aux victimes.
Je réitère mes félicitations à nos deux collègues et espère que leur amendement sera bien reçu.
L'amendement no 849 est adopté.
La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour soutenir l'amendement no 850 .
Il s'agit d'un amendement d'appel portant sur le sujet, que j'ai évoqué plus tôt, de l'accès des femmes victimes de violences conjugales à l'aide juridictionnelle. M'étant longuement exprimée sur cette question, j'ai reçu une réponse détaillée de Mme la ministre – ce dont je la remercie. Je prends bonne note du rendez-vous donné pour retravailler le sujet et prévoir le dispositif adéquat à même de permettre à ces femmes victimes de violences conjugales d'être protégées comme il se doit.
Cet amendement demande au Gouvernement la remise, dans un délai de douze mois, d'un rapport dont l'objectif serait d'évaluer « les moyens de faciliter l'attribution de l'aide juridictionnelle pour les femmes victimes de violences conjugales en étudiant la possibilité de leur attribuer cette aide sans condition de ressources et dès le dépôt de plainte. » La commission des finances n'a pas pu examiner cet amendement, mais, en raison de son objet, j'émets, à titre personnel, un avis favorable, étant donné que nous nous situons dans le prolongement de ce qui vient d'être débattu dans cet hémicycle.
En vous répondant, madame la députée, je m'adresse également à Philippe Gosselin, dont j'ai bien rappelé qu'il était le co-auteur du rapport ayant présidé à la réforme de l'aide juridictionnelle.
L'attribution de l'aide juridictionnelle aux femmes victimes de violences conjugales, je l'ai dit dans mon propos liminaire, est un sujet crucial s'inscrivant dans la politique globale que nous conduisons afin de lutter contre les violences conjugales. Il est absolument nécessaire que nous trouvions la solution la mieux adaptée en nous fondant sur votre proposition, que je souhaite d'abord retravailler. Je me suis engagée devant vous à ce que la solution la plus pertinente à votre juste question soit trouvée pour le 25 novembre, aussi devrons-nous nous rapprocher très rapidement. Je vous demande donc le retrait de votre amendement.
Dans une société où les femmes vont mal, il importe de pouvoir s'appuyer sur la résilience de chacun d'entre nous. Je souhaitais ainsi porter à la connaissance de la représentation nationale, pour ceux qui ne le savent pas encore, que l'ordre des huissiers de justice a proposé son aide en offrant des actes gratuits à destination des femmes victimes de violences, ces actes étant un préalable parfois nécessaire avant que le procureur ne se saisisse des plaintes. Il me semblait important de le mentionner à ce moment précis du débat.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et MODEM.
L'amendement no 850 est retiré.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-trois heures cinquante, est reprise le mercredi 30 octobre à zéro heure.
Nous abordons l'examen des crédits relatifs à l'enseignement scolaire (no 2301, annexe 24 ; no 2302, tome II) .
La parole est à Mme Catherine Osson, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire.
Depuis plusieurs mois, je rencontre, à Roubaix et Wattrelos, des familles dont les enfants bénéficient des réformes engagées depuis le début de la législature, comme le dédoublement des classes. Elles me disent que, pour leurs aînés, les choses avaient été difficiles à l'école de la République, mais que leurs cadets, en revanche, s'y sentent bien, s'épanouissent, apprennent mieux et plus vite.
Grâce à ce budget de l'enseignement scolaire pour 2020, dont j'ai l'honneur d'être la rapporteure spéciale, nous poursuivons les efforts nécessaires à la lutte contre les inégalités de destin, à la transmission du goût d'apprendre et au retour à un climat scolaire apaisé. Première des priorités de notre majorité, l'enseignement scolaire est le premier budget de la nation. Doté de 1,2 milliard d'euros supplémentaire par rapport à 2019, il atteint désormais 74 milliards.
Le Gouvernement, appuyé par la majorité, a fait le choix assumé de donner la priorité au premier degré. Ainsi, 500 millions d'euros supplémentaires lui seront consacrés en 2020, afin de consolider les réformes déjà engagées. Dans le réseau d'éducation prioritaire – REP – , le dédoublement des classes sera étendu à la grande section. En dehors de ce réseau, les effectifs seront progressivement limités à vingt-quatre élèves, en grande section, CP et CE1. Enfin, depuis cette rentrée, l'âge de l'instruction obligatoire est abaissé à 3 ans. Par ces trois mesures, l'école de la République dispose de moyens pour agir à la racine des inégalités, dès le plus jeune âge, en accordant une attention particulière aux élèves les plus fragiles.
Le budget pour 2020 prévoit aussi un renforcement très significatif des moyens en faveur d'une école inclusive. Je tiens à saluer l'émergence, à l'échelle des départements, d'un véritable service public de l'inclusion scolaire, qui facilitera la vie des familles des enfants concernés, grâce à une meilleure coordination des aides humaines, pédagogiques, éducatives et, bientôt, thérapeutiques, au plus près des besoins de chaque élève en situation de handicap.
Je salue également la transformation, achevée avant l'heure, des contrats aidés en contrats de trois ans pour les accompagnants des élèves en situation de handicap – AESH – , ainsi que le recrutement de 4 000 accompagnants supplémentaires prévu cette année.
Contrairement à ce qu'affirment certains, la priorité n'est pas donnée au premier degré « au détriment du second degré ». En effet, les moyens alloués à l'enseignement secondaire progresseront de 450 millions d'euros en 2020, pour financer la réforme du lycée et la montée en puissance du dispositif « devoirs faits ».
Le budget pour 2020 comporte également des mesures de revalorisation du métier d'enseignant. La prime pour les enseignants en réseau d'éducation prioritaire renforcé – REP+ – a été de nouveau revalorisée de 1 000 euros à la rentrée. Plus largement, une véritable réflexion doit être engagée dans les prochains mois sur une juste valorisation de tous les métiers de l'éducation nationale, toutes catégories confondues.
À cet égard, nous avons longuement discuté en commission des moyens à déployer pour faire face à la pénurie de personnels de santé scolaire. Depuis sa fondation, en 1945, la médecine scolaire a traversé plusieurs crises, parfois similaires à celle qu'elle rencontre aujourd'hui. Plusieurs des amendements que nous étudierons ce soir portent sur ce sujet, qui ne peut toutefois se résumer à un enjeu budgétaire. Il faut d'abord s'interroger sur le contenu des missions confiées à la médecine scolaire, sur l'attractivité des métiers et sur les attentes que nourrit la société à son égard. La question de la juste budgétisation des moyens se posera une fois que nous aurons mené cette réflexion collectivement.
J'évoquerai enfin l'enseignement technique agricole. Les taux de réussite aux examens et les taux d'insertion professionnelle y sont excellents. Aussi, monsieur le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, je réitère le voeu que votre collègue de l'agriculture et de l'alimentation et vous-même oeuvriez à davantage valoriser et promouvoir l'orientation dans cette filière auprès des élèves situés en zone urbaine, notamment auprès des jeunes des quartiers, qui, parfois, n'en connaissent même pas l'existence.
Pour clore mon propos, j'aimerais appeler l'attention de cette assemblée sur des enfants courageux, mais pour lesquels aucun dispositif spécifique n'est prévu par la mission : je pense aux enfants issus de l'aide sociale à l'enfance. Aujourd'hui, ils ne sont pas considérés comme des enfants ayant des besoins éducatifs particuliers, alors même qu'ils doivent surmonter des traumatismes profonds. Il s'agit d'un angle mort des politiques publiques de l'éducation ; cette question mériterait que l'on y consacre plus d'efforts.
L'école de la République est une école dans laquelle les enfants apprennent les savoirs fondamentaux pour vivre en société et grâce à laquelle ils peuvent s'émanciper, intellectuellement et socialement, de leur condition d'origine. Chaque élève, quels que soient ses différences et ses besoins, doit y avoir toute sa place. Le budget qui nous est proposé répond à chacun de ces enjeux. C'est pourquoi je vous invite à voter, comme je le ferai, les crédits de cette mission, qui ont été adoptés par la commission des finances.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM. – Mme Béatrice Descamps applaudit également.
La parole est à Mme Cécile Rilhac, rapporteure pour avis de la commission des affaires culturelles et de l'éducation.
Vous le savez, l'éducation est une priorité de notre majorité. Le premier objectif de la mission « Enseignement scolaire » est de conduire 100 % des élèves à l'acquisition des savoirs fondamentaux, laquelle conditionne la poursuite de la scolarité jusqu'à l'entrée dans l'enseignement supérieur ou l'insertion professionnelle.
Pour réaliser cette ambition, la confiance est indispensable – confiance de l'école envers les parents, confiance des professeurs envers leurs élèves, confiance de l'institution envers les professeurs – pour que, in fine, les élèves puissent prendre confiance en eux-mêmes.
Ce budget reflète bien les nombreuses mesures de la loi pour une école de la confiance, votée dans cet hémicycle il y a quelques mois. Ces mesures rendent compte de notre volonté d'assurer l'instruction et la formation du plus grand nombre, sans distinction.
Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour l'année 2020 s'élèvent à 74 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une augmentation de 1,2 milliard par rapport à la loi de finances initiale pour 2019. En tant que rapporteure pour avis, je tiens à saluer cette hausse des crédits, qui témoigne que le Gouvernement et la majorité considèrent, plus que jamais, l'éducation comme un investissement pour l'avenir, et non comme une dépense.
Vous le savez, la rentrée 2019 a été marquée par un calendrier dense de réformes. La réforme du lycée et du baccalauréat se met en place. La transformation et la valorisation du lycée professionnel se poursuivent ; il s'agit d'offrir des formations aux métiers de demain et d'en faire une voie d'excellence attractive. Nous voyons également l'achèvement du dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+, qui a nécessité la création de 10 000 postes ; nous pouvons d'ores et déjà en mesurer l'impact très positif. Mentionnons encore la mise en place des 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés – PIAL – et l'extension du dispositif « devoirs faits » aux écoles primaires des départements d'outre-mer. Enfin, un nouveau référentiel de formation pour les métiers de l'enseignement et de l'éducation est mis en oeuvre. Je tiens à saluer devant vous la remarquable implication des équipes éducatives dans toutes leurs composantes, sans lesquelles ces mesures n'auraient pu être effectives sur le terrain.
Concernant le terrain, précisément, je souhaite formuler quelques suggestions.
On dit souvent que le ministère de l'éducation nationale est un mammouth. Pourtant, l'analyse du budget montre qu'il est l'un des ministères les plus vertueux, si ce n'est le plus vertueux. Par exemple, le taux de personnels gérants rapporté aux personnels gérés est de 6 pour 1 000. Vous en conviendrez, mes chers collègues, ce mammouth est bien maigre !
L'éducation prioritaire est essentielle pour l'égalité des chances. En attendant les conclusions du rapport Azéma-Mathiot, je pense que l'octroi de marges de manoeuvre supplémentaires aux autorités académiques donnerait de la souplesse en matière d'allocation des moyens, notamment pour les écoles dites orphelines.
J'appelle en outre votre attention sur les moyens afférents aux postes d'assistants d'éducation, à savoir de surveillants, au vu de la contribution cruciale que ces personnels apportent à l'amélioration du climat scolaire. Dans les zones connaissant une hausse démographique et dans celles où le climat scolaire est marqué par des tensions, ces moyens doivent être ajustés en fonction des besoins.
Pour renforcer l'égalité des chances entre tous les enfants de notre République, l'école poursuit son évolution. C'est le sens du nouveau cap fixé par le Président de la République : les effectifs, dans toutes les classes de grande section, de CP et de CE1 seront plafonnés à vingt-quatre élèves sur l'ensemble du territoire. Cela se traduit aussi par un soutien aux établissements et aux territoires les plus fragiles au travers de partenariats forts entre collectivités territoriales, services déconcentrés de l'État et associations. L'amélioration du climat scolaire reste une priorité pour favoriser le bien-être des élèves et des adultes, améliorer les résultats scolaires, diminuer les problèmes de violence et de décrochage scolaire.
Revenons-en aux crédits de la mission « Enseignement scolaire ». Ses six programmes ont tous un point commun : leurs crédits sont en hausse !
Je conviens que le budget dédié à l'éducation demeure le premier budget de la nation. Je note que l'école primaire reste la priorité, grâce à la sanctuarisation du nombre de postes d'enseignants. Ce budget prévoit une augmentation des salaires ainsi qu'une revalorisation, pour la troisième année consécutive, de l'indemnité spécifique versée aux enseignants exerçant en REP+. Je souligne également le maintien de la dotation octroyée aux communes qui souhaitent une organisation de la semaine scolaire sur quatre jours et demi.
Ces revalorisations comme ces augmentations sont à saluer, et il conviendrait de les poursuivre. La revalorisation vise à assurer une juste rétribution des efforts qui continueront à être demandés aux personnels. L'augmentation est conforme à notre ambition de bâtir une école qui tienne sa promesse républicaine de réussite pour tous les élèves.
Par conséquent, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » prévus dans le projet de loi de finances pour 2020.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, vous avez déclaré : « Un pays qui a confiance en son avenir investit massivement dans son école ». Qu'en est-il ? Le budget du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse s'élèvera l'année prochaine à 52,7 milliards d'euros contre 51,68 milliards cette année, soit une augmentation de 1 milliard.
Regardons de plus près ce que recouvre ce milliard. Environ 500 millions sont destinés à financer la progression d'ancienneté des fonctionnaires, ainsi que l'application de l'accord relatif aux parcours professionnels, aux carrières et aux rémunérations – PPCR. Le doublement des primes en REP+, qui ne concerne qu'un petit nombre de personnes, devrait coûter environ 100 millions. La prise en charge des AESH sur le budget de l'éducation nationale est plus difficile à évaluer, mais elle représentait 200 millions en 2019. Enfin, on peut estimer à un peu moins de 100 millions le montant supplémentaire en faveur du service national universel, dont les effectifs passeront de 2 000 jeunes en 2019 à 40 000 en 2020.
Oublié, l'investissement massif pour l'école ! Le milliard est déjà presque dépensé. Alors que des voix s'élèvent dans tout le pays pour réclamer davantage de justice sociale et territoriale, vous persistez dans votre politique d'austérité. L'école de la République mérite tellement mieux !
Vous affirmiez une ambition renforcée pour le premier degré. Qu'en est-il ? Eh bien, la hausse de 1,3 milliard en 2018 et celle de 0,9 milliard en 2019 n'ont pas suffi à assurer le dédoublement annoncé des classes de maternelle et de primaire, malgré votre choix de redéployer des emplois du second degré vers le premier degré.
Vous annonciez le maintien des moyens d'enseignement dans le second degré et le renforcement de l'attractivité des métiers de l'éducation. Qu'en est-il ? La suppression de 440 emplois d'enseignants en 2020 porte à 6 290 les suppressions sur les années 2018, 2019 et 2020. Or, sur cette période, on estime que les effectifs d'élèves auront augmenté de 99 300.
Cette austérité pèse lourd sur les personnels et a des conséquences désastreuses sur les conditions d'étude des élèves. Les effectifs augmentent dans les classes ; les enseignants sont contraints d'accepter des heures supplémentaires ; le recours à des contractuels est en hausse ; malgré vos tentatives de rafistolage, de trop nombreux professeurs absents restent non remplacés, d'où un nombre important de cours non assurés aux élèves. Lassées d'être abusées, dix-neuf familles dont les enfants sont scolarisés au collège Colonel-Fabien, en Seine-Saint-Denis, préparent un recours devant le tribunal administratif pour « discontinuité du service public ».
Vous annonciez aussi une école pleinement inclusive. Qu'en est-il ? La rentrée est chaotique pour les AESH : on constate des problèmes d'édition de contrat ou de versement de salaire pour plusieurs centaines d'entre eux. Et il n'y a toujours aucune création de postes d'assistants sociaux, de psychologues de l'éducation nationale, de médecins scolaires, d'infirmiers, de conseillers principaux d'éducation, d'assistants d'éducation ou d'agents administratifs.
Vous indiquiez vouloir « accompagner les élèves dans leur choix par un renforcement du service public d'orientation », mais, dans les faits, vous le démantelez.
Vous annonciez « un budget à la visée profondément sociale ». Qu'en est-il ? Sous prétexte qu'ils ne sont pas utilisés en totalité, vous divisez par deux les crédits alloués aux fonds sociaux des établissements : passant de 59 à 30 millions d'euros, ils sont amputés de 29 millions. Ils sont pourtant destinés aux familles en difficulté, de plus en plus nombreuses, pour améliorer les conditions d'étude. Or, bien souvent, ces familles n'exercent pas ce droit, par pudeur ou par manque d'information.
Vous parliez de « sanctuarisation » des emplois du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse. Qu'en est-il ? Vous appliquez des mesures qui entraînent un mal-être grandissant chez les enseignants, le personnel pédagogique et les directeurs. Ils se retrouvent démunis et dans l'impossibilité d'assurer correctement leurs missions, ce qui pousse certains d'entre eux au désespoir, voire parfois au suicide.
Vous affirmiez traduire votre confiance dans la jeunesse de notre pays par la réforme des lycées. Qu'en est-il ? Votre réforme du bac et l'instauration du contrôle continu touchent de plein fouet les élèves : elle crée une inégalité des chances, puisque le diplôme n'aura désormais plus la même valeur selon l'établissement dans lequel il sera obtenu. Sortir du déterminisme social relève désormais de l'exploit.
Le décalage entre vos paroles et vos actes est criant. Reconnaissons cependant que vos choix politiques ont le mérite d'être clairs : vous développez une philosophie de l'éducation compétitive et libérale, avec en ligne de mire l'employabilité seulement. Vous formerez à l'avenir non plus des citoyens émancipés, mais des employés, destinés à servir votre « start-up nation ».
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je constate tous les jours dans mon département de la Seine-Saint-Denis le profond attachement de la population à son école. Parents, jeunes, élus se mobilisent et se mobiliseront pour la défendre et pour soutenir les équipes éducatives qui la font vivre. Les hommages et la solidarité, et aussi la colère, qui ont suivi le décès tragique de Christine Renon, ont une nouvelle fois montré que les Françaises et les Français se tiennent toujours aux côtés des femmes et des hommes qui construisent l'avenir de notre pays. Charge à nous, représentantes et représentants de la nation, d'être à la hauteur de leur engagement.
Les équipes pédagogiques sont pleinement mobilisées pour oeuvrer, dans la mesure de leurs possibilités, en faveur de la meilleure réussite possible des enfants, car elles savent mieux que quiconque que l'école est le moyen de s'affirmer intellectuellement, de construire ses rêves et de les réaliser. Elle est le lieu des rencontres qui bâtissent non seulement les destins, mais aussi la nation. Si elle n'est pas imperméable aux maux de notre société, elle en est souvent la réponse. Le budget de l'école constitue un investissement vital pour les valeurs de la République.
Que demandent les enseignants ? En premier lieu, le soutien de leur hiérarchie ; ils attendent qu'elle réagisse dès que les difficultés émergent. Ils ne peuvent pas le faire seuls, car l'éducation nationale est un tout. Psychologues, médecins scolaires, accompagnants des élèves en situation de handicap – AESH – , conseillers principaux d'éducation, assistants pédagogiques : ces hommes et ces femmes sont les maillons indispensables de la réussite de nos enfants. Pourtant, toutes ces professions souffrent.
La médecine scolaire est de moins en moins présente ; les AESH et les AVS, les auxiliaires de vie scolaire, malgré des avancées réelles, ont des statuts encore précaires ; l'accompagnement social des élèves en est fragilisé.
Dans le même temps, des milliers d'heures de cours ne sont pas assurées, par manque de remplaçants, ou en raison de l'affectation de ceux-ci à des postes pérennes. Plusieurs rapports démontrent que les trois heures d'éducation physique et sportive – EPS – ne sont pas forcément effectuées dans le primaire ; de plus, de nombreux professeurs d'EPS ne peuvent assurer correctement leurs cours faute d'équipements de proximité. J'aimerais, monsieur le ministre, connaître votre opinion sur les recommandations formulées par la Cour des comptes dans son rapport sur l'école et le sport.
Dans ce contexte, qu'attendre du budget dédié à l'éducation nationale ?
Nous attendons qu'il donne des moyens supplémentaires, afin que toutes les classes puissent profiter d'effectifs acceptables ; nous attendons également que les salaires soient en adéquation avec le niveau d'étude des professeurs et, surtout, qu'ils soient à la hauteur de leur engagement et de l'importance de leur mission.
Le présent projet de budget présente une augmentation, permet de revaloriser la prime REP+ et de mettre en oeuvre le troisième volet du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations, le PPCR. Ces mesures sont les bienvenues.
Cependant, la prime REP+ ne concerne pas tous les enseignants et le troisième volet du PPCR n'est que l'application d'une décision prise il y a quatre ans et repoussée d'un an par le Gouvernement.
L'ensemble des syndicats de la profession revendiquent depuis plusieurs années une revalorisation générale du point d'indice. Il faut y souscrire, autrement que par un décret imposant une deuxième heure supplémentaire aux enseignants.
Des moyens humains complémentaires sont indispensables pour s'adapter à l'évolution démographique : alors que les effectifs ont augmenté de 100 000 élèves depuis 2017, cette rentrée a connu la fermeture de 112 écoles et 240 fusions d'écoles. La Seine-Saint-Denis, dont la population est jeune, n'est pas encore dotée de moyens suffisants, malgré les luttes et les avancées qui en ont découlé, comme l'a démontré le rapport d'information sur l'évaluation de l'action de l'État dans l'exercice de ses missions régaliennes en Seine-Saint-Denis. Stéphane Peu et moi attendons avec impatience les annonces que le Premier ministre et vous-même, monsieur le ministre, ferez jeudi à Bobigny.
Avec la création de 440 emplois dans le premier degré, nous sommes encore loin des 1 800 postes que vous aviez annoncés l'an dernier. De plus, la priorité donnée au premier degré, tout à fait compréhensible en elle-même, se fait au détriment du second degré. En effet, depuis trois ans, les créations de postes réalisées dans le premier degré l'ont été par redéploiement des moyens du second degré.
Enfin, mon collègue Sébastien Jumel, rapporteur de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005, a déposé des amendements allant dans le sens d'un meilleur accompagnement et de meilleures conditions d'exercice pour les AESH et AVS. Je signale d'ores et déjà que de nombreux élèves en situation de handicap sont en attente d'un accompagnement, deux mois après la rentrée scolaire.
Ce projet de budget ne permettant pas à l'éducation nationale de relever pleinement les défis cruciaux qui s'imposent à elle, les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine voteront contre les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Cette année encore, le budget de l'éducation nationale et de la jeunesse demeurera le premier budget de la nation. Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » pour l'année 2020 s'élèvent à 74 milliards d'euros, en intégrant les contributions aux pensions de l'État, soit une augmentation de 1,2 milliard d'euros par rapport à la loi de finance pour 2019. Vous avez souligné en commission, monsieur le ministre, que cette augmentation est deux fois supérieure à l'inflation.
Les trois quarts de cette dotation supplémentaire sont destinés à la rémunération des personnels du ministère, notamment à la revalorisation, à hauteur de 300 millions d'euros, engagée au titre du PPCR, ainsi qu'à la reconnaissance de l'engagement des professeurs qui oeuvrent en REP et REP+. Rappelons en outre que 440 postes supplémentaires sont prévus en 2020 dans le premier degré afin d'améliorer le taux d'encadrement.
Notre groupe prend acte de la poursuite de la politique sociale en profondeur engagée par le ministère en 2017. Les crédits accordés au programme 140 augmentent ainsi de 2,34 % et l'école primaire demeure la priorité.
Le projet de budget traduit aussi une volonté de mieux accueillir les élèves en situation de handicap : les crédits alloués à l'école inclusive ont augmenté de 44 % en deux ans, atteignant près de 3 milliards d'euros, ce qui est considérable, pour ne pas dire unique. Le nombre d'élèves en situation de handicap est en constante augmentation, avec environ 340 000 élèves scolarisés en 2018, soit un triplement en dix ans.
Parmi les mesures concrètes incluses dans la mission « Enseignement scolaire », dont les objectifs restent l'élévation du niveau général et la réduction des inégalités, certaines appellent plus particulièrement notre attention et nous entendons les soutenir.
La première est l'abaissement de l'instruction obligatoire à 3 ans, permettant la scolarisation de 26 000 élèves supplémentaires ; elle constitue une avancée majeure et marquera l'histoire de l'école française.
La deuxième est l'emblématique dédoublement de 10 800 classes de CP et de CE1 en réseaux d'éducation prioritaire. Ces dédoublements seront étendus aux classes de grande section de maternelle de REP et REP+ dès la rentrée de 2020.
La troisième est la limitation progressive à vingt-quatre du nombre d'élèves, d'ici à la fin du quinquennat, dans toutes les autres classes de grande section, de CP et de CE1.
Le dispositif dit plan mercredi est maintenu : près de 2 000 plans supplémentaires seront signés en 2019-2020, complétant les 2 186 plans mercredi instaurés à la rentrée de 2018, moyennant une aide versée aux collectivités par la caisse d'allocations familiales.
Le programme devoirs faits, lancé en 2017, se généralise, grâce à l'engagement des professionnels de l'éducation, ainsi qu'aux nombreuses associations nationales ou locales, qui contribuent d'ores et déjà à l'aide aux devoirs. Ce sont 6,5 millions d'euros de subventions qui leur seront versés.
Autre vecteur de réduction des inégalités sociales et territoriales, l'internat du XXIe siècle : il se veut plus qu'une solution d'hébergement, en étant doté d'un projet pédagogique de qualité sur un thème spécifique. Nous avons retenu que la construction ou la transformation d'internats pourra bénéficier d'Edu Prêt, nouvel instrument de financement, doté de 1 milliard d'euros, mis en place par la Caisse des dépôts et consignations. Ce sont 240 nouveaux projets d'internats qui devraient voir le jour d'ici à 2022.
Retenons aussi l'attention portée aux territoires, souvent ruraux, qui connaissent les baisses démographiques les plus importantes. Ainsi, jusqu'en 2022, aucune école rurale ne sera fermée sans l'accord du maire de la commune.
Toujours en direction de la ruralité, le plan d'investissement dans les bibliothèques des écoles, lancé à la rentrée de 2018, est prolongé : 2 millions d'euros sont prévus dans le projet de loi de finances pour 2020 pour permettre la dotation d'un fonds de 100 ou 200 livres par bibliothèque d'école ou de classe.
D'autre part, avec une dotation de 57 millions d'euros, le fonds de soutien au développement des activités périscolaires continuera d'accompagner les communes qui souhaitent conserver une organisation de la semaine scolaire sur plus de quatre jours en 2020.
Le groupe La République en marche se félicite de l'ambition que traduisent les parcours d'éducation artistique et culturelle– PEAC : il s'agit de faire profiter 100 % des élèves d'un dispositif d'enseignement artistique et culturel d'ici à la fin du quinquennat. Guingamp, dans la quatrième circonscription des Côtes-d'Armor, que j'ai l'honneur de représenter, accueillera le futur pôle de formation de l'INSEAC, l'Institut national supérieur de l'enseignement artistique et culturel, lequel dépendra à la fois du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, du ministère de la culture et du ministère de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.
Voilà donc quelques-unes des mesures financées qui conduisent le groupe majoritaire à être favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » dans le projet de loi de finances pour 2020.
Pour conclure, monsieur le ministre, permettez-moi de vous transmettre l'expression d'une attente forte émanant des territoires, alors qu'une réflexion est en cours sur la redéfinition de l'éducation prioritaire et qu'un rapport sur le sujet doit être remis par M. Mathiot et Mme Azéma. Il faudrait octroyer des marges de manoeuvre supplémentaires pour la caractérisation des zones prioritaires, notamment dans les territoires ruraux. Nous restons bien entendu disponibles pour travailler ensemble sur ce sujet.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Le projet de budget pour l'enseignement scolaire semble conforme aux grandes orientations annoncées dès 2018 : priorité au premier degré, réforme du lycée et du baccalauréat, école inclusive, orientation repensée, acquisition des fondamentaux consolidée, éducation artistique et culturelle stimulée, école des valeurs mobilisée, le tout à l'ère du numérique. Un bémol : en ce qui concerne l'attractivité du métier de professeur, vous vous contentez de voeux pieux.
Monsieur le ministre, je vous ai interpellé en commission sur plusieurs points, et je vous remercie pour les réponses très complètes que vous m'avez apportées. Aussi n'évoquerai-je ni le désarroi des enseignants en centres de formation d'apprentis – CFA – , ni l'avenir du Conseil national d'évaluation du système scolaire, le CNESCO, ni la réforme du baccalauréat et les combinaisons d'enseignements de spécialités en classe de première.
Vous avez dit, monsieur le ministre : « Dans la société du XXIe siècle, la fonction professorale doit prendre un sens nouveau. [Cela passe par] la personnalisation de la carrière du professeur ». Nous ne pouvons que souscrire à ces propos. Toutefois, lorsque vous affirmez que les personnels doivent exercer à vingt minutes de leur domicile, je vous réponds qu'il y a encore du chemin à faire !
Je vous crois sincère, monsieur le ministre, lorsque vous vous engagez à créer un statut pour les directeurs d'école. J'espère que cette anomalie du système scolaire français sera corrigée, afin que les directeurs, qui sont les leaders pédagogiques de leur école, puissent enfin surmonter la crise de défiance actuelle, crise doublée d'un sentiment d'abandon par notre administration.
Consulter les organisations syndicales, c'est bien, mais n'oubliez pas le terrain : je pense au groupement de défense des idées des directeurs d'école, le GDID, ainsi qu'aux idées dont m'ont fait part certains directeurs en leur nom personnel, concernant les élections au conseil d'école, les doublons numérique et papier, les signalements d'absence, les évaluations en CP ou encore les vaccins obligatoires.
La détérioration des conditions de travail des directeurs s'est considérablement accrue, aussi est-il important d'agir.
Les personnels de direction sont souvent livrés à eux-mêmes face à la violence qui gangrène l'institution scolaire : un sur deux déclare avoir été insulté au moins une fois, un sur quatre harcelé, un sur dix bousculé, et même trois sur cent frappés. Ces chiffres, provenant de l'académie de Lyon, font froid dans le dos.
Le 27 août dernier, monsieur le ministre, vous avez annoncé différentes mesures pour lutter contre les violences scolaires ; elles ont tardé du fait du pilotage interministériel, mais aujourd'hui le protocole d'accompagnement et de responsabilisation des parents, les conseils de discipline simplifiés, la présence de forces de police aux abords de certains établissements ou le référent départemental violence en milieu scolaire sont autant de réponses à ce fléau.
La rentrée a été marquée par la montée du communautarisme et du fondamentalisme religieux. Vous avez adopté une position courageuse en déclarant que la loi n'interdisait pas aux femmes voilées d'accompagner les enfants, mais que vous ne souhaitiez pas encourager le phénomène. Lors de l'examen du projet de loi pour une école de la confiance, la majorité a rejeté les amendements présentés par le groupe Les Républicains et visant à interdire le port du voile lors des sorties scolaires. Êtes-vous néanmoins prêt à aller plus loin, en publiant une nouvelle circulaire pour clarifier la situation ? Cela s'impose d'autant plus que le Président de la République a déclaré : « Le port du voile dans l'espace public n'est pas mon affaire. [… ] »
« Le port du voile dans les services publics, à l'école, [… ] c'est mon affaire. » Ce n'est pas en criant « laïcité » sur tous les tons que nous progresserons. Le pire serait de ne rien faire.
Ce budget donnera-t-il un nouveau souffle à l'Éducation nationale ? Il prévoit 1 milliard d'euros d'augmentation, dont 400 millions correspondent à la hausse du GVT, le glissement vieillisse technicité, et 100 millions au doublement des primes REP+, qui ne résolvent pas les difficultés de l'éducation prioritaire, à laquelle l'enseignement privé n'est toujours pas associé – c'est bien dommage.
Difficile aussi d'évaluer la prise en charge des AESH et la généralisation des PIAL, les pôles inclusifs d'accompagnement localisés, mais on peut noter avec satisfaction l'augmentation de 14,2 % des crédits de l'action 03 du programme 230. L'inclusion scolaire semble dans une phase décisive pour offrir un projet personnalisé de scolarisation aux 338 000 élèves en situation de handicap dans l'enseignement public ou privé.
Pour terminer, un mot sur les salaires, inférieurs en France à la moyenne de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, notamment dans l'enseignement élémentaire. Les débuts et les milieux de carrière doivent être mieux rémunérés. Le groupe Les Républicains considère que la nécessaire augmentation des salaires doit s'accompagner d'une refonte en profondeur de la formation des professeurs dans les INSPE, les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation.
Globalement, ce projet de budget s'appuie sur des priorités que soutient notre groupe. Toutefois, dans les prochains mois, nous observerons avec vigilance l'évolution des indicateurs du système éducatif en France et à l'international.
À cette heure tardive, je rappellerai que le projet de budget pour 2020 de la mission « Enseignement scolaire » poursuit l'ambition sociale majeure du quinquennat de réduire les inégalités de parcours scolaires, qu'elles soient liées à l'origine sociale ou territoriale.
C'est un engagement très fort, que soutient tout naturellement le groupe du Mouvement démocrate et apparentés.
L'extension du dédoublement des classes en REP et REP+, qui doit s'étendre à la grande section de maternelle, ainsi que l'objectif, hors éducation prioritaire, d'un effectif maximal de vingt-quatre élèves de la grande section au CE1, nous paraît un excellent levier en ce qu'il lutte, dès les premières années, si fondamentales, contre les déterminismes sociaux. À l'autre bout du spectre, la réforme du baccalauréat, avec son libre choix de spécialités, donne plus de souplesse aux voies de réussite, forcément plurielles, et devrait favoriser le croisement des profils.
Nous saluons aussi la poursuite de la campagne pluriannuelle « Ensemble pour un pays de lecteurs », avec notamment les 2 millions d'euros destinés à équiper les écoles jugées prioritaires de fonds de bibliothèque, le renouvellement de l'opération « Un livre pour les vacances » et le soutien renforcé au concours « Les petits champions de la lecture ». Vous avez également rappelé en commission l'extension du dispositif « Quart d'heure lecture », qui donne d'évidents effets positifs. La lecture, définie comme priorité de l'éducation artistique et culturelle, est à la base de toute réussite – c'est certes un poncif, mais il est toujours utile de le rappeler.
Les crédits d'intervention dédiés à la mission de lutte contre le décrochage scolaire – MDLS – , qui s'élèvent à 3 659 830 euros et visent notamment à favoriser le retour en formation des élèves en situation de décrochage, méritent, dans cet objectif de lutte pour l'égalité des chances, d'être salués, ainsi que le milliard d'euros consacré à la rénovation ou à la construction de 240 projets d'internat.
D'autre part, la politique volontariste pour l'enseignement professionnel, le soutien apporté à l'apprentissage, dont les effectifs sont en hausse dans l'enseignement secondaire comme dans l'enseignement supérieur, la dotation consacrée aux parcours d'excellence et aux cordées de la réussite, ainsi que le souhait de voir émerger une nouvelle génération de campus des métiers et des qualifications redéfinissent la voie professionnelle comme une voie d'excellence. C'est un bon moyen d'optimiser l'insertion professionnelle des jeunes.
La transformation des contrats aidés restant en activité sur la mission d'auxiliaire de vie scolaire en emplois d'AESH, de la rentrée de 2019 jusqu'à extinction des derniers contrats, était très attendue. Elle va enfin mieux valoriser ces personnels indispensables pour l'inclusion des élèves en situation de handicap.
Ainsi, on le voit, tout est fait pour permettre à chacun, d'où qu'il vienne, de réussir. Quelques signes sont encourageants, tels qu'une augmentation de la proportion d'étudiants issus de familles défavorisées attendus en classe préparatoire.
Un mot – évidemment – sur l'enseignement agricole, qui participe toujours très activement à l'objectif de réussite pour tous. Monsieur le ministre, vous avez rappelé en commission son dynamisme, et les 750 élèves supplémentaires accueillis à cette rentrée. La réforme des seuils de dédoublement, jusque-là imposés de manière uniforme et désormais définis au niveau des établissements, est une bonne nouvelle – attendue – , tout comme le déploiement du plan d'action pour que les formations de l'enseignement agricole soient mieux connues des jeunes et des familles, ainsi que des personnels de l'éducation et de l'orientation. La mise en oeuvre en 2020 du plan enseigner à produire autrement, avec son volet de formation continue des personnels, est importante et doit être saluée, compte tenu de l'incontournable contribution de l'enseignement agricole à la réussite du projet agroécologique de la France.
Je terminerai par un point qui me paraît majeur. Si l'ensemble des catégories de personnels de l'éducation nationale bénéficient de la mise en oeuvre du PPCR, nous saluons tout particulièrement le travail mené actuellement par le ministère, en concertation avec les syndicats, pour repenser la gestion des ressources humaines et revaloriser le métier d'enseignant.
La redéfinition du professorat au XXIe siècle est un objectif crucial pour attirer et conserver les compétences, et faire réussir notre éducation nationale.
Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et LaREM.
Pour atteindre les objectifs d'une école véritablement émancipatrice, nous devons donner à l'éducation nationale les moyens de son ambition et apporter aux élèves, aux parents et à la communauté éducative des réponses concrètes, en phase avec leurs questionnements.
Le projet de budget que vous nous présentez, en augmentation, reste, à 0,7 point de PIB, en deçà du pourcentage moyen investi dans l'éducation par les onze pays d'Europe comparables au nôtre. Pourtant, nous le savons, notre système doit encore progresser pour alléger le poids que l'origine sociale et géographique fait peser sur la réussite, l'orientation et l'accès aux diplômes, et offrir à chacun la possibilité de se tracer un chemin éclairé, ambitieux et porteur d'espoir. Cependant, malgré ce bel objectif, le métier d'enseignant n'est toujours pas considéré comme attractif.
Les chiffres que vous nous donnez ne traduisent qu'une partie de la réalité : une augmentation de 1,2 milliard d'euros, certes, mais dont 323 millions d'euros affectés à la masse salariale, 435 millions dédiés au GVT, 300 millions liés aux mesures relatives au PPCR prises par la majorité précédente, 60 millions au titre de la revalorisation des personnels en REP+, une augmentation conséquente, de 11 millions d'euros, des heures supplémentaires, sans parler des 30 millions pour le SNU – service national universel – , dont nous ne voyons pas l'intérêt.
Nous sommes en désaccord sur plusieurs points.
Pour revaloriser les métiers de l'éducation, nous formulons des propositions concernant les grilles de carrière et vous demandons de faire évoluer la valeur du point d'indice. Le système consistant à toujours augmenter les primes, les indemnités – assez inégalitaires – ou les heures supplémentaires, dont beaucoup d'enseignants ne veulent pas n'est pas une bonne réponse, pas plus que le recours aux contractuels sous couvert d'une réforme de la fonction publique et de passerelles permettant le passage du public au privé.
L'augmentation insuffisante de 444 postes dans le primaire pose de nouveau la question du redéploiement que vous opérez, tout comme le fait que ces moyens ne peuvent permettre d'étendre les dédoublements, mesure phare du Gouvernement, à l'ensemble des territoires afin de prendre en considération l'ensemble des élèves les plus en difficulté, ni d'absorber les 26 000 élèves supplémentaires qui devraient rentrer à l'école. Il reste en France 90 000 classes de plus de vingt-cinq élèves.
Et puis, comme le montre l'amplification du débat sur les accompagnements des sorties scolaires, il faut donner aux chefs d'établissements les moyens d'organiser l'ensemble du continuum pédagogique. La place des parents ne peut être réduite par le ministre à une controverse sur le port du voile. Toute la laïcité, mais rien que la laïcité.
Dans le second degré, environ 2 600 postes ont été supprimés en 2019, et 440 le seront en 2020, malgré l'annonce d'une augmentation des effectifs. La baisse démographique au collège doit justement nous permettre d'améliorer les conditions d'apprentissage dans toutes les classes et d'augmenter le nombre d'adultes présents aux côtés des élèves pour les accompagner dans des moments délicats et essentiels de leur parcours – passage du primaire en collège, choix de l'orientation, décrochage scolaire – ou pour mettre en place des activités artistiques.
Au lycée professionnel, 685 postes disparaissent entre 2019 et 2020. Le réaménagement des horaires par l'intermédiaire de la réforme diminue globalement les grilles horaires des enseignements généraux et les réorganisent. Ces postes sont pourtant essentiels à la réussite et à l'égalité des chances. Le décalage entre les budget annuels que nous votons et la réalité de l'année scolaire gêne l'analyse des chiffres.
Dans l'enseignement agricole, que nous nous accordons tous à défendre, on note la suppression d'une quarantaine de postes malgré une augmentation d'effectifs à cette rentrée, et un objectif de 20 000 élèves supplémentaires fixé par le ministre de l'agriculture.
Quant à la formation des enseignants, elle permet selon nous la construction d'une culture commune, qui pose l'enjeu de la démocratisation scolaire. Pour cela, elle doit se nourrir de travaux scientifiques et surtout s'appuyer sur la légitimité des enseignants, leur permettre de faire des choix éclairés en fonction d'un contexte pédagogique et personnel, et leur donner le temps nécessaire à des échanges sur leurs pratiques.
Vous avez créé par décret, contre l'avis unanime du comité technique ministériel, une allocation de formation pendant les périodes de vacance des classes, afin de répondre aux besoins didactiques liés aux nouveaux enseignements induits par la réforme du bac. Sur ce point, vous êtes bien loin de la demande des enseignants !
Nous sommes nombreux sur ces bancs à vous demander de prendre en compte les besoins immenses en matière de la médecine scolaire. Le milieu social des jeunes pèse en effet sur leur capacité à s'intégrer dans notre système scolaire et à s'y épanouir. La santé dans toutes ses dimensions est un facteur déterminant de la réussite.
Nous avons souligné l'effort consenti en direction des personnels AESH, sur lequel notre collègue Christophe Bouillon avait fortement insisté l'an dernier, mais nous pensons qu'il faut allouer des moyens supplémentaires à leur formation, en relation avec celles des autres personnels, afin de créer de véritables équipes.
Enfin, nous vous avons interrogé en commission sur certaines baisses de budget relatives aux crédits de fonds sociaux et de vie lycéenne. Vous avez allégué la sous-utilisation des crédits, ce qui pose question : au moment où l'on constate que, malheureusement, la pauvreté ne diminue pas dans notre pays et que les inégalités explosent, il est incompréhensible que les mesures et les moyens dédiés à ceux qui en ont le plus besoin ne soient pas mobilisés. Il y a là une responsabilité collective que nous portons tous.
Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas pour les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR et FI.
Le Gouvernement nous présente un projet de budget en hausse de 1,75 % par rapport à 2019. Nous saluons l'augmentation des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
Cela va bien sûr dans le bon sens, même s'il faut la mettre en perspective avec une insuffisance des financements que nous connaissons depuis longtemps, compte tenu du rôle de l'éducation nationale.
Nous avons conscience des efforts consentis par le Gouvernement pour l'instruction de nos enfants. Je pense particulièrement au dédoublement des classes de CP et de CE1 dans les réseaux prioritaires, au versement d'une prime aux enseignants en REP et REP+ ou encore à l'ambition de limiter à vingt-quatre le nombre d'élèves par classe en grande section, CP et CE1 dans l'ensemble du territoire avant 2022. Nous savons que ces réformes permettront un suivi plus personnalisé et facilitera la mise en place d'une pédagogie au plus près de l'élève. Vous avez choisi d'accorder la priorité au premier degré, où se construisent les bases des savoirs et des savoir-faire attendus dans le second degré. Je me réjouis aussi de votre décision de revenir sur les fermetures annoncées en juin et de rouvrir certaines classes à la rentrée, malgré leurs effectifs.
Nous avons également conscience que les maux dont souffre l'éducation nationale ne peuvent pas tous obtenir de réponse au sein de la présente mission. Néanmoins, il faut garder à l'esprit les nombreux chantiers : la formation des enseignants, la revalorisation de leur fonction, de leur image et de leur salaire, l'accompagnement et l'accueil de tous les élèves, qu'ils soient précoces, décrocheurs ou handicapés.
Nous avons bon espoir, monsieur le ministre, que, durant le quinquennat, vous apportiez sur chacun de ces points des réponses à une profession qui est en souffrance, alors même qu'elle est au coeur du projet républicain.
Pour ouvrir le débat budgétaire sur les problématiques prégnantes de l'éducation nationale, je défendrai, au nom du groupe UDI, Agir et Indépendants, un certain nombre d'amendements.
Nous aurons l'occasion de débattre des accompagnants des élèves en situation de handicap. Si des postes ont été créés, particulièrement ces deux dernières années, la situation ne saurait encore être parfaite. Nous considérons toutefois qu'il est nécessaire d'augmenter leur nombre et surtout de revaloriser leur fonction – j'aimerais pouvoir dire leur statut – et, bien sûr, leur salaire. D'ailleurs, lors des débats en commission, Mme la rapporteure pour avis a reconnu la faible attractivité de leur profession.
Nous aborderons également la nécessité de remédier au manque de médecins et de psychologues scolaires. Préparer la société de demain par une transformation de notre système éducatif nécessite aussi de se pencher sur le retard français en matière de rémunération des professeurs, et sans doute de repenser la politique d'orientation.
Vous savez aussi combien il nous paraît important que la situation des directeurs d'école évolue. Vous avez répondu à nos questions à ce propos en commission et lors de la séance de questions au Gouvernement du 22 octobre ; je n'y reviendrai donc pas.
Monsieur le ministre, nous aimerions obtenir une réponse concernant l'instruction obligatoire à 3 ans. Pouvez-vous confirmer que la compensation destinée aux communes a bel et bien été intégrée dans l'augmentation de 117 millions d'euros des crédits de l'action 01, « Enseignement pré-élémentaire » du programme 140, « Enseignement scolaire public du premier degré », et qu'elle sera versée l'an prochain ? Ou bien sera-t-elle versée dans deux ans, donc inscrite dans le projet de loi de finances pour 2021, après évaluation ? De nombreux maires s'interrogent. Pouvez-vous les rassurer, de sorte qu'il ne subsiste aucun doute ?
Notre groupe conçoit que la communication sur les politiques éducatives auprès des citoyens est importante. Néanmoins, nous nous étonnons de la somme qui y est consacrée dans le projet de budget pour 2020 – 4,4 millions d'euros, dont 200 000 pour la commande d'études et de sondages.
Monsieur le ministre, nous sommes conscients des actions menées et des décisions prises par votre ministère pour tendre à une véritable égalité des chances. Pour cette raison, nous vous renouvellerons notre confiance et voterons en faveur des crédits de cette mission. Toutefois, nous attendons de votre part des réponses qui nous rassureront, rassureront les communes et tous ceux qui oeuvrent chaque jour pour nos enfants – tous nos enfants – , afin qu'ils aient les moyens de réussir, de se cultiver, de s'épanouir, de préparer leur avenir.
Applaudissements sur les bancs du groupe UDI, Agir et Indépendants.
L'école de la République n'est pas aisée à réformer, tant les espoirs à son sujet sont grands. L'école que nous construisons aujourd'hui nous dit beaucoup de la société de demain. Aussi, si un projet de budget doit recevoir toute notre attention, c'est bien celui de l'enseignement scolaire. Dès lors, nous ne pouvons que nous satisfaire de constater que les crédits de la mission sont en augmentation – de 1,9 % pour les autorisations d'engagement, de 1,75 % pour les crédits de paiement.
Le Gouvernement a fait de l'école élémentaire sa priorité, avec deux grands objectifs : l'élévation du niveau général et la réduction des inégalités. En cohérence avec cette orientation, la loi pour une école de la confiance a été adoptée cette année pour faire de l'école maternelle un levier d'égalité, l'âge de l'instruction obligatoire ayant été abaissé à 3 ans. Aussi la hausse des crédits consacrés à l'enseignement du premier degré doit-elle être saluée – et je la salue : elle était nécessaire.
Nous rappelons toutefois qu'il reste à satisfaire intégralement au principe de compensation pour les communes. Le groupe Libertés et territoires réitère l'expression de son inquiétude au sujet de l'incidence financière de cette mesure sur l'ensemble du territoire.
L'allégement des effectifs répond aussi à l'objectif d'égalité. Depuis juin 2017, les classes de CP et CE1 sont dédoublées dans les réseaux d'éducation prioritaire, REP et REP+ – mesure extrêmement importante, dont les effets positifs commencent à apparaître. Nous saluons ces résultats encourageants et souhaitons que les efforts soient maintenus, notamment là où les besoins sont les plus importants – en Guyane ou en Seine-Saint-Denis par exemple, où le manque de place ne permet pas toujours que les classes soient dédoublées.
Cependant, nous craignons que les crédits prévus ne soient pas suffisants pour soutenir les mesures annoncées, qui supposent de nombreuses créations de postes. En effet, 6 000 postes supplémentaires sont nécessaires pour étendre le dispositif du dédoublement des classes aux grandes sections maternelles du réseau d'éducation prioritaire ; le plafonnement à vingt-quatre élèves des classes de grande section, CP et CE1 demanderait quant à lui la création de 3 000 à 4 000 postes. Nous exprimons donc notre inquiétude sur ce point, monsieur le ministre, puisque vous estimez que le solde d'emploi devrait être nul, avec autant de créations d'emplois que de départs, à savoir une augmentation de 140 emplois dans le premier degré public et une diminution d'autant dans le second degré.
Les crédits consacrés à la formation des personnels enseignants sont un deuxième objet d'inquiétude, puisqu'ils diminuent de 3,45 %, alors que l'objectif premier du Gouvernement est, comme nous l'avons dit, d'élever le niveau général des élèves. Cela me conduit à rappeler dès maintenant qu'améliorer les conditions de travail des enseignants, en particulier des directeurs d'école, est une urgente nécessité. Le drame survenu au mois de septembre dans une école de Pantin ne doit pas se reproduire et doit nous alerter sur les conditions difficiles du personnel éducatif et sa solitude.
S'agissant de l'inclusion des élèves en situation de handicap, les crédits sont en augmentation -– jusqu'à 14 % dans le second degré public. Nous saluons ces efforts et votre détermination en ce domaine. Néanmoins, des progrès restent à faire sur le statut des accompagnants des élèves en situation de handicap. Une première étape a été franchie avec la loi pour une école de la confiance, qui dispose que les AESH seront désormais recrutés par CDD, contrat à durée déterminée, de trois ans minimum renouvelable une fois, avant transformation en contrat à durée indéterminée – CDI. Il nous faut toutefois aller plus loin, car nous constatons aujourd'hui encore des difficultés de recrutement des AESH ; il convient d'améliorer leur statut, leur formation et leur rémunération. Nous défendrons un amendement en ce sens. Nous défendrons également un amendement visant à augmenter les moyens consacrés à la médecine scolaire, qui est essentielle pour la prévention et l'accès aux soins de tous les enfants.
Enfin, je ne pouvais terminer mon intervention sans mentionner les inégalités territoriales en matière scolaire. Je vous invite, monsieur le ministre, à une vigilance accrue en matière de fermetures non seulement d'écoles, mais aussi de classes, car celles-ci inquiètent les élus locaux, notamment dans les territoires ruraux qui connaissent les baisses démographiques les plus importantes ; vigilance aussi quant à la poursuite de la réforme du lycée général et technologique, qui, jusqu'à présent, n'est pas totalement satisfaisante en matière d'égalité entre les territoires et les établissements.
Monsieur le ministre, le combat pour l'école républicaine est le plus grand et le plus noble des combats. Vous le menez ; les députés du groupe Libertés et territoires le mènent également. Je souhaite que ce combat nous rassemble, pour l'avenir de notre pays et, surtout, pour celui des jeunes qui seront et qui feront la France de demain.
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.
Le présent projet de budget de l'enseignement scolaire traduit la priorité accordée à l'éducation par le Président de la République et par le Gouvernement. Ce projet de budget confirme bien nos engagements – je vous remercie de l'avoir noté. Il prolonge la loi pour une école de la confiance, que vous avez adoptée cet été. Il permet la mise en oeuvre effective de nos réformes, dont l'ambition est claire : la réussite de tous les élèves, qui passe par le rehaussement du niveau général et la justice sociale. Le budget de la mission « Enseignement scolaire » qui vous est proposé pour 2020 s'établit à 52,1 milliards d'euros, hors cotisations aux pensions de l'État. Cela représente une augmentation de près de 2 %, soit un peu plus de 1 milliard d'euros supplémentaires, somme qui nous permettra de poursuivre les transformations profondes du système éducatif.
Le présent projet de budget réaffirme notre ambition pour l'école primaire. Celle-ci doit conduire à la maîtrise par tous les élèves des savoirs fondamentaux : lire, écrire, compter, respecter autrui. Si nous réussissons cela pour tous les élèves de l'école primaire, alors nous réaliserons le premier des objectifs de justice sociale qu'un pays peut se fixer. L'effort en faveur du premier degré est en effet la première des priorités. Comme les années précédentes, des créations de postes sont prévues, dont 440 à l'école primaire, alors que le contexte est celui d'une baisse démographique, puisqu'il y aura 50 000 élèves de moins à la rentrée 2020. L'effet combiné de ces deux tendances permettra d'améliorer encore le taux d'encadrement dans chaque département de France.
Ce projet de budget soutient l'une des mesures de justice sociale les plus importantes du Gouvernement : la réduction du nombre d'élèves dans les classes où sont posées les bases de l'apprentissage. Nous consoliderons le dédoublement des classes de CP et de CE1 en REP et REP+. Comme vous le savez, cela concerne aujourd'hui 300 000 élèves, soit 20 % d'une classe d'âge. Nous étendrons progressivement aux grandes sections de l'école maternelle du réseau d'éducation prioritaire le dédoublement des classes ; 150 000 élèves supplémentaires seront concernés par cette mesure. C'est un signal important, alors que la nouvelle politique de l'école maternelle était au coeur de la loi pour une école de la confiance. Nous limiterons progressivement à vingt-quatre élèves par classe à partir de la rentrée scolaire de 2020 les effectifs des classes de grande section, CP et CE1, pour toute la France. Nous accueillerons 26 000 élèves supplémentaires par an, avec l'abaissement de l'âge de la scolarité obligatoire à 3 ans. Toutes ces mesures représentent pour l'école primaire une politique volontariste, de justice sociale et de hausse du niveau général.
Le présent projet de budget accompagne tous les élèves vers la réussite. Le volume d'enseignement du second degré public sera maintenu en 2020, du fait de l'augmentation du volume des heures supplémentaires.
Ce projet de budget renforce le soutien aux élèves les plus fragiles, qui s'agisse de fragilités sociales – comme je l'ai indiqué en commission, le montant alloué aux bourses de collège et de lycée augmente de 5 % – ou de fragilités liées au handicap, puisque les moyens permettant de rendre l'école pleinement inclusive sont très significativement renforcés. Nous pouvons parler depuis cette rentrée d'un véritable service public de l'école inclusive ; en 2020, nous consacrerons ainsi plus de 3 milliards d'euros par an à l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Depuis 2017, c'est l'action dont la hausse a été la plus importante, puisqu'elle a été de 44 %. Nous en sommes fiers, parce que c'est une de nos priorités.
Le projet de budget vise à permettre le déploiement de 3 000 pôles inclusifs d'accompagnement localisés, les PIAL, qui représentent une nouvelle organisation de notre système. Le projet de loi crée également un service de gestion dédié aux accompagnants.
Enfin, ce projet de budget pour 2020 remédie à la précarité des personnels, en achevant la transformation des contrats aidés en contrats d'AESH et en généralisant le recrutement sur la base d'un contrat de droit public de trois ans renouvelable une fois, avant la signature d'un contrat à durée indéterminée pour ceux qui le souhaitent. Le financement de 4 000 postes d'AESH supplémentaires à la rentrée de 2020 montre bien qu'il s'agit d'un déploiement quantitatif ; il va de pair avec une évolution qualitative de l'école, plus inclusive.
La rentrée de 2020 sera également celle de l'aboutissement de la refonte du baccalauréat et des programmes du lycée, qui doit permettre à chacun de s'approprier progressivement son avenir.
Le présent projet de budget, enfin, marque le souci de renforcer l'attractivité des métiers des professeurs et des personnels concourant aux missions d'éducations. Comme je l'ai dit au moment de la rentrée scolaire, une des grandes priorités de l'acte II du quinquennat concerne les ressources humaines du ministère.
À l'occasion de la présentation du projet de budget, je veux insister sur les conditions de travail des personnels de l'éducation. Dans la société du XXIe siècle, les missions évoluent et peuvent s'exercer de manière différenciée. Les carrières doivent donc accompagner ces évolutions, l'investissement et le niveau de formation doivent être reconnus, et l'attractivité du métier d'enseignant maintenue. Cela dépend non seulement des mesures que nous prenons, mais aussi de nos discours et des représentations que nous nous faisons du métier d'enseignant.
Le schéma d'emploi du ministère est sanctuarisé. Il y aura donc au cours de l'année autant d'arrivée que de départs. La stabilisation des emplois administratifs du ministère doit aussi être soulignée. Elle accompagne la mise en oeuvre d'une politique plus qualitative de gestion des ressources humaines de proximité, au plus près des professeurs, comme l'ont souligné la rapporteure spéciale et la rapporteure pour avis.
Cette politique de gestion des ressources humaines de proximité est une des révolutions de cette rentrée. Elle concerne, dans un premier temps, près d'un quart des enseignants, et elle les concernera tous à terme. Il s'agit en effet de proposer la possibilité d'entretiens réguliers pour l'ensemble des personnels de l'éducation nationale. Nous voulons désanonymiser la vie professionnelle des professeurs et des personnels.
Sur 1 milliard d'euros de crédits supplémentaires, les crédits de masse salariale représentent 823 millions d'euros ; il s'agit d'un abondement net. Ainsi, 80 % de l'augmentation du budget bénéficiera directement au personnel du ministère, contribuant aux hausses du pouvoir d'achat pour l'année 2019-2020.
Pour presque la moitié, soit 300 millions d'euros, cette hausse résulte principalement de la progression naturelle du déroulement des carrières à l'ancienneté. L'autre moitié, de l'ordre de 400 millions d'euros, correspond à des mesures catégorielles : 300 millions au titre de la revalorisation des carrières dans le cadre du PPCR, 60 millions pour la troisième revalorisation des personnels exerçant en REP+ – j'insiste sur ce point car cette revalorisation, réclamée depuis longtemps, permet, après trois rentrées scolaires, d'assurer l'attractivité des postes en réseau d'éducation prioritaire renforcé ; une enveloppe indemnitaire de 30 millions est en outre destinée à accompagner les mesures de ressources humaines de l'agenda social, par exemple en améliorant le taux d'accès à la hors classe des professeurs des écoles.
Telles sont les grandes lignes du projet de budget que je vous présente et qui concrétise notre engagement à faire de l'école un lieu d'épanouissement et de réussite au service de tous. Surtout, ce projet de budget accompagne une évolution qualitative de l'enseignement scolaire, qui concerne en priorité l'enseignement primaire, car nous voulons l'ancrage des savoirs fondamentaux pour tous les élèves, mais aussi le collège, où le programme devoirs faits porte ses premiers fruits en matière d'évolution pédagogique, ainsi que le lycée : la réforme du lycée professionnel et celle du baccalauréat général et technologique se concrétisent en 2019-2020 et transforment la vie des lycées. Les lycéens, en effet, auront une bien plus grande liberté de choix et, en préparant le baccalauréat, pourront se préparer à réussir au-delà.
Il ne s'agit donc pas que d'une forte augmentation budgétaire, il s'agit aussi d'une évolution qualitative, qui se traduit par une transformation concrète et souvent attendue du système éducatif.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, MODEM, UDI, Agir et Indépendants. – Mme Agnès Thill applaudit aussi.
Nous en venons aux questions des députés. Je vous rappelle que la durée des questions et des réponses est fixée à deux minutes.
La parole est à Mme Sabine Rubin.
Dans un rapport de 2018, la Cour des comptes a jugé que les données quantitatives budgétaires et financières concernant les AESH étaient « opaques ». En effet, une part importante des AESH sont placés hors titre 2, c'est-à-dire hors du plafond d'emplois, parce qu'ils sont employés directement par leur établissement d'enseignement. Ainsi, 2,03 % des AESH inscrits au titre 2 en 2019 se retrouvent inscrits hors titre 2 en 2020, ce qui permet de ne plus justifier au premier euro quelque 800 millions d'euros de crédits. Cette tendance n'est pas prête de s'inverser : entre 2019 et 2020, les crédits hors titre 2 augmentent de 17,4 %, alors que les crédits relevant du titre 2 n'augmentent que de 8,2 %.
Pour les AESH inscrits hors titre 2, les conséquences sont concrètes : précaires parmi les précaires, ils perdent de nombreux droits. De plus, leur rémunération n'est pas incluse de manière précise dans les documents budgétaires du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse, car elle est noyée dans les subventions accordées aux établissements publics. Pour cette même raison, il est très difficile de recenser le nombre d'AESH qu'emploie votre administration.
Quand c'est flou, c'est qu'il y a un loup, monsieur le ministre. Pour nous, cela pose deux problèmes majeurs. D'une part, les comptes que vous présentez à la représentation nationale violent le principe de sincérité budgétaire, car nous ne saurions légiférer sans avoir accès à des statistiques précises. D'autre part, l'augmentation des crédits hors titre 2, réservée aux AESH mutualisés – point important – laisse envisager que le payeur, en l'occurrence votre ministère, devienne le prescripteur des notifications en lieu et place des maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH. Sinon, comment le ministère pourrait-il anticiper, dans ses prévisions budgétaires, des recrutements d'AESH mutualisés plus importants que ceux d'AESH individualisés ? En réalité, l'augmentation des crédits hors titre 2 traduit votre philosophie en matière d'inclusion scolaire : la mutualisation à tout prix, au détriment des besoins réels des élèves en situation de handicap – ce qui nous pose problème.
Nous proposons un remède à ces deux maux : la titularisation de tous les AESH, comme il est proposé dans notre contre-budget. Pourquoi ne pas choisir cette voie au bénéfice des AESH et des élèves et pour rendre lisible votre politique d'inclusion ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je l'ai dit à la tribune, madame la députée : le budget augmente de 44 % en deux ans. Il faut donc tout votre talent pour décrire cette évolution comme une quelconque régression.
S'y ajoute en outre, comme je l'ai indiqué, une déprécarisation des personnels que chacun peut constater en cette rentrée. Il faut donc aller chercher très loin des arguments techniques pour tenter de décrire la situation à l'inverse de ce qu'elle est ! Les documents budgétaires contiennent toutes les descriptions souhaitées. Les reproches de la Cour des comptes portent sur le passé ; les choses se sont améliorées depuis. La situation sociale des AESH n'est en rien différente selon qu'ils relèvent du titre 2 ou non. Qu'ils dépendent du rectorat ou de l'établissement public local d'enseignement, l'EPLE, ils perçoivent le même salaire et sont recrutés dans le cadre de contrats de trois ans, comme les assistants d'éducation. Vous devriez donc vous réjouir que cette rentrée se caractérise par une stabilité beaucoup plus forte pour les AESH.
Quant à la discussion relative aux AESH mutualisés ou individualisés, nous l'avons eue à plusieurs reprises, y compris dans le cadre de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, qui y consacre plusieurs pages de son rapport. Comme vous le savez, nous faisons preuve sur ce point d'un grand pragmatisme et partons de l'intérêt de l'élève, qui peut consister à bénéficier d'un accompagnement mutualisé ou individualisé selon les cas. Il m'est arrivé de me rendre dans des classes où la présence de trois accompagnants ne se justifiait pas en soi. La bonne gestion n'est pas un gros mot et ne saurait être reprochée, car elle est au service des élèves. Il m'est aussi arrivé de rencontrer des élèves non accompagnés alors qu'ils semblaient prioritaires par rapport à d'autres élèves accompagnés.
En clair, l'amélioration de la gestion, outre qu'elle est un objectif en soi, est au service de la situation des AESH et de celle des élèves. Ne mettons pas ces trois critères en contradiction ; au contraire, l'amélioration de cette rentrée se produit sous ces trois angles, et c'est un élément de satisfaction. N'essayons pas de faire croire à une quelconque intention cachée. Encore une fois, nous avons augmenté le budget de 44 % en deux ans et j'ignore par quel tour de passe-passe nous pourrions faire passer cette hausse pour une économie budgétaire.
Vous le voyez : nous savons dépenser plus, mais nous savons aussi dépenser mieux. Nous faisons l'un et l'autre à la fois, car il s'agit d'une priorité majeure. Nous visons naturellement l'intérêt des élèves et celui des personnels.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que les maîtres-mots de votre action sont une plus grande justice sociale et l'élévation du niveau général, et aussi une plus grande justice territoriale. Les programmes de la mission que nous examinons sont en parfaite cohérence avec les objectifs de la loi pour une école de la confiance. Je pense en particulier à la hausse importante de 14 % des crédits consacrés à l'action « Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap » et à la hausse des crédits du programme « Enseignement scolaire public du premier degré ».
Il y a quelques semaines, monsieur le ministre, vous avez confié à Mme Salomé Berlioux une mission de réflexion sur les obstacles que rencontre la jeunesse en milieu rural. De même, vous recevrez prochainement le rapport de Mme Azéma et de M. Mathiot visant à repenser l'éducation prioritaire en tenant compte de l'ensemble des enjeux liés aux territoires urbains et ruraux.
Ma question est donc la suivante : quelle stratégie déploie le ministère à travers l'augmentation importante des crédits consacrés à la mission « Enseignement scolaire », et comment comptez-vous la mettre au service de tous les élèves, dans tous les territoires ?
Monsieur le député, je vous remercie pour cette question importante sur le devenir de l'école rurale, que nous avons souvent abordée dans cet hémicycle et que concerne le présent projet de budget. Nous avons mis au point une véritable stratégie pour l'école rurale, qui repose sur des critères à la fois quantitatifs et qualitatifs.
S'agissant des aspects quantitatifs, dans les quarante-cinq départements les plus ruraux, 270 postes supplémentaires ont été créés depuis trois ans, en incluant la rentrée actuelle et la rentrée suivante, pour 57 000 élèves en moins. Nous avons maintenu l'école rurale à un haut niveau de densité, puisque 20 % des écoles de France comptent une ou deux classes, ce qui traduit le volontarisme du Gouvernement. L'amélioration du taux d'encadrement des élèves dans tous les départements est encore plus vraie dans les cinquante départements les plus ruraux, de façon à offrir un service d'éducation plus efficace partout sur le territoire. En Lozère, par exemple, les classes comptent en moyenne quatorze élèves entre la petite section et le CM2 ; dans le Cantal, cette moyenne est de dix-sept élèves. Le Président de la République s'est engagé – et nous appliquons cet engagement – à ce qu'aucune école ne ferme avant la fin du quinquennat sans accord préalable du maire de la commune concernée.
Les territoires ruraux bénéficient en priorité de mesures spécifiques relevant de l'ensemble de notre politique éducative. Je pense à la revitalisation des internats, que plusieurs d'entre vous ont saluée et qui bénéficiera notamment aux territoires ruraux ; je pense aussi au plan bibliothèques, qui permet de constituer des fonds de livres dans des écoles isolées et qui est doté de 2 millions d'euros, ou encore à l'appel à projets « Écoles numériques innovantes et ruralité », lancé dans le cadre du programme d'investissements d'avenir – PIA – et doté d'environ 20 millions d'euros, qui permettra à 3 800 écoles dans 3 570 communes rurales de bénéficier d'équipements numériques destinés à favoriser les apprentissages. Enfin, les conventions ruralité, vous le savez, constituent une politique qualitative que nous avons poursuivie et approfondie. Aujourd'hui, quarante-neuf départements sont déjà couverts par ces conventions qui permettent de constituer des pôles scolaires, de mettre les écoles en réseau, de diminuer le nombre d'écoles à classe unique, d'encourager l'innovation pédagogique, d'adapter les services de transport scolaire et de recourir aux ressources numériques.
J'ai proposé à tous les interlocuteurs concernés, notamment dans le cadre des rapports auxquels vous avez fait référence, monsieur le député, de déployer une stratégie qualitative de rebond de l'école rurale. J'en ai de multiples exemples, comme cette école que j'inaugurai la semaine dernière non loin d'ici, où se fait ce que nous préconisons pour l'ensemble de la France, à savoir le renforcement de l'attractivité par une politique de l'école rurale, le rebond de l'école pouvant entraîner le rebond démographique d'un village. C'est cette stratégie qualitative que nous souhaitons pour l'école rurale, en ne nous contentant pas d'agir sur la défensive, mais en étant aussi à l'offensive.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Permettez-moi de vous rappeler, monsieur le ministre, que la durée de deux minutes s'impose à la réponse du Gouvernement aussi.
La parole est à Mme Agnès Thill.
Force est de constater que cette année, le budget de l'éducation est en hausse, ainsi que le taux d'encadrement des élèves, que l'école primaire est la priorité – ce dont je me réjouis sincèrement – et que les salaires des enseignants en REP augmentent.
Ces dernières semaines, l'actualité de l'école s'est accélérée : prise de conscience croissante du harcèlement et des violences à l'école, formation et appui sur les fondamentaux, débat sur le voile islamique pour les accompagnatrices scolaires, suicide d'une directrice d'école. Autant de sujets qui mériteraient d'être traités individuellement, mais j'irai à l'essentiel, car nous devons être pragmatiques.
Le premier point que j'évoquerai concerne ce tragique événement que nous avons tous suivi : le suicide de Mme Christine Renon, directrice de l'école Méhul de Pantin. Un tel drame suscite des interrogations et exige des réponses ; cela ne doit pas se reproduire. N'est-il pas temps de doter les directeurs et directrices d'école d'un véritable statut ? Quelles sont les mesures prévues pour soulager leur charge de travail croissante depuis des années et pour revaloriser leur rémunération, afin de rendre plus attractive la profession de ceux qui se trouvent en première ligne dans l'instruction de nos enfants ? Rappelons qu'un professeur des écoles ayant vingt-quatre années d'ancienneté gagne 2 000 euros par mois, sans possibilité d'heures supplémentaires.
Ma seconde question porte sur l'objectif ambitieux que le Président de la République, Emmanuel Macron, dévoilait le 25 avril : parvenir, d'ici à la fin du quinquennat, c'est-à-dire en trois ans, à ce qu'aucune classe de grande section, de CP et de CE1 ne compte plus de vingt-quatre élèves. C'est l'objectif affiché de classes « à taille humaine », dans toutes les écoles de la République. Cette annonce, au-delà de l'ambition qu'elle incarne, suscite un problème majeur : il faudra consentir un effort budgétaire considérable. Comment le Gouvernement compte-t-il financer une telle mesure ?
S'agissant des directeurs d'école, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire ici, des évolutions se produiront au retour des vacances de la Toussaint. D'abord, je réunirai le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ministériel pour faire le point sur les conditions d'exercice du métier. Ensuite, un questionnaire, conçu avec les organisations syndicales, sera envoyé à l'ensemble des directeurs d'école, afin d'obtenir des informations qualitatives. D'ores et déjà, les charges administratives ont diminué et des aides supplémentaires ont été débloquées pour améliorer les conditions de travail. Je crois qu'un certain consensus règne sur ce sujet.
Quant au plafonnement des effectifs dans les grandes sections de maternelle et les classes de CP et de CE1 dans toute la France, il commencera, je le répète, dès la rentrée de 2020, grâce à ce projet de loi de finances. La mesure sera effective dès la rentrée prochaine dans toutes les grandes sections de maternelle. L'objectif est un plein déploiement de cette disposition à la rentrée de 2021. La mise en oeuvre de la mesure nécessitera par conséquent deux projets de loi de finances.
Le plafonnement est déjà effectif dans plus de la moitié des classes de CP et de CE1 depuis la rentrée de cette année. Nous piloterons cette évolution progressive au cas par cas, en fonction des constats démographiques dressés dans chaque département.
Il y aura donc trois temps : une première étape a eu lieu à la rentrée de cette année ; une deuxième, qui apparaît dans la programmation budgétaire, se déroulera à la rentrée de l'année prochaine ; enfin, la rentrée de 2021 constituera le troisième temps de la mise en oeuvre de la mesure.
J'appelle les crédits de la mission « Enseignement scolaire », inscrits à l'état B.
Nous commençons par une discussion thématique sur les postes d'enseignants.
Compte tenu de l'heure tardive, je vous propose, si vous en êtres d'accord, madame Victory, de soutenir en même temps les trois amendements nos 358 , 363 et 362 .
Certainement, madame la présidente.
L'amendement no 358 concerne les postes dans l'enseignement du premier degré. Le 25 avril 2019, le Président de la République a fait part de sa volonté de limiter à vingt-quatre le nombre d'élèves par classe entre la grande section de maternelle et le CE1, et d'élargir cette mesure au-delà de l'éducation prioritaire. Ce dernier point nous paraît primordial, puisque 70 % des enfants en difficulté scolaire ne sont pas scolarisés en REP ou en REP+. Il convient donc d'étendre la mesure à l'ensemble des territoires.
Si nous saluons cette annonce, il reste néanmoins à la mettre en oeuvre. On estime que l'application de cette mesure nécessiterait au total la création de 10 000 postes d'enseignants supplémentaires, soit 3 300 postes par an d'ici à la fin du quinquennat. Or le présent projet de loi de finances ne prévoit la création que de 440 postes d'enseignants dans le premier degré, ce qui nous semble insuffisant. L'amendement no 358 vise donc à y créer 3 000 postes d'enseignants dans le premier degré.
L'amendement no 363 vise quant à lui à créer des postes dans l'enseignement secondaire. Je rappelle qu'à la rentrée de 2019, 2 650 postes d'enseignants ont été supprimés alors même que la direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse prévoyait une augmentation des effectifs dans les collèges et les lycées généraux, techniques et professionnels de 27 515 élèves. Pour que tous les élèves bénéficient de conditions d'apprentissage égales et acceptables, il faut créer de nouveaux postes ou, à tout le moins, revenir sur la suppression de postes prévue par le projet de loi de finances, comme le prévoit l'amendement no 362 .
S'agissant de l'amendement no 358 , je tiens à rappeler que l'objectif de dédoubler l'ensemble des classes de CP et de CE1 en REP et en REP+ a été atteint cette année. Cela concerne 300 000 élèves. Pour l'instant, force est de constater que le Gouvernement tient ses engagements.
Phénomène préoccupant, les effectifs dans le primaire diminuent depuis 2017 : ainsi, il y aura 50 000 élèves en moins en 2020, enseignement public et privé confondus. La commission et moi-même sommes défavorables à l'amendement.
Pour ce qui concerne les deux amendements suivants, la hausse des effectifs d'élèves, qui justifierait l'augmentation des crédits, est en réalité minime, puisqu'elle n'est que de 0,2 % par rapport à l'an dernier. La diminution d'emplois, qui, pour l'essentiel, n'étaient pas pourvus par des titulaires, est compensée par un recours accru aux heures supplémentaires, qui améliore le pouvoir d'achat des professeurs, certains d'entre eux le demandant. En outre, les crédits du second degré ne baissent pas : près de 450 millions d'euros supplémentaires sont prévus pour le programme 141. La commission est donc défavorable aux amendements nos 363 et 362 .
Même avis que celui de la commission.
Madame la députée, je pourrais souscrire à votre volonté d'accélérer le rythme, mais n'oublions jamais que les décisions de ce type ont un impact non seulement sur les finances publiques, mais aussi sur les ressources humaines. Quand bien même nous généraliserions plus rapidement la mesure de plafonnement du nombre d'élèves par classe – et nous ne pourrions qu'être d'accord sur le principe – , nous rencontrerions des difficultés à pourvoir les postes que nous créerions.
Le rythme que j'ai indiqué lors de ma précédente intervention nous paraît le bon, tant du point de vue budgétaire que de celui des ressources humaines. Il traduit un très grand volontarisme, inédit, car nous créons des postes alors que la démographie diminue, afin d'améliorer, rentrée après rentrée, le taux d'encadrement. Avis défavorable.
Je pourrais, à mon tour, être d'accord avec vous, monsieur le ministre, mais demander des heures supplémentaires aux collègues lorsque les postes ne sont pas pourvus n'est pas la bonne solution. Nous en avons souvent parlé : il faut aller plus loin et envisager les conséquences du fait que beaucoup d'élèves en difficulté ne sont pas scolarisés en REP ou en REP+.
Murmures sur certains bancs du groupe LaREM.
Entendu, madame la présidente – désolée, chers collègues, mais il se trouve que nous avons travaillé sur ces questions.
L'amendement no 361 , d'appel, me tient particulièrement à coeur. Il vise à financer la titularisation d'une partie des contractuels de l'enseignement secondaire. Le volume des contractuels atteint en effet 40 % dans certaines zones tendues, où le recrutement d'enseignants reste difficile dans certaines matières ; cela contredit l'exigence de stabilité des équipes, élément pourtant déterminant d'une politique tournée vers la réussite des élèves.
Aujourd'hui, l'éducation nationale a régulièrement recours aux enseignants non titulaires, qui sont 37 000, dont 1 000 maîtres auxiliaires et 36 000 contractuels. Ces postes précaires placent les enseignants dans des conditions difficiles et instables, et les mettent dans des situations qui ne favorisent ni leur épanouissement personnel, ni le bon exercice de leur métier, ni la réussite des enfants. En effet, ils doivent s'adapter, dans des périodes très courtes, à des types d'établissements, des niveaux et des programmes différents. En outre, ce statut ne leur permet pas d'avoir accès à la formation dont bénéficient les autres enseignants, et les défavorise pour leur rémunération et leur retraite.
Certains de ces enseignants possèdent une longue expérience de cinq, dix ou quinze ans, et devraient être titularisés en fonction de la qualité de leur enseignement et de critères validés par l'institution, sans avoir à réussir un concours interne.
J'ai tout à fait conscience qu'il s'agit d'un amendement d'appel, et qu'une discussion serait nécessaire entre le ministère et les partenaires sociaux pour fixer les conditions des titularisations. Il faudrait néanmoins se pencher sérieusement sur la question.
L'amendement no 370 concerne l'enseignement agricole, dont nous avons beaucoup parlé dans nos interventions. Il vise à revenir sur la suppression de soixante postes dans l'enseignement agricole, prévue à la rentrée de 2020. Le Gouvernement, selon les chiffres que nous avons consultés, souhaite supprimer trente-neuf postes d'enseignants, sept postes de catégorie A et quatorze de catégories B et C. Alors que le ministre de l'agriculture et de l'alimentation lance une campagne, « L'aventure du vivant », qui a pour objectif d'augmenter de 20 000 élèves les effectifs de l'enseignement agricole, une telle diminution viendrait affaiblir ce dernier, qui constitue pourtant une voie de formation très intéressante, notamment pour des élèves au profil un peu particulier.
Lors de la précédente législature, 800 emplois avaient été créés pour accompagner la montée en puissance de l'enseignement agricole ; aujourd'hui, les suppressions de postes se font au détriment de la qualité de l'enseignement et de l'éventail des options offertes dans ces établissements, au moment où les enjeux touchant à la biodiversité et à l'état de la planète sont fondamentaux. Cette question des postes dans l'enseignement agricole est importante pour nous.
S'agissant de l'amendement no 361 , comme je l'avais dit en commission, la titularisation d'une partie seulement des contractuels de l'enseignement secondaire me paraît compliquée. Il s'agit bien d'un amendement d'appel, puisqu'une réforme d'une telle ampleur ne peut être examinée dans le cadre d'une discussion aussi restreinte. La commission y est défavorable.
Quant à l'amendement no 370 , les suppressions de postes que vous évoquez sont dues à la baisse des effectifs d'élèves dans l'enseignement agricole. Il est normal que le nombre d'enseignants s'ajuste à celui des élèves.
Madame la députée, vous avez vous-même qualifié l'amendement no 361 d'amendement d'appel. Il y a toujours du travail à accomplir pour améliorer la situation des contractuels. La loi de transformation de la fonction publique va stabiliser la position de ceux-ci et améliorer leurs conditions de travail. C'est en tout cas la tâche que nous aurons à remplir à l'avenir.
Comme vous le savez, le nouveau cadre d'emploi des contractuels, qui existe depuis trois ans à l'éducation nationale, a permis d'améliorer la situation de ces personnels. Je tiens néanmoins à dire très clairement que notre but n'est pas d'augmenter le pourcentage de contractuels dans l'éducation nationale ; la présence de contractuels répond à une nécessité pour le service public, mais n'est pas un but en soi.
L'amendement no 370 me donne l'occasion de réitérer mon complet soutien à l'enseignement agricole. Sur ce sujet, comme sur d'autres, nous parvenons à déployer des politiques interministérielles très coopératives, qui commencent à porter leurs fruits. Je l'ai dit en commission, le nombre d'élèves orientés vers l'enseignement agricole a augmenté pour la première fois depuis de nombreuses années. Avec M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, nous allons accentuer cette tendance, très positive.
Vous le savez, les moyens de l'enseignement agricole sont proportionnellement plus élevés que ceux de l'enseignement scolaire. De ce fait, certains lycées agricoles sont parfois sous-fréquentés, ou connaissent un surencadrement. Notre politique d'orientation vise à ouvrir des opportunités. Mme la rapporteure proposait tout à l'heure avec raison que davantage d'élèves vivant dans les zones urbaines aillent dans les lycées agricoles : c'est tout à fait le genre de politiques que nous mettons en place, car elles ressortissent à la fois à l'intérêt de l'élève et à la bonne gestion. Bien orienter l'élève et remédier au sous-effectif de certains lycées agricoles, c'est une bonne manière de concilier ce double objectif.
Pour ces raisons et celles avancées par Mme la rapporteure spéciale, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les deux amendements.
J'aimerais répondre brièvement au sujet des contractuels. On peut admettre, à la rigueur, que l'on y recoure s'il manque un enseignant pour assurer deux, voire quatre heures de cours de langue, car on ne trouvera personne d'autre pour le faire. Il faut alors s'en remettre à la souplesse de fonctionnement des établissements scolaires.
En revanche, si des contractuels occupent des postes pleins, assurant dix-huit heures de cours hebdomadaires, cela pose problème. Or chacun sait qu'il en va ainsi dans certains établissements. On en revient à ce que nous disions tout à l'heure au sujet notamment de l'attractivité du métier. Recourir à un contractuel pour assurer deux ou trois heures d'un enseignement très spécifique ou pour occuper un poste plein, ce sont deux choses bien distinctes.
« Ah ! » sur certains bancs du groupe LaREM.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 725 .
Il s'agit de transférer 50 millions d'euros du programme 214 vers l'action 03, « Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap », du programme 230, « Vie de l'élève ».
Dans le Biterrois, lors de la rentrée 2019, de nombreux enfants souffrant de troubles de l'apprentissage ou de troubles « dys » ont été particulièrement démunis.
Quelques exemples. Myriam, 11 ans, souffre de dyspraxie visuo-spatiale et d'une maladie orpheline. Elle se déplace en fauteuil roulant. Lundi 2 septembre 2019, elle n'a pu faire sa rentrée comme les autres enfants, car il n'y avait personne pour s'occuper d'elle dans son établissement scolaire.
Lou, 9 ans, est accompagnée par un AVS qui doit, contrairement à la législation en vigueur, partager son temps avec deux autres enfants, dans l'attente du traitement de son dossier par la MDPH.
Kévin, 7 ans, souffre du trouble du déficit de l'attention et est hyperactif. Faute d'AESH, il ne peut aller à l'école que le matin depuis la rentrée.
D'après l'INSERM, l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, une proportion comprise entre 5 % et 7 % de la population est concernée, à des degrés variables, par la dyspraxie. Les enfants sont les premiers à connaître des difficultés, dans le cadre de leur scolarité. Si certains handicaps sont immédiatement détectables, d'autres, tels que les troubles « dys » – par exemple, la dyslexie, la dysphasie et la dyspraxie – sont beaucoup plus difficiles à identifier.
À la rentrée scolaire de 2019, on estimait que le nombre d'enfants handicapés privés d'AESH était compris entre 11 000 et 13 000. Si la volonté de professionnalisation des parcours des accompagnants des élèves en situation de handicap est une bonne chose, il faudrait en augmenter considérablement le nombre pour répondre aux besoins des enfants qui en sont privés, ainsi qu'aux besoins des enfants disposant d'un AESH dont le nombre d'heures d'intervention est insuffisant. D'après un rapport du Haut Conseil de la famille, de l'enfance et de l'âge publié le 5 juillet 2018, 33 % des parents d'enfants auquel un accompagnement mutualisé a été prescrit par la MDPH estiment en effet que le nombre d'heures d'intervention est insuffisant.
Madame Ménard, je partage avec vous le voeu que chaque enfant et chaque famille qui en ont besoin puissent bénéficier de l'aide d'un AESH. L'opportunité de votre amendement a déjà été débattue.
Le présent projet de loi de finances prévoit la création de 4 000 postes d'AESH supplémentaires, de 3 000 PIAL et des services départementaux dédiés à l'inclusion scolaire.
La commission n'ayant pas examiné l'amendement, c'est à titre personnel que j'émets un avis défavorable.
L'amendement no 725 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
« Ah ! » sur certains bancs du groupe LaREM.
Il est incompréhensible que le budget de la formation des personnels enseignants du premier degré soit diminué de 3,45 %, alors même que le tout premier objectif de la mission budgétaire « Enseignement scolaire » est de mener 100 % des élèves du premier degré à la réussite.
Certes, le nombre d'élèves de l'enseignement primaire devrait diminuer de 50 000 l'an prochain. Toutefois, compte tenu des nouveaux défis auxquels sont confronté les professeurs – école inclusive, accueil des enfants dès l'âge de 3 ans, violence à l'école – , il ne semble pas opportun de baisser le budget alloué au poste de la formation des enseignants du premier degré.
En outre, l'adoption de la loi pour une école de la confiance a jeté un éclairage neuf sur l'inclusion scolaire des élèves en situation de handicap, avec une augmentation substantielle des crédits y afférents.
C'est pourquoi il importe de permettre aux enseignants de se former, notamment à la présence dans leur classe d'un ou plusieurs élèves en situation de handicap. L'amendement vise donc à rétablir les crédits alloués à la formation des enseignants du premier degré à leur niveau de 2019.
« Ah ! » sur certains bancs du groupe LaREM
Mêmes mouvements
Mêmes mouvements. – Rires.
Dans ce cas, que les auteurs des amendements prennent la peine de venir les défendre dans l'hémicycle !
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 365 .
Nous devrions pouvoir travailler tranquillement sans devoir subir ce genre de manifestations. Franchement, c'est un peu pénible !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Comme le précédent, l'amendement porte sur la formation des personnels, en l'espèce celle des AESH. En la matière, les attentes sont nombreuses, et partagées par tous – heureusement !
Cette formation devrait être plus complète, adaptée à toutes les situations d'accompagnement. Il faudrait notamment tenir compte des besoins de l'enfant, du type de handicap dont il souffre, des apports pédagogiques que celui-ci exige et de sa psychologie. Un prisme de paramètres très large entre en ligne de compte.
En outre, cette formation devrait être intégrée au plan académique de formation, le PAF, et ouverte aux enseignants comme aux accompagnants, afin d'assurer un continuum pédagogique, avec la mise en place de véritables équipes pédagogiques ; à défaut, les personnels sont catégorisés et ne travaillent pas ensemble.
Le projet de budget pour 2020 prévoit d'allouer à la formation des AESH une enveloppe de 8,2 millions d'euros. C'est un premier pas dans la bonne direction. Toutefois, les personnels que nous avons rencontrés nous ont indiqué que l'horaire de formation de soixante heures, prévu lors de leur recrutement, n'était pas toujours respecté, et que la formation continue était inexistante. L'académie de Créteil, par exemple, ne lui consacre aucun financement. C'est pourquoi nous proposons d'abonder cette partie du budget.
Enfin, s'agissant de l'enseignement agricole, on nous a signalé que les notes de cadrage et les lettres de mission n'étaient pas toujours respectées, de sorte que le travail et la formation des AESH ne font parfois l'objet d'aucune prise en compte, en dépit des demandes du ministère. Peut-être faudrait-il y prêter attention.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 478 .
Il vise à inciter le Gouvernement à accroître davantage le nombre de postes d'AESH. Si l'accompagnement des élèves en situation de handicap s'est notablement amélioré depuis quelques années, certains ne sont toujours pas accompagnés, ce qui les a empêchés, cette année, de faire une rentrée dans les meilleures conditions – ou simplement correcte.
Compte tenu des données dont nous disposons, nous pensons que la situation sera identique l'année prochaine. Certains enfants seront encore en attente de la nomination d'un AESH, alors même que certaines personnes, dont tout porte à croire qu'elles maîtrisent les compétences nécessaires, sont en attente de recrutement.
Le présent amendement vise à attribuer une somme de 1 million d'euros – qui ne semble pas excessive – à l'action 03, « Inclusion des élèves en situation de handicap », du programme 230, « Vie de l'élève ».
La parole est à M. Yannick Favennec Becot, pour soutenir l'amendement no 707 .
Cet amendement, dont notre excellent collègue Olivier Falorni est le premier signataire, vise à augmenter les moyens destinés à financer l'inclusion des élèves en situation de handicap, notamment ceux destinés à financer leurs accompagnants.
L'adoption de la loi pour une école de la confiance a permis quelques avancées concernant leur statut, en prévoyant qu'ils seront désormais recrutés dans le cadre d'un contrat à durée déterminée de trois ans minimum, renouvelable une fois, avant sa transformation en contrat à durée indéterminée. En outre, le projet de budget pour 2020 prévoit d'allouer à leur formation une enveloppe de 8,2 millions d'euros, ce qui est un premier pas.
Toutefois, il faut aller plus loin, car nous constatons que le recrutement des AESH se heurte toujours à des difficultés. L'amélioration de leur statut et de leur formation doit aller de pair avec une amélioration de leur rémunération.
Nous souhaitons vivement que des efforts en ce sens soient consentis, …
… et cela d'autant plus que l'inclusion croissante d'élèves en situation de handicap implique davantage d'accompagnement, auquel il faudra allouer des moyens supplémentaires, en raison de la hausse rapide des demandes d'accompagnement par les familles et des prescriptions délivrées par les maisons départementales des personnes handicapées.
Le présent amendement vise donc à allouer 1 million d'euros à l'action 03, « Inclusion des élèves en situation de handicap », du programme 230, « Vie de l'élève », au détriment de l'action 03, « Communication », du programme 214, « Soutien de la politique de l'éducation nationale ».
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 479 .
Si mon amendement précédent visait à augmenter le nombre d'AESH, celui-ci vise à rouvrir le débat sur leur revalorisation salariale.
Lors de l'examen du projet de loi pour une école de la confiance, nous avons adopté la CDIsation de ces personnels, à l'issue de deux CDD de trois ans. Ce dispositif contribue à une certaine dé-précarisation des AESH.
Brouhaha.
Puis-je poursuivre, chers collègues ? Merci.
Il constitue donc un pas vers leur professionnalisation. Toutefois, leurs salaires demeurent très faibles, même après dix ans ou plus d'ancienneté, et ne leur permettent pas toujours pas de vivre décemment.
Le rapport de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République a fait état de cette situation. Nous savons que vous ne l'ignorez pas, monsieur le ministre, et qu'une réflexion est entamée.
Toutefois, ne pouvons-nous pas, dès aujourd'hui, prendre une décision permettant d'améliorer un peu – leur vie n'en serait pas transformée – le quotidien de ceux qui oeuvrent à l'inclusion ? Ils font beaucoup pour nos enfants, ne pouvons-nous pas faire un peu pour eux ? À cette fin, je propose de leur allouer la somme de 1 million d'euros. Je pense, je le répète, que ce n'est pas trop demander.
Monsieur Reiss, la baisse des crédits alloués à la formation des enseignants du premier degré s'explique par le fait que celle-ci a changé. Modernisée, elle est en partie dispensée par l'intermédiaire de la plateforme M@gistère. Son coût est donc bien moindre qu'une formation dispensée dans une salle par un formateur rémunéré.
Il est donc inévitable que les crédits baissent. Une formation de qualité n'est pas nécessairement onéreuse ! La commission n'ayant pas examiné cet amendement, c'est à titre personnel que j'émets un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement no 365 défendu par Mme Victory, je rappelle que l'exécution budgétaire des crédits alloués à la formation des AESH s'est élevée à 1,17 millions d'euros en 2018. En 2019, 7,4 millions d'euros ont été prévus, dans le cadre du décret du 27 juillet 2018 fixant la durée minimale de leur formation à soixante heures.
Pour 2020, le budget prévoit une enveloppe de 8,2 millions d'euros. Chère collègue, il me semble que vous avez repris votre amendement de l'an dernier, sans actualiser vos chiffres. La commission a émis un avis défavorable sur l'amendement.
L'amendement no 478 de Mme Descamps rouvre le débat – que nous avons eu l'année dernière – sur la création de postes d'AESH. L'amendement a déjà été examiné dans ce cadre. La commission ne l'ayant pas examiné cette année, c'est à titre personnel que j'émets un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement no 707 , je participerai bien volontiers au débat sur le niveau de rémunération des AESH.
Le projet de loi de finances pour 2020 prévoit des améliorations significatives, que vous avez rappelées, monsieur Favennec Becot. Je vous propose de travailler plus précisément sur ce sujet en vue de la prochaine édition du printemps de l'évaluation. La commission n'ayant pas examiné l'amendement, c'est à titre personnel que j'émets un avis défavorable.
S'agissant de l'amendement no 479 , même argumentaire et même avis que sur l'amendement no 478 .
S'agissant de l'amendement no 554 relatif aux crédits alloués à la formation des personnels enseignants du premier degré, je répète ce que j'ai dit en commission, monsieur Reiss : il s'agit d'abord et avant tout d'une sincérisation budgétaire. En 2020, la dotation dédiée à la formation continue des enseignants de l'enseignement public du premier degré s'élève à 13 millions d'euros, soit le niveau de l'exécution budgétaire de 2018, qui est la dernière connue. Mentionnons également les effets de la formation à distance, rappelés par Mme la rapporteure spéciale, qui s'additionnent à cette sincérisation. Nous assurons donc une amélioration de la qualité de la formation et un maintien des sommes qui lui sont consacrées.
Pour ce qui est de la formation spécifique en matière de handicap, vous savez que nous faisons en la matière un effort très important, conformément aux positions que nous avions défendues lors de l'examen du projet de loi pour une école de la confiance. Je pense notamment au nouveau référentiel de formation, intitulé « Former l'enseignant du XXIe siècle ». La formation délivrée au sein des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation – INSPE – a fait de l'inclusion des élèves un axe de formation à part entière. Je rappelle enfin la création de la plateforme numérique nationale Cap école inclusive, opérationnelle depuis la rentrée et qui apporte une amélioration considérable. Avis défavorable.
L'amendement no 365 vise à augmenter les crédits de la formation des AESH. Or le projet de loi de finances pour 2020 prévoit déjà une nette augmentation de ces crédits puisqu'elle atteint 8,2 millions d'euros, soit une hausse de 10 % par rapport à la loi de finances pour 2019. Cette somme recouvre la formation de soixante heures et les 4 000 postes supplémentaires d'AESH. Aussi, même si l'on peut toujours envisager davantage encore pour les années à venir, le présent effort est déjà très important. Avis défavorable.
L'amendement no 478 vise pour sa part à améliorer de 1 million d'euros les crédits alloués à la rémunération des AESH. Je souscris évidemment aux arguments développés par Mme Descamps. Seulement, je le répète, nous avons fait beaucoup à l'occasion de la dernière rentrée scolaire même si, certes, cela n'exclut pas, rentrée après rentrée, de veiller à l'amélioration des conditions des AESH. Comme l'a souligné la rapporteure spéciale, nous pourrons en discuter dans le cadre du printemps de l'évaluation. C'est pourquoi je vous demande de retirer votre amendement, faute de quoi j'émettrai un avis défavorable.
L'objet de l'amendement no 707 est l'attribution de 1 million d'euros à l'action 03, « Inclusion des élèves en situation de handicap ». Je m'accorde avec les arguments avancés par M. Falorni, mais, comme je viens de le souligner, l'effort fait à l'occasion de la dernière rentrée est considérable. De plus, je rappelle que nous avons créé des postes d'AESH référents, nommés dans chaque département pour accompagner les AESH qui débutent. Toutes ces mesures ont pour effet direct et indirect d'améliorer la formation des AESH. Avis défavorable.
Enfin, en ce qui concerne l'amendement no 479 visant à ouvrir un débat sur la revalorisation salariale des AESH, je suis là aussi d'accord avec le principe. Nous aurons donc certainement l'occasion d'y revenir au cours des prochains mois. En attendant, je vous remercie d'avoir salué les efforts importants réalisés pour cette rentrée. Avis défavorable.
Je souhaite revenir un instant sur les AESH. Puisque tout le monde le fait, je salue à mon tour les quelques avancées du Gouvernement en faveur de l'inclusion scolaire.
M. Gaël Le Bohec applaudit.
Cela dit, tout le monde constate qu'elles sont insuffisantes. Ici, un amendement demande un plus grand nombre d'AESH, là, un autre soulève la question de leur salaire, un autre encore le problème de leur formation…
Il se trouve que j'ai évalué tout cela. Je vous informe, pour anticiper sur les prochaines années, que le coût annuel d'un AESH titularisé, bien formé – de niveau bac plus deux – , est de 26 450 euros par an. Pour répondre aux besoins d'accompagnement, qui ne cessent de s'amplifier, il nous faudrait 110 000 AESH. Pour vous éviter de faire le calcul, monsieur le ministre, je vous indique que le coût total est de 2,9 milliards d'euros.
Je pense que nous pourrions facilement les trouver. Nous vous proposons quelques idées dans notre contre-budget.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
L'amendement no 478 est retiré.
Nous entamons une nouvelle discussion thématique, relative à l'inclusion des élèves en situation de handicap.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 726 .
Mon amendement porte sur l'accompagnement des enfants atteints de surdité. Sur les plus de 10 000 élèves concernés, moins d'un quart bénéficie d'un accompagnement humain et seulement un tiers, de matériel adapté. Autant dire que ces élèves ne peuvent pas apprendre dans de bonnes conditions. Et, ce qui est terrible pour eux, c'est que la plupart sont obligés d'arrêter leurs études – non pas parce qu'ils sont moins intelligents que d'autres enfants, mais simplement parce qu'ils sont sourds et qu'en France, l'enseignement n'est pas adapté pour eux.
Pour ces enfants, le décrochage scolaire survient après l'âge de dix-huit ans : seulement 5 % de ceux qui sont atteints d'une surdité grave poursuivent leurs études dans l'enseignement supérieur contre 44 % de la population française du même âge. Les conséquences en sont terribles : leur niveau de diplôme est moins élevé – seulement un sourd sur dix parvient à obtenir un diplôme de l'enseignement supérieur, contre 30 % pour le reste de la population.
Il y a urgence à réagir pour que les enfants atteints de surdité puissent se sentir mieux et suivre une vraie scolarité. En effet, selon le ministère de la santé, 60 % de ces adolescents sont frappés de dépression parce que leur avenir est bouché, parce que les enseignements adaptés sont rares, parce que leur langue, la langue des signes, n'est pas enseignée partout.
Il est temps que ces enfants bénéficient d'une politique d'enseignement adaptée. Peut-être faudrait-il prendre en considération les propositions avancées le 18 juillet 2019 par la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République, en particulier la proposition no 13, « Conforter les instituts nationaux de jeunes sourds et aveugles dans leurs missions et leur statut », et la proposition no 29, « Reconnaître la langue des signes française comme une langue vivante à part entière et développer partout les pôles d'enseignement pour jeunes sourds dès la maternelle ».
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 360 .
Je peux en même temps, si vous le voulez bien, madame la présidente, défendre l'amendement no 371 , portant lui aussi sur les unités localisées pour l'inclusion scolaire, les ULIS.
Les ULIS constituent une solution efficace pour les élèves qui nécessitent un enseignement adapté et dont le handicap ne permet par une scolarisation dans une classe ordinaire. À la rentrée de 2019, 66 ULIS ont été créées et le Gouvernement annonce la création, au cours du quinquennat, de 250 ULIS lycées. Il nous semble que l'investissement devrait être le même pour l'enseignement du premier degré, afin de permettre la création de dispositifs d'accompagnement adaptés à tous les élèves. Plus de 51 000 élèves, soit 1,2 % du total, sont concernés par ces dispositifs, avec une augmentation très importante – un de nos collègues l'a souligné tout à l'heure – de près de 30 % en dix ans. En 2018, le taux de couverture des notifications d'affectation en ULIS écoles est en revanche passé de 86,6 % à 85,6 %, en particulier du fait de l'augmentation très rapide des demandes.
L'amendement no 371 concerne pour sa part les ULIS dans l'enseignement agricole. Il n'en existait qu'un seul, dans le Tarn-et-Garonne, si je me souviens bien, et qui a été fermé. C'est assez regrettable parce que dans l'enseignement agricole aussi, et peut-être encore davantage, on est face à des élèves au profil fragile, un peu particulier. C'est pourquoi il nous semble que cette structure, qui fonctionne vraiment bien et dont tout le monde reconnaît qu'elle apporte quelque chose aux élèves, devrait être développée également dans l'enseignement agricole.
Le présent amendement vise à abonder l'action 03, « Besoins éducatifs particuliers », du programme 140, « Enseignement scolaire public du premier degré », dans le but d'augmenter le nombre d'ULIS dans le second degré, conformément à la proposition no 6 du rapport de la commission d'enquête sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République.
En ce qui concerne l'amendement no 726 , il existe déjà des dispositifs adaptés dans le cadre de l'école inclusive. Ils ne sont peut-être pas suffisants, mais je laisserai le ministre compléter mon propos. La commission n'ayant pas examiné cet amendement, j'émettrai, à titre personnel, un avis défavorable.
Pour ce qui est de l'amendement no 360 , le projet de loi de finances pour 2020 prévoit déjà la création de 66 ULIS dans le primaire public. À la rentrée de 2018, 71 ULIS écoles avaient été créées. Selon les prévisions, le taux de couverture s'améliorerait en 2019 et passerait à 92 % pour les écoles. On doit aussi cette amélioration à la création d'un service de l'inclusion scolaire dans tous les départements, à la création de 3 000 PIAL et à la création de 4 000 postes d'AESH. Je vous propose de refaire le point sur le taux de couverture l'année prochaine. Je doute que la situation ne soit pas meilleure d'ici là. La commission n'ayant pas examiné cet amendement, j'y suis défavorable à titre personnel.
J'en viens à l'amendement no 910 . Le projet de loi de finances pour 2020 reprend les propositions suivantes du rapport d'enquête remis par M. Jumel sur l'inclusion des élèves handicapés dans l'école et l'université de la République : la création d'un véritable service de l'inclusion scolaire dans chaque département ; l'installation du comité national de suivi de l'école inclusive ; enfin l'augmentation du nombre d'AESH, avec 4 000 créations de postes. Comme pour le précédent, la commission n'ayant pas examiné cet amendement, j'émets un avis défavorable à titre personnel.
L'amendement no 371 concerne l'inclusion dans l'enseignement agricole. Il ne faut pas être dogmatique : ce n'est pas parce qu'il n'y a pas d'ULIS dans chaque académie pour l'enseignement agricole que l'État ne consacre pas le même effort que pour l'enseignement général. L'enseignement agricole est exemplaire du point de vue de l'inclusion scolaire. Je l'ai moi-même constaté au cours des auditions que j'ai organisées. Le nombre de jeunes en situation de handicap dans l'enseignement agricole augmente de 15 % par an. La dotation pour les élèves en situation de handicap ne cesse de croître – plus 26 % en 2020, soit 14,4 millions d'euros. Cette augmentation était déjà de 49 % en 2019 et de 14,4 % en 2018. La commission n'ayant pas examiné cet amendement, j'y suis défavorable à titre personnel.
Je termine avec l'amendement no 908 . Le groupe La République en marche avait salué la qualité du travail de la commission d'enquête dont M. Jumel a été rapporteur et souligné que son objectif était partagé par la majorité. Des actions dans le même sens avaient en effet déjà été engagées par la secrétaire d'État Sophie Cluzel à la suite du rapport remis par Adrien Taquet et Jean-François Serres, intitulé « Plus simple la vie ». Ce rapport insistait déjà sur la nécessaire révision de la formation des enseignants et sur la baisse du nombre de dossiers par enseignant-référent. Il sera plus aisé de suivre la réalisation de cet objectif grâce à la création du Comité national de suivi de l'école inclusive, installé le 17 juillet 2019 par Sophie Cluzel et Jean-Michel Blanquer. Le projet de budget pour 2020 nous donne déjà les moyens d'atteindre cet objectif. Je ne suis donc pas favorable aux mouvements proposés, mais je nous invite à continuer à suivre cette question au cours des prochaines années. La commission n'ayant pas examiné cet amendement, mon avis sera défavorable à titre personnel.
Je vous remercie, madame Ménard, d'avoir insisté, en défendant votre amendement no 726 , sur la scolarisation des jeunes sourds, qui suppose en effet une approche particulièrement attentive. Je tiens à rappeler que les crédits affectés à leur prise en charge, tout comme les autres actions relevant de l'école inclusive, bénéficient d'une augmentation importante : 9 % pour cette année. La diversité des parcours scolaires des jeunes sourds est prise en considération avec le développement des ULIS et celui de la scolarisation en pôle d'enseignement du jeune sourd, le PEJS. Enfin, les élèves peuvent également être scolarisés dans un institut national ou régional de jeunes sourds – INJS ou IRJS.
Vous le savez, des orientations ont été adressées aux recteurs d'académie afin de rappeler la nécessité d'améliorer les conditions de scolarisation des jeunes sourds et l'importance du déploiement des parcours de formation des jeunes sourds sur l'ensemble du territoire national. La plateforme Cap école inclusive s'est enrichie de nombreux dispositifs pédagogiques pour les jeunes sourds. La rentrée, sur le plan budgétaire comme sur le plan des ressources pédagogiques, représentant une nette amélioration, j'émets un avis défavorable sur l'amendement.
L'amendement no 360 vise à augmenter le nombre de créations d'ULIS écoles. Cela peut évidemment s'entendre, d'autant, madame Victory, que vous avez souligné l'écart entre les besoins exprimés et les inclusions effectives dans ces dispositifs. Vous avez en particulier fait état de la légère baisse du taux de couverture des notifications d'affectation en ULIS école, indiquant que ce taux était passé, entre 2017 et 2018, de 86,6 % à 85,6 %.
Le nombre d'ULIS d'écoles est en augmentation. On en compte soixante et onze de plus par rapport à 2017. Il s'agit donc d'un effort très important sur le plan budgétaire, mais l'augmentation rapide et continue du nombre de notifications d'affectation des élèves en ULIS peut entraîner quelques délais supplémentaires, et quelques discontinuités. Cela explique le chiffre que vous avez cité, mais il faut rappeler qu'à la rentrée de 2018, on dénombrait 4 919 ULIS écoles, soit une hausse de 12 % en cinq ans. Cette augmentation s'accompagne d'une hausse considérable des moyens consacrés à ces dispositifs grâce aux augmentations budgétaires de cette rentrée. J'émets donc un avis défavorable sur l'amendement no 360 .
L'amendement no 9 10 , déposé à l'initiative de M. Jumel et soutenu par Mme Buffet, vise à augmenter les moyens destinés à créer des ULIS dans le second degré. Bien entendu, nous sommes d'accord avec la proposition no 6 du rapport de la commission d'enquête, qui va évidemment dans le bon sens. La question qui se pose est plutôt celle du rythme de la démarche. Je rappelle qu'en cette rentrée, nous avons considérablement augmenté les moyens dans ce domaine – et cela vaut aussi pour les ULIS implantés dans les lycées professionnels. Avis défavorable, par conséquent.
L'amendement no 371 tend à diminuer de 1,5 million d'euros les ressources du programme 214, « Soutien de la politique de l'éducation nationale », pour permettre l'ouverture de classes ULIS dans l'enseignement agricole. Je pense que ce serait une mesure peu opportune, d'une part, parce que le programme 214 est conçu de façon ajustée, d'autre part, parce que, pour l'enseignement agricole, il existe une convention avec l'éducation nationale. Nous avons conçu un maillage des ULIS, afin que les élèves des lycées agricoles puissent y avoir accès au plus près de leur domicile. La doctrine qui consisterait à créer un ULIS par lycée agricole dans chaque académie pourrait être contre-productive pour les élèves des lycées agricoles eux-mêmes, qui peuvent trouver des ULIS plus proches de leur domicile dans les lycées de l'éducation nationale. En conséquence, je suis défavorable à l'amendement no 371 , même si, bien entendu, je perçois de manière positive la coopération renforcée entre l'enseignement agricole et l'enseignement scolaire en matière de développement des ULIS.
Enfin, l'amendement no 908 vise à atteindre un objectif de cent élèves en situation de handicap par enseignant référent. Vous le savez, nous augmentons le nombre d'enseignants référents en cette rentrée. Nous sommes donc favorables à ce cap, mais nous ne pouvons que souligner l'augmentation budgétaire déjà très importante consentie à l'occasion de cette rentrée, qui permet de tendre vers l'objectif proposé. Pour cette raison, avis défavorable.
Madame la rapporteure spéciale, vous avez indiqué que certains de nos amendements n'avaient pas pu être examinés par la commission des finances : ce n'est certainement pas le cas, puisque tous les amendements du groupe Socialistes et apparentés ont été déposés en commission – je crois que nous sommes les seuls dans ce cas.
Je vous propose une nouvelle discussion thématique d'amendements relatifs aux fonds sociaux dans l'éducation nationale.
La parole est à M. Michel Larive, pour soutenir l'amendement no 838 .
Nous proposons une revalorisation ambitieuse des fonds sociaux dans l'éducation nationale. Depuis 2002, les budgets alloués aux fonds sociaux n'ont cessé d'être dépréciés. De 2006 à 2012, les crédits qui leur sont alloués ont ainsi été divisés par deux. De 2019 à 2020, le constat s'aggrave : le budget passe de 59 millions à 30 millions d'euros, soit une nouvelle diminution de moitié, cette fois en l'espace d'un an.
Ces coupes budgétaires ont pour conséquence d'aggraver les situations difficiles que rencontrent certains élèves ou leurs familles pour assurer les dépenses de scolarité ou de vie scolaire. Ces fonds permettent en effet l'accès à la cantine scolaire, à des déplacements et à des voyages scolaires, autant d'activités importantes pour l'épanouissement et le développement de l'élève. C'est à cet effet précis que les fonds sociaux sont destinés.
Ils permettent de remédier à des situations de grande précarité dans lesquelles les familles ne sont plus en mesure d'assurer les dépenses annexes relatives à la scolarisation de leurs enfants. Si vous diminuez les crédits de ces fonds, les inégalités scolaires n'en seront que plus fortes. La République se doit d'assurer l'égalité dans l'éducation pour tous et toutes, et, pour ce faire, d'assurer aux familles les moyens d'accéder aux conditions matérielles nécessaires.
C'est pourquoi nous proposons de transférer 43 millions d'euros de l'action 12 du programme 139 à l'action 4 du programme 230.
La parole est à Mme Sylvie Tolmont, pour soutenir l'amendement no 368 .
Le Gouvernement diminue de près de 29 millions d'euros, ce qui représente une baisse d'environ 50 %, les crédits alloués aux fonds sociaux. Ces fonds sont versés aux établissements pour apporter une aide exceptionnelle aux familles défavorisées qui en ont le plus besoin. Ils ont pour objectif de venir en accompagnement de dispositifs correctifs des inégalités sociales et matérielles des familles afin que la réussite de tous les élèves puisse être au rendez-vous.
La pauvreté augmente dans notre société, comme l'a montré la dernière étude de l'INSEE, l'Institut national de la statistique et des études économiques. Aujourd'hui, 15 % des Français vivent sous le seuil de pauvreté. Les équipes éducatives, qui sont, au quotidien, en contact avec les élèves et leurs familles, savent à quel point certaines situations sont douloureuses, difficiles à verbaliser et surtout sources d'échec scolaire.
Monsieur le ministre, lorsque je vous ai interrogé sur la diminution des crédits des fonds sociaux en commission, vous avez argué de leur sous-utilisation. Celle-ci vous amène, nous avez-vous expliqué, à diminuer les crédits du budget pour 2020 par rapport au précédent budget, afin de les ramener au niveau de l'exécution de 2018.
Il y a quelque chose de très choquant à constater, dans notre pays, que des fonds destinés à la solidarité ne sont pas utilisés. Il y a quelque chose de plus choquant encore, c'est de considérer cette sous-utilisation comme une fatalité.
Ce qui nous choque, c'est que vous n'engagiez pas les chefs d'établissement à mener une véritable politique sociale. Je le répète, il est inadmissible de faire des économies sur des budgets dédiés à la solidarité quand on sait le nombre d'enfants qui vivent dans des conditions extrêmement difficiles.
Par l'amendement no 838 , il est proposé une augmentation de 43 millions d'euros des crédits afin de revaloriser les fonds sociaux. Or il n'y a pas de coupes budgétaires pour les fonds sociaux. Sur l'ensemble de l'action que vous citez, monsieur Larive, l'augmentation est de 3 millions d'euros. Le montant alloué aux fonds sociaux est indicatif et le projet annuel de performance précise bien que les aides sociales seront maintenues au niveau de la consommation de 2018, soit 53 millions d'euros. Depuis le début de la législature, les crédits alloués aux fonds sociaux sont plutôt en hausse puisqu'en 2016, 47 millions d'euros ont été consommés.
La commission n'a pas examiné l'amendement no 838 , mais, à titre personnel, j'émets un avis défavorable. Les mêmes arguments valent pour l'amendement no 368 , sur lequel la commission a émis un avis défavorable.
Madame la députée, monsieur le député, nous avons déjà eu une discussion sur ce sujet en commission, mais je crains qu'il ne faille ranger ce thème parmi ceux sur lesquels, malgré les multiples explications fournies, les mêmes arguments reviennent à l'infini – nous avons déjà connu cela l'année dernière sur d'autres sujets.
J'ai sous les yeux la consommation des fonds sociaux des dernières années. J'affirme, à la suite de Mme la rapporteure spéciale, qu'il n'y aura pas de baisse des fonds sociaux pour les élèves. C'est même le contraire qui se produira : il y aura plus de fonds sociaux d'une année à l'autre, comme il y en a eu davantage en 2018 qu'en 2017.
Le fait de faire de la sincérisation budgétaire doit être vu comme de la bonne gestion, alors même que nous allons augmenter les dépenses sociales. J'ai déjà signalé que nous allons considérablement augmenter les bourses. Nous augmenterons également d'autres dépenses sociales – je pense en particulier aux cités scolaires. Si vous voulez, nous pouvons nous donner rendez-vous dans un an pour constater l'augmentation des dépenses sociales au service des élèves les plus défavorisés.
J'espère que vous allez entendre ces arguments, et que vous n'avancerez plus à l'avenir des assertions – je les ai vues écrites ça et là – que nous venons explicitement de réfuter. Je comprends parfaitement que vous vous interrogiez, mais à partir du moment où vous disposez des réponses, j'espère qu'elles pourront vous satisfaire.
En 2016, c'est-à-dire la dernière année d'exécution pleine et entière des fonds sociaux, le montant consommé par les EPLE s'élevait à 29 millions d'euros. En 2017, nous sommes passés à 36 millions d'euros et en 2018, à 39 millions d'euros. Avec 32 millions plus 8 millions de reliquats, nous atteindrons vraisemblablement, en 2020, les 40 millions d'euros, ce qui représente évidemment une augmentation, à laquelle il faut ajouter celles prévues sur d'autres sujets déjà évoqués.
En conséquence, le fait que l'on constate, à partir de 2017, une programmation à 60 millions d'euros ne doit pas nous induire en erreur. Cela relevait purement de l'apparence. Ce qui compte, c'est le consommé. Vous préconisez de faire réellement consommer les fonds sociaux : c'est exactement ce que nous avons réalisé. Il n'y a jamais eu de progression aussi forte qu'entre 2016 et 2017, puis entre 2017 et 2018 : en deux ans, on est passé de 29 millions d'euros consommés à 39 millions d'euros. En 2020, nous passerons vraisemblablement à 40 millions d'euros consommés. C'est clairement une augmentation, avec, en plus, une sincérisation, et c'est tant mieux.
Non seulement les fonds sociaux ne diminuent pas pour les élèves, mais il y a des dépenses sociales supplémentaires. Elles sont nécessaires, parce qu'il y a malheureusement de la pauvreté dans de nombreuses parties de nos territoires. Cela explique que d'autres mesures s'ajoutent aux fonds sociaux. Ces derniers ne sont pas l'alpha et l'oméga de la politique sociale. Sans répéter ce que j'ai déjà dit, des efforts particulièrement importants sont notamment consentis dans le projet de budget pour 2020 en faveur des bourses et de la politique de cité scolaire.
Monsieur le ministre, vous venez de nous expliquer assez longuement votre point de vue. Vous nous avez parlé des consommations, mais nous examinons le budget, et quoi que vous disiez, ce qui est inscrit dans le projet de budget pour 2020, c'est bien une diminution de 59 millions à 30 millions d'euros. C'est de cela dont nous parlons. Vous pouvez évaluer les consommations, c'est sûrement votre rôle, mais nous sommes en train d'étudier le budget, et, je le répète, on enregistre bien une diminution de 29 millions d'euros des crédits alloués aux fonds sociaux dans le budget projeté pour 2020.
Il se passe exactement ce que je prophétisais il y a quelques instants. J'aimerais vraiment que ce soit la dernière fois – mais je le dis sans beaucoup d'optimisme, je le reconnais. Je constate que le même message se répète en dépit de la contradiction parfaitement claire qui lui a été apportée.
Je le répète, nous avons fait de la sincérisation. C'est une erreur de prévoir 60 millions d'euros pour un budget, alors que l'on est en mesure de dépenser seulement 30 ou 40 millions.
Si vous voulez, je vous donne rendez-vous dans un an. Nous regarderons la consommation des fonds sociaux : elle aura augmenté telle que nous l'avons programmée. C'est de la sincérisation, c'est-à-dire de la bonne gestion.
C'est aussi une politique sociale, car en plus de l'augmentation de l'utilisation des fonds sociaux, il y aura eu d'autres politiques sociales. Vous pouvez faire comme si je n'avais rien dit, mais c'est la réalité.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
J'aimerais rappeler que les fonds sociaux ne fonctionnent pas comme les bourses : ils peuvent servir à financer la cantine, ou même des voyages scolaires. Il arrive qu'un voyage scolaire n'ait pas lieu en raison de l'absence de fonds social dans un établissement.
Que les établissements ne les utilisent pas constitue un véritable problème !
On peut se demander pourquoi. Comment faire en sorte que les fonds sociaux soient utilisés pour financer des activités que toutes les familles ne peuvent pas se payer ?
L'amendement no 838 n'est pas adopté.
L'amendement no 368 n'est pas adopté.
Avant d'entamer la prochaine discussion thématique, je suspends la séance quelques minutes afin de m'entretenir avec les responsables des groupes.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue le mercredi 30 octobre 2019 à deux heures quinze, est reprise à deux heures dix-huit.
Assurer la réussite de tous les élèves implique de doter les enseignants d'une formation initiale et continue de qualité tout au long de leur carrière.
Il est difficile de distinguer, dans les documents dont nous disposons, la part qui revient à la formation initiale et celle qui revient à la formation continue, ce qui est un peu gênant. On constate toutefois, dans le bleu budgétaire, une diminution des crédits.
J'ajoute qu'il faut penser non seulement à la formation des enseignants dans leur matière, mais aussi à la formation personnelle et à la formation d'équipe. Les enseignants ont besoin de travailler avec un horizon plus large que leur propre discipline. Les PAF doivent être complets et répondre à tous les besoins de nos enseignants.
Je m'en tiendrai là, car vous nous avez demandé de faire vite, madame la présidente.
J'ai informé les responsables des groupes des conditions de déroulement de notre séance, mais prenez le temps qui vous paraît nécessaire, chère collègue.
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l'amendement no 779 .
Dans son plan de lutte contre le harcèlement à l'école, présenté en juin dernier, le ministère de l'éducation nationale s'est engagé à former l'ensemble des acteurs de la communauté éducative à la prévention du harcèlement scolaire et à la lutte contre les violences sexistes et la haine en ligne. Cette décision va évidemment dans le bon sens. Elle s'inscrit dans la continuité des annonces faites par Marlène Schiappa, qui s'était engagée à ce que chaque enseignant soit formé à la lutte contre les LGBTphobies, qui constituent un facteur privilégié de harcèlement à l'école.
Or, comme l'observe l'ancien réseau national des écoles supérieures du professorat et de l'éducation – ESPE – , les enseignants sont actuellement très peu formés à ces questions dans le cadre de leur formation initiale.
D'autre part, la réforme engagée dans le cadre du projet de loi pour une école de la confiance a eu pour effet de réduire le volume horaire dédié au tronc commun de formation dans les INSPE.
Comme l'a souligné à l'instant notre collègue Victory, l'enjeu est donc de renforcer la formation continue des professeurs, conformément à la volonté exprimée par le ministère d'améliorer de manière constante les conditions d'exercice des enseignants, trop souvent démunis face aux situations de violences et de harcèlement auxquelles ils sont confrontés en classe.
Si des efforts de rationalisation ont été permis grâce au renforcement de la plateforme M@gistère, à laquelle recourent chaque année près de 250 000 enseignants, la formation à des situations de crise ne peut pas se résumer, selon moi, à une autoformation en ligne. Elle implique forcément des séances de sensibilisation en partenariat avec les associations spécialisées, afin de permettre aux professeurs d'apprendre à réagir et à désamorcer des situations trop fréquentes dans les établissements.
Tel est le sens du présent amendement, qui vise donc à consolider les moyens alloués à ces formations continues.
En ce qui concerne la formation continue, je rappelle que cette rentrée se caractérise par l'application du schéma directeur de la formation continue des personnels de l'éducation nationale, conclu avec les organisations syndicales dans le cadre du dialogue social qui s'est déroulé, pendant plusieurs mois, entre 2018 et 2019. Ce schéma se traduit par une proposition de formation continue conforme aux souhaits que vous avez exprimés. Il permettra notamment à chaque professeur de France de bénéficier d'au moins une formation au cours des trois prochaines années.
Sans entrer dans les détails, j'observe qu'il s'agit d'un progrès pour les futurs programmes académiques de formation, salué par de nombreux interlocuteurs.
S'agissant de la lutte contre les LGBTphobies, je partage évidemment les arguments que vous avez développés, monsieur le député. L'éducation nationale s'est saisie de cette question avec un grand volontarisme, qui se traduira dans les INSPE et qui a été salué par les associations de lutte contre les LGBTphobies. Sur un tel sujet, les aspects budgétaires ne sont pas tout.
Avis défavorables sur les trois amendements.
Il concerne les directrices et directeurs d'école, maillons indispensables de notre école républicaine. Je vous ferai grâce de toutes les tâches qui leur incombent : c'est à eux de coordonner les activités pédagogiques, d'assurer les relations avec les parents et les collectivités, et aussi d'animer l'école et d'assurer son bon fonctionnement au quotidien.
Pour ce faire, ils bénéficient de décharges : d'un quart du temps de travail dans les établissements de quatre à sept classes, d'un tiers dans ceux de huit à neuf classes, et de 50 % dans ceux de dix à treize classes. La décharge est totale à partir de quatorze classes.
Malheureusement, ces décharges ne sont plus suffisantes eu égard aux nouvelles missions des directeurs d'établissement, épuisés, écrasés par une avalanche de tâches administratives – dont a témoigné Christine Renon, empêchée de se consacrer à ses missions de base.
À défaut d'obtenir des assistantes administratives, nous proposons, par cet amendement, une extension des heures de décharge des directeurs d'école. Cette préconisation est issue du rapport de la mission flash sur les directeurs d'école menée par quelques députés de la majorité. Les directeurs seraient déchargés à 50 % à partir de cinq classes et à 100 % à partir de dix classes.
L'impact de cette mesure a été évalué à près de 3 800 équivalents temps plein, soit 19 millions d'euros. Où trouver cette somme ? Eh bien, nous proposons de transférer 19 millions d'euros de crédits du titre 2 de l'action 12 du programme 139, « Enseignement privé », vers le programme 140.
Je ne pense pas que l'on puisse régler la situation des directeurs d'école au détour d'un amendement. Une véritable réflexion doit être menée sur le sujet.
La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
J'ai eu l'occasion d'indiquer à plusieurs reprises que nous allions agir pour améliorer la situation des directeurs d'école. Je partage votre analyse, notamment quant à la nécessité d'alléger leurs charges administratives.
Je rappelle que le projet de budget pour 2020 prévoit pour eux plusieurs améliorations, s'agissant par exemple de l'accès à la hors-classe des professeurs des écoles, qui aura des conséquences pour les directeurs d'école : 30 millions d'euros sont prévus à cet effet, dont 7,1 millions pour le relèvement du taux d'accès à la hors-classe des professeurs des écoles.
Je crois, comme la rapporteure spéciale, que cette question mérite une réflexion approfondie. Le travail engagé par la rapporteure de la mission flash Cécile Rilhac nous permettra d'avancer en la matière, en partie dans la direction que vous souhaitez.
Sans entrer dans le détail, je veux cependant souligner les conséquences logiques et naturelles du dédoublement des classes de CP et de CE1, et même de la limitation à vingt-quatre élèves des classes de grande section, CP et CE1, qui augmentent le nombre de classes et, ipso facto, les décharges pour les directeurs.
On ne peut évidemment pas se contenter de cette unique réponse, mais, la rapporteure spéciale l'a souligné, nous travaillons activement sur ce sujet ; d'autres réponses seront apportées ultérieurement.
Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
La mission flash, qui commence à dater, a formulé différentes préconisations, dont celle qui fait l'objet de l'amendement. À quel moment se traduiront-elles sur le plan budgétaire ?
La mission flash a évalué la mesure que nous proposons à 19 millions d'euros. Pourquoi donc, monsieur le ministre, nous parlez-vous de 7 millions d'euros ?
C'est comme dans le débat précédent : il y a des préconisations, des idées, des engagements, des annonces, mais ils ne se traduisent jamais budgétairement.
Je le répète : 7 millions, ce n'est pas 19 millions – et encore, il ne s'agit que d'une partie des engagements !
L'amendement no 845 n'est pas adopté.
Nous entamons la discussion thématique sur la médecine scolaire.
La parole est à Mme Muriel Ressiguier, pour soutenir l'amendement no 830 .
Cet amendement vise à recruter davantage de médecins du travail dans le domaine de l'enseignement scolaire. La souffrance des personnels de l'éducation nationale, qui s'exprime de manière parfois dramatique, doit susciter un véritable sursaut républicain. Nous ne pouvons déplorer des effets sans combattre les causes. Nous attendons donc des actes forts de votre part, monsieur le ministre.
Nous pouvons certes rendre hommage aux personnels de l'éducation nationale, mais il faut aussi leur donner les moyens d'accomplir efficacement leurs missions. Or les chiffres publiés au sujet de la médecine préventive dans l'éducation nationale sont alarmants. Six académies en France seraient totalement dépourvues de médecine de prévention. Selon les différentes estimations, on compterait un médecin pour 11 000 agents dans l'éducation nationale. D'autres sources citent un médecin pour 15 000 agents. Certains avancent même le chiffre d'un médecin pour 22 000 agents. Il est difficile d'obtenir des chiffres précis, mais s'ils varient, le bilan reste, hélas, le même : la médecine de prévention dans l'éducation nationale reste dangereusement en sous-effectif.
La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour soutenir l'amendement no 909 .
Dans le département de la Seine-Saint-Denis, nous avons des problèmes de santé spécifiques, par exemple un retour, d'une ampleur importante, de la tuberculose, et nous avons besoin que les enfants soient suivis. L'école obligatoire, c'est le lieu où chaque enfant se trouve et pourrait de ce fait avoir la visite d'un médecin scolaire. On a supprimé le certificat médical d'absence de contre-indication à la pratique sportive, encore une occasion de moins pour cette visite obligatoire. Il faut donc impérativement renforcer les moyens dévolus à la médecine scolaire. C'est une question essentielle et le but de cet amendement, qui vise à abonder l'action « Santé scolaire » du programme 230.
Cet amendement d'appel tend à inciter le Gouvernement à attribuer des crédits supplémentaires à la médecine scolaire. Aujourd'hui, notre pays manque de médecins scolaires et leur niveau de salaire l'explique sans doute en partie.
La Cour des comptes publiera au mois d'avril les conclusions de son rapport sur la médecine scolaire. Nous nous devons néanmoins de réfléchir sans plus tarder au financement nécessaire. L'urgence d'une telle mesure a été révélée par l'instauration du service national universel : le grand nombre de problèmes de vue et d'audition constatés à cette occasion a révélé que ces jeunes n'avaient pas eu assez de visites médicales durant leur scolarité. On sait de surcroît combien les problèmes de santé publique sont importants dans certains territoires.
La parole est à M. Yannick Favennec Becot, pour soutenir l'amendement no 710 .
Cet amendement, déposé à l'initiative de notre collègue Olivier Falorni, vise à accroître les moyens à destination de la médecine scolaire. En effet, ces moyens sont aujourd'hui insuffisants au vu des besoins et de la politique de prévention qui doit être menée. Le nombre de médecins scolaires ne fait que diminuer et les départements peinent à recruter – je le constate moi-même dans mon département de la Mayenne – , et cela pour deux raisons : en premier lieu, le métier n'est pas attractif, les médecins et infirmiers scolaires percevant les salaires les plus bas de l'ensemble de la profession médicale ; en second lieu, il conviendrait d'accompagner matériellement les conditions de travail des médecins scolaires, à qui l'on assigne toujours plus de missions sans leur donner plus de moyens.
Or, on le sait, la présence d'un médecin scolaire est précieuse pour la prévention et le suivi des élèves. Cela dépasse largement les questions de santé, puisque les médecins scolaires jouent un rôle important dans la prévention sanitaire, dans le suivi de la scolarisation des élèves ayant des troubles de santé, en situation de handicap ou ayant des troubles des apprentissages, ainsi qu'en matière de protection de l'enfance.
La politique de prévention joue un rôle-clé dans la stratégie de santé du Gouvernement, et le groupe Libertés et territoires y souscrit totalement. Néanmoins, il faut accompagner cette stratégie de moyens. L'objet du présent amendement vise donc à attribuer 1 million d'euros à l'action 02, « Santé scolaire », du programme 230, « Vie de l'élève », au détriment de l'action 03, « Communication », du programme 214, « Soutien de la politique de l'Éducation nationale ».
Applaudissements sur les bancs du groupe LT.
La parole est à Mme Béatrice Descamps, pour soutenir l'amendement no 528 .
Par cet amendement, nous invitons le Gouvernement à attribuer des crédits supplémentaires pour les postes de psychologues scolaires. Ceux-ci apportent en effet leur aide à l'analyse de la situation particulière des élèves, en liaison étroite avec les familles et les enseignants, s'appuient sur des outils et des méthodes spécifiques adaptés à la situation de chaque élève, et mènent des actions spécifiques pour prévenir les difficultés d'apprentissage et les risques de désinvestissement ou de rupture scolaire, dont on parle tant actuellement. Or les psychologues scolaires sont en nombre insuffisant et ne peuvent de ce fait accomplir parfaitement leur fonction auprès de tous les élèves qui en auraient besoin : on compte parfois un seul psychologue scolaire par circonscription. Malheureusement, la création d'un corps unique de psychologues de l'éducation nationale à la rentrée 2017, dont ils font partie, n'a pas eu d'effet sur ce problème.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 366 .
On a beaucoup évoqué les médecins scolaires, et il est vrai qu'il en manque énormément – je pense à un collège de la banlieue lyonnaise où les professeurs principaux n'ont toujours pas pu appliquer les protocoles prévus parce que le médecin n'a pas pu les signer dans les temps – , mais cet amendement vise plutôt à augmenter les effectifs des infirmières et des infirmiers, dans la mesure où ceux-ci sont au coeur de la relation entre l'école et les jeunes, notamment ceux d'entre eux qui ont une souffrance particulière, comme la phobie scolaire. Ils jouent un rôle-clé dans les lycées dotés d'internat et dans les lycées professionnels, même s'ils ne peuvent être présents évidemment vingt-quatre heures sur vingt-quatre – on doit souvent faire appel à des pompiers en cas de petites blessures, alors qu'il faudrait vraiment du personnel pratiquement en permanence. Le coeur de leur mission en milieu scolaire reste néanmoins le dialogue, grâce à la relation de proximité qu'ils entretiennent avec les élèves, qui se confient beaucoup à eux. Ils sont un élément de cohésion dans nos lycées.
On a déjà dit que la bonne santé à l'école est un facteur de réussite scolaire. S'il y a une difficulté à régler ensemble le problème des médecins et des infirmières, il faudra que le dialogue s'installe avec le Gouvernement pour que nous puissions avancer sur cette question.
La parole est à Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe, pour soutenir l'amendement no 837 .
J'irai dans le même sens que les précédents orateurs.
Cet amendement vise à appeler l'attention du Parlement et du Gouvernement sur les conditions de travail, de plus en plus dégradées, des médecins scolaires. La somme de 250 000 euros que nous proposons pour abonder l'action « Santé scolaire » ne révolutionnerait pas leurs conditions de travail, mais c'est un amendement d'appel. Il existe actuellement une vraie souffrance au travail, et leurs représentants ne cessent de demander de l'aide, dans un contexte de graves difficultés organisationnelles. Les demandes les plus variées se multiplient, alors que leur statut empêche qu'ils aient des perspectives salariales du même ordre que celles des autres médecins de la fonction publique. Ce sont pourtant les seuls professionnels qualifiés en santé publique de l'éducation nationale. Or leurs compétences ne sont pas reconnues et sont même mal utilisées, alors qu'elles constituent un vrai levier pour remédier à l'échec scolaire et améliorer la santé des enfants.
Pour certains enfants, ce sont d'ailleurs les seuls médecins qu'ils verront durant tout leur cursus scolaire.
La prévention médicale et la santé publique ne s'improvisent pas. On a besoin de professionnels dotés d'une expertise capable de soutenir efficacement la politique de prévention en milieu scolaire ; le médecin traitant ne peut pas assurer la fonction d'un médecin scolaire. C'est pourquoi ce dernier est détenteur d'une spécialité en développement de l'enfant et en détection des troubles des apprentissages, du comportement ou des signes de maltraitance. Ils sont capables d'adapter le milieu scolaire à ces spécificités parce qu'ils le connaissent bien et assurent souvent le rôle de médiateurs avec les familles.
Maints rapports tirent la sonnette d'alarme, mais rien ne bouge. Les médecins sont de plus en plus seuls, il n'y a pas de travail en équipe, pas de délégation de tâche possible ; alors que l'on développe cela dans les pôles et maisons de santé et en médecine du travail, notamment entre médecin et infirmiers, ce n'est pas possible à l'éducation nationale. Je regrette la méconnaissance de cette profession, alors que si l'on prenait les mesures qui s'imposent, cela concourrait à lui redonner de l'attractivité et à permettre une politique de recrutement efficace.
J'espère, monsieur le ministre, qu'on va enfin reconsidérer la profession de médecin scolaire et permettre les recrutements nécessaires à la bonne santé des enfants.
Je vais donner un avis argumenté global.
Nous sommes nombreux dans cette assemblée à nous inquiéter de la situation de la médecine scolaire. Lors des débats en commission, nous avons consacré beaucoup de temps à ce sujet. Toutefois, nous avons tous conscience que les sommes proposées par les auteurs de ces amendements ne permettraient pas de résoudre le problème, qui n'est pas uniquement lié à une question de moyens. Comme je le disais dans mon intervention liminaire, il faut réfléchir à une réforme globale de la médecine scolaire, depuis le recrutement jusqu'aux conditions de travail, en passant par la formation. Le Parlement a demandé à la Cour des comptes un rapport sur le sujet. Elle rendra ses conclusions en avril.
Je suis donc défavorable à l'ensemble de ces amendements.
L'avis du Gouvernement est identique à celui de la rapporteure spéciale, mais je voudrais tout de même répondre aux différents arguments qui ont été exposés.
D'abord, reconnaissons que nous traitons ici d'un manque de l'éducation nationale, et ce depuis de nombreuses années. Ce manque reflète un problème à l'échelle de la société : les problèmes que nous rencontrons en médecine du travail se retrouvent dans d'autres administrations, et même dans le secteur privé. Il y a donc évidemment, comme vient de le dire la rapporteure spéciale, une vision systémique à adopter.
Répétons-le : il ne s'agit pas tant d'un problème budgétaire que d'un problème de ressources humaines. Le ministère a pris des dispositions avec les rectorats pour que le métier soit plus attractif, car ceux-ci sont en situation de proposer des rémunérations supplémentaires ; il reste que même avec ces mesures, nous avons toujours des difficultés à recruter.
Cela étant, nous ne restons pas inertes : le ministère travaille de manière collaborative avec d'autres secteurs – je pense évidemment aux partenariats avec les grandes mutuelles comme la MGEN, la mutuelle générale de l'éducation nationale. Ce partenariat produit de bons résultats, notamment pour tout ce qui a trait aux maladies psychologiques. Il y a aussi tout le travail que nous accomplissons avec le ministère des solidarités et de la santé pour assurer une plus grande coopération entre la médecine civile et la médecine de l'éducation nationale, qu'il s'agisse de la médecine du travail ou de la médecine pour les élèves. Des progrès conséquents sont à attendre, mais ils vont prendre du temps et ne requièrent pas forcément des augmentations budgétaires à ce stade.
Je voudrais par ailleurs m'inscrire en faux contre une prétendue diminution du nombre d'infirmières : non, leur nombre ne diminue pas en 2018-2019 par rapport à 2017-2018, pas plus qu'il ne diminuera en 2019-2020. Nous avons d'ailleurs plus de problèmes à pourvoir les postes de médecin que les postes d'infirmière.
Ces amendements soulèvent une véritable question, j'en suis d'accord. Il va y avoir des améliorations, y compris pour la médecine scolaire, dès 2019-2020 ; je pense en particulier à l'un des objectifs prioritaires du ministère, celui de la visite médicale systématique à l'âge de 3 ans, au lieu de 6 ans jusqu'à présent. C'est le travail avec le ministère des solidarités et de la santé, notamment la collaboration entre les écoles et les centres de protection maternelle et infantile qui nous permettra d'apporter cette amélioration.
Pour résumer et conclure, je dirai que l'année 2019-2020 sera celle des premières améliorations dues à une coopération plus forte notamment avec les administrations de santé et les mutuelles, aussi bien en médecine du travail qu'en médecine scolaire, et que, dans une perspective plus structurelle et plus systémique, un travail organisationnel plus que budgétaire reste à accomplir, pour lequel je suis bien entendu ouvert aux discussions futures avec la représentation nationale, en articulation avec celles que je mène avec les organisations syndicales.
M. Jean-Charles Colas-Roy applaudit.
L'amendement no 727 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 369 .
Monsieur le ministre, je vous avais interrogé, en commission, sur la réduction du budget de l'action internationale. Vous m'aviez répondu qu'il s'agissait, non pas d'une diminution, mais d'un transfert de crédits du CIEP, le Centre international d'études pédagogiques, vers la structure qui le remplace, FEI – France Éducation international.
Or, alors que la France a tout de même quelques progrès à faire en matière de langues vivantes, le CIEP travaille énormément avec les enseignants pour qu'ils puissent recevoir des assistants de langue dans leurs établissements ou faire partir des Français dans des établissements étrangers. Il oeuvre également sur des programmes avec la Louisiane et propose des stages de perfectionnement à nos enseignants. Cette structure est donc absolument primordiale pour les professeurs de langue. Ceux qui en ont bénéficié savent à quel point elle est formidable.
Il m'avait été expliqué – par la rapporteure pour avis, me semble-t-il – que la nouvelle structure s'autofinancerait, ce qui permettrait de ne pas abonder ses crédits du même montant que pendant les exercices précédents. Je n'ai pas compris cette démonstration. Parce que j'estime que la nouvelle structure France Éducation international devra occuper une place prépondérante, je souhaiterais que vous m'expliquiez comment elle sera financée.
Le CIEP a simplement changé de nom pour devenir France Éducation international, dont le financement sera assuré grâce à un prélèvement sur trésorerie. La commission des finances a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Merci, madame la députée, pour votre intervention, qui me donne l'occasion – plutôt rare – de souligner l'importance de France Éducation international, auparavant appelée CIEP. Vous avez parfaitement raison de noter l'importance de cette structure, dont il n'est évidemment nullement question de diminuer le rôle.
Comme vous le savez, le Président de la République emploie une formule inédite : il parle de la France comme d'une « puissance éducative ». Nous sommes particulièrement fiers de l'utilisation de ce terme, aux côtés de ceux de puissance culturelle, de puissance économique ou de puissance politique. Le choix des mots a un sens. Pour France Éducation international, il signifie que la France a vocation à remonter dans les classements internationaux et à être toujours plus influente quant à sa capacité d'innovation en matière scolaire. Tel est d'ailleurs l'objet de plusieurs des mesures dont nous débattons ici : nous les évoquons toujours dans un cadre national, mais elles ont aussi un rayonnement européen et international. Je songe par exemple à la réforme du lycée, qui est très regardée.
Dans ce contexte, France Éducation international a un rôle très important à jouer, dans les domaines que vous avez mentionnés et quelques autres. Je l'ai affirmé très clairement à l'occasion de la réunion des ministres de l'éducation du G7, organisée au mois de juillet à Sèvres, au siège de France Éducation international.
S'agissant du projet de budget pour 2020, comme l'a indiqué Mme la rapporteure spéciale, la baisse de crédits n'est qu'apparente, puisque la diminution de 5,9 millions d'euros correspond à un exercice 2020 exceptionnel, c'est-à-dire à une reprise de trésorerie de France Éducation international. Cette reprise constitue simplement une mesure de saine gestion, les organismes de ce type n'ayant nullement vocation à accumuler des trésoreries aussi élevées.
Il faut d'autre part saluer le dynamisme de France Éducation international, qui réussit à développer ses ressources propres et constitue un excellent exemple de développement de l'activité publique, du rayonnement de notre pays, et en même temps de bonne gestion publique.
Je suis donc heureux de pouvoir vous donner cette explication – qui va en réalité dans votre sens, madame la députée, puisque vous souhaitez comme moi le développement de cette structure.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable sur l'amendement.
L'amendement no 369 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 729 .
… ou encore « Maintenant, je vous jure sur la tête de mon défunt père, quand j'te croise dans l'hyper ou quand j'te croise par là, dehors, tu es une femme comme toi et moi, j'te crève » : c'est en ces termes qu'une institutrice d'une école primaire d'Agde a été agressée le 30 septembre dernier. À cette violence verbale se sont ajoutés des gifles et des coups. Cette agression n'est malheureusement pas isolée : elle contribue seulement à remplir un peu plus une coupe déjà beaucoup trop pleine.
Tous les professeurs se demandent – et je vous le demande à mon tour – jusqu'où il faudra aller. Une agression au sein d'une école doit-elle être considérée comme un simple fait divers ? Quand ces derniers s'enchaînent, ne révèlent-ils pas un problème structurel ? Comment se fait-il que certaines écoles soient devenues un lieu d'insécurité permanent pour les enseignants comme pour les élèves ?
Ma demande est simple : il s'agit de mettre en place une politique efficace pour empêcher que de telles attaques puissent se reproduire. Les institutrices, les professeurs, les personnels éducatifs, les parents d'élèves ou les élèves, aucun ne doit se résigner à subir une telle violence. Celle-ci doit être sévèrement combattue.
Madame Ménard, vous suggérez de régler le problème de la violence scolaire par une allocation de crédits. Nous croyons au contraire que le respect de l'autre et des enseignements n'est pas seulement une question de moyens, mais que c'est une culture qui doit être enseignée depuis le plus jeune âge. C'est pourquoi nous avons décidé d'investir dans le premier degré. Un plan de lutte contre les violences scolaires a en outre été annoncé par le ministre en août dernier.
Je suis donc défavorable à cet amendement à titre personnel, la commission des finances ne s'étant pas prononcée.
Le problème que vous évoquez, madame la députée, est effectivement très sérieux, et je le considère comme tel. Dans l'exemple que vous avez cité – celui d'Agde, qui a particulièrement appelé mon attention – , l'institution a immédiatement eu les réactions nécessaires, notamment en interpellant les personnes qui ont commis les faits scandaleux que vous avez décrits.
Une série de mesures ont été prises à compter de novembre dernier, dès l'annonce du plan d'actions pour la protection de l'école. S'y sont ajoutées des mesures spécifiques pour la rentrée, de nature plus interministérielle, qui ont notamment trait à la réactivité des forces de police et de justice, ou encore à leur coopération avec l'éducation nationale. Je n'entrerai pas, à cette heure tardive, dans tous les détails de ce plan de lutte contre les violences scolaires, mais le cas que vous évoquez en constitue une bonne illustration, par la réponse sans faille qui y a été apportée – nous ne devons nous rendre coupables d'aucun laxisme face à des phénomènes de ce type.
Soyez assurée de la réactivité de l'institution, comme du fait que les moyens appropriés sont déployés. Cette question ne revêt d'ailleurs pas un aspect uniquement budgétaire ; elle soulève aussi des enjeux de coordination et de volontarisme quant aux nécessaires sanctions et préventions qui doivent intervenir. Tel est l'objet du plan de lutte contre les violences scolaires que nous avons adopté et qui est doté dans ce projet de budget.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.
Vous n'êtes pas sans savoir que, dans ma circonscription, un jeune a été tué alors qu'il se dirigeait vers le gymnase de son établissement. Il est mort dans les bras de son professeur d'EPS, qui tentait de le sauver. Le lycée Paul-Robert et le collège Marie-Curie des Lilas réclament des moyens de vie scolaire supplémentaires, ne serait-ce que pour gérer cette crise : davantage d'assistants d'éducation, de conseillers principaux d'éducation ou de psychologues. Le temps d'attente qu'ils doivent observer pour obtenir une réponse est difficilement acceptable.
J'entends bien que la question n'est pas uniquement budgétaire, mais elle l'est en partie : les établissements scolaires vivent avec le strict minimum, et un encadrement réduit à sa portion congrue. Votre plan de lutte contre les violences scolaires devrait donc inclure une augmentation du personnel encadrant, peut-être par le recrutement d'éducateurs, au moins dans certains quartiers et certaines villes, ainsi que des réactions beaucoup plus rapides. La seule réponse qui est pour l'heure donnée à l'établissement concerné consiste à lui faire savoir que son diagnostic est en cours. Or, quand un établissement déplore quatre morts en un an, il me semble que son diagnostic est déjà largement dressé.
J'entends bien moi aussi qu'il ne s'agit pas uniquement d'une question de budget. Si j'ai choisi l'exemple d'Agde, une ville proche de ma circonscription, c'est aussi pour vous alerter sur le fait que les violences à l'école ne concernent désormais plus seulement les adolescents entre eux ou les élèves qui agressent leurs professeurs, elles concernent également les parents. Votre plan de lutte contre les violences scolaires devrait inclure la sensibilisation des parents, car le nombre d'agressions d'enseignants par des parents augmente, ce qui me semble particulièrement inadmissible.
L'amendement no 729 n'est pas adopté.
L'amendement no 813 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Catherine Osson, rapporteure spéciale, pour soutenir l'amendement no 269 .
Depuis l'adoption de cet amendement par la commission des finances, les services du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse m'ont fait part d'une difficulté de mise en oeuvre de la mesure proposée. En prévision de la probable demande de retrait de M. le ministre, je me propose donc de retirer cet amendement.
Je demande effectivement le retrait de l'amendement.
Nous n'obtiendrons donc même pas de réponse du ministre ? Ce n'est pas normal !
Je peux tout à fait faire une réponse, pour votre plaisir, madame la députée.
Vous proposez de revaloriser les rémunérations des agents de catégorie 3 de l'enseignement technique agricole privé sous contrat, en minorant les crédits du programme 230. Comme vous le savez, le Gouvernement attache un grand intérêt à la rémunération de ces agents. La mesure figure par ailleurs dans le plan d'action en faveur des enseignants de catégorie 3 discuté dans le cadre du comité consultatif ministériel.
Deux éléments me conduisent toutefois à demander le rejet de l'amendement. D'abord, la mise en oeuvre de ces mesures dès le projet de loi de finances pour 2020 n'est pas réaliste : la première mesure impliquerait l'organisation d'un concours spécifique au cours de l'année 2020, ce qui, vu les échéances, semble particulièrement difficile à réaliser ; la deuxième nécessiterait l'adoption d'un vecteur législatif afin de permettre la mise en adéquation de la rémunération de ces agents avec une grille indiciaire, et non avec un corps, comme cela est actuellement prévu à l'article L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime.
En outre, le programme 230 est extrêmement contraint : la quasi-totalité des crédits qui le composent sont des dépenses obligatoires, comme les bourses ou les rémunérations d'assistants d'éducation ou d'assistants d'élèves en situation de handicap.
Par conséquent, je demande le retrait de cet amendement.
L'amendement no 269 est retiré.
L'amendement ayant été retiré, madame Dupont, le débat est désormais clos. C'est la règle.
M. le ministre a accepté de reprendre son explication et je l'ai laissé s'exprimer, mais je ne peux pas vous donner la parole.
Je suis restée en séance jusqu'à trois heures du matin pour cela ? Chapeau !
Vous vous en expliquerez avec les intéressés, mais il n'est pas nécessaire de prendre l'Assemblée à témoin de vos agacements.
La parole est à M. Raphaël Gérard, pour soutenir l'amendement no 777 .
Monsieur le ministre, vous avez fait de la lutte contre le harcèlement scolaire une priorité de votre action, ce dont je me réjouis. J'indiquais tout à l'heure que, faute d'une formation suffisante, les personnels de la communauté éducative se trouvaient souvent démunis pour prévenir ce type de phénomène ou désamorcer des situations de harcèlement. C'est pourquoi l'éducation nationale s'appuie très largement sur un réseau d'acteurs associatifs pour former les enseignants, ainsi que pour sensibiliser les élèves. Je pense par exemple au numéro d'écoute de l'association e-Enfance.
Pourtant, la dernière campagne de financement participatif de l'association SOS homophobie montre que des acteurs majeurs dans la lutte contre le harcèlement sont très fragiles sur le plan financier et ont besoin du soutien de l'État. Dans ce cadre, je tenais à vous faire part de mes inquiétudes s'agissant de la baisse des subventions du ministère de l'éducation nationale et de la jeunesse aux associations dans le secondaire. Je souhaite que cette baisse n'affecte pas le financement des priorités ministérielles en matière de lutte contre le harcèlement.
Cet amendement n'a pas été examiné par la commission des finances. J'émets un avis défavorable, dans la mesure où les subventions s'établissent environ au niveau des dépenses d'exécution observé en 2018.
Monsieur le député, je tiens à vous rassurer : les subventions aux associations concernées ne baissent pas dans le projet de budget pour 2020. Il se trouve simplement qu'elles ne relèvent pas de la même ligne budgétaire. Sur ce point comme sur d'autres, ce sont des mesures qualitatives que nous prenons.
En termes budgétaires, c'est donc la même chose. En termes de volontarisme politique, en revanche, il s'agit d'une accentuation des mesures prises.
Pour l'ensemble de ces raisons, avis défavorable.
Au vu des explications données par M. le ministre, je retire l'amendement.
L'amendement no 777 est retiré.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 367 .
Nous avions évoqué cet amendement en commission, où je m'inquiétais de la diminution de 25 % des crédits alloués au fonds de vie lycéenne. J'avais souligné que ces crédits permettaient de soutenir bon nombre d'initiatives des élèves et de travailler notamment sur la citoyenneté, sur le climat scolaire et sur la transmission des valeurs de la République.
Vous m'aviez expliqué que, comme dans le cas des fonds sociaux, ces crédits n'avaient pas été utilisés et qu'il en restait des reliquats. Je m'interroge cependant, comme l'a fait tout à l'heure notre collègue : si l'on en arrive là, alors que les jeunes ont grand besoin de s'exprimer, d'être acteurs de leurs projets et de faire quelque chose dans leurs établissements scolaires, c'est qu'il faudrait probablement muscler davantage la partie vie scolaire, avec davantage de conseillers principaux d'éducation – CPE – ou d'assistants d'éducation, pour que les projets puissent être lancés et que les jeunes soient accompagnés. Il faudrait donc trouver une solution pour encourager les équipes à aider les jeunes et faire en sorte que ces projets puissent se concrétiser.
Comme cela a été dit en commission, il s'agit d'une mesure de sincérisation du budget. La commission a émis un avis défavorable.
L'amendement no 367 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » sont adoptés.
Je suis saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 76.
La parole est à Mme Michèle Victory, pour soutenir l'amendement no 372 .
Cet amendement vise à demander la remise d'un rapport sur la situation des contractuels, que j'ai évoquée tout à l'heure. On compte en effet 39 000 enseignants contractuels, chiffre en augmentation constante, avec une flexibilité et une adaptabilité qui plaisent peut-être à certains, mais qui débouchent finalement sur une assez forte précarité de ces enseignants et une instabilité qui n'est pas sérieuse dans ces métiers, alors que ces personnes font, je le rappelle, le même métier que les enseignants titulaires.
Un rapport de la Cour des comptes de mai 2018, largement commenté par le Sénat, titrait sur « Le recours croissant aux personnels contractuels dans l'éducation nationale ». Le problème avait donc déjà été souligné.
Si nous voulons avancer et voir où se trouvent ces contractuels, et dans quelle mesure on peut s'en passer ou non – car, je l'ai dit, on peut trouver des solutions pour deux heures, mais on ne peut pas pourvoir ainsi des postes entiers – , il importe que nous puissions travailler sérieusement sur ces questions et disposer d'un tel rapport.
La commission avait donné un avis défavorable. À titre personnel, j'émettrai pour ma part un avis favorable.
Le sujet est important. Sans faire de longs développements à cette heure de la soirée, j'émets un avis favorable.
L'amendement no 372 est adopté.
Mme Muriel Ressiguier et M. Jean-Charles Colas-Roy applaudissent.
L'objet de cet amendement – qui aura, je l'espère, le même destin que celui de Mme Victory – est de demander un rapport sur les crédits alloués au financement des écoles maternelles privées.
En rendant obligatoire l'instruction pour les enfants de 3 à 6 ans, le Gouvernement impose aux communes de financer ces écoles maternelles privées. Cette mesure s'inscrit, bien sûr, dans la philosophie générale de l'action du Gouvernement : financer le secteur privé au détriment du secteur public. En effet, depuis la loi Debré de 1959, il est déjà prévu que les municipalités participent dans les mêmes proportions aux frais de scolarité pour les enfants de leurs communes, qu'ils soient dans des écoles publiques ou privées sous contrat. Les dépenses de fonctionnement, qu'il s'agisse du personnel, du chauffage ou du matériel, doivent ainsi être prises en charge dans la même mesure. Jusqu'à présent, seules les écoles élémentaires étaient visées par cette obligation. Les communes investissaient dans les écoles maternelles publiques pour garantir un meilleur accueil et les écoles maternelles privées prenaient en charge leurs propres besoins pour les 300 000 enfants qu'elles accueillent.
La nouvelle mesure implique donc désormais le financement du fonctionnement des écoles maternelles privées par les pouvoirs publics, ce qui remet en cause les perspectives d'investissement public et opère un grave changement de paradigme, dont il nous paraît vital d'évaluer le coût pour les finances publiques.
J'émettrai un avis défavorable à titre personnel, car l'amendement n'a pas été examiné en commission. Un principe de parité s'applique en effet et il faudrait changer la loi : il ne suffit pas de couper des crédits.
L'amendement no 840 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les collèges et lycées sont attributaires de fonds sociaux qui visent à apporter une aide exceptionnelle aux familles défavorisées. Ces fonds permettent de financer des aides pour l'accès à la restauration scolaire, de réduire les dépenses de vie scolaire et de participer aux sorties pédagogiques ou aux voyages scolaires, comme l'a rappelé tout à l'heure Mme Rubin.
Lors de l'examen du texte en commission, comme à nouveau voilà quelques instants, une inquiétude légitime a été exprimée, car ces fonds connaissent en apparence une baisse dans le présent projet de loi de finances. Le projet annuel de performance précise toutefois que la mobilisation de reliquats de subventions versées aux EPLE au titre des années antérieures et non consommées par ceux-ci permettra de maintenir ces aides sociales au niveau de l'exécution 2018, soit 53 millions d'euros.
Si l'on ne peut que se réjouir du maintien de cette enveloppe, l'existence de reliquats de subventions dans la trésorerie des EPLE pose la question de l'utilisation de ces fonds par les établissements. C'est pourquoi le présent amendement propose la remise d'un rapport sur ce sujet, afin d'évaluer ces taux – que je qualifierai de non-recours – et, ainsi, de déterminer les raisons de la non-consommation ou de la consommation incomplète de ces fonds par les EPLE, en vue de l'examen au Parlement du prochain projet de loi de finances.
Le bégaiement est un trouble qui apparaît dans notre communication. C'est un blocage de la voix, ce sont des mots qui ne sortent pas, ce sont des arrêts, c'est l'impression que la personne fait énormément d'efforts pour parler – et ce sont aussi des stéréotypes. C'est une façon de parler qui peut apparaître comme plus nerveuse. On attaque donc tous les bègues de France – qui sont tout de même au nombre de 650 000 – en les considérant comme des personnes hystériques ou instables. Or ce sont seulement des personnes qui ont du mal à parler, du « bonjour » du matin au « bonne nuit » du soir. Des mots qui vous paraissent simples peuvent, pour des personnes comme moi, être très difficiles à prononcer. Un bègue, c'est quelqu'un qui roule à 180 kilomètres-heure sur un terrain dangereux. Il est très important de comprendre cela.
Un enfant bègue sur quatre reste bègue en atteignant l'âge adulte. C'est beaucoup à l'aube de 2020, à une époque où les sciences neurologiques sont très développées et où l'on commence à accompagner de très près ce handicap invisible. Le bégaiement s'installe de 2 à 5 ans et les parents d'élèves sont souvent perdus, tandis que les enseignants du primaire et du secondaire ne savent pas exactement comment le gérer.
Voilà ce qui se passe, et vous le voyez très bien en ce moment même avec les paroles d'une députée bègue et bavarde. Je dis souvent à tous les bègues – qui sont nombreux à être restés jusqu'à trois heures du matin pour nous regarder – que chaque prise de parole est une bataille que nous menons tous les jours. J'espère que nous obtiendrons la première victoire aujourd'hui en inscrivant le mot « bégaiement » dans la formation des enseignants. C'est très important de mettre un mot sur les choses et d'inscrire ce mot-là dans la formation continue. Dans une société qui communique énormément, il est très difficile d'être enfermé dans son propre corps.
Mmes Muriel Ressiguier et Jacqueline Dubois et M. Jean Terlier applaudissent.
Sur l'amendement no 842 , j'émets un avis de sagesse.
L'amendement no 847 n'a pas été examiné par la commission. À titre personnel, j'y suis défavorable.
Pour ce qui est de l'amendement no 862 , madame Krimi, je partage votre souci de former les enseignants aux handicaps non-visibles. Cependant, je ne pense pas qu'un rapport résolve la solution. Peut-être la question pourrait-elle être davantage intégrée dans les modules existants, comme Cap école inclusive. Je vous suggère également un échange avec la DGESCO, la direction générale de l'enseignement scolaire. Je veux bien aussi que nous nous intéressions ensemble à ce sujet. La commission n'ayant pas examiné cet amendement, j'émettrai, à titre personnel, un avis défavorable.
L'amendement no 842 de Mme Rilhac comporte une proposition intéressante, qui fait écho aux interventions d'autres députés. J'ai eu l'occasion de dire qu'il fallait s'intéresser au fond des choses, et pas seulement à leur apparence budgétaire. Cette proposition est donc particulièrement intéressante, car elle peut, d'abord, nous permettre de nous intéresser à la chaîne de décision – comment parvient-on jusqu'à la dépense d'un fonds social ? – , puis de mettre en perspective les dépenses sociales des fonds sociaux avec les dépenses sociales en général, donc d'avoir une vision à la fois systémique et cohérente de ce sujet, au moment où nous nous apprêtons à avancer encore, non seulement au titre des dépenses dont je parlais, mais aussi d'autres mesures sociales ou en matière d'éducation prioritaire. J'émets donc un avis favorable sur cet amendement.
Sur l'amendement numéro 847, avis défavorable.
Quant à l'amendement no 862 , je vous remercie, madame Krimi, pour votre intervention, en réalité très fluide, à ce qu'il m'a semblé, et très intéressante. Le sujet mérite en effet la consécration que vous venez de lui donner. Nous aurons des occasions d'en parler et d'y travailler dans le cadre de tout ce que nous avons à faire pour lutter contre l'ensemble des handicaps que les élèves peuvent avoir, y compris à l'oral. Dans le cadre de la réforme du lycée, nous sommes en train de faire de l'épreuve orale du baccalauréat un moment important, obligeant ainsi l'ensemble du système scolaire, dès la petite section de maternelle, à s'intéresser aux capacités orales, donc aussi à la détection de problèmes tels que le bégaiement.
SI j'émets donc un avis défavorable sur la demande d'un rapport sur le sujet, je tiens en revanche à manifester une ouverture totale quant à l'idée d'y travailler dans les temps futurs.
L'amendement no 842 est adopté.
Nous en avons terminé avec l'examen des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
La suite de la discussion budgétaire est renvoyée à la prochaine séance.
Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
Discussion de la proposition de résolution portant sur la condamnation de l'offensive militaire turque dans le Nord-Est syrien ;
Suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2020 :
Examen des crédits des missions « Défense », « Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation », « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », « Action et transformation publiques », « Crédits non répartis », « Régimes sociaux et de retraite » et « Remboursements et dégrèvements », ainsi que des comptes d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » et « Pensions ».
La séance est levée.
La séance est levée à trois heures quinze.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra