COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI CONFORTANT LE RESPECT DES PRINCIPES DE LA RÉPUBLIQUE
Vendredi 22 janvier 2021
La séance est ouverte à vingt-et-une heures cinq.
La commission spéciale poursuit l'examen du projet de loi confortant le respect des principes de la République (n° 3649 rect.) (M. Florent Boudié, rapporteur général et rapporteur pour le chapitre I du titre II, Mme Laurence Vichnievsky, rapporteure pour le chapitre I du titre Ier, M. Éric Poulliat, rapporteur pour le chapitre II du titre Ier, Mme Nicole Dubré-Chirat, rapporteure pour le chapitre III du titre Ier, Mme Laetitia Avia, rapporteure pour le chapitre IV du titre Ier, Mme Anne Brugnera, rapporteure pour le chapitre V du titre Ier, M. Sacha Houlié, rapporteur pour les chapitres II et III du titre II, et pour les titres III et IV).
Nous poursuivons l'examen des articles du projet de loi.
Article 22 (suite) : Renforcement des contrôles sur les établissements d'enseignement privés hors contrat
La commission est saisie de l'amendement CS993 de M. Xavier Breton.
Il s'agit de limiter le dispositif exorbitant du droit commun de l'article 22 – qui permet à l'autorité administrative de fermer des établissements d'enseignement privés hors contrat – à l'objet du projet de loi tel qu'il figure dans son exposé des motifs, à savoir la lutte contre l'entrisme communautariste et les idéologies séparatistes. Il convient d'être méfiant, compte tenu de la tendance liberticide qui caractérise plusieurs des décisions prises par le Gouvernement au cours des derniers mois.
Sauf erreur de ma part, nous avons déjà examiné des amendements similaires déposés par vous-même sur d'autres articles. Défavorable.
Défavorable.
Vous avez raison, madame la rapporteure : sur chaque article restreignant les libertés, j'ai déposé un amendement analogue à celui-ci pour m'assurer que cet article vise bien la lutte contre les idéologies séparatistes. À chaque fois, vous y êtes défavorable, et pour cause : ces mesures sont bien de portée générale, et elles vont donc restreindre les libertés de nos concitoyens.
Ni l'Assemblée nationale ni le Sénat ne peuvent accepter d'inscrire dans la loi les termes « entrisme communautariste » et « idéologies séparatistes », qui n'ont aucune valeur juridique. Ce serait contraire à tous nos principes constitutionnels. Une fois pour toutes, monsieur Breton, notre démarche consiste à identifier les comportements séparatistes ou traduisant un repli communautarise et à leur imposer des contraintes nouvelles, voire des sanctions supplémentaires. Mais nous ne pouvons pas inscrire dans la loi des notions qui n'en relèvent pas.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CS1846 et CS1847, tous deux de la rapporteure.
Elle examine ensuite l'amendement CS1446 de Mme Marie-George Buffet.
Cet amendement d'appel vise à supprimer les alinéas 11 à 26 afin qu'il ne soit plus possible pour un établissement d'enseignement privé d'être hors contrat. Le nombre de ces établissements a augmenté de 26 % entre 2011 et 2014 et, en 2019, la Fondation pour l'école a indiqué avoir recensé plus de 300 projets d'ouverture d'écoles de ce type.
Cinq années de fonctionnement sont nécessaires pour pouvoir passer un contrat avec l'éducation nationale. Nous souhaiterions, et c'est le sens de notre amendement, que ce délai d'instruction soit réduit de manière à éradiquer le plus grand nombre possible d'écoles hors contrat.
Je soutiens l'amendement de M. Peu, car les écoles hors contrat sont le problème de demain. Si nous limitons l'instruction des enfants en famille, les réseaux contre lesquels nous voulons lutter vont ouvrir des centaines d'écoles hors contrat pour accueillir ces enfants. Soyons très attentifs à ce problème !
Je soutiens également l'amendement de M. Peu et je partage l'inquiétude qui le motive. En durcissant les conditions de l'instruction en famille, nous risquons de provoquer un report sur les établissements hors contrat. Si tel est le cas, nous serons forcés de constater que l'article 21 aura raté la cible qu'il prétendait atteindre.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CS1091 de M. Alexis Corbière.
Nous souhaitons renforcer le contrôle de l'État sur les établissements privés hors contrat en garantissant à chaque élève le droit d'avoir accès aux savoirs et connaissances qu'il doit, aux termes du code de l'éducation, acquérir pendant sa formation scolaire. En effet, le projet de loi tend à limiter le contrôle exercé par l'éducation nationale aux attendus du socle commun. Or, celui-ci, souvent désigné comme un « SMIC éducatif », ne correspond pas à la formation d'un futur citoyen. Par ailleurs, chaque enfant doit pouvoir bénéficier d'une éducation à la santé et à la sexualité sans que lui soient opposés le caractère propre de l'établissement ou des convictions religieuses, politiques ou philosophiques.
Cet amendement est similaire à un autre amendement défendu cet après-midi par M. Corbière. Avis défavorable.
On ne peut pas escamoter le débat sur les établissements privés hors contrat. Or, à M. Peu, qui propose l'extinction de ce régime, vous vous contentez de répondre : « Défavorable ». Il faut dire les choses franchement ! Nous considérons, nous, que l'enseignement doit être libre et que cette liberté implique la possibilité pour les parents de choisir le mode d'instruction de leurs enfants. M. Vallaud, quant à lui, craint que des écoles privées hors contrat se développent selon une logique séparatiste. Discutons-en ! C'est vous qui réveillez ce débat en abordant cette question dans le projet de loi. Répondez-nous : quelle est votre conception de l'enseignement privé hors contrat ? A-t-il toute sa place dans notre système éducatif ?
Madame la rapporteure, l'amendement qu'a défendu M. Corbière cet après-midi avait pour objet de permettre à l'éducation nationale de s'opposer à l'ouverture de certains établissements. Il n'a donc pas le même objet que celui que je viens de soutenir,qui vise à renforcer le contrôle de l'État sur les écoles hors contrat. Nous dénonçons leur existence mais, si elles sont autorisées, que l'on s'assure au moins qu'elles respectent l'intérêt supérieur de l'enfant.
Monsieur Breton, M. Peu a bien indiqué que son amendement était un amendement d'appel. Par ailleurs, nous avons déjà débattu des écoles hors contrat, notamment lors de l'examen de l'amendement de suppression ; je crois que nous avons été suffisamment clairs à ce sujet. Enfin, monsieur Coquerel, M. Corbière a évoqué tout à l'heure l'enseignement qui devrait être dispensé dans les écoles hors contrat, ce à quoi je lui ai répondu que nous ne pouvions avoir, vis-à-vis de ces établissements, les mêmes exigences en matière de programmes.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CS936 de M. François Pupponi.
Il s'agit de préciser que les principes de la République doivent être enseignés dans les établissements hors contrat. Nous savons que les quelques contrôles auxquels ils sont soumis ne sont pas suffisants. Or, ce sont ces établissements que, demain, les réseaux que nous voulons combattre investiront.
Ces principes figurent dans le socle commun de compétences, de connaissances et de culture que les établissements hors contrat doivent permettre à leurs élèves d'acquérir à l'issue de chaque cycle ; cet élément est contrôlé lors des inspections. Votre amendement est donc satisfait ; je vous propose de le retirer.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CS1207 de Mme Géraldine Bannier.
Il s'agit de compléter l'alinéa 14 – qui impose aux établissements hors contrat de communiquer à l'éducation nationale les noms des personnels ainsi que les pièces attestant de leur identité, de leur âge, de leur nationalité et, pour les enseignants, de leurs titres – par la phrase suivante : « Un fichier national recense l'ensemble des enseignants exerçant dans ces établissements. »
Un fichier d'une telle ampleur – dont, au demeurant, nous ne connaissons pas la finalité – serait très difficile à gérer pour les établissements privés. Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CS994 de M. Xavier Breton et CS937 de M. François Pupponi.
Pour lutter de manière concrète contre les séparatismes, il paraît nécessaire que les responsables des établissements hors contrat puissent obtenir des autorités académiques qu'elles consultent le bulletin n° 2 (dit B2) du casier judiciaire des personnels qu'ils souhaitent recruter, ainsi que le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS) et le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT).
Je comprends l'esprit de votre amendement, mais il est en partie satisfait : les FIJAIS et FIJAIT sont déjà consultés. Quant à la mesure relative à la consultation du B2, elle est de nature réglementaire. Avis défavorable.
Lorsqu'une école hors contrat recrute un enseignant, aucun contrôle n'est effectué. Elle doit, une fois par an, envoyer la liste de ses enseignants, de sorte que le contrôle s'exerce éventuellement a posteriori. Or, il n'est pas question que, pendant plus d'un an, on confie nos enfants à un enseignant figurant sur un fichier relatif au terrorisme ou à la radicalisation. Je propose donc, par l'amendement CS937, qu'avant de recruter un enseignant, les responsables puissent saisir la préfecture pour qu'elle vérifie que celui-ci ne figure ni dans le FIJAIT, ni dans le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ni à la lettre S du fichier des personnes recherchées (FPR). Les responsables que nous avons auditionnés nous ont confirmé qu'ils ne pouvaient pas être informés de ces éléments lors d'un recrutement.
Cette demande a en effet été exprimée lors de l'audition des responsables de l'enseignement privé. Toutefois, le FSPRT est un fichier de renseignement et non un fichier de condamnations judiciaires. Avis défavorable.
Même avis. Un décret relatif à la consultation du B2 est en cours de rédaction.
S'il est vrai que le contrôle ne s'effectue éventuellement qu'un an après le recrutement de l'enseignant, alors des personnes figurant sur l'un des fichiers de renseignement mentionnés ou condamnées pour terrorisme peuvent enseigner dans des écoles privées. Réagissons : n'attendons pas qu'un drame se produise ! Je rappelle qu'on ne peut pas être embauché dans un aéroport si l'on est inscrit dans l'un de ces fichiers.
Au début de notre mission d'information, M. Poulliat et moi-même avons constaté que les personnels de l'administration pénitentiaire n'étaient pas soumis à un criblage par le service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS), si bien qu'actuellement, une vingtaine de surveillants pénitentiaires sont inscrits au FSPRT. Depuis mars 2019, les choses ont changé. Mais les enseignants ne font toujours pas l'objet d'un tel criblage, ni les éducateurs, dont certains ont pourtant été envoyés sur des théâtres d'opérations. Il est urgent de remédier à cette situation.
J'ajoute que, lors de l'examen de la proposition de loi relative à la sécurité globale, je suis parvenu à faire adopter un amendement qui vise à soumettre à un criblage les personnes chargées de la maintenance dans les transports publics.
À notre connaissance, lorsqu'un établissement privé est créé, le FIJAIS et le FIJAIT sont consultés. Puis, chaque année, la liste de leurs personnels est transmise à l'autorité académique, qui a la possibilité d'avoir accès à ces fichiers. Nous allons donc chercher à savoir, d'ici à la séance publique, si cette consultation annuelle a lieu ou non et s'il est nécessaire de préciser le cadre dans lequel elle doit se faire.
La commission rejette l'amendement CS994.
Elle adopte l'amendement CS937.
Puis la commission est saisie de l'amendement CS91 de Mme Anne-Laure Blin.
Nous proposons que les pièces figurant à l'alinéa 14 soient également communiquées aux maires, dans la mesure où il leur appartient de recenser les enfants de leur commune.
Je comprends la préoccupation des maires, mais ils n'ont pas, me semble-t-il, à connaître des informations relatives aux personnels des établissements d'enseignement privés ni à procéder aux vérifications qui s'imposent ; cela relève d'une prérogative de l'État. Par ailleurs, les personnels sont contrôlés par l'éducation nationale. Enfin, le rôle du maire est déjà important puisque la loi dite « Gatel » lui permet de s'opposer à l'ouverture d'un établissement. Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CS260 de Mme Anne‑Laure Blin et CS307 de M. Xavier Breton.
En ce qu'ils peuvent donner lieu à une ingérence dans les activités éducatives françaises, les financements d'établissements scolaires par des organisations ou des États étrangers doivent être publics. Il convient donc de restreindre la communication des informations budgétaires et comptables aux cas où de tels financements existent.
Les contrôles doivent en effet cibler les situations qui présentent un risque de séparatisme, notamment celles qui concernent des fonds provenant de l'étranger.
Vos amendements visent à restreindre la possibilité de demander des informations comptables et financières aux cas de suspicion de financements étrangers. En pratique, l'État demandera ces informations lorsqu'il aura des soupçons et non pour s'ingérer dans le fonctionnement des établissements. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle est saisie de l'amendement CS821 de Mme Perrine Goulet.
Il s'agit de s'assurer que les établissements hors contrat dispensent, non seulement des enseignements relatifs aux principes de la République, notamment la laïcité, mais transmettent également les informations relatives à l'éducation au corps et aux droits de l'enfant. Cette précision me paraît d'autant plus importante que, nous le savons, les inspections sont rares puisqu'elles ne sont obligatoires qu'au cours de la première et de la cinquième année suivant l'ouverture de l'école.
Je partage votre intérêt pour cette question, mais les principes que vous mentionnez figurent dans le socle commun de compétences, de connaissances et de culture que les établissements hors contrat doivent permettre à leurs élèves d'acquérir à l'issue de chaque cycle, ce qui est contrôlé lors des inspections. Je vous demande donc de bien vouloir retirer l'amendement.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS1119 de M. Jean-Luc Mélenchon.
Cet amendement vise à mieux contrôler les écoles hors contrat. Nous proposons que ces dernières fassent obligatoirement l'objet d'un contrôle par an, ce qui est loin d'être le cas aujourd'hui. Il en va aussi de l'égalité entre les territoires : il n'est pas acceptable que, dans certains départements des établissements hors contrat soient moins contrôlés faute de personnel disponible.
Dans un rapport publié en 2017, on apprend que, sur une centaine d'écoles hors contrat implantées dans l'académie de Versailles, seule une trentaine ont été contrôlées en trois ans et qu'aucune d'entre elles ne respecte le socle commun – les enseignements minimaux ne sont pas dispensés aux élèves. L'éducation physique et sportive, l'histoire, la géographie, les arts et les sciences sont réduites à leur portion congrue. Il est donc nécessaire de normaliser le nombre de contrôles auxquels ces établissements doivent être soumis.
Vous proposez un contrôle au moins annuel des écoles hors contrat. Pour ma part, j'estime qu'il faut laisser de la souplesse aux contrôleurs dans l'établissement de leur planning : il peut être nécessaire d'effectuer un ou plusieurs contrôles par an dans certains établissements, alors que d'autres écoles ayant déjà fait l'objet d'évaluations satisfaisantes peuvent être soumises à des contrôles plus espacés. Avis défavorable.
Je ne suis pas d'accord avec vous, madame la rapporteure. Si telle ou telle école hors contrat n'est pas contrôlée, ce n'est souvent pas du fait d'une décision du contrôleur qui estimerait que, d'après les informations dont il dispose, elle est « dans les clous », mais bien à cause d'un manque de personnel. Dès lors que la loi imposera au moins un contrôle par an, il faudra évidemment y consacrer les moyens humains adaptés. Les dérives constatées dans les écoles hors contrat sont beaucoup plus importantes que celles observées dans le cadre de l'instruction en famille, une pratique sur laquelle nous avons pourtant passé beaucoup de temps. Les écoles hors contrat posent des problèmes qui dépassent le seul séparatisme : il faudrait vraiment augmenter le nombre de contrôles dont elles font l'objet.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CS458 de M. Frédéric Petit, CS1093 de M. Alexis Corbière et CS395 de M. Jean-Baptiste Moreau.
L'amendement CS458 vise à ce que les établissements hors contrat soient contrôlés tous les ans, et surtout que le premier contrôle ait lieu au cours de la première année suivant leur ouverture. Si nous n'adoptons pas ce genre d'amendement, il y aura un décalage entre ce que nous imposerons aux familles et ce que nous demandons à l'enseignement hors contrat – ce n'est pas logique. Nous avons ici l'occasion de faire baisser la pression qui s'exerce contre l'ensemble du texte et de montrer que nous nous attaquons vraiment à ce qui mérite d'être combattu.
L'amendement CS1093 est quasiment le même que celui de M. Petit. Nous demandons qu'au sixième alinéa de l'article L. 442‑2 du code de l'éducation, les mots « de la première année » soient remplacés par les mots « des six premiers mois ». Lorsque des enfants sont scolarisés dans des conditions déplorables, que ce soit en termes sanitaires, de violences subies ou d'instruction, on ne peut tout de même pas attendre un an avant que l'établissement soit contrôlé ! Ce contrôle est d'autant plus important que plusieurs amendements visant à conditionner l'ouverture des établissements au respect d'un certain nombre de critères ont été rejetés tout à l'heure.
Comme je l'ai déjà dit lors de l'examen de l'amendement précédent, la loi prévoit un contrôle des écoles hors contrat au cours de leur première année d'existence. À l'issue de ce premier contrôle, il faut laisser le corps de contrôle décider de la pression qui sera exercée sur l'établissement ; celui-ci pourra faire l'objet de plusieurs contrôles par an ou, au contraire, de contrôles plus espacés, en fonction de ce qui aura été observé lors du premier contrôle. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1848 de la rapporteure.
Elle examine l'amendement CS308 de M. Xavier Breton.
Il convient de laisser aux directeurs d'établissements privés hors contrat un délai raisonnable pour régulariser ce qui doit l'être. Nous proposons de fixer ce délai à trois mois. En cas de risque pour l'ordre public, la santé ou la sécurité physique ou morale des mineurs, ou de manquement de l'établissement à ses devoirs en matière de contrôle de l'obligation scolaire et de l'assiduité des élèves, un délai plus court pourrait être fixé. Le régime actuellement prévu par l'alinéa 18, qui prévoit que « l'une des autorités de l'État […] peut adresser au directeur ou au représentant légal d'un établissement une mise en demeure […] dans un délai qu'il détermine […] », laisse trop de latitude à l'autorité publique. Il est important de fixer a priori les règles du jeu, en tenant compte, encore une fois, de la gravité des situations.
Avis défavorable. Il faut laisser le préfet et le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN), qui connaissent la situation, décider de ce délai, qui peut être beaucoup plus restreint que trois mois si les insuffisances constatées sont très importantes.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1849 de la rapporteure.
Elle examine les amendements identiques CS262 de Mme Anne-Laure Blin et CS309 de M. Xavier Breton.
Si l'État doit avoir un droit de regard sur le fonctionnement des établissements hors contrat, les contrôles diligentés par l'éducation nationale ne doivent pas concourir à aligner les progressions des programmes, des supports et des méthodes scolaires mis en œuvre dans ces écoles sur les pratiques développées dans les établissements publics.
J'insiste sur la nécessité de concilier le droit à l'instruction des enfants avec la liberté d'enseignement des établissements scolaires, dont je rappelle qu'il s'agit d'une liberté de rang constitutionnel. Il convient de respecter la liberté de choix des progressions, des programmes, des supports et des méthodes scolaires relatifs à la spécificité des établissements privés hors contrat. Nous proposons de rappeler expressément ce principe à l'alinéa 20.
D'une manière générale, l'État doit respecter la liberté de l'enseignement dont bénéficient les établissements privés hors contrat. Il n'est pas besoin d'alourdir la rédaction de l'alinéa 20 pour expliciter ce principe, mentionné à l'article L.442-3 du code de l'éducation, qui permet à ces établissements d'exercer leur liberté dans le choix des méthodes, des programmes et des supports. Les mises en demeure adressées par le préfet se fondent uniquement sur l'insuffisance des enseignements qui pourrait résulter d'un mauvais usage de cette liberté.
La commission rejette ces amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1850 de la rapporteure.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, elle rejette l'amendement CS611 de Mme Florence Granjus.
Elle est saisie de l'amendement CS769 de M. Xavier Breton.
Comme l'a dit cet après-midi notre collègue Charles de Courson, le juge des libertés doit intervenir à chaque fois qu'il est porté atteinte à une liberté. Substituer un régime de fermeture administrative d'un établissement à un régime de fermeture par le juge judiciaire ne nous semble ni utile ni prudent : ce serait donner trop de pouvoirs à l'administration, qui les exercerait de manière arbitraire et menacerait la liberté de l'enseignement.
Nous avons déjà débattu de ce sujet important tout à l'heure, lors de l'examen des amendements de suppression de l'article 22. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS265 de Mme Anne-Laure Blin.
Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 24. Comme vient de l'expliquer M. Breton, il n'est absolument pas prudent de substituer un régime de fermeture administrative à un régime de fermeture par le juge judiciaire. Aujourd'hui, l'administration peut vider une école en quinze jours, en mettant en demeure les parents des élèves scolarisés dans l'établissement mis en cause d'inscrire leurs enfants dans un autre établissement d'enseignement scolaire, dans les quinze jours suivant la notification qui leur en est faite. Ces enfants sont alors soustraits au danger que l'administration a identifié : le dispositif proposé à l'alinéa 24 n'est donc pas utile.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS1851 de la rapporteure.
Cet amendement prévoit l'information du maire de la commune sur le territoire de laquelle est implanté un établissement hors contrat en cas de fermeture administrative de ce dernier sur le fondement du non-respect d'une mise en demeure.
La commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l'amendement CS264 de Mme Anne-Laure Blin.
Elle examine l'amendement CS1852 de la rapporteure.
Il s'agit d'informer le maire de la commune sur le territoire de laquelle est implanté un établissement hors contrat en cas de décision administrative de fermeture prise par le préfet sur le fondement d'un refus de contrôle.
La commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS263 de Mme Anne-Laure Blin.
Cet amendement reprend la même idée que mon amendement précédent. Cependant, madame la rapporteure, je ne comprends pas ce qu'apporte votre amendement CS1852, que la commission vient d'adopter.
Lorsque le préfet décide de fermer une école hors contrat, il faut qu'il en informe le maire de la commune concernée. C'est important, surtout si celui-ci doit organiser la rescolarisation des enfants.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CS1853 de la rapporteure.
Elle adopte ensuite l'article 22 modifié.
Après l'article 22
L'amendement CS938 de M. François Pupponi est retiré.
La commission examine l'amendement CS939 de M. François Pupponi.
L'article L. 911-5 du code de l'éducation dispose : « Sont incapables de diriger un établissement d'enseignement […] ceux qui ont été définitivement condamnés par le juge pénal pour crime ou délit contraire à la probité et aux mœurs […]. » Cela veut dire, a contrario, qu'une personne condamnée pour terrorisme peut diriger un établissement privé ce qui est quelque peu gênant ! Je propose donc d'ajouter, après les mots « condamnés par le juge pénal pour crime ou délit contraire à la probité et aux mœurs », les mots « ou pour crime ou délit terroriste mentionnés aux articles 421‑1 à 421‑6 du code pénal ». C'est quand même le minimum que l'on puisse faire !
Cet amendement est satisfait, car les crimes et délits contraires à la probité et aux bonnes mœurs incluent les crimes et délits terroristes. Avis défavorable.
Je ne voudrais pas contredire madame la rapporteure, d'autant que je n'ai pas regardé les choses précisément, mais si les crimes et délits terroristes ne sont pas compris dans les crimes et délits contraires à la probité et aux bonnes mœurs, peut-être pourrions-nous inclure à l'article L. 911-5 du code de l'éducation les individus inscrits au FIJAIT. Ce serait cohérent avec les dispositions du chapitre Ier relatives au service public. Si ces personnes ont été condamnées pour terrorisme, alors elles sont inscrites au FIJAIT !
Nous avons adopté aujourd'hui, contre l'avis du Gouvernement, un amendement empêchant les individus inscrits au FIJAIT d'être enseignants. Mais l'article L. 911-5 du code de l'éducation concerne les dirigeants des établissements scolaires.
Je rappelle que le FIJAIT ne recense pas seulement les personnes condamnées pour des crimes ou délits terroristes, mais aussi certains individus mis en examen pour ces motifs et certains auteurs d'apologie d'acte de terrorisme, dont les propos, pour affreux qu'ils soient, relèvent du délit d'opinion et non du code pénal. Il serait opportun d'appliquer ici des dispositions similaires à celles que nous avons adoptées pour la fonction publique et que nous pourrions étendre demain à d'autres domaines.
Je pourrais rectifier mon amendement. Dans sa rédaction actuelle, il concerne les personnes condamnées pour crime ou délit terroriste, mais si le champ du FIJAIT est plus large… Pour ne pas rendre les choses plus difficiles, je vais être gentil : je retire mon amendement.
Nous devons réaliser un travail législatif sérieux… (Exclamations.) Tout le monde voit bien qu'on est dans le flou !
Je vous invite à réfléchir à une rédaction claire en vue de la séance publique. C'est tout l'intérêt de nos réunions de commission que de soulever de vrais sujets afin d'effectuer un travail législatif complet.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CS942 de M. François Pupponi.
Monsieur le ministre de l'intérieur, j'ai rédigé l'amendement dont vous rêviez : il vise à ajouter dans le champ de l'article L. 911-5 du code de l'éducation les individus inscrits au FSPRT.
Nous avons déjà évoqué ces sujets lors de l'examen de l'article 1er.
Le FIJAIT est un fichier judiciaire : il recense des individus condamnés pour terrorisme ou mis en examen pour ce motif, lorsqu'un juge a ordonné l'inscription de la décision dans le fichier. Avec le rapporteur général, nous avons fait le choix d'interdire à ces personnes d'accéder aux emplois publics et à certaines fonctions comme celle de membre du conseil d'administration d'un lieu de culte.
Quant au FSPRT, il s'agit d'un fichier de signalement, d'un fichier de renseignement. Nous ne pouvons pas accepter votre amendement, pour la bonne et simple raison que les individus qui figurent dans ce fichier ne sont pas des personnes condamnées. Certains n'ont pas été jugés responsables d'actes terroristes mais sont soupçonnés de l'être ou sont en contact avec des personnes elles-mêmes soupçonnées de l'être. Le principe d'un fichier de renseignement, c'est que les individus qui y figurent n'en sont pas informés : nous pouvons ainsi les suivre ou les écouter en toute discrétion.
Enfin, il y a un doute sur le fait que toutes les personnes inscrites au FIJAIT peuvent être considérées comme condamnées pour crime ou délit contraire à la probité et aux bonnes mœurs. Si tel n'est pas le cas, il faudra compléter l'article L. 911-5 du code de l'éducation – je le dis en vue de la séance publique.
J'avais anticipé l'explication du ministre : j'ai déposé un amendement CS940 portant sur le FIJAIT.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS940 de M. François Pupponi.
Il s'agit d'inclure dans le champ de l'article L. 911-5 du code de l'éducation les personnes inscrites au FIJAIT.
Je l'ai indiqué tout à l'heure, cette mention ne paraît pas nécessaire dans la mesure où nul ne peut diriger ou être employé dans un établissement d'enseignement s'il a été condamné pour des crimes ou délits contraires à la probité ou aux bonnes mœurs – une notion qui semble inclure les crimes et délits terroristes. Je propose que nous vérifiions ce point.
Je propose que nous travaillions sur ce sujet d'ici à la séance publique afin de lever toute ambiguïté.
Nous recevons des informations contradictoires. Je préfère que nous restions prudents et que nous examinions le droit existant ; lorsque nous serons éclairés, nous pourrons modifier la loi, le cas échéant, dans le sens que propose M. Pupponi.
Lorsque nous avons auditionné les ministres, j'ai posé cette question. Il m'a été répondu que les personnes condamnées pour des crimes et délits contraires à la probité ou aux bonnes mœurs incluaient les personnes condamnées pour terrorisme. J'ai alors répliqué qu'une jurisprudence de la Cour de cassation me faisait penser le contraire. Les services du ministère ont eu tout loisir de vérifier mes dires. Si j'ai accepté de retirer mes amendements précédents, je ne peux que maintenir cet amendement CS940, qui concerne le FIJAIT et va dans le même sens que les explications du ministre de l'intérieur. Je suis cohérent avec le ministre de l'intérieur et je partage son avis.
La commission adopte l'amendement.
L'amendement CS941 de M. François Pupponi est retiré.
La commission examine l'amendement CS995 de M. Xavier Breton.
Je m'étonne de l'improvisation à laquelle nous venons d'assister dans la rédaction du texte, s'agissant de sujets aussi importants. Vous votez des mesures pour empêcher les établissements privés hors contrat de fonctionner normalement, mais lorsqu'il s'agit d'atteindre les véritables objectifs de ce projet de loi, vous ne proposez aucune mesure opérationnelle. Je remercie M. Pupponi d'avoir formulé des propositions.
L'amendement CS995 vise à adapter aux besoins actuels les conditions requises pour diriger un établissement hors contrat.
La loi visant à simplifier et mieux encadrer le régime d'ouverture et de contrôle des établissements privés hors contrat, dite « loi Gatel », soumet les personnes désireuses de diriger un établissement privé hors contrat à une obligation d'exercice préalable dans un établissement scolaire pendant cinq ans. Si elle constitue une contrainte pour un certain nombre de personnes, cette condition garantit surtout la compétence des chefs d'établissement dans le domaine éducatif. La « loi Gatel » a été adoptée récemment : je propose donc de lui laisser le temps d'être mise en œuvre avant de la modifier. Avis défavorable.
Je comprends, madame la rapporteure, votre souci de laisser vivre la « loi Gatel ». Elle présente cependant quelques faiblesses. Lors des auditions que nous avons menées, nous avons entendu le témoignage d'une personne empêchée de diriger un établissement hors contrat alors qu'elle avait exercé un métier dans le domaine de l'éducation, avec de très fortes responsabilités. Je pense aussi aux personnes ayant travaillé auprès de la jeunesse, par exemple dans un centre de documentation, ou ayant dirigé pendant quinze ans un centre social. Leur expérience devrait être prise en compte : il conviendrait donc de modifier cette obligation introduite par la « loi Gatel », qui altère peut-être la qualité de certains établissements hors contrat au moment de leur ouverture. Je ne voterai pas l'amendement de M. Breton, dont la rédaction est trop large, mais si la « loi Gatel » est efficace, les auditions que nous avons conduites nous ont donné des exemples assez frappants de sa trop grande rigidité sur certains points.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS996 de M. Xavier Breton.
Les personnes qui ne réunissent pas toutes les conditions pour enseigner ou diriger un établissement hors contrat peuvent demander une dérogation. Cependant, l'article L. 914-4 du code de l'éducation dispose que le recteur « peut accorder » une telle autorisation ; on peut craindre qu'il ne considère, alors, qu'il a le choix de faire droit ou non à cette demande. Si les conditions exigées pour demander une dérogation sont réunies, il est impératif que celle-ci soit accordée par le recteur ; dans le cas contraire, la liberté d'appréciation laissée à ce dernier serait source d'insécurité juridique et présenterait un risque d'arbitraire.
L'octroi de dérogations aux conditions fixées pour diriger ou exercer dans un établissement public ou privé doit rester une faculté et non une obligation. Ce ne sont pas les dérogations elles-mêmes qui sont fixées par le décret, mais les modalités dans lesquelles la dérogation peut être accordée. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS1090 de M. Alexis Corbière.
Nous souhaitons que le projet de loi proscrive de manière très claire tout financement public, direct ou indirect, pour la création ou les besoins de fonctionnement des établissements hors contrat. Autrement dit, ces établissements doivent être financés exclusivement par des fonds privés. Or, aujourd'hui, ils peuvent bénéficier de fonds publics, sous différentes formes – subventions des collectivités territoriales, parfois via des participations d'associations recevant elles-mêmes des subventions publiques, ventilation de subventions reçues directement de l'État par des établissements à statut multiple.
Le financement public des établissements hors contrat est déjà très encadré. Il est interdit s'agissant des écoles du premier degré et limité à un certain pourcentage des dépenses de fonctionnement pour les établissements du second degré. Votre amendement mettrait fin à cette possibilité, qui est ancienne et qui présente, surtout, un intérêt pour les élèves. Avis défavorable.
Je ne comprends pas très bien cette réponse. Nous avons adopté l'article 21, dont l'objectif est de transférer vers l'école de nombreux enfants faisant actuellement l'objet d'une instruction en famille. Je suppose que vous ne souhaitez pas que ces enfants soient scolarisés dans une école hors contrat – je pense notamment aux enfants instruits en famille du fait des croyances religieuses ou des opinions philosophiques de leurs parents, qui seraient tout à fait enclins à se tourner vers les établissements hors contrat. Pourquoi refusez-vous des amendements visant à pénaliser davantage ce type d'établissements et à les empêcher d'apparaître comme une alternative ? Je ne vois pas en quoi l'interdiction du financement des écoles hors contrat par des fonds publics n'irait pas dans le sens du bien de l'enfant.
La commission rejette l'amendement.
Article 23 : Augmentation des sanctions à l'encontre des chefs d'établissements d'enseignement privés hors contrat méconnaissant différentes mises en demeure
La commission est saisie des amendements de suppression CS998 de M. Xavier Breton et CS1422 de Mme Anne-Laure Blin.
L'article modifie l'article 227-17-1 du code pénal afin de pouvoir sanctionner beaucoup plus facilement et sévèrement les directeurs d'établissements hors contrat. Or si, dans certaines situations, il faut naturellement faire preuve de sévérité, il convient que les mesures soient justifiées et proportionnées, ce qui n'est pas le cas ici.
Actuellement, le fait, pour un directeur d'établissement hors contrat, de ne pas prendre, malgré la mise en demeure de l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation, les dispositions nécessaires pour que l'enseignement dispensé dans son école soit conforme à l'objet de l'instruction obligatoire est puni de six mois d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. C'est un cumul de faits qui expose à ces deux sanctions. L'article punit beaucoup plus sévèrement ces directeurs : c'est disproportionné.
L'article 23 prévoit des peines de nature à dissuader quiconque de ne pas respecter les mises en demeure et les décisions administratives prises par l'État sur le fondement des mesures introduites par l'article 22. Il aligne également les peines encourues sur celles prévues par l'article 22, notamment pour ouverture d'un établissement sans autorisation.
Il s'agit de sanctionner le non-respect des mises en demeure adressées par le préfet ou par l'autorité académique, mais également celui des mesures de fermeture administrative. En effet, le renforcement des contrôles doit s'accompagner d'un renforcement des sanctions pour être opérationnel. C'est tout l'enjeu des articles 22 et 23.
Avis défavorable.
Je suis très surpris de ces amendements de suppression venant du groupe Les Républicains : comme ceux visant l'article 22, ils sont en totale contradiction avec la volonté que vous affichez, la même que la nôtre – fermer les établissements hors contrat qui ne respectent pas les valeurs de la République.
Il se joue actuellement un jeu du chat et de la souris qui nécessite que nous légiférions. La procédure judiciaire est longue, l'injonction de rescolarisation n'est pas toujours respectée, des directeurs recréent rapidement voire immédiatement l'établissement sous un autre nom et à une autre adresse. Ce jeu peut prendre bien des formes, à l'initiative de groupes qui se consacrent à cette question et ont donc acquis une certaine expertise en la matière.
Nous créons les moyens juridiques de sanctions plus lourdes pour ceux qui s'y adonnent. Cela devrait recueillir votre assentiment. À part votre volonté systématique de supprimer chaque article du projet de loi, je ne vois pas ce qui motive votre demande quant au fond.
Avis profondément défavorable.
Ce qui nous motive, c'est, comme nous vous l'expliquons depuis le début, le caractère général de vos dispositifs. Vous aviez annoncé vouloir vous attaquer à l'islam radical et au séparatisme, mais, en réalité, vous ciblez l'ensemble des écoles hors contrat et vous portez ainsi atteinte à la liberté d'enseignement.
Monsieur le ministre, nous ne déposons pas des amendements de suppression à chaque article, seulement à ceux qui sont privatifs de liberté et qui vont entraîner des dégâts collatéraux. Ceux-ci sont, je crois, volontaires : ce sont les parents qui instruisent leurs enfants à domicile et les établissements privés hors contrat qui sont dans le collimateur. Vous profitez de ce texte pour imposer des mesures qui étaient dans les tuyaux depuis longtemps. C'est contre cela que nous nous élevons, et nous continuerons de le faire.
La commission rejette ces amendements.
Elle en vient à l'amendement CS771 de M. Xavier Breton.
Il convient que les sanctions pénales prévues ciblent bien ce que vise la loi : les seuls cas où l'ordre public et la sécurité des enfants sont en danger, ou encore où le directeur s'oppose aux contrôles de l'administration. Voilà des critères objectifs, et non généraux, afin d'éviter l'arbitraire.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
La commission aborde alors l'amendement CS997 de M. Xavier Breton.
Au départ, comme le dit l'exposé des motifs, le texte a pour but la lutte contre l'entrisme communautariste et contre les idéologies séparatistes. Il ne porte pas sur l'éducation, sur l'instruction en famille ni sur les établissements privés hors contrat. Les mesures répressives ici prévues sont-elles bien conformes à cet objectif ou en visent-elles un autre – ce serait la face cachée du texte ?
Cela a déjà été dit au sujet de l'instruction en famille : on s'aperçoit que le projet de loi ne vise pas la cible annoncée. Pourquoi cela suscite-t-il tout à coup des réactions ? En réalité, un tiers des écoles hors contrat sont confessionnelles et, parmi elles, 17 % seulement sont musulmanes. Nos collègues réalisent ainsi qu'en voulant légiférer sur les écoles hors contrat, on met en évidence ce qu'a de fantasmatique l'influence de l'intégrisme religieux au sein de ces établissements – à moins d'admettre que cet intégrisme est très divers et pluraliste… La plupart des écoles hors contrat, dont nous dénonçons régulièrement le contenu de l'enseignement, sont en effet chrétiennes. Voilà ce qui gêne nos collègues.
En effet, un certain nombre d'écoles hors contrat posent problème, et personne ne le conteste. Mais je voudrais rappeler à M. Coquerel que c'est l'islamisme qui tue en France : jusqu'à preuve du contraire, les écoles catholiques hors contrat n'ont jamais fourni de terroriste qui égorge les professeurs dans la rue !
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CS612 de Mme Florence Granjus.
Aux termes de cet amendement, des chefs d'établissement qui ne se plieraient pas aux mises en demeure qui leur sont adressées encourraient, puisque cela constitue un manquement particulièrement grave, des sanctions deux fois plus élevées que celles prévues par le texte actuel, afin d'en assurer l'effet dissuasif.
Vous parlez de jeu du chat et de la souris, monsieur le ministre, mais, parfois, le contrôle par l'État est défaillant, et le chat ne passe pas souvent…
Cette mesure serait disproportionnée et contraire à l'exigence de gradation des peines en fonction de la gravité des délits. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CS770 de M. Xavier Breton.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CS1854 de la rapporteure.
Elle examine alors l'amendement CS772 de M. Xavier Breton.
Il s'agit de faire en sorte que la sanction ne soit pas disproportionnée, pour éviter un effet contre-productif.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 23 modifié.
Après l'article 23
La commission aborde l'amendement CS776 de M. Xavier Breton.
Cet amendement constructif tend à permettre au médiateur de l'éducation nationale d'établir des relations avec les familles dont les enfants fréquentent une école hors contrat et avec celles pratiquant l'instruction à domicile, pour resserrer les liens entre ces familles et l'éducation nationale.
Le médiateur de l'éducation nationale, dont on parle peu, représente un recours pour les familles et pour les enfants scolarisés. En pratique, les familles dont vous parlez peuvent déjà établir un lien avec lui, notamment en cas de réclamation. L'amendement est donc satisfait.
En effet, le médiateur s'occupe déjà des relations avec le privé. Avis défavorable. Mais je vous remercie de nous donner l'occasion de signaler le rôle important que le médiateur joue désormais, à l'échelle académique comme nationale, dans notre système éducatif – et qu'il jouera certainement dans la mise en œuvre de la présente loi.
L'amendement est retiré.
La commission en vient à l'amendement CS868 de Mme Géraldine Bannier.
Cet amendement, qui nous a été suggéré, lors des auditions, par le directeur d'une école hors contrat, vise à proposer aux établissements hors contrat une charte des valeurs et principes républicains. Ce serait une version de la charte de la laïcité qui s'applique dans les établissements publics et qui serait adaptée aux établissements sous contrat sous le forme de charte d'éthique républicaine. Le directeur que nous avons auditionné a souligné que la plupart des écoles hors contrat adhèrent aux principes républicains ; la mesure que nous défendons serait ainsi un moyen de séparer le bon grain de l'ivraie et de mettre en valeur ces établissements vertueux.
L'amendement est en partie satisfait, puisque l'enseignement du socle commun de connaissances et de compétences inclut les valeurs et principes républicains, mais il a le mérite d'être plus explicite et d'aller un peu plus loin. Avis favorable.
Je suis intriguée que l'on suggère régulièrement que les écoles hors contrat ne respecteraient pas les valeurs et principes républicains. Le texte n'encadre que le hors contrat et l'instruction à domicile : il ne parle pas des établissements publics. Je vous ai entendu, monsieur le ministre : il n'y a ni islam radical ni séparatisme dans les écoles publiques. Pour ma part, j'avais proposé des amendements relatifs au respect de ces principes et de ces valeurs au sein de l'école publique, car on constate des difficultés à en imprégner celle-ci. Or ils ont été déclarés irrecevables au titre de l'article 45. On va pouvoir imposer aux établissements hors contrat une charte des valeurs et principes républicains, mais on ne fait absolument rien au sein de l'école publique !
En effet, l'amendement en discussion est très révélateur. Ceux qui vivent en République n'ont pas nécessairement à lui prêter allégeance : ils sont seulement tenus de ne rien faire qui soit contraire à ses lois. Ici, selon la même logique que celle qui préside au contrat d'engagement républicain avec les associations, la République impose ses principes du haut vers le bas à défaut de les définir et de les faire vivre concrètement.
On est pourtant fondé à demander, comme madame Anne-Laure Blin, comment ces principes sont appliqués au sein de l'école publique, où l'islamisme radical est beaucoup plus présent qu'ailleurs. Mais, à ce sujet, rien n'est fait : tous nos amendements visant à lutter contre l'islamisme radical à l'école publique ont été déclarés irrecevables, sans exception.
On voit bien que le but poursuivi n'a rien à voir avec la lutte contre le séparatisme. Vous voulez imposer votre vision de la République – de haut en bas, selon un système d'allégeance et de tutelle. Pour nous, la République est un état d'esprit partagé. Aucun soupçon à cet égard ne devrait viser telle ou telle catégorie de population. On peut faire vivre l'idéal républicain par des initiatives communes, non par des chartes imposées d'en haut.
Inutile de répéter les mêmes propos sur l'irrecevabilité, comme si elle vous visait délibérément : elle vient en l'occurrence du fait que le projet de loi ne compte pas d'article sur l'éducation nationale ni sur l'organisation de l'école publique, mais seulement des articles sur les établissements d'enseignement privés sous contrat, hors contrat et sur l'instruction en famille.
Monsieur le ministre vous répondra à propos de tout ce qui est fait au sein de l'éducation nationale pour lutter contre le communautarisme et le séparatisme.
M. Diard veut, je crois, apporter une nuance aux propos tenus par les membres de son groupe.
Les nuances ont été apportées de toutes parts au sujet de l'article 21. Je veux simplement rappeler que c'est par le biais des établissements hors contrat et de l'instruction à domicile que la radicalisation s'est développée – je pourrai citer les chiffres concernant certains départements. Puisque la plupart des établissements hors contrat ne sont pas séparatistes, la charte ici proposée permettra de signaler les brebis galeuses. Pourquoi, si les associations sportives doivent s'engager à respecter les valeurs de la République, les établissements hors contrat en seraient-ils dispensés ?
Sans vouloir polémiquer, je ne peux pas ne pas réagir quand j'entends certains collègues de la droite républicaine nous donner de telles leçons. Je veux bien que vous soyez de grands défenseurs de l'école publique, que vous avez certainement fréquentée et où vous avez assurément envoyé vos enfants… Pour ma part, pur produit de l'école publique, je ne peux vous laisser dire que rien n'y est fait pour défendre nos valeurs républicaines, citoyennes et laïques. Vous qui n'avez cessé de promouvoir l'instruction en famille, vous nous donnez des leçons sur l'école publique et laïque ? Si le professeur Paty a été assassiné de la sorte, c'est bien parce que la République avait instauré dans nos écoles publiques des dispositifs destinés à lutter contre l'extrémisme radical islamique. On peut certainement mieux faire, mais voilà longtemps que la République agit en ce domaine.
Les principes républicains sont évidemment affichés au sein de l'école publique – je vous renvoie à la charte de la laïcité. Je ne reprendrai pas toutes les mesures adoptées depuis trois ans à ce sujet, dont la création du conseil des sages de la laïcité et celle des équipes dites « Valeurs de la République », qui interviennent directement dans les établissements.
Les obligations auxquelles il est ici proposé de soumettre les établissements hors contrat restent très en deçà de celles qui s'imposent aux écoles publiques en la matière. Il est totalement absurde de dire le contraire. Certains directeurs d'établissements hors contrat demandent d'ailleurs plus de contrôles et d'obligations de ce type, car ils se sentent très à l'aise avec les principes de la République : ce genre de règles ne gêne que ceux qui ne respectent pas ces derniers. Seules les institutions problématiques sont visées. Il est absolument aberrant d'avoir pour ligne de défense l'idée que nous ne ferions rien à l'école publique. Je pourrai vous dresser le bilan de l'action conduite en la matière. Vous ne cessez de le répéter depuis ce matin ; je le redis, c'est totalement absurde.
Je l'ai dit – mais vous n'étiez peut-être pas là –, nous devons considérer quatre enjeux : premièrement, le repérage des élèves ; deuxièmement, l'ouverture d'établissements hors contrat – c'est la loi dite « Gatel » ; troisièmement, la fermeture d'établissements hors contrat – ce sont les dispositions que nous examinons ici ; enfin, l'instruction en famille – c'était l'article 21, qui nous a longuement occupés.
Depuis ses fondements, l'école de la République a défini des principes ; en pratique, depuis trois ans, des actions de nature infralégislative sont menées, qui sont bien connues et sur lesquelles nous pourrions revenir – mais certainement pas ce soir.
La commission adopte l'amendement CS868.
Elle aborde ensuite l'amendement CS775 de M. Xavier Breton.
« Si on n'a rien à se reprocher… » : ce genre de déclaration est insupportable. Pourquoi ne pas imposer une charte des principes républicains dans l'appartement de chacun de nos concitoyens, en commençant par ceux qui pratiquent l'instruction à domicile ? Dans la salle à manger, et pourquoi pas dans la chambre à coucher, pendant qu'on y est ? Une telle ingérence de l'État dans la société suscite de très fortes résistances, qui s'expriment de plus en plus. C'est ce qui a donné lieu au mouvement des « gilets jaunes ». Je n'excuse pas les violences qu'elles entraînent ; j'explique ce à quoi ces mouvements réagissent. Arrêtez d'embêter les gens, les familles, ceux qui prennent des initiatives !
Vous imposez la République alors qu'elle doit être partagée. Vous vous heurterez à des résistances, comme toujours quand on impose quelque chose de vide. Le rapporteur général a souhaité tout à l'heure que l'on définisse le séparatisme : nous sommes en train d'élaborer un texte portant sur une notion dont on ne connaît pas le sens ! Et voilà que reviennent toutes les vieilles lubies de contrôle de l'enseignement extérieur à l'éducation nationale, comme les contrôles fiscaux des associations – tout était dans les tuyaux de l'administration centrale ! En revanche, peu de mesures efficaces sont prises pour lutter contre la cible. Je le répète, cela suscite des réactions de fond, qui vont être de plus en plus nombreuses.
Aux termes de notre amendement, un représentant des parents d'élèves de l'école hors contrat et un représentant des parents d'élèves de l'instruction à domicile sont désignés par le ministre chargé de l'éducation, sur proposition des associations de parents d'élèves, pour siéger au Conseil supérieur de l'éducation, de façon à favoriser le partenariat entre l'éducation nationale et toutes les autres formes d'enseignement.
Pour désigner des représentants de parents d'élèves, il faut les élire au sein d'un collectif. Je vous répondrai donc ce que je disais aux parents d'élèves indépendants lorsque j'étais adjointe au maire chargée de l'éducation : pour avoir un représentant, il faut se fédérer. Dès lors, votre amendement paraît difficilement applicable. Avis défavorable.
Monsieur le ministre, que vous attachiez une telle importance à l'affichage de chartes dans les établissements publics, soit ; mais ne partagez-vous pas le diagnostic d'un problème au sein de l'école publique ? Hier – j'assiste aux débats depuis leur début, contrairement à ce que vous avez dit –, nous avons examiné des dispositions qui trouvent leur origine dans l'assassinat de Samuel Paty, qui enseignait à l'école publique. Pourquoi n'y avait-il eu aucune nouvelle mesure depuis celles que vous invoquez ? Sauf erreur, on a observé un certain nombre de violations de la minute de silence faisant suite à l'attentat contre Samuel Paty, et de violations des valeurs et principes républicains à l'école publique. Pourquoi ne pas résoudre ces problèmes ?
Par ailleurs, des terroristes ont été formés à l'école de la République, et non dans des établissements hors contrat. On le sait, et vous avez certainement des éléments à ce sujet. C'est là qu'est le mal ; il faut y remédier. C'est l'objet du texte, me semble-t-il ! Vous ne pouvez pas dire que nous sommes hors sujet !
Madame la députée, je vous rappelle que vous n'aviez qu'une minute de temps de parole pour répondre à la commission et au Gouvernement.
Le rôle de la loi est de permettre à ceux qui la respectent de vivre bien, et de contraindre et punir ceux qui sont « en dehors des clous ». Il est donc légitime de dire que les mesures que nous prenons ne poseront problème qu'à ceux qui se soustraient au schéma républicain.
Vous parlez de logique totalitaire ? À propos du fait de demander aux gens de respecter la loi ? Je ne suis pas tout à fait d'accord avec cette définition… Je ne vois pas dans l'école publique de système, d'enseignant, d'administration qui transgresse les principes républicains. Que le respect des principes républicains pose problème à une partie de la population qui vit dans certains quartiers, bien sûr : c'est ce qui justifie le projet de loi. Mais le texte traite des environnements où ces phénomènes apparaissent, non de ceux où l'école publique fait son travail. Il faut protéger les fonctionnaires ; nous l'avons fait au début du titre Ier. Ici, il s'agit de demander aux établissements hors contrat de respecter les principes républicains ; ceux qui posent problème se trahiront en refusant de le faire.
Les propos de Mme Blin m'ont profondément heurté. L'école publique, parce qu'elle accueille tout le monde, parce qu'elle est fidèle à des principes, par son histoire qui se transmet de génération en génération, est le principal rempart contre le séparatisme et contre les tentatives de l'islam politique. Ce n'est pas par hasard si ce sont ses professeurs qui sont visés, accusés, tués !
Votre haine de l'enseignement public est insupportable. Je connais des écoles privées catholiques – je peux vous en citer le nom – qui envoient des représentants rencontrer les communautés musulmanes au pied des mosquées pour leur dire : « Venez chez nous, chez nous il n'y a pas de mécréants, et si vous voulez, vous pourrez porter le voile ! » Cela témoigne d'une convergence des séparatismes contre la République. Dites ce que vous voulez sur les écoles hors contrat, défendez-les, mais n'attaquez pas l'école publique, qui est, je le répète, le principal rempart contre le séparatisme dans notre pays.
Voilà un moment que j'ai envie de répondre à M. Breton et à Mme Blin.
De deux choses l'une. Première hypothèse : ils croient sincèrement à ce qu'ils disent. Je connais peu Mme Blin, mais je connais bien M. Breton ; j'ai eu la chance de siéger avec lui et je sais que c'est un homme sincère. Dans ce cas, je suis désolé de constater, monsieur le député, que vous n'êtes manifestement pas convaincus que ce projet de loi nous donne des armes puissantes pour lutter contre les séparatismes, et singulièrement contre le séparatisme islamiste. Je vais m'employer à vous convaincre.
Il y a des problèmes, dans les transports en commun et les piscines – les magazines regorgent d'articles à ce sujet –, de communautarisation, d'organisation parallèle, de femmes refusant de serrer la main aux hommes ou le contraire : l'article 1er étend comme jamais le champ d'application du principe de neutralité. Certains élus présentent des listes communautaires, d'autres concluent des accommodements plus que déraisonnables : l'article 2 permet à la République de reprendre la main. Il y a des problèmes, sur internet, de haine en ligne, notamment sur des sites miroirs qui réapparaissent : les débats que vous avez eus hier soir avec Cédric O vous ont démontré à quel point la loi de la République va au-delà du règlement européen, qui n'est même pas achevé, se méfiant aussi des puissances d'argent, comme diraient certains, au premier rang desquels les entreprises dites « GAFAM » (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft). Des fonctionnaires sont attaqués : madame Blin, permettez-moi de vous rappeler que nous avons passé une soirée de débats à élaborer les articles 4 et 18, visant à lutter contre les pressions et les intimidations dont ils sont victimes. Vous y étiez, je ne vous ferai donc pas l'offense de lire les articles que vous avez votés, si tant est que vous les ayez votés. Je constate que les articles sont tous quasiment votés à l'unanimité, avec quelques abstentions, que M. le président prend soin de mentionner. Vous n'avez donc pas voté contre.
Si vous n'avez pas voté contre ces articles, c'est qu'ils ne sont pas si terribles que cela ! Ou alors voter n'a plus de sens…
Nous allons donc disposer désormais des armes adéquates. Nous avons créé deux délits, l'un visant à lutter contre les pressions exercées sur les agents du service public et contre le séparatisme, sanctionné par une reconduite à la frontière le cas échéant, l'autre visant à assurer la protection des agents publics, enseignants compris.
Il y a des difficultés, depuis toujours, nées du financement des cultes depuis l'étranger. Nous constaterons tout à l'heure ou demain que la République, pour la première fois, connaîtra tous les financements et pourra s'y opposer. Il y a des difficultés, ça et là, en raison de « médecines » parallèles dédiées à l'établissement de certificats de virginité, ainsi que du fait de situations de polygamie et de mariages forcés : la République prend comme jamais – on nous le reproche parfois – des mesures d'autorité.
Nous avons également pris des dispositions s'agissant de la vie associative. Je pourrais ainsi énumérer, une par une, les dispositions du projet de loi. Pour une fois, nous aurons énormément de moyens pour lutter contre les phénomènes que vous déplorez. Sans faire le procès des précédents gouvernements, il se trouve que c'est le nôtre qui prend ces mesures, que nous devrions tous soutenir. Je ne dis pas pour autant que rien n'avait été fait avant. Ainsi, madame Blin, monsieur Breton, si vraiment vous êtes sincères, j'espère que la lecture du compte rendu de nos débats, ainsi que nos discussions ultérieures, vous démontreront que nous prenons des mesures sans précédent, assorties d'actes forts.
Seconde hypothèse, plus complexe : vous ne croyez pas à ce que vous dites et cherchez des prétextes pour ne pas voter le texte. M. Breton, qui souscrit aux philosophies d'inspiration libérale, considère que l'État intervient trop et que nous aurions dû prendre des mesures spécifiques contre une religion en particulier, et non contre toutes. C'est un débat politique, que je respecte, mais telle n'est pas notre conception des choses. L'État, c'est bien ! L'école, c'est bien ! La République, c'est bien ! Il est normal – et heureux ! – que l'État intervienne. Au demeurant, il ne vous aura pas échappé, monsieur Breton, que les courants libertariens ne sont pas majoritaires dans notre pays, ni économiquement ni politiquement. Nos positions politiques peuvent être différentes ; dans ce cas, assumez-le.
Madame Blin, il me semble que vous cherchez des prétextes politiques pour ne pas voter le texte. Si vous aviez été maire – pardonnez-moi de vous le dire ainsi –, vous sauriez que les établissements d'enseignement privés hors contrat sont très difficiles à gérer, quelle que soit la couleur politique du maire. Curieusement, vous ne citez pas les communiqués de l'Association des maires de France (AMF), que les membres de votre groupe citent, par ailleurs, matin, midi et soir. M. Baroin, M. Laignel, M. Platret, M. Lisnard passent leur temps à nous dire qu'il faut leur donner la possibilité de prendre des mesures. Chaque maire sait très bien qu'il ne peut pas entrer à sa guise dans un établissement d'enseignement privé hors contrat. Il arrive qu'il ne sache même pas qu'un tel établissement a été ouvert dans sa commune, qu'il découvre, après coup, qu'il a été ouvert pour un autre motif. Monsieur Coquerel, des petites filles de trois ans se retrouvent dans des locaux sans fenêtre. Lorsque la moitié des parents d'un établissement déclarent officiellement leurs enfants comme étant instruits en famille, c'est un drame pour la République ! Seuls 17 % des établissements d'enseignement privés hors contrat à vocation confessionnelle s'inscrivent dans le cadre de la religion musulmane, avez-vous rappelé. Certes, mais leur croissance est exponentielle, d'une part, et, d'autre part, pas une école où l'on enferme des petites filles ou des petits garçons ne peut être tolérée. Je sais bien que tel est votre avis ; mon propos est de démontrer à quel point les dispositions que nous adoptons sont importantes. Il ne s'agit pas d'une fantasmagorie des services. Au demeurant, vous le savez très bien ; vous êtes en contact avec les agents de la préfecture de votre département et voyez très bien de quoi je parle.
Lutter contre de tels établissements est une action forte. Bien entendu, tous les établissements privés hors contrat ne correspondent pas à cette description, mais on ne peut que constater que certains sont ouverts clandestinement et travaillent bizarrement, avec des financements bizarres. Il va de soi qu'il faut réguler leur fonctionnement. Il ne s'agit pas d'insulter quiconque, mais d'assurer la protection de l'enfance. Permettez-moi de faire également observer que ce n'est pas seulement une question de religion ; nous luttons aussi contre les dérives sectaires, et plus généralement contre ceux qui ne sont pas capables d'offrir à nos enfants un projet pédagogique ni de garantir leur sécurité.
Pour vous le dire franchement, madame Blin, si vous cherchez une excuse pour ne pas voter le texte, parce que vous êtes membre du groupe Les Républicains, dites-le-nous ! Vous nous accusez à longueur de journée d'être naïfs ou trop laxistes, et, dès que nous prenons des mesures, soit nous sommes trop autoritaires, soit nous n'allons pas assez loin. Dites que vous ne voulez pas voter le texte, cela ira plus vite ! Je comprends les nuances exprimées par M. Breton ; il y a cinquante nuances de Républicains, nous l'avons bien compris. (Sourires.) Entre M. Ciotti, qui veut tout régenter et tout interdire – je caricature à peine – en matière d'IEF et Mme Genevard qui pense le contraire, entre M. Breton, dont je comprends la position très libertarienne, hostile à toute intervention de l'État, et M. Diard qui au contraire la juge très intéressante, je suis curieux de connaître le vote final du groupe sur ce texte.
Si, madame Blin, c'est le sujet. Cela fait trois jours que vous multipliez les arguments pour ne pas voter le texte.
Il est normal de faire de la politique – c'est un beau mot ! –, surtout au Parlement. Vous ne pouvez pas demander au Gouvernement d'être dur tout en lui refusant les armes pour l'être. C'est totalement irresponsable, ou totalement politicien.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CS1094 de M. Alexis Corbière.
Monsieur le ministre, je ne niais pas qu'au sein des 17 % d'établissements que j'ai mentionnés on pouvait trouver les situations que vous avez décrites. Je voulais aussi appeler l'attention, par exemple, sur la Fraternité Saint Pie-X, qui compte seulement soixante écoles sur le territoire national, mais où l'on tient, selon les enquêtes qui y ont été effectuées, des propos antisémites, ou d'inspiration analogue, que je ne reprendrai pas ici. Il faut donc contrôler plus étroitement ces établissements.
Tel est l'objectif du présent amendement. Monsieur Blanquer, vous avez déclaré le 16 février 2018, dans l'émission politique de France 2, que la loi dite « Gatel », alors en cours d'élaboration, serait un outil juridique efficace pour mieux contrôler l'ouverture des établissements d'enseignement privés hors contrat. Nous pouvons constater ensemble que l'objectif n'a pas été pleinement atteint. Nous proposons donc de nous calquer sur les dispositions prises pour l'IEF et de remplacer le régime de déclaration applicable aux établissements d'enseignement privés hors contrat par un régime d'autorisation. Le Conseil constitutionnel a annulé les dispositions de la loi Égalité et citoyenneté prévoyant une telle évolution, en raison de l'absence de motifs permettant aux autorités compétentes de refuser l'ouverture de certains établissements. Le présent amendement vise à répondre aux objections du Conseil constitutionnel en précisant ces motifs.
La loi dite « Gatel », récemment adoptée, a durci les conditions d'ouverture des établissements d'enseignement privés hors contrat, ainsi que les contrôles auxquels ils sont soumis. Leur ouverture suppose le dépôt d'un dossier de déclaration largement étoffé, auxquelles les autorités compétentes peuvent s'opposer dans un délai de trois mois. Avis défavorable.
Même avis. La loi dite « Gatel » est efficace pour empêcher, s'il y a lieu, les ouvertures de tels établissements. Sur cette base, j'ai refusé, lors des deux précédentes rentrées scolaires, l'ouverture de plusieurs dizaines d'établissements privés hors contrat. L'innovation offerte par le présent projet de loi réside surtout dans la possibilité accrue de fermer ces établissements. S'agissant de leur ouverture, il ne nous semble pas nécessaire de durcir les choses sur le plan législatif. Nous disposons des moyens juridiques nécessaires. Quelques améliorations sont envisageables sur le plan réglementaire ; nous y travaillons.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CS1397 de M. Éric Diard.
L'existence d'opinions distinctes au sein d'un même groupe politique ne me gêne pas. Sauf erreur de ma part, les membres du groupe majoritaire n'ont pas voté l'article 21 d'une seule voix ; certains ont même défendu des amendements visant à le supprimer ! S'agissant de la proposition de loi pour une sécurité globale, nous avons été bien plus cohérents que les groupes La République en marche et MoDem lors de son adoption dans l'hémicycle. Monsieur Sylvain Waserman, qui présidait la séance, a dit à cette occasion qu'il existait cinquante nuances de MoDem.
Le présent amendement vise à soumettre les établissements d'enseignement privés hors contrat à un régime d'autorisation avant ouverture. Dès lors que l'IEF est soumise à un tel régime, il semble normal, en vertu du parallélisme des formes, de l'étendre aux établissements d'enseignement privés hors contrat. Au demeurant, la loi dite « Gatel » dispose qu'en l'absence d'opposition de l'autorité compétente – maire ou procureur de la République – dans un délai de trois mois, les établissements d'enseignement privés hors contrat peuvent ouvrir. L'instauration d'un régime d'autorisation vise à éviter l'ouverture d'établissements en cas d'opposition formulée hors délai, ou contournée par quelques modifications de détail d'un dossier précédemment refusé. Je me fonde sur des faits constatés : certains établissements, à peine fermés, rouvrent ailleurs sous une autre forme, faisant le tour de la région parisienne ; d'autres demandent une autorisation au mois de juin en espérant profiter de la vacance des services de l'éducation nationale.
La loi dite « Gatel » oblige les établissements privés hors contrat à déposer un dossier de déclaration avant ouverture. Ils ne peuvent pas ouvrir tant qu'ils n'ont pas reçu l'autorisation des autorités compétentes, qui la donnent dans un délai de trois mois. S'agissant du régime d'autorisation préalable appliqué à l'instruction en famille, les parents devront déposer une demande d'autorisation, qui sera instruite, sachant que le silence de l'administration vaudra accord au bout de deux mois. Votre amendement me semble satisfait par la loi dite « Gatel ». J'en suggère le retrait et émets à défaut un avis défavorable.
L'application à l'instruction en famille d'un régime d'autorisation me convient, d'autant plus que le Conseil d'État, dans sa grande sagesse, a suggéré d'ouvrir davantage de possibilités que celles initialement prévues. Cette position est également celle d'une partie de notre groupe. Mais cette évolution revient à être plus laxiste avec les établissements d'enseignement privés hors contrat. L'exemple que j'ai donné sur les demandes d'autorisation formulées avant l'été m'a été rapporté par des inspecteurs de l'éducation nationale. Tout le monde connaît maintenant la ficelle – qui est un peu grosse, d'ailleurs – et j'imagine, monsieur le ministre, que vous avez trouvé la parade.
Je partage les propos de M. Diard. Je comprends les réticences et les difficultés, mais nous serons obligés, demain, de nous attaquer aux établissements privés hors contrat. Les réseaux de l'islam radical vont chercher en effet à en ouvrir partout. Ils rêvent de pouvoir accueillir les enfants, qu'ils pourront encadrer comme ils veulent. Ils ont les fonds nécessaires et n'auront besoin de personne pour financer ces établissements. J'en ai pris conscience lors de la controverse sur la théorie du genre : ils venaient faire leur publicité devant les écoles publiques et cherchaient à faire peur aux parents.
Enfin, les islamistes ont ouvert des établissements hors contrat en expliquant, comme notre collègue, que certains terroristes étaient issus de l'école publique. C'était l'un de leurs arguments pour convaincre les parents de scolariser leurs enfants chez eux ! Soyons attentifs à nos propos !
Monsieur Pupponi, vous ne pouvez pas dire cela. La loi dite « Gatel » a considérablement durci les modalités d'ouverture de ces établissements. J'indique à nouveau, car je n'ai manifestement pas été claire, qu'ils ne peuvent pas ouvrir tant que leur dossier de déclaration n'a pas été approuvé par l'administration.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CS1450 de Mme Marie-George Buffet.
Cet amendement vise à supprimer les dispositions du code de l'éducation relatives aux établissements d'enseignement privés hors contrat. Nous nous opposons à la création de nouveaux établissements privés hors contrat et souhaitons que ceux qui existent soient contraints de conclure avec l'éducation nationale un contrat d'association avec le service public de l'éducation ou un contrat simple. Nous considérons qu'il n'y a pas de place, dans notre pays, pour ces établissements. Les établissements d'enseignement publics et les établissements d'enseignement privés sous contrat suffisent. À tout le moins, l'éducation de nos enfants doit s'inscrire dans le cadre d'un contrat avec l'État, donc avec la République et ses valeurs. Le présent amendement vise à conforter les valeurs de la République.
Les établissements d'enseignement privés ne peuvent être créés que sous la forme d'établissements hors contrat. La contractualisation ne leur est proposée qu'à l'issue de cinq années d'existence. La suppression du régime des établissements hors contrat entraînerait mécaniquement l'impossibilité de toute nouvelle création d'établissements d'enseignement privés sous contrat, à l'avenir. Avis défavorable.
Nos débats mettent en lumière les façons distinctes que nous avons de concevoir l'enseignement privé hors contrat. Notre collègue Pupponi considère que nous devrons tôt ou tard leur appliquer un régime d'autorisation. Cela reviendra à réduire la liberté de l'enseignement. Le Conseil constitutionnel a pourtant rappelé que l'exigence d'une autorisation administrative préalable était contraire à cette liberté fondamentale. Il est normal que les opinions à ce sujet divergent, au sein des groupes politiques comme dans la société. Certaines collègues pointent déjà une inégalité entre l'instruction en famille et les établissements d'enseignement privés hors contrat. Une logique de restriction progressive de la liberté d'enseignement est en marche. Nous nous y opposerons toujours.
Monsieur Breton, je n'y viendrai pas de gaieté de cœur. Malheureusement, ceux qui attaquent la République utilisent nos libertés pour nous attaquer, ce qui nous contraint à les restreindre pour nous protéger. C'est leur stratégie. Donc, soit nous ne touchons pas à nos libertés, et ils peuvent nous détruire, soit nous les restreignons pour nous protéger. Le choix est terrible !
Madame la rapporteure, la loi dite « Gatel » a permis en effet de nombreuses avancées. Il n'en reste pas moins que nous avons souvent un temps de retard. Peut-être faudrait-il, un jour, avoir deux temps d'avance.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine les amendements CS1659 et CS1660 de Mme Marietta Karamanli.
Les établissements d'enseignement privés hors contrat sont soumis à des contrôles obligatoires. L'enseignement dispensé doit être conforme aux normes minimales de connaissances et respecter le droit des élèves à l'éducation, tel qu'il est défini par le code de l'éducation. Ces établissements ont également des obligations en matière de respect de l'ordre public, de prévention sanitaire et sociale ainsi que de protection de l'enfance et de la jeunesse. Nous proposons de renforcer leur contrôle, selon deux modalités, chacune prévue par l'un des deux amendements : lors de leur troisième et cinquième année d'existence, ou de manière inopinée.
S'agissant du rythme des contrôles effectués dans ces établissements, mieux vaut conserver une certaine souplesse, afin de contrôler plus fréquemment ceux sur lesquels pèsent le soupçon qu'ils ne se conforment pas à leurs obligations, et moins fréquemment ceux dont le contrôle produit des résultats régulièrement satisfaisants. Avis défavorable.
Je soutiens ces amendements. Madame la rapporteure, je sais que les établissements privés hors contrat ne peuvent contractualiser avec l'État qu'après cinq ans d'existence. Nous pensons qu'il faut raccourcir ce délai, et leur imposer d'emblée un contrat simple ou un contrat d'association au service public de l'éducation, ce qui permettra de les soumettre à un contrôle minimal avant de signer ou non un contrat avec eux. Ils ne doivent pas échapper à tout contrôle pendant cette période.
Quant aux cinquante nuances plusieurs fois évoquées, vous ne les trouverez jamais dans notre groupe, car nous ne sommes pas cinquante.
(Rires.)
Madame la rapporteure, votre argument repose sur la périodicité des contrôles, pour lesquels il faut conserver une certaine souplesse, avez-vous dit. L'amendement CS1660, prévoyant un contrôle aléatoire, devrait vous convenir.
La commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine l'amendement CS1481 de M. Jean-Louis Thiériot.
Chacun ses références littéraires ! Certains évoquent cinquante nuances de telle ou telle couleur ; pour ma part, j'ai récemment relu certains rapports d'information rédigés par nos collègues sénateurs – c'est un autre genre, je le conçois bien volontiers ! (Sourires.) J'ai tiré de ces documents certains constats et certaines préconisations, dont l'amendement CS1481 est issu. Il vise à étendre aux établissements d'enseignement privés hors contrat l'obligation de transparence sur les financements d'origine étrangère, que les articles 35 et 36 du présent projet de loi durcissent. Les rapports d'information à ce sujet de nos éminents collègues sénateurs, ainsi que plusieurs observations formulées depuis le début de nos débats, attestent de la capacité de certaines mouvances et de certaines organisations à s'insérer dans la moindre faille de notre droit. La disposition que nous proposons permettrait de se réarmer face aux entreprises de conquête, notamment celles de l'islam politique.
L'amendement prévoit, s'agissant des établissements d'enseignement privés hors contrat, l'introduction d'un mécanisme de déclaration des avantages, ressources et libéralités reçus de l'étranger, et d'opposition au financement étranger pour un grave motif d'ordre public tiré de l'existence d'une menace réelle. Il est satisfait par la loi dite « Gatel », qui prévoit que ces établissements doivent, avant leur ouverture, présenter leur plan de financement, qui peut motiver une opposition pour risque pour l'ordre public. Le présent projet de loi permet à l'État de contrôler ponctuellement ces ressources, notamment leur provenance pour prendre des mesures appropriées en cas de suspicion de financement occulte. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CS777 de M. Xavier Breton.
Voilà un amendement constructif dans le cadre des relations entre les diverses formes d'éducation, dont le choix appartient aux parents. Il s'agit de faire en sorte que les sorties scolaires soient proposées aux enfants instruits au sein d'établissements d'enseignement privés hors contrat et en famille. Nous avons déjà adopté une disposition relative au rattachement administratif à un établissement d'enseignement public. Les établissements d'enseignement public organisent régulièrement des sorties scolaires, notamment dans des musées. Réunir les enfants issus des divers modes d'instruction– établissements d'enseignement publics, établissements d'enseignement privés sous contrat et hors contrat, instruction en famille – serait un moyen de favoriser la socialisation de tous. En la matière, aucun mode d'éducation n'est meilleur qu'un autre. Il s'agit de jeter une passerelle entre les diverses formes d'éducation.
S'agissant des enfants instruits à domicile, la disposition proposée pourra s'inscrire dans le cadre du rattachement administratif que nous avons adopté tout à l'heure. S'agissant des établissements d'enseignement privés hors contrat, ils peuvent organiser des sorties scolaires dans le cadre de leur projet pédagogique. Quant aux sorties scolaires organisées par les établissements d'enseignement publics, sur lesquelles vous tentez sans doute d'appeler l'attention par le biais de cet amendement, il faudrait plutôt – c'est un avis personnel – faire en sorte que tous les enfants y participent, car il s'agit d'un enjeu de cohésion de classe, avant d'envisager d'y inclure les enfants des autres établissements. Avis défavorable.
Madame la rapporteure, dois-je comprendre qu'il y a des problèmes dans l'école publique ? Tous les enfants des établissements d'enseignement publics ne participent donc pas aux sorties scolaires ? Pourtant, notre collègue Stéphane Peu affirmait tout à l'heure que tout s'y passe bien ! Demandez donc aux enseignants ce qu'il en est. Ils vous diront qu'ils manquent de moyens et qu'ils ne sont pas soutenus par leur hiérarchie. Dire qu'il existe des problèmes dans l'école publique, ce n'est pas s'en prendre au service public de l'éducation, c'est dresser un constat. Je suis très inquiet de vous entendre dire que tous les enfants des établissements d'enseignement publics ne participent pas aux sorties scolaires. Où est le volet du projet de loi visant à résoudre les dysfonctionnements de l'école publique ? Je rappelle que nos amendements visant à combattre les tendances séparatistes qui s'expriment au sein de l'école publique ont été jugés irrecevables.
À partir d'une simple phrase, M. Breton parvient à bâtir tout un scénario sur la défaillance de l'école publique. Ce n'est pas ce que je voulais dire !
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS1394 de M. Éric Diard.
Cet amendement vise à demander un rapport au Gouvernement pour évaluer la pertinence de la création d'un module de formation des inspecteurs de l'éducation nationale à l'inspection des établissements privés hors contrat, afin de s'assurer du respect des principes républicains en leur sein, ou de la création d'un corps d'inspecteurs spécifiquement dédiés à cette mission. En effet, à l'heure actuelle, la mission des inspecteurs de l'éducation nationale consiste à vérifier que les enseignements dispensés respectent les programmes énoncés par le ministère. Certains inspecteurs m'ont confié qu'ils se sentaient un peu démunis pour contrôler les établissements hors contrat.
J'ai annoncé un peu plus tôt un déploiement des inspecteurs pour contrôler le respect des valeurs de la République tant dans l'instruction en famille que dans les établissements hors contrat. S'agissant d'un amendement d'appel, qui, de surcroît, demande un rapport, j'émets un avis défavorable, mais nous souhaitons, en effet, étoffer les équipes pour être à la hauteur des nouvelles obligations de contrôle qui pèsent sur l'éducation nationale.
L'amendement est retiré.
Article 24 : Condition de capacité à dispenser un enseignement par référence ou conforme aux programmes de l'enseignement public pour la conclusion d'un contrat avec l'État
La commission adopte l'amendement rédactionnel CS1855 de la rapporteure.
Elle en vient à l'amendement CS1656 de M. David Habib.
Il s'agit de supprimer à l'alinéa 2 les mots : « la vérification de la capacité de l'établissement à dispenser ».
Le Conseil d'État a jugé à plusieurs reprises que l'obligation d'organiser l'enseignement par référence aux programmes et aux règles générales relatives aux horaires de l'enseignement public ne s'applique qu'aux classes et établissements déjà placés sous le régime du contrat simple et ne saurait fonder un refus de passation d'un tel contrat. C'est pourquoi nous avons choisi de vérifier la capacité de l'établissement à dispenser cet enseignement plutôt que le fait qu'il le fasse déjà, l'obligation ne prenant effet qu'à la date d'entrée en vigueur du contrat. Dès lors, je donne un avis défavorable à cet amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine les amendements identiques CS773 de M. Xavier Breton et CS267 de Mme Anne-Laure Blin.
Loin d'être libertarien, cet amendement se veut opérationnel. Les écoles pilotées depuis l'étranger, valorisant une langue et une culture étrangères et mettant en contact leurs élèves avec des interlocuteurs dont les propos ou les actes ont été jugés contraires à l'ordre public ne doivent pas passer sous contrat. Pour lutter contre les séparatismes, il faut adopter des mesures ciblées et non s'en prendre à toutes les formes d'éducation qui n'entrent pas dans l'enseignement public.
Les établissements hors contrat peuvent poser problème, et il convient de s'assurer que les établissements pilotés depuis l'étranger, valorisant une langue et une culture étrangères, ne portent pas atteinte à l'ordre public.
J'en profite pour demander à nouveau à Mme la rapporteure de nous communiquer quelques éléments d'information sur les difficultés que pourraient rencontrer les élèves et les enseignants lors de sorties scolaires. Cela permettrait d'approfondir la question.
Ces deux amendements sont satisfaits. Les conditions sont déjà vérifiées puisque l'établissement doit pouvoir dispenser les enseignements permettant l'acquisition du socle commun. Quant aux financements, contrôlés au moment du dépôt du dossier d'ouverture, ils le seront également ponctuellement grâce aux dispositions du projet de loi. Le contrat ne sera pas passé en cas de liens financiers avec une organisation française ou étrangère contraire à l'ordre public. Demande de retrait, sinon avis défavorable.
La commission rejette ces amendements.
Elle examine les amendements CS509, CS510 et CS546 de Mme Cathy Racon-Bouzon.
L'amendement CS509 vise à instaurer un pourcentage minimal, qui ne peut être inférieur à 25 %, d'élèves boursiers dans les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré sous contrat. N'étant pas soumis à la sectorisation, ceux-ci peuvent choisir leurs élèves. Cela favorise la reproduction des élites au détriment de la mixité sociale que nous appelons tous de nos vœux.
L'amendement CS510 propose d'instaurer un pourcentage minimal d'élèves boursiers dans les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré sous contrat. Le taux en serait fixé par le recteur après concertation avec le chef d'établissement afin de respecter les spécificités locales.
L'amendement CS546 vise à imposer à ces mêmes établissements, tout en les laissant libres des moyens pour y parvenir, de développer une politique favorisant l'égal accès de tous les élèves, comme le fait l'enseignement public.
Ces amendements traitent de la mixité sociale dans les établissements privés sous contrat. J'émets un avis défavorable sur le premier de ces amendements, qui propose de fixer à 25 % le pourcentage minimal d'élèves boursiers, car ce seuil en valeur absolue est élevé. De plus, il doit être appréhendé différemment selon les territoires.
Le deuxième amendement propose que l'autorité académique fixe ce pourcentage après concertation avec le chef d'établissement. Cela permettrait de l'adapter aux spécificités du territoire dans lequel se situe l'établissement. L'objectif est de favoriser la mixité sociale dans les établissements privés, comme le propose le troisième amendement, qui lui demande aux établissements de faire un rapport sur les moyens qu'ils engagent pour améliorer cette mixité.
En application de l'article L. 111-1 du code de l'éducation, l'établissement privé sous contrat, qui concourt au service public de l'éducation, veille à la mixité sociale des élèves scolarisés ainsi qu'à la prise en considération de leurs difficultés et de leur état de santé. Avis défavorable.
Même avis. L'objectif de mixité sociale est très important et nous le poursuivrons par des voies diverses, notamment par des incitations dans le cadre des politiques rénovées d'éducation prioritaire, mais l'adoption de ces amendements créerait trop de rigidité et poserait probablement un problème constitutionnel. Avis défavorable.
Le pourcentage de 25 % n'est pas un chiffre absolu mais un seuil plancher ; il peut évoluer. Le rôle de la loi est de donner des instructions claires à l'action publique. Si, en matière de mixité sociale, on peut parfaitement imaginer des déclinaisons territoriales afin d'apporter un peu de souplesse, on ne peut toutefois déplorer que la loi soit très précise.
Depuis quelques années, les quartiers les plus ghettoïsés retrouvent une mixité sociale car les classes moyennes mettent leurs enfants dans des écoles privées. Pour ma part, je mettais mes enfants à l'école publique mais la directrice de l'école de mes enfants, avant de venir enseigner, déposait son enfant dans l'école privée de la ville. Je ne peux pas lui en vouloir car ce débat est très compliqué.
Il faudra trouver le moyen de faire revenir les classes moyennes dans certains quartiers pour assurer la mixité dans les écoles, particulièrement dans l'école publique. Si on retire les meilleurs élèves boursiers des écoles publiques pour les scolariser dans le privé, on videra encore un peu plus l'école publique d'élèves qui appartiennent à l'excellence. Je comprends la logique de vos amendements, mais des mesures comme celles-là peuvent se révéler très contre-productives.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement CS1118 de M. Jean-Luc Mélenchon.
Cet amendement vise à aligner les devoirs des écoles privées sous contrat simple sur ceux des établissements privés sous contrat d'association. Nous proposons donc, à l'alinéa 3, de substituer aux mots : « d'organiser l'enseignement par référence » les mots : « à dispenser un enseignement conforme ». La simple « référence » est une notion relativement floue, qui ne nous paraît pas suffisante. La contractualisation permet à ces établissements de recevoir des fonds publics et à leurs enseignants d'être rémunérés par l'État. Nous devons donc leur demander d'être plus exigeants et plus précis sur le contenu de l'enseignement.
Les contrats simples imposent de dispenser un enseignement « par référence » aux enseignements de l'éducation nationale, tandis que les contrats d'association imposent un enseignement « conforme » à ceux de l'éducation nationale. Il paraît nécessaire de conserver cette dualité. Avis défavorable.
Il existe deux types d'établissement privés, avec deux types de contrats comportant chacun des exigences différentes. Celles-ci sont définies dans le code de l'éducation.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS774 de M. Xavier Breton.
Il s'agit de clarifier les conditions d'octroi du contrat en introduisant un peu plus de rationalité et de transparence dans le processus. Il est proposé que l'autorité compétente motive sa décision, celle-ci pouvant être contestée devant le juge administratif.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 24 modifié.
Après l'article 24
La commission examine l'amendement CS1657 de M. Boris Vallaud.
Cet amendement, qui vise à préciser que l'objectif de mixité sociale s'applique également aux établissements privés, me donne l'occasion de rappeler un certain nombre de chiffres : 10 % des collèges accueillent moins de 15 % d'élèves issus de milieux défavorisés ; 10% des élèves fréquentent un établissement qui accueille au moins 63 % d'élèves issus de milieux défavorisés ; en moyenne, l'enseignement privé accueille moitié moins d'enfants défavorisés.
Or l'enjeu de la mixité sociale est majeur. Nombre d'expérimentations, à Paris ou à Toulouse, ont produit des effets extrêmement intéressants et devraient être prolongées. Si les principes et les valeurs de la République ne sont pas respectés dès le stade de l'école, comment espérer que les enfants les respectent une fois devenus adultes ? Comment peut-on prétendre vivre ensemble quand on n'a ni grandi ni étudié ensemble ? Il est particulièrement regrettable que cette loi ne prévoie rien de ce point de vue, ni pour l'enseignement privé ni pour l'enseignement public.
Votre amendement propose d'inscrire dans l'article L. 442-1 que l'objectif de mixité sociale s'applique également aux établissements privés. Or cet article prévoit déjà que « tous les enfants, sans distinction d'origine, d'opinion ou de croyances » ont accès aux établissements privés sous contrat et que, dans la mesure où ceux-ci font partie du service public de l'enseignement, ils doivent contribuer à l'objectif de mixité sociale. Cela est donc déjà prévu dans le code de l'éducation. Je comprends votre souhait d'aller plus loin, néanmoins j'émets un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CS1214 de Mme Caroline Abadie.
Concernant la scolarisation des enfants roms, étrangers ou vivant dans des bidonvilles, un grand pas a été fait avec l'adoption de la loi pour une école de la confiance, qui a établi une liste limitative des pièces pouvant être demandées par la commune pour l'inscription sur la liste des élèves soumis à l'obligation scolaire. Nous proposons de faire de même avec la liste des pièces à fournir pour l'inscription dans un établissement. Je rappelle que la Commission nationale consultative des droits de l'homme estime que 80 % des jeunes vivant en bidonville en France métropolitaine sont non scolarisés.
Votre amendement illustre le souci largement partagé de veiller à la scolarisation de tous les enfants présents sur le territoire français. Il est satisfait, le code de l'éducation limitant déjà, dans son article L. 131-6, la liste des pièces à fournir. Demande de retrait.
Je me permets d'insister car si cela est prévu pour l'inscription sur les listes des élèves soumis à l'obligation scolaire, le code de l'éducation ne mentionne pas les pièces à fournir pour l'inscription dans un établissement public ou privé. Ce sont deux choses différentes.
Je vous propose de retirer votre amendement afin que nous puissions y retravailler et lever ce doute avant la séance.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CS589 de Mme Cathy Racon-Bouzon.
La part des enfants défavorisés dans les collèges est de 20 % dans l'enseignement privé et de 43 % dans l'enseignement public ; un effort important doit donc être mené. Le rapport de M. Yann Algan, Agir pour la mixité sociale et scolaire au collège, paru en 2016, mentionne près d'une vingtaine d'expérimentations qui montrent qu'agir à l'échelle d'un territoire, avec seulement quelques collèges, donne des résultats. Ainsi, dans le pays de Redon, situé entre Vannes, Nantes et Rennes, trois collèges privés et publics ont œuvré ensemble au renforcement de la cohésion sociale. Alors que le collège Saint-Joseph ne comptait que 25 % d'élèves défavorisés en 2014, il en accueillait 36 % deux ans plus tard : c'est un résultat important. C'est pourquoi, dans cet amendement, je propose de conditionner le versement de subventions par les collectivités territoriales à des objectifs favorisant la mixité.
L'amendement est satisfait car les collectivités territoriales peuvent déjà conditionner le versement de leurs subventions au respect de critères de mixité sociale. Demande de retrait.
Même avis. Certaines politiques publiques infra-législatives doivent être incitatives, par exemple en impliquant les établissements privés dans la réalisation d'objectifs de mixité sociale – je vous renvoie à l'expérience des CLA (contrats locaux d'accompagnement). Toutefois, et même si je partage l'esprit de cet amendement, je ne pense pas qu'il faille écrire des choses trop rigides dans la loi.
Je partage l'objectif de mixité sociale mais il est important de raisonner par bassin. Dans certains territoires, les toutes petites communes n'ont parfois qu'une seule école, privée. Quand il n'y a que cinquante élèves, il n'est pas envisageable de fixer des objectifs de mixité sociale à l'école locale.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CS1062 de M. Éric Coquerel.
Nous souhaitons que les établissements privés sous contrat soient contrôlés une fois par an.
Le contrôle est différent de celui exercé sur les établissements hors contrat car il porte sur les enseignants. Ceux-ci participent en effet à une mission de service public et sont rémunérés par l'État. Votre proposition reviendrait à imposer à chaque enseignant d'être inspecté tous les ans, ce qui ne correspond pas à la pratique de l'inspection des enseignants. Avis défavorable.
Cela créerait une inégalité entre les enseignants des établissements privés sous contrat et les enseignants de l'enseignementpublic. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS1013 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.
Lorsqu'ils existent, les comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté fonctionnent à l'échelon de l'établissement, ce qui ne favorise pas toujours la mixité sociale. L'objectif de cet amendement est d'en faire des comités inter-établissements. C'est d'ailleurs une recommandation formulée par la Cour des comptes, qui estime que l'échelon inter-établissements favorise la lutte contre l'entre-soi et contre le séparatisme.
Je comprends l'objectif de votre amendement. Néanmoins, votre organisation semble trop complexe à mettre en œuvre. Avis défavorable.
Le risque, c'est que l'accumulation de bonnes intentions conduise à des lourdeurs extrêmes. Il y a des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté à l'échelle de chaque établissement et des politiques sociales à l'échelle territoriale. Mais je comprends l'esprit de votre amendement, sur lequel nous pouvons travailler d'ici à la séance.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS394 de M. Jean-Baptiste Moreau.
Cet amendement vise à proposer à tous les établissements hors contrat, dès leur création et à chaque rentrée scolaire, une contractualisation de la part du ministère de l'éducation nationale.
Il faut actuellement cinq ans de fonctionnement avant de pouvoir passer un contrat avec l'État. Les contrôles menés en amont permettent de s'assurer d'un certain nombre de dispositions avant d'engager financièrement l'État. Cela permet aussi de s'assurer de la solidité financière de l'établissement et de l'existence d'un besoin scolaire. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
La commission est saisie de l'amendement CS114 de Mme Anne-Laure Blin.
J'ai déjà présenté cet amendement dans le cadre de l'article concernant le contrat d'engagement républicain et je sais que vous n'êtes pas favorables au déplacement des maires dans les établissements privés hors contrat.
Pour avoir suivi tous les débats, je ne crois pas que ce soit ce qui a été dit. Il a été dit qu'il n'y avait pas forcément besoin d'inscrire une telle disposition dans la loi pour que les maires se rendent à tel ou tel endroit de leur commune.
Suivant l'avis défavorable de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS1087 de M. Alexis Corbière.
L'amendement vise à mettre fin aux discriminations entre les sexes dans les établissements scolaires privés sous contrat, qui sont une sorte de séparatisme, puisque certains établissements imposent des tenues plus couvrantes aux filles, que, dans d'autres, filles et garçons sont séparés ou que, dans d'autres encore, un sexe est exclu. Ce n'est pas ainsi que l'on prépare à un égal accès aux responsabilités professionnelles et sociales, qui sont pourtant prévues à l'article 1er de la Constitution. De la même manière qu'il ne doit pas y avoir de discriminations liées à une distinction d'origine, d'opinion ou de croyance, il ne doit pas y en avoir non plus pour le sexe.
Je comprends l'esprit de votre amendement, mais la mixité ne peut pas être imposée de manière absolue, en application du droit international, qui prévoit explicitement que la lutte contre les discriminations ne fait pas obstacle à l'organisation des enseignements par regroupement des élèves en fonction de leur sexe. De manière générale, la non-mixité de certains établissements ou enseignements n'en rend pas moins obligatoire la transmission des enseignements relatifs à l'égalité homme‑femme. Avis défavorable.
Vous me permettrez de m'étonner de votre réponse, madame la rapporteure. J'avais cru comprendre que, par rapport à certaines pratiques religieuses, on faisait en sorte de réduire tout ce qui était assujettissement des femmes. En revanche, des établissements peuvent continuer à penser au XXIe siècle qu'il faut que filles et garçons soient séparés et qu'il y ait des discriminations de fait basées sur le sexe. C'est assez étonnant pour une loi qui prétend renforcer les principes républicains, dont l'égalité homme‑femme devrait être l'un des socles.
La tenue vestimentaire et l'organisation de classes non mixtes ne relèvent-elles pas du règlement intérieur de l'établissement ? Des établissements célèbres à Paris proposent aux parents de mettre leur enfant au collège dans des classes de filles, de garçons ou mixtes. Quant à la question de la tenue vestimentaire, monsieur le ministre, qui a été d'actualité il y a quelques mois, vous aviez utilisé l'expression de « tenue républicaine ». Ce n'est pas le terme que j'utiliserais, mais je pense que cela relève du chef d'établissement et que cela n'a donc pas sa place dans la loi.
La commission rejette l'amendement.
Elle étudie l'amendement CS1662 de M. David Habib.
Vous allez trouver que je tarabistouille... L'amendement vise à inverser la logique actuelle concernant la passation de contrat entre l'État et les établissements privés, en proposant que ce soit désormais l'État qui soit à l'initiative du contrat.
Avis défavorable. Il vaut mieux que ce soient les établissements qui fassent la démarche et se montrent volontaires pour passer le contrat.
La commission rejette l'amendement.
La commission examine l'amendement CS1089 de M. Alexis Corbière.
Nous souhaitons abroger la « loi Carle » qui instaure des obligations supplémentaires de financement des écoles privées pour les communes. Lorsqu'elles accueillent des élèves scolarisés hors de leur commune de résidence, les communes doivent payer les dépenses de fonctionnement des écoles sous contrat. On nous parle de parité, mais le privé n'a pas les mêmes obligations que l'école publique, ne serait-ce que pour ce qui est de la possibilité de choisir ses élèves. En outre, la « loi Carle » fragilise les écoles primaires publiques des petites communes rurales. Dans un amendement déclaré irrecevable, nous avions proposé que la loi détermine qu'il y ait une école publique par commune ou, à tout le moins, à moins de trente minutes de chaque enfant. Pour nous, dès lors qu'un parent choisit d'inscrire son enfant dans une école qui n'est pas dans la commune, ce n'est pas à la collectivité de prendre en charge ce contournement de la carte scolaire.
Vous proposez d'abroger la loi dite « Carle », qui a un impact très fort sur les finances des communes mais aussi sur celles des établissements privés. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis de la rapporteure et du ministre, elle rejette successivement les amendements CS513 et CS587 de Mme Cathy Racon-Bouzon.
La commission examine l'amendement CS1088 de M. Alexis Corbière.
Nous souhaitons abroger les dispositions particulières régissant l'enseignement dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle. Les élèves, des écoles primaires au lycée de l'enseignement public, consacrent dans ces départements une heure par semaine à suivre un enseignement religieux élaboré en dehors du cadre du ministère de l'éducation nationale. Les écoliers travaillent ainsi une heure de moins par semaine les programmes scolaires. Mais surtout cela contrevient à la non‑reconnaissance par l'État d'une religion. Par ailleurs, certains témoignages, que nous citons dans l'exposé sommaire, font montre d'une dérive dangereuse et d'un prosélytisme religieux dans ces cours. L'Observatoire de la laïcité l'a notamment relevé. Nous souhaitons que le même principe de laïcité et de neutralité du service public de l'éducation s'applique sur tout le territoire.
Je m'étonnais de certains amendements déposés après l'article 24… Le Conseil constitutionnel reconnaît comme un principe fondamental celui du droit local de ces départements, qui s'applique notamment en matière d'enseignement. Avis défavorable.
Je me sens un peu concerné en tant que Mosellan… Je comprends la logique de M. Coquerel, et partage sa position concernant l'aspect obligatoire de ces cours. Mais il n'est pas démontré que le niveau scolaire des élèves des écoles d'Alsace‑Moselle soit inférieur à celui du reste de la France, malgré cette heure de cours en moins. Votre argumentaire ne tient pas. Cela peut vous déranger que l'on y parle de Jésus, mais ce sont des cours de religion. Plus encore que le Concordat c'est le droit local alsacien‑mosellan issu de la loi Falloux qui s'applique. Il faudrait revoir vos classiques. Mais je suis prêt à discuter avec vous du statut obligatoire de ces cours.
J'en serais très satisfait, d'autant que vous me semblez tolérant. Mais je connais mes classiques ! Nous sommes contre le Concordat. Nous sommes pour que la loi de 1905 s'applique partout sur le territoire français, notamment en matière d'éducation et de religion.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS1654 de M. Boris Vallaud.
Cet amendement vise à ce que les actions de formation professionnelle de tous les enseignants des établissements privés sous contrat, financés par l'État, soient assurées par l'État et son administration. C'est l'éducation nationale qui élaborerait les plans de formation de tous ses agents et s'assureraient de leur accès effectif aux actions de formation. Nous respectons ainsi le principe de laïcité : les enjeux religieux sont éloignés de la carrière des agents des établissements privés, qui sont aussi des agents de l'État.
Il faut permettre à l'État d'ouvrir aux professeurs du privé des possibilités de formation, mais on ne peut pas instaurer son exclusivité sur celle-ci. De manière générale, la formation des enseignants du privé sous contrat est assise sur un principe de parité avec celle du public, qui repose sur le fait que les maîtres du privé participent au service public de l'enseignement. Toutefois, encore récemment, le Conseil d'État a précisé que, si les maitres dans des établissements d'enseignement privés sous contrat devaient bénéficier des mêmes possibilités de formation que ces derniers, leur formation devait, néanmoins, être assurée dans le respect notamment du caractère propre de leur établissement.
Certains établissements privés ont des caractéristiques spécifiques, des méthodes pédagogiques particulières ou encore des enseignements techniques très rares. C'est notamment le cas de certains établissements de la fédération nationale des établissements privés laïcs sous contrat que nous avons entendue en audition. Pour ceux-là, il faut prévoir que des formations puissent être organisées en dehors du cadre de formation de l'État, qui ne peut décemment assurer un éventail de formation aussi large. Avis défavorable.
Mon amendement ne fait absolument pas obstacle à la jurisprudence du Conseil d'État telle que vous venez de l'énoncer. Nous souhaitons simplement que ce soit l'académie qui soit l'autorité à l'initiative des actions de formation et non pas que ce soit elle qui les dispense, afin de faire sortir un certain nombre d'enseignants d'une forme de tutelle excessive du privé.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CS1086 de M. Alexis Corbière.
Nous proposons que la formation initiale et continue des enseignants des établissements privés sous contrat soit identique à celle des enseignants des établissements publics. Cet amendement nous a été proposé par l'UNSA-SNEP, que nous avons auditionné de notre côté. Le syndicat nous a fait part de son inquiétude concernant la qualité des formations de l'enseignement privé. C'est pourquoi il nous semble nécessaire d'opérer un rééquilibrage.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, l'amendement CS779 de M. Xavier Breton et CS1442 de Mme Anne-Laure Blin.
Il s'agit d'un amendement de cohérence. Le ministre de l'éducation nationale avait invité les parents d'élèves qui pratiquaient l'instruction en famille et qui ne pourraient pas continuer à le faire à rejoindre ou à créer des établissements privés hors contrat, en présentant cela comme une perspective accessible. En réalité, le code de l'éducation interdit aux parents, à moins qu'ils aient surveillé ou dirigé un établissement d'enseignement pendant cinq ans, ou qu'ils y aient enseigné, de fonder leur propre école hors contrat. Dans la logique des propos du ministre, nous vous proposons d'ouvrir les conditions définies par le code de l'éducation pour pouvoir diriger un établissement scolaire, en proposant, alternativement aux cinq ans d'expérience dans un établissement d'enseignement, d'autres caractéristiques comme cinq ans d'activité d'enseignement, de soutien scolaire, d'instruction en famille, d'accompagnement paramédical des élèves ou de production de manuels scolaires ou de supports pédagogiques.
Vous souhaitez revenir sur les dispositions de la loi dite « Gatel », nous ne le souhaitons pas. Avis défavorable.
La commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis de la rapporteure et du ministre, elle rejette l'amendement CS1085 de M. Alexis Corbière.
La commission examine l'amendement CS1395 de M. Éric Diard.
La section 2 du chapitre V de la présente loi a pour objectif principal d'assurer la conformité des enseignements dispensés dans les établissements d'enseignement privés avec les principes de la République. À l'article 24 est notamment introduite une disposition subordonnant toute signature d'un contrat d'association à l'enseignement public à la vérification de la capacité de l'établissement à dispenser un enseignement conforme aux programmes de l'enseignement public et, de facto, aux principes de la République. Dans les faits, cette vérification passe par une inspection de l'établissement commandée à un inspecteur académique par sa hiérarchie. L'amendement a pour objectif d'empêcher le refus d'inspection d'un établissement par un inspecteur académique sans justification particulière qui ne soit reconnue et validée par le rectorat. Je vous parle d'expérience, monsieur le ministre, puisque je sais qu'un inspecteur a refusé d'aller contrôler un établissement hors contrat qui posait problème.
L'amendement concerne le fonctionnement d'un corps de contrôle, comme il en existe dans plusieurs administrations. Tout fonctionnaire qui se réfère à son autorité hiérarchique parce qu'il refuse un contrôle peut avoir des raisons, notamment une situation de conflit d'intérêts. Sinon, je pense qu'il existe des dispositions dans nos administrations pour traiter ce sujet. Votre amendement m'étonne un peu et j'aimerais en discuter avec vous à l'occasion. Avis défavorable.
J'aimerais bien qu'on en rediscute, parce qu'il y a eu des soucis. Un établissement n'a pas pu être contrôlé parce que l'inspecteur a refusé, sans aucun motif, l'inspection.
La commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CS1508 de Mme Sylvie Charrière.
Cet amendement vise à ce que les établissements privés sous contrat d'association rendent compte tous les trois ans à l'autorité compétente de l'État en matière d'éducation des actions menées afin d'améliorer la mixité sociale en leur sein. Les bienfaits de la mixité sociale sont reconnus. Les établissements privés ont également leur rôle à jouer et une valeur ajoutée à apporter, notamment lorsqu'ils font, par ailleurs, l'objet d'un contrat d'association avec l'État. Beaucoup d'expérimentations ont montré tous les bienfaits d'un travail par bassin de formation. Il faudrait que nous réussissions à proposer un amendement pour la séance.
Je trouve votre amendement très intéressant. Néanmoins, je vous propose de le retirer afin d'en rediscuter pour la séance.
Quelle que soit leur forme, leur intensité ou le groupe d'où ils proviennent, les amendements sur la mixité sociale sont rejetés. Je veux bien comprendre que le discours des Mureaux du Président de la République n'était pas toute la loi, mais il avait suscité un certain consensus, notamment en liant le combat contre le séparatisme et la mixité sociale ou, autrement dit, le refus du séparatisme social et territorial. Or la loi a fait l'impasse sur ce volet. Aussi, sur les sujets qu'elle aborde, comme celui de l'éducation, il me semblerait profitable de faire preuve d'une exigence républicaine de mixité sociale.
Je retire l'amendement pour travailler avec Mme la rapporteure sur une rédaction satisfaisante pour la séance.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CS459 de M. Frédéric Petit.
Ces dernières décennies, dans les quartiers, nous avons subi le lent effondrement des mouvements d'éducation populaire, que cette loi pourrait être l'occasion de refonder. Seul le mouvement sportif a réussi à se maintenir. Tous les autres, ceux qu'on appelait les tiers de confiance, ont disparu. Je ne dis pas que c'est la faute d'un grand méchant, et je pense que ces mouvements doivent aussi analyser les causes de leur disparition. Mais nous devons réfléchir pour voir comment revenir à une action éducative périscolaire.
J'ai été très surpris, en me préparant pour ce débat, de constater qu'il y avait un code du sport mais rien qui réunisse toutes les autres activités. Quand Mme la ministre dit que l'on sait former des fonctionnaires mais pas les responsables du secteur associatif, cela fait frémir les gens qui ont mon âge. Il y a quarante ans, il y avait une multiplicité de formations dans le domaine associatif, très fiables, contrôlées par l'État. Tout le monde a entendu parler de la fédération Léo-Lagrange, des Francas, des grandes associations familiales. Tout cela a disparu. Mon amendement est un amendement d'appel. J'aimerais que l'on trouve comment étendre aux autres activités ce que l'on va définir pour le domaine sportif. C'est ainsi que je propose un code qui soit une extension du code du sport, un code du sport et de l'activité éducative en dehors de l'école. Nous devons restructurer l'éducation extrascolaire, sans quoi nous n'y arriverons pas.
Lors de nos auditions, nous avons souvent abordé le sujet de l'éducation populaire, des temps péri et extrascolaires, du secteur socio‑éducatif, socioculturel, des accueils de mineurs. Nous devrions lancer une mission sur cette question. Quant au sujet éminemment technique et difficile de la codification, il faudrait saisir la commission supérieure de codification, afin d'avoir son avis sur l'opportunité de la création du nouveau code que vous proposez. Avis défavorable, même si je suis très intéressée par votre amendement.
J'ai parlé de codification, parce que j'ai été très surpris de voir que seul le droit du sport avait été codifié. Il me semble que ce que nous disons à l'article 25 sur les fédérations sportives est transposable à tout le reste. Nous avions des fédérations qui avaient des délégations. Je retire mon amendement sauf si quelqu'un veut prendre la parole dessus.
Je partage l'avis de M. Frédéric Petit. Il manque, dans le texte, tout le volet relatif à la réhabilitation des quartiers et à la disparition de l'éducation populaire. Le jour de l'assassinat de Samuel Paty, je regardais un documentaire avec Gilles Legendre sur Marseille, où l'on voyait que les quartiers avaient été abandonnés, qu'il n'y avait plus d'éducation populaire et que le religieux avait pris la place des associations d'éducation populaire. Il reste le sport, certes, mais il est de plus en plus dévoyé par des mouvements séparatistes, malheureusement.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CS1661 de Mme Cécile Untermaier.
C'est une demande de rapport afin d'envisager une transition vers une contractualisation obligatoire pour tous les établissements privés.
Suivant l'avis de la rapporteure et du ministre, la commission rejette l'amendement.
Avant l'article 25
La commission examine l'amendement CS1878 de la rapporteure.
La commission adopte l'amendement.
Mes chers collègues, je vous informe que, à la demande du Gouvernement, par cohérence, l'examen de l'article 31 est réservé et que cet article sera examiné après l'article 44.
La séance est levée à minuit-dix.
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la République
Réunion du vendredi 22 janvier 2021 à 21 heures
Présents. - Mme Caroline Abadie, Mme Géraldine Bannier, Mme Anne-Laure Blin, M. Florent Boudié, M. Xavier Breton, M. Jean-Jacques Bridey, Mme Anne Brugnera, M. Francis Chouat, Mme Fabienne Colboc, M. Éric Coquerel, M. François Cormier-Bouligeon, M. Éric Diard, Mme Coralie Dubost, Mme Nicole Dubré-Chirat, Mme Perrine Goulet, Mme Florence Granjus, Mme Marie Guévenoux, M. Pierre Henriet, M. Sacha Houlié, Mme Anne-Christine Lang, M. Gaël Le Bohec, Mme Constance Le Grip, M. Jean-Paul Mattei, M. Ludovic Mendes, M. Jean-Baptiste Moreau, Mme Valérie Oppelt, M. Patrice Perrot, M. Frédéric Petit, M. Stéphane Peu, M. François Pupponi, M. Julien Ravier, M. Robin Reda, M. Thomas Rudigoz, M. François de Rugy, M. Boris Vallaud, M. Guillaume Vuilletet
Assistaient également à la réunion. - Mme Sylvie Charrière, Mme Emmanuelle Ménard