Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Réunion du mercredi 9 juin 2021 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI CONFORTANT LE RESPECT DES PRINCIPES DE LA RÉPUBLIQUE

Mercredi 9 juin 2021

La séance est ouverte à neuf heures.

La commission spéciale procède à la suite de l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme (n° 4078) (M. Florent Boudié, rapporteur général et rapporteur pour le chapitre I du titre II, Mme Laurence Vichnievsky, rapporteure pour le chapitre I du titre Ier, M. Éric Poulliat, rapporteur pour le chapitre II du titre Ier, Mme Nicole Dubré-Chirat, rapporteure pour le chapitre III du titre Ier, Mme Laetitia Avia, rapporteure pour le chapitre IV du titre Ier, Mme Anne Brugnera, rapporteure pour le chapitre V du titre Ier, M. Sacha Houlié, rapporteur pour les chapitres II et III du titre II, et pour les titres III et IV).

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Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi confortant le respect des principes de la République par les amendements à l'article 21.

Chapitre V Dispositions relatives à l'éducation et aux sports

Section I Dispositions relatives à l'instruction en famille

Article 21 : Encadrement des possibilités de recours à l'instruction en famille

La commission est saisie des amendements identiques CS456 des rapporteurs, CS773 du Gouvernement, CS421 de Mme Géraldine Bannier, CS535 de M. Pierre-Yves Bournazel et CS571 de Mme Fabienne Colboc, faisant l'objet de plusieurs sous-amendements.

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L'amendement a pour objet de rétablir la rédaction de l'article 21 telle qu'adoptée par l'Assemblée nationale, et notamment le principe d'autorisation préalable de l'instruction en famille (IEF), que le Sénat a supprimé. Ce principe nous paraît indispensable pour garantir la pleine protection du droit à l'instruction des enfants tout en assurant la prise en compte de leurs besoins particuliers recensés au travers des différents motifs listés.

Cette rédaction conserve toutes les modifications que nous avions apportées ensemble en première lecture, à l'initiative des différents groupes politiques de notre assemblée : elles garantissent le juste équilibre du dispositif et la prise en compte de tous les enjeux. Je pense notamment aux précisions apportées sur le quatrième motif autorisant l'IEF, à l'explicitation du principe selon lequel le silence de l'administration vaut acceptation de l'autorisation préalable, au droit au recours auprès d'une cellule ad hoc en cas de refus de celle-ci, à l'accompagnement des familles pratiquant d'ores et déjà l'IEF, à la possibilité d'accorder certaines autorisations pluriannuelles pour des enfants souffrant de longues maladies ou de handicaps ou encore au maintien de dispositions transitoires pour les familles pratiquant déjà l'instruction en famille dans des conditions satisfaisantes.

Nous avons également conservé ce qui relève de notre volonté générale de lutter contre l'évitement scolaire et d'atteindre l'objectif que nous nous fixons – que chaque enfant de France ait droit à une instruction de qualité – au travers d'un dispositif d'ensemble comprenant l'identifiant national élève, que le Sénat a conservé tel quel, les instances de lutte contre l'évitement scolaire, avec des dispositions réécrites afin d'être plus explicites, ou encore le rattachement administratif à un établissement scolaire des enfants instruits en famille.

Sur le fond, je ne pense pas nécessaire de refaire les débats de la première lecture : nous nous étions largement exprimés. Je rappellerai simplement quelques éléments relatifs à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, qui forme le cœur de bien des arguments d'opposition.

Le Conseil consacre certes la liberté de l'enseignement comme l'un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, celle-ci devant s'exercer dans le respect du droit de l'enfant à l'éducation et à l'instruction. Il ne s'est cependant jamais prononcé sur la question de savoir si la faculté d'instruire ses enfants au sein de la famille était une composante essentielle de cette liberté ou seulement une modalité secondaire. N'ont été reconnus comme composantes essentielles du principe constitutionnel de la liberté de l'enseignement que l'existence de l'enseignement privé, le respect du caractère propre des établissements privés et l'octroi de financements publics à ces mêmes établissements : c'est précisément pourquoi enseignement privé et IEF ne sont traités de la même façon.

Par ailleurs, plusieurs États européens ne reconnaissent pas l'IEF et imposent la scolarisation, sans que cela ait été remis en cause par la Cour de justice de l'Union européenne ou par la Commission européenne des droits de l'homme.

D'une manière générale, laissons le Conseil constitutionnel se prononcer – nul doute en effet qu'il en sera saisi. C'est pourquoi je vous propose d'adopter l'amendement qui rétablit la version de l'article 21 adoptée par l'Assemblée nationale.

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Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports

L'amendement du Gouvernement a pour objectif de rétablir l'article 21. Je partage totalement l'approche de Mme la rapporteure : tous les débats que nous avons eus avaient abouti à une position d'équilibre, loin de certaines caricatures et dans le respect des principes constitutionnels qu'elle vient de rappeler.

La liberté d'enseignement, qui est un principe essentiel, s'entend de deux points de vue : celui de l'enfant et celui des structures d'enseignement. S'agissant des établissements hors contrat, d'ailleurs, tout l'enjeu tient aux limites de leur liberté, qui n'est pas absolue. En revanche, le droit de l'enfant à l'instruction est extrêmement important, aussi bien sur le plan national qu'international, et l'objet du projet de loi est d'augmenter les droits de l'enfant, de s'assurer de ce qu'il advient de lui, évidemment dans le respect du droit des familles, mais aussi dans le cadre de la société dans laquelle il vivra en tant que personne et en tant que citoyen.

Il s'agit donc tout simplement de restituer l'équilibre auquel nous étions parvenus, en ayant à l'esprit certains arguments que nous avons échangés au Sénat, qui seront utiles à la discussion constitutionnelle que la rapporteure vient d'amorcer.

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Il s'agit de rétablir l'article 21, et notamment de revenir au principe d'autorisation préalable que le Sénat a supprimé et qui paraît indispensable pour garantir la pleine protection du droit à l'instruction des enfants, tout en assurant la prise en compte de leurs besoins particuliers recensés au travers des différents motifs listés.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale au projet de loi initial et reprises à travers l'amendement permettent d'assurer l'équilibre le plus juste s'agissant notamment de la protection de l'intérêt supérieur de l'enfant, de la modification du quatrième motif, de l'explicitation du principe selon lequel le silence vaut acceptation, du droit au recours auprès d'une cellule ad hoc, de l'accompagnement des familles par le service public du numérique éducatif, de la possibilité d'accorder certaines autorisations pluriannuelles, du report de l'entrée en vigueur ou encore du maintien de dispositions transitoires pour les familles pratiquant déjà l'instruction en famille dans des conditions satisfaisantes.

Elles étendent également le dispositif à des mesures plus larges de lutte contre la déscolarisation et l'évitement scolaire au travers du rattachement administratif à un établissement scolaire des enfants instruits en famille ou de la généralisation des cellules de prévention de l'évitement scolaire.

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Nous avons beaucoup débattu de ces questions, et des craintes légitimes ont pu s'exprimer ici ou là. Pour autant, il ne faut pas perdre de vue l'objectif initial et terminal de cet article : d'une part, répondre au souci de scolarisation des enfants, et donc préserver leur droit à l'instruction ; d'autre part, lutter contre un certain nombre de dérives, tant aujourd'hui que dans les années qui viennent.

Pour le groupe Agir ensemble, toutes les dispositions rappelées tant par Mme la rapporteure que par M. le ministre semblent apporter des garanties suffisantes en matière de droits de la famille et préserver toute la cohérence du texte. D'où notre amendement.

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Les enjeux liés à l'IEF nous avaient longuement occupés et amenés à enrichir considérablement l'article 21 afin de trouver un juste équilibre entre respect de la liberté d'instruction et protection des enfants. L'IEF concerne aujourd'hui un nombre croissant d'enfants et constitue un sujet sociétal important : loin d'être marginale, elle doit donc faire l'objet de la plus grande vigilance, tant de la part des pouvoirs publics que du législateur, notamment en raison du rôle majeur de l'école dans la socialisation, l'apprentissage et l'équilibre des enfants.

L'objectif de protection des droits de l'enfant nous impose d'agir fermement vis-à-vis de certains parents qui détournent la liberté d'instruction dans le but d'éloigner leur enfant de la République. Nous souhaitons non pas interdire l'IEF, mais renforcer son encadrement afin qu'elle ne puisse être organisée que dans l'intérêt supérieur de l'enfant.

Le retour au principe d'autorisation préalable, que le Sénat a supprimé, apparaît indispensable pour garantir la pleine protection du droit à l'instruction des enfants tout en assurant la prise en compte de leurs besoins particuliers recensés au travers des différents motifs listés.

Nos débats en première lecture avaient permis d'aboutir à un dispositif équilibré que nous proposons de rétablir et qui inclut notamment un droit au recours auprès d'une cellule ad hoc, un accompagnement des familles par le service public du numérique éducatif, la possibilité d'accorder certaines autorisations pluriannuelles, le report de l'entrée en vigueur ou encore le maintien de dispositions transitoires pour les familles pratiquant déjà l'IEF dans des conditions satisfaisantes.

La rédaction que nous proposons permet également d'étendre le dispositif à des mesures plus larges de lutte contre la déscolarisation et l'évitement scolaire au travers du rattachement administratif des enfants instruits en famille à un établissement scolaire ou de la généralisation des cellules de prévention de l'évitement scolaire.

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Je ne voudrais pas, madame la rapporteure, entendre à nouveau que nous avons déjà discuté de tout parce que nous sommes en nouvelle lecture, alors que nous n'avons jamais obtenu de réponse à un certain nombre de questions que nous avons posées dans l'hémicycle. Malheureusement, vous reprenez exactement les mêmes arguments qu'en première lecture pour rétablir l'article qui a été supprimé par nos collègues du Sénat.

Vous ne pouvez pas vous targuer de l'avoir enrichi de propositions émanant de tous les groupes politiques : vous avez été particulièrement fermée à celles du groupe Les Républicains visant notamment à renforcer les contrôles par l'éducation nationale et par l'État de la scolarisation des enfants, et à repérer les enfants passés sous les radars.

Je ne peux pas non plus vous laisser dire que votre autorisation préalable est un régime de liberté. Non ! Il a vocation à interdire et à réduire la liberté d'instruction des familles, à laquelle nous sommes profondément attachés. Les familles sont les premières éducatrices de leurs enfants ; elles savent, car elles les connaissent, leurs éventuels besoins spécifiques, et bon nombre d'entre elles respectent les règles qui leur sont aujourd'hui imposées – vous n'avez pas de chiffres qui le contredisent.

S'il en existe effectivement de déviantes, donnez-vous les moyens d'aller les chercher, pour vous conformer au titre de votre projet de loi qui vise à lutter contre les séparatismes et l'islam radical ! Or nous n'en voyons toujours pas dans les dispositifs que vous réintroduisez par cet amendement. Nous y sommes donc naturellement toujours opposés : vous ne pouvez pas tout faire au nom de la lutte contre l'islam, et notamment sacrifier nos libertés.

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Nous sommes toujours contre cet article 21. Sans refaire le débat en première lecture, je souhaite apporter quelques éléments nouveaux.

En premier lieu, nous sommes certains que les dispositions de ce texte emportent un risque d'inconstitutionnalité – dont, d'ailleurs, vous avez une conception à géométrie variable. J'en veux pour preuve le rapport de Catherine Bergeal, c'est-à-dire le projet d'avis du Conseil d'État : il concluait au caractère inconstitutionnel de votre mesure, jugeant que le passage d'un régime de déclaration, sous lequel la liberté est la règle, à un régime d'autorisation préalable, avec l'interdiction pour règle, n'était ni proportionné ni justifié au regard de l'absence de risque séparatiste avéré dans le domaine de l'IEF.

Autre élément nouveau, votre dispositif d'autorisation n'aura aucune efficacité dans la lutte contre les risques séparatistes s'ils étaient avérés. Compte tenu du peu de moyens des académies en matière de contrôle, la règle de droit administratif selon laquelle le silence vaut acceptation aura un véritable effet d'aspirateur sur l'IEF, qui va bénéficier d'autorisations données sans aucun contrôle préalable. Si vous voulez protéger les enfants, il faut affecter des moyens à ces contrôles et, pourquoi pas, passer à un régime de déclaration renforcé.

Dernier élément, aucune étude ne précise les risques séparatistes, alors que cela devrait constituer la base de notre réflexion – il s'agit tout de même d'encadrer une liberté fondamentale. En l'absence de cette étude, vous stigmatisez des familles entières qui pratiquent honnêtement l'IEF, souvent ultime recours après des parcours compliqués avec leurs enfants. Vous allez leur imposer des contraintes supplémentaires avec ces demandes d'autorisation systématiques à faire chaque année, quand bien même elles l'obtiendront de façon tacite. Une fois de plus, vous vous trompez de cible.

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Monsieur le ministre, quand nous vous avons demandé : « Pourquoi faites-vous cela ? », vous nous avez répondu : « Nous avons trouvé deux écoles coraniques en Seine-Saint-Denis, dans lesquelles la moitié des enfants étaient inscrits en IEF ». Et l'autre moitié ? Comment se fait-il que l'inspection d'académie ne l'ait pas détectée ? Quels contrôles celle-ci a-t-elle diligentés en application des lois existantes sur ceux inscrits en IEF ? Jamais vous n'avez répondu à ces questions.

En fait, les associations nous l'ont dit, le taux de contrôle est très variable d'un département à l'autre, mais il ne dépasse pas en moyenne 70 %. Ce n'est donc pas par votre nouvel article liberticide, qui substitue à un régime déclaratif un régime d'autorisation, que le problème sera réglé, mais par la mise en œuvre des moyens matériels de contrôle des 60 000 enfants en IEF.

Nous irons jusqu'au bout. La majorité, et j'en ai connu un certain nombre depuis vingt-sept ans, vote tout et n'importe quoi – souvenez-vous du fameux article 24 de la proposition de loi relative à une sécurité globale, contre lequel nous vous avions mis en garde et pour lequel le Conseil constitutionnel vous a réglé votre compte. Dans cette affaire, on s'attaque aux libertés, et en particulier à la liberté d'instruction que vous voulez encadrer, voire restreindre. Pire encore, vous ne vous rendez même pas compte que vous vous octroyez la définition de l'intérêt supérieur de l'enfant ! Nous irons jusqu'au bout pour montrer à ces 60 000 familles qu'elles ne sont pas des parias de la société.

Enfin, gardez-vous d'invoquer des exemples européens. En Allemagne, c'est le régime hitlérien qui a interdit l'instruction en famille, pour avoir la main sur la jeunesse, et en Espagne, c'est le régime de Franco !

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Il n'y a rien de plus faux !

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Comme vous êtes incapables d'écouter de temps en temps l'opposition, qui ne dit pas que des bêtises, nous nous battrons jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'au Conseil constitutionnel !

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Quand on restreint une liberté essentielle, il n'y a pas de débat inutile. Nous allons donc refaire à fond le débat que nous avons eu en première lecture. Pourquoi vous entêtez-vous à restreindre la liberté de l'enseignement ? Sans aucun doute, pour des raisons idéologiques. Le Gouvernement et sa majorité suivent un drôle de raisonnement en essayant de voir jusqu'où ils peuvent pousser leurs tentations liberticides, et ce qu'en dira ensuite le Conseil constitutionnel.

En première lecture, nous avons vu que le choix de l'IEF pour les parents relevait d'une démarche très personnelle, motivée et argumentée. On a vu aussi que la part de la radicalisation était marginale et qu'en tout cas, le dispositif prévu manquait sa cible. La vraie question est effectivement celle des moyens affectés au contrôle de l'IEF, et non pas celle de sa mise sous tutelle que vous prévoyez en rognant une nouvelle fois la liberté des familles : nous nous y opposons.

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Sur cette question sensible, on peut avoir des points de vue divergents. Je sais gré à notre collègue Charles de Courson de nous faire la leçon sur ce qu'il convient de penser et de faire référence aux régimes nazi et franquiste, avec lesquels je n'ai aucune familiarité.

S'agissant du risque d'inconstitutionnalité, je me suis souvent ému dans cette commission de ce que l'on considère une décision du Conseil constitutionnel comme un camouflet. En démocratie, la majorité gouverne dans le respect de la Constitution et du droit. Si l'une de ses décisions est soumise au contrôle de constitutionnalité, le Conseil dit si elle est conforme ou non à la Constitution.

Je pense que la préoccupation exprimée par notre collègue Anne-Laure Blin est complètement satisfaite : les besoins de l'enfant figurent parmi les critères d'acceptation légitime de l'éducation en famille, et le système de l'acceptation tacite donne satisfaction.

Pour finir sur une remarque un peu plus politique, il y a quelque contradiction à vouloir nous donner la leçon en faisant l'apologie des libertés tout en suggérant, à longueur de débats, une police vestimentaire dans l'espace public.

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Sur un sujet comme celui-là, il est bon effectivement que les débats soient nourris et que des convictions s'expriment : après tout, la politique, c'est d'abord faire des choix. J'entends bien qu'il s'agit de la restriction de l'une de nos libertés fondamentales, mais une telle restriction est possible si un intérêt supérieur lui est confronté. Nous pensons que l'intérêt supérieur de l'enfant peut justifier une telle atteinte à cette liberté. Au demeurant, compte tenu des discussions nourries que nous avions eues, la rédaction à laquelle nous étions parvenus en séance publique avait atteint un équilibre assez raisonnable.

Si j'entends toutes les observations faites s'agissant du contrôle, il faut se référer à cette même rédaction pour considérer qu'un système plus performant sera mis en place.

Au-delà de la lutte contre les séparatismes et de la défense des principes de la République, c'est une option forte que de dire que l'école, d'une manière générale, est très bénéfique à l'enfant en termes de socialisation et d'ouverture, même si les parents – je suis une mère de famille nombreuse – ont leur mot à dire.

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Oui, le Conseil constitutionnel aura à se prononcer : c'est très bien, c'est son travail. Cela ne nous empêche pas de légiférer, d'autant que l'on nous reproche à peu près tout le temps de nous montrer trop timides à l'égard de la Constitution.

J'observe que nos collègues de l'opposition ont tendance à revendiquer leur droit à avoir leur définition de la liberté tout en nous reprochant d'être liberticides, ce qui est tout de même un exercice un peu compliqué. On peut avoir une perception de l'intérêt général, de la liberté et de son exercice sans se faire injurier et traiter de postnazis ou de postfranquistes, comme M. de Courson vient de le faire.

Par ailleurs, à quoi sert la loi ? Selon moi, à protéger le faible, le fragile et la victime. À propos de la haine sur internet, hier, vous nous avez dit : il n'y a pas d'urgence, attendons l'Europe, ce n'est pas si grave si quelques centaines de personnes se font harceler d'ici là. Ici, c'est la même chose. Sans doute faudra-t-il renforcer les moyens de contrôle, mais l'urgence est à défendre toutes les victimes, c'est-à-dire les enfants. Quand bien même la moitié seulement des enfants des écoles coraniques décrites par M. le ministre seraient inscrits en IEF, ils mériteraient que l'on s'intéresse à eux.

Les personnes qui sont dans les clous et qui conduisent un projet, nous avons prévu pour elles toutes les garanties qui leur permettront de le mener à bien, en première lecture.

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Nous avons longuement débattu du choix des termes pour cet article. Avec la rédaction initiale que nous allons rétablir, nous sommes arrivés à un compromis. Dans la mesure où les parents présenteront leur projet éducatif, il n'y aura plus d'arbitraire : il est bien inscrit que l'autorisation « est accordée » – et pas seulement « peut être accordée ». La rédaction est donc satisfaisante et rassurante pour les parents.

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Mon cher collègue de Courson, je n'ai pas eu le bonheur de vous entendre depuis vingt-sept ans, seulement depuis une décennie : lorsque vous dites que le Parlement vote tout et n'importe quoi, vous donnez du crédit à l'antiparlementarisme très profondément ancré dans une partie de notre société. Vous l'alimentez, vous le nourrissez ici-même, en commission spéciale, au lendemain, d'ailleurs, d'une journée au cours de laquelle toute la classe politique s'est émue de la violence, verbale et parfois physique, qui se répand dans notre pays et qui touche les élus de la République. Je vous ai connu plus inspiré. Lorsque vous parlez de parias de la société, lorsque vous faites des parallèles historiques avec l'hitlérisme et le franquisme, sans doute considérez-vous qu'il s'agit de propos modérés, pesés et nuancés. Je les crois dangereux.

Nous serions les auteurs d'une disposition liberticide. Or encadrer une liberté, c'est ce que propose – et même incite à faire – la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Les libertés valent avec leur encadrement : ainsi la loi de 1905, que beaucoup d'entre vous ont évoquée à juste titre au cours de nos débats, garantit-elle le libre exercice du culte, à condition, bien sûr, de respecter l'ordre public.

L'équilibre entre le respect d'un certain nombre de règles et les libertés garanties par nos institutions est fondamental et structurant dans notre République. Il est donc normal que nous regardions s'il est possible et nécessaire d'encadrer certaines libertés. Il n'y a pas de destruction ni de suppression de l'instruction en famille ; c'est pourquoi, cher collègue de Courson, il faut faire attention aux mots que l'on emploie. Vous reprenez des propos, et parfois des attaques, qui inondent les réseaux sociaux et qui nous visent, nous, rapporteurs du texte.

Brandissant l'interdiction supposée de l'IEF, vous affirmez, chers collègues du groupe LR, que nous sommes liberticides. Vous n'avez pourtant eu de cesse, au cours de nos débats, de vouloir augmenter le champ des mesures liberticides, en particulier sur les questions vestimentaires – Christophe Euzet a parlé de police vestimentaire. Vous voulez des interdictions dans l'espace public, au mépris de la liberté de conscience, de la liberté et du pluralisme religieux. Et vous donnez ici des leçons à une majorité qui cherche l'équilibre !

Vos collègues sénateurs du groupe Les Républicains sont même allés plus loin puisqu'ils ont imposé dans le texte la police de la pensée, que nous allons supprimer. Celle-ci, vous voudriez parfois l'imposer dans notre pays en interdisant, par exemple, à des citoyens d'être candidats au motif qu'ils émettraient des opinions que nous combattons fermement, y compris et surtout lorsqu'il s'agit d'islamisme.

D'un côté, vous voudriez priver de libertés certains de nos concitoyens, imposer la police vestimentaire et celle de la pensée, et, de l'autre, vous nous reprochez à nous, députés de la majorité, parce que nous sommes vigilants et exigeants avec l'instruction en famille, d'être liberticides. Vous lancez des attaques à la fois scandaleuses par la voix de M. de Courson et immensément paradoxales par celle de Mme Blin.

Au fond, nos objectifs sont simples : l'intérêt supérieur de l'enfant, dont il n'est pas question que l'État, tel un monstre inspiré à la fois par Franco et par Hitler, décide seul de ce qu'il est, et le projet éducatif pour leur enfant, que les parents devront approfondir, décrire, présenter et expliquer.

Chers collègues, vos propos comportent beaucoup d'outrances qui ne contribuent pas à nous donner, à nous, collectivement, la crédibilité qui sied aux représentants de la nation. Sur un tel sujet, je trouve cela assez dommage.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Monsieur de Courson, répéter une contre-vérité n'en fait pas une vérité. L'interdiction de l'instruction en famille en Allemagne n'est pas d'origine nazie : elle a été prévue par une constitution considérée comme protectrice des libertés, celle de 1949, et dire le contraire est tout simplement injurieux pour les Allemands. De même, en Espagne, c'est la constitution de 1978 qui ne prévoit pas l'IEF et qui, donc, a contrario l'interdit. Une loi suédoise de 2011 interdit également l'IEF au nom des droits de l'enfant – mais sans doute allez-vous nous dire qu'elle émane également d'un régime totalitaire. Il est grave de dire des choses fausses comme cela ; il y a d'autres arguments à avancer.

S'agissant du Conseil d'État, vous surfez un peu sur une vague d'inspiration complotiste qui court sur les réseaux sociaux, comme s'il existait un rapport secret. C'est assez grave, alors que, normalement, c'est le sérieux qui émane de vous, monsieur le député, que vous entremêliez des choses sérieuses et d'autres tout à fait inexactes. Si vous les répétiez après que je les aurais démenties, vous le feriez sciemment. Vous faites semblant de ne pas voir qu'il s'est passé l'inverse de ce que vous dites : c'est précisément parce que le Conseil d'État a signalé des risques potentiels d'inconstitutionnalité dans la version initiale, et que nous les avons pris en considération, que vous a été communiquée une version différente. Vous avez d'ailleurs souligné à l'envi cette évolution.

Celle-ci témoigne du fait que nous sommes à l'écoute, contrairement à ce que vous dites, et que nous n'avons pas voulu attaquer des modes d'IEF qui ne posent aucun problème. Là encore, vous jouez un jeu bizarre : vous essayez de faire croire que l'on va supprimer l'IEF dans des familles où elle ne sera pas supprimée, et vous créez une peur inutile. Pourtant, tout est très clair, et dans ce que nous avons écrit et dans ce que nous avons dit ; et si cela ne l'était pas suffisamment, le Conseil d'État nous a invités à prendre en compte les risques, ce qui constituerait plutôt un argument en faveur d'une forte sécurité juridique de notre action.

Sur le reste, il est très important de bien établir que ce qui est derrière cet article est la protection des droits de l'enfant, et donc celle des libertés : vous faites donc, les uns et les autres, du mot « liberticide » un usage que je trouve très large. Du reste, votre conception des libertés me semble à géométrie variable : sur d'autres sujets, vous êtes prêts à les limiter très fortement, et sur celui-ci, parce que vous voulez en faire un cheval de bataille et effrayer à mauvais escient, vous utilisez des grands mots et faites des références historiques inexactes.

Je vous invite donc à ne pas créer d'incident diplomatique avec nos amis européens, dont les constitutions sont protectrices des libertés. La limitation de l'instruction en famille qui y trouve son fondement n'a jamais soulevé de difficulté, vous le savez bien, devant la Cour européenne des droits de l'homme.

Je rétablis aussi les faits concernant l'avis du Conseil d'État ; tout le monde peut les vérifier. Il y a eu un cheminement, dont l'objectif est précisément de tenir compte des risques d'inconstitutionnalité.

Respectons aussi l'État de droit. Il est bien normal qu'il y ait une discussion parlementaire, mais également que l'on essaie de démêler le vrai du faux, en distinguant ce qui relève ou non de l'argumentation. Il est bien normal qu'il existe des opinions différentes. Ensuite, le Conseil constitutionnel rendra sa décision. Tous les propos qui tendent à relativiser sa jurisprudence ou à expliquer que les dispositions présentées n'y sont pas conformes me paraissent inquiétants, comme l'a dit le rapporteur général, eu égard à la conception que nous nous faisons de la démocratie et de l'État de droit.

Les sujets que nous traitons sont sérieux ; l'actualité nous rappelle qu'ils doivent être maniés avec précaution. Dès lors que nous débattons entre partis républicains, entre mouvements respectueux de la République et de la démocratie, nous devons faire très attention aux arguments et aux termes que nous employons.

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Je ne suis pas un ultra ; je suis un homme modéré. Au cours de ces vingt-huit années, je ne me suis fâché qu'à cinq ou six reprises, chaque fois à un moment où on s'attaquait aux libertés publiques.

Ce que vous dites à propos de l'Espagne et de l'Allemagne, monsieur le ministre, n'est pas exact. Lorsque vous avez utilisé l'argument selon lequel l'instruction en famille était interdite dans ces deux pays – cela figure également dans l'étude d'impact –, je me suis renseigné, car je l'ignorais. Or ce ne sont pas les constitutions espagnole et allemande que vous évoquez qui ont interdit l'instruction en famille. En Espagne, c'est le régime franquiste qui l'a interdite en 1939, comme le régime hitlérien l'avait fait un peu avant. Et l'on sait bien pourquoi : pour mettre la main sur la jeunesse. Il s'agissait de régimes totalitaires. Vous ne vous rendez même pas compte que vous vous laissez aller de temps en temps à des dérives. Pour notre part, nous sommes des défenseurs des libertés publiques.

À vous entendre, monsieur le rapporteur général, je donnerais du crédit aux théories complotistes. Mais enfin, vous rêvez ! Je n'ai jamais rien dit de tel ! Quant aux restrictions vestimentaires, je les ai moi-même combattues hier ! Avez-vous encore un peu de mémoire ? J'ai toujours défendu les libertés publiques.

Vous ne nous répondez toujours pas, monsieur le ministre. Vous avez cité un exemple en Seine-Saint-Denis – vous n'en avez d'ailleurs pas donné d'autre. Or le problème, c'est le dysfonctionnement de votre ministère. Contrairement à ce que prévoit la loi, vous n'arrivez pas à contrôler de manière exhaustive – vous l'avez reconnu vous-même – la situation des enfants qui reçoivent l'instruction en famille. Si vous nous aviez proposé un article 21 créant un fichier afin de suivre tous ces enfants – ce que l'on n'est pas capable de faire aujourd'hui, puisqu'on ne connaissait pas la moitié des enfants qui fréquentent les écoles coraniques dont il a été question –, je vous aurais soutenu. En revanche, je m'oppose à la substitution d'un régime d'autorisation à l'actuel régime de déclaration.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS806 de M. Xavier Breton et CS845 de Mme Anne-Laure Blin.

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Il s'agit de préciser dans l'amendement que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Il faut que cela soit indiqué très clairement dans le code de l'éducation.

Nous sommes bien d'accord, monsieur le rapporteur général, il n'appartient pas à l'État de déterminer à lui seul ce qu'est l'intérêt supérieur de l'enfant. Cela renvoie au débat que nous avons eu hier soir, en séance publique, sur le projet de loi relatif à la bioéthique : les parents et la société contribuent, eux aussi, au quotidien, à déterminer ce qu'est l'intérêt supérieur de l'enfant.

Vous dites que les parents rempliront un dossier et pourront y indiquer ce qui est bon pour leur enfant. Toutefois, ce dossier sera soumis à l'agrément de l'État. Autrement dit, tout revient à l'État ; c'est toujours l'État qui contrôle. Vous avez une vision collectiviste.

On retrouve d'ailleurs cette vision dans vos tentations liberticides. Dois-je rappeler que le Conseil constitutionnel a censuré la loi Avia, qui portait atteinte à la liberté d'expression ? Que la justice administrative a annulé les limitations que vous aviez apportées aux libertés de réunion et de manifestation ? Dois-je évoquer la décision du Conseil d'État relative à la liberté de culte, que vous aviez également limitée ? Vous avez fait tout cela, et il est heureux que nous ayons des juridictions constitutionnelle et administrative qui préservent encore nos libertés face aux atteintes liberticides du Gouvernement et de sa majorité.

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Compte tenu des discussions que nous avons eues à ce stade, il me paraît plus que nécessaire de préciser dans le texte que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Lorsque je vous entends affirmer, madame Vichnievsky, que les parents ont leur mot à dire, les bras m'en tombent ! Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants, et l'État n'a pas à leur imposer de choix. Il leur revient de faire le choix qui leur semble être le bon pour leurs enfants et la famille. C'est là où notre conception diffère fondamentalement de la vôtre.

Nous partageons votre volonté de lutter contre l'islam radical et le séparatisme, mais les moyens que vous employez ne sont pas les bons pour atteindre vos objectifs – nous vous l'avons dit tout au long de nos discussions. Pis, ces mesures sont des appels d'air !

Monsieur le ministre, nous disposons aujourd'hui des moyens administratifs pour contrôler la totalité des parents qui ont déclaré donner l'instruction en famille. Or ces contrôles ne sont pas faits. Avant d'envisager éventuellement de nouveaux dispositifs, faisons-les ! Assurez-nous qu'ils sont faits et démontrez-nous qu'il existe une proportion de cas problématiques telle qu'il faut restreindre la liberté de l'ensemble des familles.

Nous, Républicains, voulons garantir la liberté d'instruction pour les familles tout en luttant contre les dérives. Mais nous voulons cibler les dérives, non les familles qui assurent l'instruction en famille. C'est là une autre différence fondamentale entre vous et nous. Donnez-nous les chiffres précis qui nous imposeraient d'édicter une nouvelle réglementation pour l'instruction en famille. Malgré les débats que nous avons eus dans l'hémicycle, nous n'avons toujours pas ces éléments.

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De même qu'en première lecture, vous proposez d'ajouter, dans le code de l'éducation, la mention selon laquelle les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants.

L'article L. 111-1 du code de l'éducation, qui figure en tête de ce code, dispose : « L'éducation est la première priorité nationale ». L'article L. 111-2 suivant précise : « Tout enfant a droit à une formation scolaire qui, complétant l'action de sa famille, concourt à son éducation ». Cela montre bien que l'action de la famille est première. Il n'est donc pas nécessaire d'insérer cette mention dans la loi. J'émets donc un avis défavorable aux sous-amendements.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis que la rapporteure.

Ces sous-amendements sont révélateurs de la façon dont vous souhaitez orienter le débat. Vous faites semblant de penser que nous n'aurions pas les mêmes valeurs de départ. Or, comme vient de le rappeler la rapporteure, tant le cadre juridique existant que nos propositions respectent, bien entendu, le rôle éducatif des familles. Celui-ci est fondamental, et il est évidemment reconnu. Si nous nous aventurions à le nier, nos dispositions seraient, pour le coup, censurées.

Vous faites semblant de penser qu'il y a une menace, alors que ce n'est pas le sujet. Le principe que vous défendez est déjà consacré par le droit. D'un point de vue juridique, nous pourrions nous en tenir à cet argument, qui est suffisant. D'un point de vue politique, je l'ai dit, vous cherchez à orienter le débat, alors qu'à aucun moment nous n'avons mené un procès contre les familles ; à aucun moment nous ne les avons ciblées, pour reprendre votre expression qui est destinée à faire peur mais ne reflète pas la réalité.

La réalité, je le répète, c'est que nous voulons conforter les droits de l'enfant, ce qui est d'ailleurs l'intérêt de la société. Je ne comprends pas pourquoi vous mettez tant de passion à défendre le droit en vigueur, qui permet que des enfants, dès l'âge de 3 ans, soient endoctrinés dans des structures clandestines.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Quand bien même trois enfants seulement seraient concernés, madame la députée, trouvez-vous normal que des enfants soient endoctrinés, que cela ne fasse l'objet d'aucun contrôle et que l'on reste impuissant à changer cela ?

Le chiffre est évidemment important. Depuis le début, je fais valoir que le sujet est complexe, et que c'est précisément pour cette raison que nous avons besoin d'évolutions juridiques et pratiques. Le problème n'est pas seulement statistique ; il y a une question de principe : quand bien même peu d'enfants seraient concernés – et c'est plus que cela –, quand bien même un seul enfant le serait, cela justifierait notre mobilisation. Le sort de chaque enfant compte ; c'est le principe en matière éducative. Chaque enfant sur le territoire de la République doit aller à l'école ou avoir une scolarisation ; c'est un droit absolument fondamental, parmi les plus essentiels d'une République.

Vous vous arc-boutez sur la question des chiffres. Nous avons effectivement des difficultés à cerner le nombre d'enfants instruits en famille. Une chose est certaine : les chiffres dont nous disposons montrent l'explosion du phénomène, en France comme ailleurs. Et nous devons regarder ce phénomène de société en face.

Pardonnez-moi de le relever, mais votre argumentation décrédibilise un peu le ton que vous adoptez généralement lorsque vous évoquez le combat contre l'islamisme radical. En fait, vous êtes en faveur du combat contre l'islamisme radical, sauf si… Quand on mène un combat, il faut le faire complètement. Il ne doit pas souffrir d'exceptions liées à des intérêts politiques qui entreraient en contradiction avec les principes que l'on affiche.

Soyons très clairs, l'article 21 tel qu'il est rédigé ne viole en aucun cas les droits de la famille, bien au contraire. Les parents qui pratiquent une instruction en famille conforme aux droits fondamentaux de l'enfant n'auront aucun problème. Si le débat parlementaire consiste à effrayer ces parents, il aura pour seul effet de nous gêner dans un combat que vous dites vouloir mener vous aussi, contre l'enrôlement des enfants dès le plus jeune âge dans des structures clandestines ou des formules prétendument d'instruction en famille qui n'en sont pas en réalité – phénomène que l'on déplore dans notre pays comme dans d'autres.

Nous nous dotons d'outils juridiques, comme nous l'avions fait précédemment avec la loi Gatel. Au passage, les législatures précédentes n'ont strictement rien fait sur ces questions. Vous dites que nous ne cernons pas le problème, mais cela fait des décennies qu'il n'est pas traité. Sur ce point comme sur d'autres, cette majorité a au moins le mérite de le regarder en face et d'essayer de définir un cadre juridique cohérent.

Comme souvent quand on crée un cadre juridique nouveau, on entend ce commentaire un peu facile : c'est nécessaire mais pas suffisant, point sur lequel je vous donne complètement raison. Il faut, d'une part, adopter ces dispositions, d'autre part, assurer un meilleur contrôle. Nous nous organisons pour le faire.

J'ai évoqué dernièrement à plusieurs reprises ce que j'ai appelé le carré régalien, formé par quatre points de contrôle. Dans quatre domaines, nous devons constituer des équipes qui vont sur le terrain, bien plus souvent que cela n'a été le cas dans le passé. Il s'agit d'abord de la laïcité, des principes et des valeurs de la République ; depuis quatre ans, vous le savez, nous avons mis sur pied des équipes pour combattre les violations de ces principes. Il s'agit ensuite des violences en général ; à cet égard, nous déployons un plan contre les bandes et contre la drogue, entre autres. Il s'agit encore du harcèlement et du cyberharcèlement ; l'intervention d'équipes de soutien est, là aussi, nécessaire. Il s'agit enfin de l'instruction en famille, qu'il convient effectivement de mieux contrôler, ce qui suppose des personnes et des équipes dédiées.

Vous avez tout à fait raison de dire que l'action en la matière a été insuffisante. L'éducation nationale a eu de la peine à courir après le phénomène, qui a explosé depuis les années 2000. Quelques moyens humains supplémentaires ont été déployés, mais pas suffisamment. Nous nous organisons en ce moment même pour être capables d'assurer ces contrôles au moment où la loi sera promulguée. Dès la rentrée prochaine, les moyens de contrôle seront augmentés.

Il est tout à fait exact qu'il faut davantage de moyens humains pour contrôler, je vous l'accorde bien volontiers. Mais cet argument ne plaide pas contre l'article 21 ; il va dans le sens de l'accompagnement de l'article 21. S'agissant des principes fondamentaux, je le redis, les droits de la famille sont totalement préservés par l'article 21 tel qu'il est rédigé.

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J'entends ce que disent nos collègues. Je défends depuis longtemps les droits des enfants, notamment dans l'hémicycle, et je tiens à dire que les parents n'ont pas tous les droits sur leurs enfants. En vertu de la Convention internationale des droits de l'enfant, que la France a ratifiée, les États doivent s'assurer que le droit à l'éducation est respecté. Dès lors, ils doivent le faire correctement.

J'ai rencontré des parents qui donnent l'instruction en famille. Ils disent que les contrôles sont compliqués parce qu'ils ne correspondent pas au projet pédagogique qu'ils ont pour l'enfant. Désormais, avec l'article 21, on demandera aux parents de déposer leur projet éducatif. Celui-ci sera construit, réfléchi ; on saura vers quelle pédagogie ils s'orientent. Ainsi, le contrôle des inspecteurs qui se rendront dans les familles portera précisément sur le projet pédagogique et éducatif qui aura été validé ; il ne s'agira pas d'un contrôle lambda.

Il faut le voir non pas comme une régression, mais comme une avancée. Les parents qui font les choses correctement pour le bien de l'enfant continueront à avoir le droit de donner l'instruction en famille. Cessez de faire croire que cette mesure est liberticide ! En première lecture, nous avons abouti à une rédaction mesurée et proportionnée qui convenait à quasiment tout le monde.

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Je n'ai pas dit « à tout le monde ». En tout cas, le soutien allait au-delà de la majorité.

Je vous invite à considérer l'article 21 comme une avancée. On demandera aux parents d'expliquer leur projet pour leur enfant, et on les évaluera par rapport à ce projet, et non en fonction de la vision que peut avoir l'éducation nationale pour ce niveau scolaire. L'État est totalement dans son droit en vérifiant que les enfants reçoivent une éducation, conformément à la Convention internationale de droits de l'enfant.

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L'histoire de la République est indissociable de la progression du droit des enfants à l'éducation. Petit à petit, la République, parfois à la faveur de mouvements révolutionnaires, a rendu l'instruction obligatoire, pour les garçons puis pour les filles, cette obligation s'appliquant désormais de 3 à 16 ans, voire 18 ans. Cela a été un bienfait non seulement pour les enfants, mais aussi pour la nation, car cela a permis le partage de connaissances et de compétences, le développement d'un esprit critique et de débat dans notre pays. L'école de la République est source de démocratie.

Que des familles retirent leurs enfants de cette école, c'est leur droit. Le texte ne met pas en cause ce droit, mais l'État doit jouer son rôle de protection des droits de l'enfant. Celui-ci doit avoir accès à toutes les connaissances, sans qu'elles soient triées au nom de telle ou telle doctrine sectaire ou fondamentaliste. L'État doit protéger le droit des enfants. Je suis favorable au rétablissement de l'article 21, sans qu'on y ajoute aucune dérogation.

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Je suis toujours surpris d'entendre une partie de nos collègues Les Républicains développer une vision aussi idyllique de la famille. Mes chers collègues, je me demande parfois dans quel monde vous vivez ! La famille serait, d'une certaine manière, sacrée, représenterait un modèle de perfection, et il ne faudrait surtout pas y toucher. Pourtant, vous le savez aussi bien que nous, il y a de très nombreux cas dans lesquels des parents, malheureusement, vont à l'encontre de l'intérêt de leurs propres enfants. Et heureusement qu'il y a la République pour se mettre en travers, pour faire respecter les droits et l'intérêt supérieur de l'enfant vis-à-vis de leurs propres parents !

Il ne s'agit pas de remettre en cause un équilibre. Bien évidemment, dans la grande majorité des cas, les parents assurent très bien leur mission d'éducation. Mais, quand tel n'est pas le cas, cette force de la République et de la société est nécessaire pour garantir l'intérêt supérieur de l'enfant.

Selon moi, vous vous laissez parfois un peu trop influencer par cette vision traditionnelle, sinon traditionaliste, de la famille. Il s'agit d'ailleurs d'une certaine forme de famille, alors qu'il existe des milliers de situations différentes.

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Au cours de votre dernière intervention, monsieur le ministre, vous avez davantage abordé les problèmes de fond. Quant aux sous-amendements sympathiques déposés par nos collègues, ils sont déjà satisfaits par le code de l'éducation. Le débat ne porte donc pas sur ce point ; il porte sur les moyens dont nous disposons pour nous assurer que chaque enfant reçoit une éducation, ce qui est pour lui un droit.

Monsieur le ministre, disposez-vous des moyens pour vérifier que tous les enfants résidant en France bénéficient d'une éducation ? Vous l'avez reconnu vous-même, une partie des enfants ne sont pas scolarisés – et il ne s'agit pas d'enfants instruits en famille, car ceux-là, vous les connaissez. Cela tient au fait que l'on n'a pas mis en place les moyens techniques et humains de ce contrôle.

J'ai demandé un jour aux quarante maires de ma communauté de communes s'ils étaient au courant qu'ils devaient, en vertu de la loi, vérifier que tous les enfants de leur commune fréquentaient une école publique ou privée ou étaient instruits en famille. Vous serez peut-être étonné d'apprendre, monsieur le ministre, que seuls trois ou quatre d'entre eux le savaient. Voilà un point qu'il faut traiter.

Le vrai problème, ce n'est pas l'instruction en famille, ce sont vos moyens. Vous l'avez reconnu, vous n'appliquez pas la loi, qui prévoit un contrôle annuel obligatoire consistant à vérifier que les enfants instruits en famille suivent bien les cours et ont atteint le niveau requis, et qu'il n'y a pas de problème particulier. Voilà la grande question. Il est nécessaire de renforcer les moyens, notamment de disposer d'un fichier central. Nous n'avons pas besoin de passer du régime déclaratoire actuel à un régime d'autorisation ; ce n'est pas de cette manière que l'on progressera dans ce domaine.

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Je n'imagine pas, madame Blin, que vous ayez mal compris le sens de ma précédente intervention. Les parents jouent un rôle déterminant dans l'éducation de leurs enfants, qu'ils choisissent l'école ou l'instruction en famille. Mais celle-ci doit répondre à l'intérêt supérieur de l'enfant.

Notre collègue Marie-George Buffet a très bien décrit l'apport de l'école, qu'il s'agisse de l'école républicaine ou de l'école privée, et je n'ai rien à ajouter à ses propos.

La commission rejette les sous-amendements.

La commission est saisie du sous-amendement CS805 de M. Xavier Breton.

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Je reviens sur les sous-amendements précédents, par lesquels nous entendions affirmer que les parents sont les premiers éducateurs. Peut-être l'idée est-elle présente de manière diffuse dans le code de l'éducation, monsieur le ministre, mais on n'en a jamais fait un principe premier.

Lorsque nous avons examiné le projet de loi pour une école dite de la confiance, nous vous avions déjà proposé, à l'article 1er, d'indiquer que les parents sont les premiers éducateurs des enfants. Nous l'avions également proposé à votre prédécesseur lors de la discussion du projet de loi dit de refondation de l'école. À chaque fois, dans la même continuité logique, cela a été refusé. En effet, si l'on affirmait vraiment ce principe, cela aurait un certain nombre de conséquences qui iraient à l'encontre de votre vision de l'éducation.

Je relève les termes que vous avez employés, monsieur le ministre : « quand bien même un seul enfant serait concerné… » Attention à ce mode de raisonnement ! Les restrictions aux libertés doivent être proportionnées. On ne va pas restreindre la liberté de milliers de familles si un seul enfant est concerné ! C'est comme si je vous disais que je continuerai à me battre même s'il n'y a qu'une famille dont on restreint la liberté. Ces raisonnements ne sont pas de l'ordre du législateur ; ils relèvent peut-être de l'émotion, mais pas de l'argumentation rationnelle. Lorsqu'on est amené à restreindre les libertés, on doit le faire de manière proportionnée.

Par le sous-amendement CS805, nous vous proposons d'inscrire dans le code de l'éducation : « Les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leur enfant. Si l'instruction obligatoire est assurée prioritairement dans les établissements d'enseignement, elle l'est toujours dans le respect du principe de subsidiarité et le respect du choix éducatif des familles. »

À cet égard, je réagis aux propos de notre collègue Pacôme Rupin, selon lequel nous aurions une vision idéologique de la famille. Dans notre conception, qui se distingue de la vôtre, les parents savent ce qui est bon pour leur enfant ; nous considérons que, par principe, les familles savent ce qu'elles ont à faire. Il arrive effectivement qu'elles soient défaillantes et, dans ce cas, le rôle de l'État est d'intervenir, c'est même son devoir. Mais l'État doit intervenir de manière subsidiaire, non dans une logique de coéducation, car il y aurait alors une confusion des rôles, ni a fortiori dans la logique à laquelle obéit ce texte, qui place l'État au-dessus des familles.

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Vous proposez d'indiquer dans le code de l'éducation que les parents ont le droit de choisir l'éducation donnée à leur enfant. Or, bien évidemment, les parents ont déjà le droit de choisir le mode d'instruction de leurs enfants. En France, la liberté de l'enseignement est une liberté de choix, entre l'école publique, l'école privée sous contrat, l'école privée hors contrat ou l'instruction en famille. Le choix est tout de même relativement large, surtout lorsque l'on considère la diversité des écoles privées, notamment sous contrat et hors contrat, et la diversité de leurs méthodes pédagogiques.

Le choix de l'instruction en famille, je vous l'ai dit, n'a pas été reconnu à ce jour comme une composante de la liberté de l'enseignement. Il devra être motivé, afin que l'on puisse vérifier que le droit de l'enfant à l'instruction est bien respecté. Quant au principe de subsidiarité, il ne s'applique pas en la matière. Mon avis est donc défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Il n'y a pas plus sourd que celui qui ne veut pas entendre ! Entendez ce que nous vous disons : nous partageons votre objectif, mais nous faisons valoir que vous n'êtes pas obligés de sacrifier la liberté des familles. Il y a bien sûr des familles défaillantes, mais nous ne partageons pas cette vision selon laquelle il faudrait sacrifier la totalité des familles sur l'autel de l'intervention contre quelques familles déviantes !

Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants et, par principe, nous devons leur faire confiance, car ils connaissent les besoins éducatifs de leurs enfants et savent ce qui concourt à leur bien-être. Nous voulons, nous aussi, contrôler et sanctionner ceux qui ne respectent pas les règles, mais ce que vous dites est dangereux, monsieur le ministre : on ne peut pas, au nom de la défaillance d'une seule famille, sacrifier les 59 999 autres familles concernées ! Ce serait dramatique ! Les mesures prises doivent être proportionnées, ce que rappellent souvent les juges dans leurs décisions.

Je soulève une fois de plus la question : vous ne nous donnez pas l'ensemble des éléments de nature à garantir que les objectifs que vous visez seront atteints grâce aux nouveaux dispositifs que vous proposez.

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Je souhaite exprimer la position du groupe Socialistes et apparentés. Nous considérons que ces dispositions ne répondent pas à l'objectif assigné au projet de loi, à savoir lutter contre l'islamisme radical. Nous n'avons pas besoin de ce texte pour nous organiser et rendre les contrôles effectifs.

En réalité, il y a une multitude de textes, mais ils ne sont pas appliqués. Le pouvoir réglementaire n'exerce pas le contrôle qu'il devrait assurer. Je ne vous incrimine pas, monsieur le ministre, cela remonte à plusieurs années. En tout cas, il faut bien admettre que les collectivités locales et les services académiques sont dans l'impossibilité de repérer les enfants non scolarisés. Or là est la priorité des priorités, compte tenu de l'objectif que vous cherchez à atteindre.

L'instruction en famille est un espace de liberté qui peut répondre à l'intérêt supérieur de l'enfant. Nous souhaitons que l'on ne stigmatise pas les parents qui y ont recours et que le dispositif prévu soit assoupli au maximum.

En outre, il est essentiel d'affirmer que les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants, puisque nous luttons en permanence pour que la parentalité s'exerce. Lorsque ce n'est pas le cas, cela cause des dégâts majeurs ; il convient de les éviter. Profitons de l'examen de ce texte pour rappeler que le parent est un enjeu très fort du point de vue de l'intérêt supérieur de l'enfant ; je pense que nous sommes tous d'accord sur ce point.

À mon avis, le seul mérite de ce chapitre du texte, c'est de prévoir enfin l'attribution d'un identifiant national à chaque enfant. De la sorte, aucun enfant ne sortira des radars de l'école. C'était une priorité, et je regrette que nous ayons dû attendre la discussion de ce texte relatif au respect des principes républicains pour prendre une telle décision.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS807 de M. Xavier Breton et CS849 de Mme Anne‑Laure Blin.

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Il a été fait état tout à l'heure d'une quasi-unanimité en faveur de ce dispositif ou du soutien que lui apporterait une très large majorité. Or plus de cinquante amendements de suppression avaient été déposés en première lecture, et le Sénat s'est prononcé contre ces dispositions. Nous sommes donc loin de la grande majorité ! Ce texte suscite de vraies oppositions, qui s'expriment également à travers le sous-amendement CS807.

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Le rapporteur général a accusé notre collègue Charles de Courson d'alimenter l'antiparlementarisme. Tout l'enjeu de la présente discussion est de vous expliquer, en notre qualité de législateurs, que nous n'avons pas besoin de nouvelles dispositions législatives en la matière – notre collègue Cécile Untermaier a raison. Il n'est pas nécessaire que le législateur s'en mêle. Nous devrions, au contraire, prendre acte du fait que nous avons tous les dispositifs nécessaires pour effectuer les contrôles requis. En revanche, il appartient aux législateurs que nous sommes d'exercer leurs responsabilités en demandant au Gouvernement de faire en sorte que le droit qu'ils ont eux-mêmes adopté soit dûment appliqué. Rien dans nos propos ne relève de l'antiparlementarisme.

En application de la fameuse règle de l'entonnoir, nous ne pouvons pas, en nouvelle lecture, mettre en débat de nouvelles propositions, comme nous l'avions fait en première lecture. Néanmoins, monsieur le ministre, nous pouvons discuter des mesures que vous envisagez dans le domaine de l'éducation au sens large. Vous ciblez l'instruction en famille comme s'il s'agissait du remède à tous les maux. Or elle ne concerne que 60 000 familles, la plupart des enfants étant scolarisés à l'école publique. C'est aussi de là que viennent nos désaccords. Quels dispositifs prévoyez-vous, au sein même de l'école publique, pour lutter contre le séparatisme et l'islam radical ? Il y a eu un certain nombre d'attaques contre les valeurs de la République ; c'est contre cela que, pour notre part, nous voulons lutter.

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Nous avons déjà discuté, en première lecture, des mesures prises à l'école publique. Je vous rappelle que nous avons longuement débattu d'un projet de loi intitulé « pour une école de la confiance », qui portait presque exclusivement sur l'école publique, et que nous l'avons adopté. Il ne faudrait pas penser que le présent texte est le seul qui ait été consacré à l'éducation au cours de la législature. Cela fait plusieurs années que nous en parlons, et nous avons nettement progressé.

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Ça a tellement bien fonctionné qu'il faut une nouvelle loi !

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Vous passez votre temps à dire qu'il n'y a pas de chiffres, mais vous en avez cité vous-même. Des chiffres figurent d'ailleurs dans l'étude d'impact. Au demeurant, chaque fois que nous vous en communiquons, vous les contestez.

Vous indiquez à juste titre qu'en France, l'école est la règle, et l'instruction en famille, l'exception. C'est effectivement ce que montrent les chiffres. Mais vous direz peut-être le contraire plus tard…

J'émets un avis défavorable sur les sous-amendements.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Vous dénigrez nos thèses et nos arguments juridiques. Vous taxez certains d'entre nous d'être des conservateurs, des réactionnaires ou des idéologues en ce qui concerne la famille. Cette attitude n'est pas à la hauteur de nos débats. Cela vous conforte peut-être dans vos convictions, mais cela n'a aucune force : tout ce qui est excessif est insignifiant.

La motivation essentielle de ce texte, c'est de lutter contre la menace que représente l'islam politique radical et séparatiste. Or il n'est absolument pas démontré que cette menace existe dans le cadre de l'instruction en famille. Les chiffres que vous nous donnez suggèrent même que le phénomène est totalement accessoire. C'est donc un écran de fumée ! On s'attaque à une liberté fondamentale, sans régler le problème.

Selon le rapporteur général, c'est nous qui serions liberticides, puisque nous voulons une police du vêtement. Pourtant, ne croyez-vous pas que nous ferions mieux d'interdire le voile pour les fillettes ? Ne croyez-vous pas que l'on devrait interdire le port de signes ostentatoires par les accompagnants lors des sorties scolaires et par les usagers du service public ? Il y a là de véritables risques séparatistes et l'expression d'un islam politique revendiqué. Vous ne voulez même pas interdire les emblèmes religieux sur les documents de propagande électorale, qui ont pourtant un caractère officiel.

L'instruction en famille, c'est un faux sujet. Il est dommage d'y consacrer autant de temps et de gêner ainsi autant de familles.

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Monsieur Breton, il y a eu effectivement plus de cinquante amendements de suppression déposés, mais quasiment tous par le même groupe.

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D'autres partis que ceux de la majorité sont d'accord avec ces dispositions. Par exemple, Mme Buffet, ici présente, défend comme moi les droits de l'enfant.

Sur le fond, nos points de vue divergent fortement. Selon vous, le parent est tout-puissant sur son enfant. Selon nous, l'enfant doit être considéré comme un être à part entière, qui n'est pas forcément dépendant de ses parents. On doit donc s'assurer qu'il reçoit une éducation, conformément au principe figurant dans la Convention internationale des droits de l'enfant, que la France a ratifiée.

Selon vous, les parents savent mieux ce qui est bon pour leurs enfants. Pourtant, en dix ans, le nombre de mesures éducatives a augmenté de 15 % ; elles concernent désormais plus de 300 000 enfants, dont les parents sont défaillants. Il importe donc que l'État exerce son contrôle pour s'assurer que le projet éducatif correspond bien aux besoins de l'enfant.

Vous dites que nous allons interdire ou, à tout le moins, restreindre l'instruction en famille. Or, parmi les quatre motifs pour lesquels l'autorisation est accordée, figure le projet éducatif de l'enfant. Si les parents arrivent à montrer qu'ils ont un projet éducatif, l'instruction en famille ne sera pas interdite. Cessez de dire que nous l'interdisons, ce n'est pas vrai ! Elle sera certes plus encadrée, mais dans le respect des principes de la République, conformément au titre même du projet de loi, qui vise, d'une part, à conforter le respect des principes de la République, d'autre part, à lutter contre le séparatisme – bien sûr, vous cherchez constamment à ramener le texte à ce second volet.

La commission rejette les sous-amendements.

La commission est saisie du sous-amendement CS808 de M. Xavier Breton.

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L'enseignement doit être autorisé par correspondance auprès d'établissements agréés.

Selon la rapporteure, l'école est la règle et l'instruction en famille l'exception. D'un point de vue statistique, c'est exact, ce qui montre d'ailleurs à quel point les familles savent que l'école est une chance pour les enfants et qu'il est inutile de les contraindre pour qu'elles les y inscrivent. D'un point de vue juridique, en revanche, une inscription dans la loi reviendrait à instaurer une forme de défiance vis-à-vis des familles et à attenter à la liberté de l'enseignement puisque l'État choisirait à la place de ces dernières.

Nous sommes néanmoins d'accord pour qu'un contrôle s'exerce. Les situations anormales sont minoritaires mais elles existent et ont d'ailleurs tendance à se développer – il faudrait se demander pourquoi.

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L'école est en effet la règle. L'instruction en famille sera possible sur dérogation motivée par l'intérêt supérieur de l'enfant et les parents sont libres de la choisir : ils feront une demande d'autorisation à partir de leur projet éducatif, des besoins de l'enfant, et pourront soit poursuivre l'IEF, soit s'y engager. Un avis défavorable sera bien évidemment motivé, un recours sera possible et, le cas échéant, une rescolarisation.

Avis défavorable au sous-amendement, qui ne porte pas, d'ailleurs, sur ce sujet.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Le cinquième alinéa de l'amendement CS456 distingue bien deux catégories : d'une part, l'école publique, l'école privée sous contrat, l'école privée hors‑contrat ; d'autre part, l'IEF puisque que l'instruction peut également, « par dérogation », être dispensée dans la famille par les parents. Les quatre façons d'instruire les enfants ne sont donc pas mises sur un pied d'égalité et les libertés sont restreintes, ce qui n'est pas acceptable. C'est d'ailleurs sur ce plan-là que le Conseil constitutionnel se prononcera.

L'IEF se développe de plus en plus, et pas seulement en France. Pourquoi ? Peut-être parce que l'enseignement public, voire privé, ne répond plus suffisamment aux besoins des familles. Voilà la question fondamentale !

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Enseigner, c'est un métier et il s'apprend. La pédagogie n'est pas innée, tous les parents ne sont pas spontanément des enseignants. Pourquoi cherchez-vous donc à mettre à égalité l'enseignement public ou privé, avec des professeurs qualifiés, et l'IEF, avec des parents non formés ?

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Ce débat n'a pas grand-chose à voir avec le sous-amendement. Sans doute serait-il opportun de ne pas ressasser les mêmes argumentaires… Je vous ai, par exemple, répondu s'agissant des moyens de contrôle de l'éducation nationale et vous faites comme si je n'avais rien dit !

Toutefois, nous avançons puisque vous considérez désormais qu'il importe de contrôler la qualité de l'IEF. Il faut donc distinguer ce qui relève du droit et ce qui relève de l'action administrative laquelle, je suis le premier à le dire, doit être améliorée. Il n'en reste pas moins que, pour ce faire, l'évolution du droit est nécessaire.

M. Breton a raison, on constate une tendance sociétale globale à l'individualisme mais le confinement a considérablement relégitimé l'école : l' affectio societatis pour elle, dans notre pays, s'est accentuée.

Les dérives, le repli sur soi peuvent certes aller à l'encontre de l'intérêt de l'enfant mais l'IEF peut aussi être correctement menée et cette loi préservera l'intérêt des familles qui ont opté pour celle-ci. Le texte a d'ailleurs évolué, précisément pour éviter de pénaliser ces dernières. Les dispositions que nous avons ajoutées permettent même une forme d'automaticité des autorisations après un contrôle favorable.

J'ajoute que l'article 21 renforce le contrôle, notamment, au niveau départemental. Les angles morts évoqués par M. de Courson justifient ces avancées.

Enfin, d'un point de vue philosophique et sociologique, l'institution scolaire, qu'elle soit publique ou privée, demeure fondamentale, notamment afin de sociabiliser les enfants. L'IEF tend d'ailleurs souvent à associer les parents entre eux et, ainsi, à réinventer l'école. Contrairement à certaines thèses anarchistes post-soixante-huitardes d'Ivan Illich, je ne crois pas au déclin de cette dernière : plus notre société se technicise et devient individualiste et communautariste, plus l'antidote scolaire est nécessaire.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS832 de M. Grégory Labille.

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Le régime d'autorisation restreint les libertés. Même si l'autorité statuera à partir des éléments qui lui seront communiqués, son avis sera nuancé selon son expérience de l'instruction en famille et son attachement à l'école publique. De plus, ce régime ne règlera pas le problème des enfants non instruits ou hors-radar.

On ne demande pas aux familles choisissant l'école publique ou privée, sous contrat ou non, de motiver leur choix. Pourquoi donc le faire pour celles qui optent pour l'IEF ? Doutons-nous d'elles ? Sommes-nous certains que les établissements publics ou privés ne sont jamais défaillants, qu'ils sont toujours irréprochables ? Le directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN) acceptera-t-il l'IEF pour un enfant en difficulté à l'école ? En tant qu'ancien enseignant et ancien maire, je sais que des parents n'ont pourtant parfois pas d'autre choix.

Je propose donc d'en revenir au principe de la déclaration au maire ou à l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Il est plutôt malvenu de se référer à la crise sanitaire que nous venons de vivre. Après les annonces du Président de la République, les parents ont dû, du jour au lendemain, mener de front – « en même temps » – l'instruction de leurs enfants et la poursuite de leurs activités professionnelles. Vous ne pouvez pas en tirer argument pour le nécessaire retour à l'école. Les familles pratiquant l'IEF ont, elles aussi, été confrontées à des difficultés !

Par ailleurs, la sociabilisation est également une réalité au sein de ces familles. Pensez-vous qu'elles restent entre elles et que seule l'école développerait les interactions ? C'est faux ! Ces enfants sont parfois bien plus épanouis que les autres tant il est vrai que, parfois, l'école remédie mal aux situations de harcèlement. Arrêtez de vous voiler la face ! Entendez notre souhait de défendre les libertés !

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Nos collègues ont tendance à ne voir qu'un versant de l'IEF. Tout à l'heure, ils niaient l'existence de l'extrémisme islamiste ; nieront-ils maintenant la possibilité de dérives sectaires ? Je préfère le contrôle a priori plutôt qu' a posteriori, car plus vite on interviendra, mieux ce sera dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Je n'accepte pas leur refus de voir le risque que l'instruction en famille puisse être instrumentalisée dans un but répréhensible, alors que je suis favorable à l'IEF lorsqu'elle se déroule correctement – je n'ai moi-même été scolarisée qu'à l'âge de 5 ans pour des raisons médicales mais je gage que mes parents auraient accepté un contrôle a priori.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS820 de M. Xavier Breton.

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Pensez-vous que les familles animées par des intentions sectaires les feront valoir dans leur demande d'autorisation ? Le contrôle se fera a posteriori !

Selon Mme la rapporteure, les parents seront libres. Non ! Il y aura dérogation – nous proposons d'en supprimer la mention – et autorisation. Assumez donc la restriction des libertés ! Argumentez rationnellement au lieu de faire valoir la lutte contre l'islamisme radical, laquelle passe plus par l'effectivité des contrôles, comme la lutte contre les dérives sectaires d'ailleurs, que par le remplissage de dossiers par des familles hors de soupçon. Le texte doit affirmer la liberté a priori et l'intransigeance face aux dérives, pas l'inverse.

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Nous assumons de faire de la scolarisation la règle et de l'IEF l'exception motivée par les besoins des enfants – ce qu'elle est d'ailleurs dans les faits.

Je note combien votre vision de l'IEF est limitée. Je ne porte pas de jugement sur les parents qui choisissent cette option mais nous savons combien il importe de distinguer les différentes situations. Sur un certain plan, vous êtes dans un déni total.

Avis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Arrêtez de laisser croire que les familles qui pratiquent correctement l'IEF seraient menacées d'une manière ou d'une autre par cette loi ! Arrêtez de faire croire que ceux qui sont visés n'existent pas ! Ce sont là vos deux péchés capitaux. Les familles qui pratiquent correctement l'IEF n'auront aucun problème pour faire une démarche préalable ! Nous savons, par ailleurs, que l'islamisme radical s'est engouffré dans les possibilités offertes par ce mode d'éducation. Libre à vous de faire comme si vous ne le voyiez pas mais, à l'avenir, ne vous en offusquez pas !

Si vous êtes vraiment aux côtés des familles qui pratiquent correctement l'IEF, rassurez-les avec nous et dites-leur donc qu'elles ne sont pas concernées par ces enjeux. Si vous êtes animés par une volonté politique visant à faire peur afin d'en tirer quelques avantages, continuez ainsi ! Nous servons, quant à nous, l'intérêt général, sans clientélisme aucun.

Cette loi protège l'IEF, qui n'a d'ailleurs jamais fait jusqu'à présent l'objet d'une jurisprudence constitutionnelle. Suite aux recours qui auront lieu, nous bénéficierons d'un cadre juridique général et je serai heureux d'en débattre avec vous le moment venu. Je suis très confiant, car nous avons entendu le Conseil d'État et les parlementaires.

Notre but politique, social et sociétal est clair : l'IEF correctement pratiquée n'a rien à craindre de ce texte, à la différence de ceux qui en profitent à des fins séparatistes, et c'est tant mieux.

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Je voterai en faveur de ce sous-amendement car, je le répète, vous distinguez bien deux catégories d'instruction.

Il est, par ailleurs, assez amusant de noter qu'une bonne partie des parents en IEF recourt au Centre national d'enseignement à distance (CNED) ! Cela n'a donc aucun sens d'opposer l'IEF aux trois autres formes d'instruction.

L'argument de l'exception n'en a aucun non plus : pourquoi l'IEF en est une et pas l'enseignement privé hors contrat ? Pourquoi ne pas appliquer à celui-ci les règles de celle-là ? La seule position cohérente consiste à mettre sur un pied d'égalité les quatre formes d'instruction et à les contrôler – le ministre reconnaît d'ailleurs lui-même que le ministère n'a jamais fait son boulot en la matière. Les taux de contrôle sont en effet très variables selon les académies et les départements ; or c'est vous, monsieur le ministre, qui êtes le patron ! Sans doute disposez-vous des statistiques mais vous vous gardez bien de nous en faire part parce qu'elles sont explosives ! Le contrôle a priori n'aura aucune utilité, le seul contrôle efficace étant a posteriori.

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Nous ne nous voilons pas la face ! Nous ne sommes simplement pas d'accord et nous ne partageons pas la même analyse. Arrêtez donc de caricaturer nos propos ! Nous ne stigmatisons pas toutes les familles en IEF ! Un droit de recours est prévu auprès d'une cellule rectorale ad hoc, de même que la possibilité d'accorder certaines autorisations pluriannuelles ! Nous savons fort bien que l'IEF s'impose parfois !

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS841 de M. Julien Ravier.

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Il convient de préserver la liberté constitutionnelle d'instruction en maintenant un système de déclaration en lieu et place du système d'interdiction-dérogation. J'entends déjà l'avis défavorable de Mme la rapporteure, sans autre explication. Je vais donc vous en donner.

Selon le rapport de pré-avis de la conseillère d'État Catherine Bergeal, « Il n'est pas établi, en particulier, que les motifs des parents relèveraient d'une manière significative d'une volonté de « séparatisme social » ou d'une contestation des valeurs de la République. Dans ces conditions, le passage d'un régime de liberté encadrée et contrôlée à un régime d'interdiction ne paraît pas suffisamment justifié et proportionné. Le Conseil d'État, par suite, écarte du projet les dispositions relatives à l'instruction au sein de la famille. »

La constitutionnalité de l'article 21 fait donc l'objet d'une controverse au sein du Conseil d'État. Vous prétendez que vous seriez parvenus à une entente en travaillant sur les conditions de l'autorisation et qu'il y aurait consensus. Or soixante-quatre amendements de suppression, et pas uniquement de la part des Républicains, ces conservateurs réactionnaires, ont été déposés : un Agir ensemble, deux Mouvement démocrate et démocrates apparentés, deux Gauche démocrate et républicaine, cinq La République en Marche, trente-six Les Républicains, trois Libertés et Territoires, un Socialistes et apparentés, cinq UDI et Indépendants, neuf non-inscrits ! Et je ne parle pas du Sénat. Sans doute faudrait-il revoir votre façon de penser.

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Je suis un peu gênée, car vous vous référez au texte tel qu'il était avant même l'avis du Conseil d'État ! J'ai bien compris que vous êtes opposé au système d'autorisation préalable, mais fondez au moins vos arguments sur le bon texte ! Avis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

C'est comme si je n'avais déjà rien dit ! Le rapport Bergeal visait à alerter sur une éventuelle interdiction absolue de l'IEF et, donc, une possible inconstitutionnalité. La rédaction ici proposée en tient compte et, d'une certaine façon, conforte votre souhait, car nous sommes parvenus à un équilibre.

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Seules les familles radicalisées craindraient ce texte, dites-vous. Vivons-nous dans le même pays ? Pourquoi les contrôles ne sont-ils donc pas effectués ? Croyez-vous vraiment que, demain, on y procédera au sein des familles les plus radicalisées alors qu'on ne va pas les chercher aujourd'hui par manque de volonté politique ? Je gage que, si ce texte est voté, la situation ne changera pas.

La commission rejette le sous-amendement.

La réunion est suspendue de onze heures à onze heures cinq.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS809 de M. Xavier Breton et CS850 de Mme Anne-Laure Blin.

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Il s'agit de supprimer les alinéas 12 à 14.

J'ai l'impression, monsieur le ministre, que vous ne faites aucune différence entre un régime de déclaration et un régime d'autorisation. Or, dans le second, la famille candidate à l'IEF doit lever le doigt, un peu comme si on devait demander l'autoriser de circuler. La logique sera donc bien différente.

Vous dites que ceux qui n'ont rien à se reprocher n'ont rien à craindre, mais c'est là l'esquisse d'une dérive totalitaire, celle qui pourrait conduire à placer des caméras au domicile des gens en faisant valoir le même argument. Peut-être est-ce la logique du pouvoir macronien ? Ce n'est en tout cas pas la nôtre.

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Nous ne sommes pas obligés d'inverser le rapport de confiance et de montrer d'emblée de la méfiance à l'endroit des familles. Nous devons, au contraire, leur garantir la confiance tout en ne fermant pas les yeux sur des dérives, contre lesquelles la volonté politique suffit.

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M. Breton rappelle l'arrêt non publié du 19 juillet 2017 du Conseil d'État énonçant que la liberté d'enseignement inclut la possibilité de l'IEF. Pourquoi l'enseignement privé hors contrat ne fait-il pas l'objet du même dispositif ? Pourquoi cette distinction ? Les dérives sectaires y ont cours également, tout le monde le sait.

La commission rejette les sous-amendements.

La commission est saisie du sous-amendement CS814 de M. Xavier Breton.

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Il importe d'en rester à un régime de déclaration et de le renforcer. Nous en sommes tous d'accord, il faut lutter contre les dérives mais il faut cibler les contrôles de manière à ce qu'ils soient efficaces.

Soit on opte pour un système de suspicion a priori, et on demande un dossier soumis à l'appréciation de l'État, soit on accorde la confiance a priori mais, sachant qu'il peut y avoir des dérives, on se donne les moyens d'opérer des contrôles. Nous proposons l'instauration d'une déclaration renforcée, avec des critères précis, afin que les contrôles, ciblés, aient lieu sur un fondement objectif, dans une logique de confiance et non pas de suspicion.

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Outre que le formulaire-type de déclaration préalable ne relève pas du domaine législatif, nous sommes favorables à un régime d'autorisation préalable.

Avis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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J'ai également proposé un système de déclaration renforcée en première lecture, car c'est le meilleur moyen de lutter contre les risques séparatistes. L'académie peut identifier les déclarations farfelues et déclencher un contrôle a priori. En revanche, votre système d'autorisation avec acceptation tacite multipliera les trous dans la raquette.

Je sais très bien que le rapport Bergeal visait la première rédaction du texte où, conformément aux directives du Président de la République, vous interdisiez totalement l'IEF, ce qui était une erreur fondamentale. Reste qu'il y est bien écrit que nous sommes aujourd'hui dans un régime de liberté encadrée et contrôlée, et qu'un régime d'interdiction ne serait pas suffisant. Or votre système d'autorisation conditionnée fait de l'interdiction la règle.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS846 de Mme Anne-Laure Blin.

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On peut maintenir la liberté d'accéder à l'instruction en famille, à laquelle nous sommes attachés, tout en luttant contre les dérives et la volonté de passer sous le radar grâce à un régime de déclaration renforcé qui permettra à l'administration d'examiner les demandes.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette le sous-amendement.

La commission est ensuite saisie des sous-amendements identiques CS810 de M. Xavier Breton et CS847 de Mme Anne-Laure Blin.

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Dans la logique de déclaration renforcée que nous préconisons pour maintenir la confiance envers les familles et améliorer l'efficacité des contrôles, nous proposons le recours à un formulaire-type faisant apparaître les motifs du choix et l'organisation de la famille.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les sous-amendements.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS848 de Mme Anne-Laure Blin et CS811 de M. Xavier Breton.

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Il s'agit, par ce sous-amendement ainsi que les suivants, CS812 et CS813, d'intégrer dans le formulaire-type que nous demandons un rappel des objectifs de l'instruction, qui sont de parvenir à la maîtrise du socle commun et d'assurer tous les enseignements ; des informations sur la participation aux activités extrascolaires car, contrairement à ce qu'a indiqué M. le ministre, ceux qui pratiquent l'instruction en famille sont très ouverts à la société – ce n'est pas une logique d'individualisme et de repli sur soi, mais un choix pédagogique, les enfants participent à des associations ; un dossier pédagogique.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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La question est-elle réellement documentée ? Nous proposons une déclaration renforcée, reposant sur un formulaire-type qui permettrait de connaître l'objectif des parents. Savez-vous pourquoi le recours à l'instruction en famille augmente ? Y a-t-il un lien avec des risques de séparatisme ? Nous n'avons aucun chiffre : vous ne nous dites rien.

Ce qu'on constate dans le cadre des auditions, c'est plutôt que beaucoup de parents d'enfants présentant des troubles dys et du spectre autistique et d'enfants précoces, dépistés de façon croissante, sont conduits à se tourner vers l'IEF, car il n'y a pas suffisamment d'accompagnants des élèves en situation de handicap et d'auxiliaires de vie scolaire dans le système scolaire. Ce n'est pas lié à l'islam radical. Il y a aussi l'augmentation des phobies scolaires et du harcèlement à l'école, notamment à cause de l'absence d'autorité des maîtres sur les élèves. À cela s'ajoute la question des techniques d'apprentissage adaptées à l'enfant que l'on ne trouve pas dans l'éducation nationale. Donnez-nous des chiffres et expliquez-nous !

La commission rejette successivement les sous-amendements.

Suivant l'avis de la rapporteure, elle rejette successivement les sous-amendements CS812 et CS813 de M. Xavier Breton.

Puis la commission est saisie du sous-amendement CS822 de M. Xavier Breton.

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Nous demandons que le maire soit informé lorsqu'une autorisation d'instruction en famille est délivrée dans la commune. Cela permettrait d'améliorer le contrôle de proximité, en plus de celui des services de l'éducation nationale.

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Votre amendement est totalement satisfait par le projet de loi.

Demande de retrait, sinon avis défavorable.

L'amendement est retiré.

La commission est saisie du sous-amendement CS842 de M. Julien Ravier.

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Je propose de réécrire la quatrième condition qui permettra d'obtenir une autorisation dans le régime d'interdiction que vous allez instaurer, en ne mentionnant pas seulement l'intérêt de l'enfant, mais aussi le choix d'un projet éducatif par les parents. L'autorité parentale a un sens dans le code civil. La liberté de choix des parents quant à l'instruction de leurs enfants doit continuer à exister.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS843 de M. Julien Ravier.

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Il s'agit cette fois d'ajouter une cinquième condition, qui serait le choix d'un projet éducatif. Je ne vois pas pour quels motifs on priverait les parents de la liberté d'instruire leurs enfants en famille.

Cet amendement respecte votre choix d'un régime d'autorisation, même si nous avons expliqué notre hostilité à l'égard de ce dispositif qui n'aura pas d'impact réel. Nous vous demandons, s'agissant des conditions permettant d'accéder à l'IEF, de respecter la liberté des parents.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS824 de M. Raphaël Gérard.

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J'ai redéposé ce sous-amendement d'appel, attendant toujours une réponse depuis la première lecture. Je l'ai fait la mort dans l'âme, car il demande exactement le contraire de ce qui serait souhaitable, en matière d'école inclusive, pour les enfants transgenres.

Depuis la première lecture, nous avons eu droit à des déclarations dans des émissions de grande écoute à la télévision et, il y a encore quelques jours, à des unes putassières dans la presse nationale, dont les arguments franchement limites sont repris dans les murs de cette maison. Du côté de l'éducation nationale, rien. On nous avait promis une circulaire, le 15 avril, pour clarifier la manière dont l'institution scolaire allait accueillir ces enfants et leur donner une chance de réussir dans l'école de la République, mais cette circulaire n'est pas sortie.

La direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) nous a dit, lors d'une audition du groupe d'études contre les discriminations LGBTQ, que la circulaire serait publiée lors de la journée symbolique du 17 mai, mais nous ne voyons toujours rien venir. Dans le même temps, des associations ouvertement transphobes disent avoir l'oreille du ministère de l'éducation nationale. Où en est, monsieur le ministre, l'école inclusive pour les enfants transgenres ?

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Merci pour votre persévérance sur ce sujet complexe et délicat. Je partage l'appel que vous lancez.

Vous savez néanmoins que l'éducation nationale travaille sur cette question : des formations sont réalisées afin qu'elle soit mieux connue. L'école doit évidemment progresser, comme toute notre société, afin de mieux comprendre et de mieux prendre en compte les difficultés rencontrées par un enfant ou un jeune qui se découvre misgenré. Il faut que l'école soit à l'écoute et elle doit redoubler d'attention pour aider cet enfant ou ce jeune – et je ne parle pas de son rôle très délicat entre lui et les parents.

C'est un sujet très délicat, je le redis. On comprend que progresser puisse prendre du temps, même s'il y a une urgence pour certains enfants et certains jeunes.

L'identité de genre ne doit pas être un motif automatique d'instruction en famille – vous avez d'ailleurs souligné que c'est un sous-amendement d'appel. Nous prônons une école inclusive dans laquelle le vécu de l'enfant doit être pris en considération, et nous avançons en ce qui concerne les cas où les dysphories de genre entraînent une scolarité difficile voire du harcèlement.

Je vous remercie pour votre sous-amendement, même si je vous demande de le retirer. Je sais que l'éducation nationale, les professeurs, les principaux et les proviseurs, sont attentifs à ce sujet, sur lequel nous allons progresser.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Par définition, chaque enfant est chez lui dans l'école de la République. J'entends que vous avez déposé un sous-amendement d'appel, mais il faut faire attention au risque pointé par la rapporteure, c'est-à-dire l'idée qu'un élève transgenre bénéficierait automatiquement de l'instruction en famille : ce serait complètement contre-productif, et je ne suis pas certain qu'une telle question soit opportune dans le cadre de ce débat.

Par ailleurs, je ne peux pas laisser dire qu'il y aurait une sorte d'inertie de l'éducation nationale en la matière. Beaucoup a été fait dans le domaine de la lutte contre les LGBTphobies. Nous y sommes très attentifs au titre de la lutte contre les différentes discriminations qui peuvent exister au sein de l'école de la République. Ce n'est pas le moment de dresser un bilan et des perspectives d'ensemble sur ce sujet.

La circulaire à laquelle vous avez fait référence doit bel et bien sortir, simplement c'est un sujet très complexe qui mérite beaucoup de travail. Il est fait en lien avec les associations et en prenant en compte les différents points de vue, qui ne sont pas univoques sur cette question. Si on veut réellement être au service de chaque élève, il faut affiner les propositions. L'objectif est que la circulaire soit prête pour la prochaine rentrée scolaire.

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Je vous remercie pour cette réponse. Je ne manquerai pas de revenir vers vous à la rentrée pour savoir ce qu'il en est.

Vous avez parlé du monde associatif : des associations de parents ont eu beaucoup de mal à être entendues par vos services, même si cela a finalement été possible, ce dont je me réjouis.

Je vais retirer le sous-amendement, car il ne correspond pas du tout, en réalité, à ce que nous souhaitons. Nous avons besoin non seulement d'engagements, mais aussi d'actes concrets pour ces enfants, au quotidien. Il y a encore trop de suicides parmi les élèves trans de l'éducation nationale.

Le sous-amendement est retiré.

La commission est saisie des sous-amendements CS833 et CS835 de M. Grégory Labille.

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Nous proposons de compléter les motifs prévus, d'une manière qui facilitera la tâche de l'administration, déjà bien occupée.

Lorsque l'éducation de l'enfant est déjà dispensée en famille depuis un an, que le contrôle pédagogique a conclu qu'elle était conforme aux valeurs de la République et que l'enfant souhaite continuer à bénéficier de ce type d'instruction, la reconduction sera automatique. C'est l'objet du sous-amendement CS833.

Le sous-amendement CS835 prévoit que l'instruction en famille sera également possible à la demande, motivée, de l'enfant, une vérification de l'autorité de l'État compétente pouvant avoir lieu. J'ai rencontré, depuis octobre dernier, beaucoup d'enfants qui peuvent rédiger un texte détaillant les raisons de leur choix.

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Dans le cadre du quatrième motif, qui demande de détailler le projet pédagogique menant à choisir l'instruction en famille, les parents pourront ajouter, s'ils le souhaitent, des écrits de leur enfant.

Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La commission rejette successivement les sous-amendements.

La commission est saisie du sous-amendement CS821 de M. Xavier Breton.

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Je voudrais en profiter, puisque nous n'avons pas pu avoir un échange au sujet des transgenres, pour soutenir la démarche prudente de M. le ministre. Il existe des revendications militantes radicales, mais la réalité est beaucoup plus compliquée. On peut avoir, à certains âges de l'enfance et de l'adolescence, des interrogations sur sa réalité corporelle et son évolution. Seulement, un nouveau phénomène apparaît, celui des détrans : certains ont cru, à un moment, connaître une dysphorie de genre mais ils retrouvent tout d'un coup un accord avec leur réalité corporelle. Des associations, comme Post Trans qui vient d'être créée, sont à l'écoute de ces jeunes. Je crois qu'il faut être très prudent et, dans l'intérêt de notre jeunesse, ne pas céder aux pressions de certains militants.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS815 de M. Xavier Breton et CS852 de Mme Anne-Laure Blin.

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Face à votre logique de restriction des libertés, par la création d'un régime d'autorisation, le sous-amendement de repli CS815 tente de préserver autant que possible le choix des familles. Le refus de l'autorisation d'instruction en famille par l'autorité de l'État compétente devra être motivé, et le silence gardé par l'administration pendant un délai d'un mois vaudra acceptation implicite de la demande.

Les déclarations seront revues régulièrement, et l'organisation d'une scolarité n'est pas une chose évidente : en cas de refus, il faudra avoir le temps de s'adresser à un établissement scolaire. Ce que nous proposons vise à protéger les familles en droit et dans les faits.

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Je voudrais vous faire part d'une initiative du maire Les Républicains de Nîmes pour lutter contre la déscolarisation et le décrochage ainsi que pour prévenir les risques de sectarisme et de radicalisation, quelle qu'en soit la forme. La question des enfants hors radars relève de la volonté politique. Une convention a été établie avec la DASEN, la caisse d'allocations familiales (CAF) et la Mutualité sociale agricole (MSA) pour rechercher les enfants non scolarisés que l'on ne connaissait pas : 437 étaient hors radars. Même sans loi, les exécutifs locaux peuvent agir.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les sous-amendements.

La commission est ensuite saisie du sous-amendement CS838 de M. Grégory Labille.

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Si la demande d'autorisation est déposée au moins un mois avant la rentrée, par exemple durant l'été, l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation devra apporter une réponse avant le début de l'année scolaire. Dans le cas contraire, par exception à l'article L. 231‑1 du code des relations entre le public et l'administration, son silence vaudra décision d'acceptation.

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Les modalités de délivrance de l'autorisation seront précisées par décret. Elles seront naturellement en harmonie avec le cycle scolaire afin que toutes les situations soient réglées avant le début de l'année, pour le bien des enfants et de leur famille.

Demande de retrait, sinon, avis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même position.

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Il faut s'adresser au ministre. Est-il d'accord pour que les réponses soient données au plus tard un mois avant la rentrée scolaire ? S'il dit oui, je suppose que notre collègue retirera son amendement.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS836 de M. Grégory Labille.

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Nous demandons que la décision de refus d'autorisation puisse faire l'objet d'un recours administratif selon les modalités prévues à l'article L. 521‑1 du code de justice administrative.

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Avis défavorable. Nous avons déjà prévu qu'un recours administratif pourra être exercé devant une cellule rectorale ad hoc.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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On comprend bien que vous vouliez avancer vite, puisque vous pensez avoir déjà traité le sujet, mais nous mettons sur la table des éléments qui méritent des réponses – je pense à l'intervention de Charles de Courson, mais aussi à la mienne au sujet de la ville de Nîmes. Pouvez-vous nous donner des explications ? Pourquoi ne voulez-vous pas instaurer, à votre échelle, des partenariats avec les CAF et la MSA ?

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie du sous-amendement CS837 de M. Grégory Labille.

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Les recours doivent aller vite. La cellule que vous prévoyez devrait statuer en urgence, dans un délai d'un mois, ou avant la rentrée scolaire lorsque la demande est antérieure à celle-ci.

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Avis défavorable. J'ajoute, s'agissant des explications que nous ne donnerions pas, que nous avons passé dix-neuf heures sur cet article en première lecture et que les réponses sont dans le texte : il faudrait peut-être que vous le relisiez. Par exemple, le cas de Nîmes que vous avez cité est complètement pris en compte. Une telle méconnaissance du sujet est tout de même assez étonnante.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Je vais vous lire la partie des amendements identiques à laquelle j'ai fait allusion tout à l'heure – il est vrai que j'ai été assez légitimiste, le président ayant demandé d'être concis :

« Une instance départementale chargée de la prévention de l'évitement scolaire associe les services de l'État compétents, les services municipaux concernés, le conseil départemental, l'organisme chargé du versement des prestations familiales et le ministère public. Elle assure notamment le suivi des élèves scolarisés à la suite de la mise en demeure mentionnée à l'article L. 131‑10. Les modalités d'application du présent article sont précisées par décret. »

Je crois qu'il existe une convergence sur les grandes lignes de ce qu'il faut faire. Nous aurons un support juridique modernisé et plus efficace, au service d'une action administrative qui devra, elle aussi, être efficace.

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Les questions posées sont tout à fait fondées. Le problème sera la vitesse de traitement des recours devant la juridiction administrative. Que fera-t-on de l'enfant pendant ce temps ? L'instruction est obligatoire. Voilà le problème pratique qui est soulevé par notre collègue, et je ne pense pas, madame la rapporteure, que vos propos y répondent. Le recours sera-t-il suspensif, ce qui permettrait de continuer l'enseignement en famille tant que la décision de justice n'a pas été rendue ? Si ce n'est pas le cas, il faudra inscrire l'enfant dans un établissement public ou privé, hors contrat ou sous contrat. À ma connaissance, le recours prévu par le texte n'est pas suspensif.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Cela correspond à des situations qui peuvent déjà exister. Le recours n'est pas suspensif, donc l'instruction en famille se poursuit. En cas d'urgence, une injonction de scolarisation est possible, dans l'intérêt de l'enfant. Nous y faisons appel : nous pouvons enjoindre l'inscription de l'enfant dans l'établissement le plus proche.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie des sous-amendements CS823, CS816, CS817 et CS818 de M. Xavier Breton.

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Afin d'améliorer l'efficacité des contrôles, il faut cibler au maximum les enfants hors radars, comme on dit, c'est-à-dire ceux qui disparaissent parce qu'ils ne sont pas inscrits dans un établissement scolaire et n'ont pas fait l'objet d'une déclaration d'instruction en famille. À cette fin, nous vous proposons plusieurs procédés, notamment la création d'un portail numérique commun et la transmission d'informations aux maires.

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On voit votre souci des détails pratiques. Je le partage en partie mais, un peu comme pour le formulaire-type tout à l'heure, c'est du niveau réglementaire.

Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

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Je vais retirer ces sous-amendements, mais il serait bon de rediscuter de cette question en séance afin de connaître les intentions du ministère s'agissant de la rédaction du décret.

Les sous-amendements sont retirés.

La commission est saisie du sous-amendement CS819 de M. Xavier Breton.

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On doit être précis au sujet du contrôle. L'article L. 131-10 du code de l'éducation évoque l'hypothèse de résultats « jugés insuffisants », ce qui laisse une part à l'arbitraire. Or il faut que le droit soit très clair. Afin d'objectiver les situations et d'éviter une appréciation partiale ou arbitraire, de manière volontaire ou non, nous proposons de faire référence à la condition suivante : lorsque « des lacunes graves sont manifestes dans les enseignements ».

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J'entends vos arguments mais je ne les partage pas. Je pense qu'il serait difficile de prouver des lacunes manifestes ou un défaut d'investissement. Une insuffisance par rapport à un référentiel est un critère plus objectif et plus simple à appliquer.

Avis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Nous avons tous constaté que le contrôle est efficace lorsqu'il est correctement mené. Le problème est sa disparité dans l'ensemble du territoire. Qu'allez-vous faire pour qu'il y ait, dans toutes les académies, un contrôle effectif et identique, nous permettant d'être réellement protégés ? Ce n'est pas le régime de l'autorisation qui le garantira.

La commission interinstitutionnelle placée sous le pilotage départemental dont vous avez parlé, monsieur le ministre, assure un suivi de la scolarisation des élèves à la suite d'une mise en demeure. Ce n'est pas du tout efficace pour les enfants hors radars, puisqu'il s'agit d'une action a posteriori. L'action engagée à Nîmes, dont Mme Blin a parlé, est a priori : elle vise à identifier les enfants hors radars. Il y a clairement un trou dans la raquette. Vous pourriez améliorer le dispositif.

La commission rejette le sous-amendement.

La commission est saisie des sous-amendements identiques CS831 de M. Grégory Labille et CS851 de Mme Anne-Laure Blin.

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L'instruction en famille concerne 50 000 enfants. À la suite d'une décision du Conseil constitutionnel, l'administration ne disposera que d'une année pour traiter l'intégralité des demandes, ce qui paraît bien trop court. Décaler l'échéance de 2022 à 2023 renforcerait la sécurité juridique et éviterait aux services d'avoir à traiter trop rapidement certains dossiers.

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Nous ne sommes peut-être pas d'accord, madame la rapporteure, mais nos interventions sont courtoises. Je ne peux pas vous laisser dire que je ne connais pas le texte, que nous ne l'avons pas travaillé. J'ai été élue en septembre dernier. Je travaille, depuis, sur le sujet que nous sommes en train d'évoquer. Nous avons rencontré des familles et nous les avons écoutées.

Comme en première lecture, nous demandons une année supplémentaire pour l'entrée en vigueur du dispositif. Dans les milieux ruraux, les familles ne peuvent pas toujours choisir l'école. Nos propositions sont en corrélation avec la réalité du terrain, celle des familles qui pratiquent l'IEF. Que vous ne vouliez pas l'entendre, c'est une chose, mais vous ne pouvez pas dire que nous ne connaissons pas le sujet.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette les sous-amendements.

Elle adopte les amendements identiques CS456, CS773, CS421 et CS535, et l'article 21 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CS129 de M. Fabien Di Filippo, CS111 de M. Pierre Cordier et CS136 de M. Gaël Le Bohec tombent.

Article 21 bis A : Extension des missions du service public du numérique éducatif, déclaration d'instruction en famille et rattachement administratif des enfants instruits en famille

La commission est saisie des amendements de suppression CS653 des rapporteurs et CS762 du Gouvernement.

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J'ai déposé une série d'amendements visant à supprimer des articles additionnels introduits par le Sénat. Les questions qu'ils traitent ont été en grande partie intégrées dans l'article 21 que nous venons d'adopter.

S'agissant de l'article 21 bis A, le 1° relatif au service public du numérique éducatif et le c) du 2°, relatif au rattachement administratif, viennent d'être repris à l'article 21. Quant aux a) et b) du 2°, qui tendent à revenir au principe de déclaration, j'y suis défavorable.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

L'amendement du Gouvernement va dans le même sens, pour les mêmes raisons.

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Je ne pourrai pas présenter mon amendement CS143, car il va tomber si ceux du Gouvernement et des rapporteurs sont adoptés.

Je ne comprends pas la suppression de cet article. Pourquoi êtes-vous si réticents à l'égard de la notion de contrôle ? Elle devrait être inscrite au cœur de votre action. Contrôler l'application des dispositifs qu'il instaure est une prérogative essentielle pour l'État. Lors des auditions, dont la rapporteure doit très bien se souvenir, un inspecteur général qui supervisait le service chargé des contrôles a confirmé, à la suite d'une question que je lui ai posée, que des parents refusaient les contrôles ou s'y dérobaient. Le ministère de l'éducation nationale ne peut donc pas attester que les enfants concernés sont correctement instruits. C'est une défaillance majeure.

Nous ne sommes pas naïfs, au groupe Les Républicains. Nous savons que des familles veulent échapper à l'école pour pouvoir délivrer à leurs enfants un enseignement à caractère exclusivement confessionnel ou en rupture avec les valeurs de la République. Nous voulons un contrôle renforcé, mais dans le cadre du maintien du régime de déclaration.

La question du contrôle est essentielle. Vous avez avancé des justifications, mais vous n'avez rien dit, en réalité : en gros, vous supprimez cet article parce que vous voulez le supprimer. Mais quand des parents ne respectent pas la règle, qu'y a-t-il d'illégitime à leur demander de la respecter ? S'ils ne respectent pas la règle, ils ne doivent plus être éligibles à l'instruction en famille. C'est tout de même frappé au coin du bon sens.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Je vais vous répondre, mais j'essaie de respecter l'exigence de rapidité qui a été fixée. Sur la forme, votre amendement va tomber mais il est satisfait. J'en ai parlé tout à l'heure : nous pouvons enjoindre à une famille d'inscrire un enfant à l'école si le contrôle révèle un problème. Nous partageons votre intention. Le droit actuel et le cadre juridique à venir permettront tout à fait d'agir.

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Merci d'avoir répondu. Vous évoquez des familles qui contreviennent, par la nature de l'enseignement délivré, aux règles auxquelles elles devraient s'astreindre. Des procédures sont lancées pour répondre à ces situations, soit, mais ce n'est pas de cela que j'ai parlé. Lorsque des parents se dérobent, par exemple en étant absents le jour où l'inspecteur est annoncé, on ne peut pas évaluer si l'enseignement est conforme ou non, et l'inspecteur général que nous avons auditionné nous a dit qu'il n'était pas toujours possible de revenir. Y a-t-il dans le texte une réponse claire à ce problème qui a été signalé par un membre de votre administration ?

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Jean-Michel Blanquer, ministre

En l'état actuel de la loi, s'il y a deux refus de déférer au contrôle sans motif légitime, l'administration est tout à fait en droit de mettre en demeure les responsables légaux – en général les parents – d'inscrire leur enfant dans un établissement d'enseignement public ou privé. C'est ce que prévoit l'article L. 131-10 du code de l'éducation. Il n'y a pas d'opposition à ce que vous dites : votre amendement est satisfait.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis A est supprimé et les amendements CS172 de M. Éric Diard et CS143 de Mme Annie Genevard tombent.

Article 21 bis B : Possibilité d'interdire le recours à l'instruction en famille lorsqu'un enfant ou un membre de sa fratrie fait l'objet d'une information préoccupante auprès du conseil départemental

La commission est saisie des amendements de suppression CS655 des rapporteurs et CS753 du Gouvernement.

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Je propose de supprimer l'article 21 bis B, qui repose sur un régime de déclaration de l'instruction en famille, et non sur celui de l'autorisation préalable que nous avons rétabli. Par ailleurs, nous avons réintroduit une disposition que nous avions adoptée en première lecture au sujet des informations préoccupantes et de la possibilité d'abréger l'autorisation dans ce contexte. Cela permet d'atteindre l'objectif visé, en la matière, par cet article.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis B est supprimé et l'amendement CS533 de Mme Anne-Laure Blin tombe.

Article 21 bis C : Présentation des modalités d'organisation et d'enseignement lors de la déclaration d'instruction en famille et engagement à respecter les principes de la République et à assurer l'instruction majoritairement en français

La commission est saisie des amendements de suppression CS656 des rapporteurs et CS754 du Gouvernement.

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Cet article repose également sur un régime de déclaration. Quant aux dispositions relatives à la présentation du projet éducatif et à la nécessité de délivrer l'instruction majoritairement en langue française, que nous avions introduites dans le texte en première lecture, elles ont été reprises à l'article 21.

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Je regrette cette suppression. La formulation adoptée par le Sénat reprend les principaux critères permettant de garantir que l'instruction délivrée aux enfants sera conforme à l'esprit qui nous anime.

Parmi ces critères, j'avais insisté sur la maîtrise de la langue française. Le Sénat a assoupli cette exigence afin de permettre aux enfants bilingues de parler leur langue d'origine avec la langue française, en disposant que l'instruction doit se faire « majoritairement » en langue française. Je pense que la traduction faite dans les médias de cette proposition détermine votre volonté de supprimer cet article. Le président de Rugy a déclaré y déceler une forme de discrimination à l'égard des personnes issues de l'immigration, mais enfin, pour qu'un enfant soit correctement instruit, il doit l'être dans le respect des principes de la République et en maîtrisant la langue française. Comment faire des cours si la langue n'est pas maîtrisée ?

Vous avez modifié le délit d'entrave, c'est une bonne chose. Mais je regrette que la liberté pédagogique ne soit pas bornée : ce n'est pas l'autorisation de faire tout ce dont on a envie, elle doit s'exercer dans le respect des programmes et des méthodes. Vous avez fait preuve d'une pudeur inexpliquée en la matière.

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L'enseignement en français, langue de notre République – sans méconnaître les langues régionales –, est important. Pour ma part, je suis toujours admirative des enfants capables de faire leurs études en français dès la maternelle tout en apprenant la langue d'origine de leur famille. Cette maîtrise de plusieurs langues dès les premières années de la scolarité n'est pas un handicap, mais peut être un avantage pour l'apprentissage d'autres langues.

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Vous avez raison, mais je fais référence à l'instruction en français. Les professeurs des écoles, de collège, de lycée et d'université attestent de la perte de la maîtrise de la langue française. Alain Finkielkraut dit que les Français sont devenus étrangers à leur propre langue. Le vocabulaire s'est appauvri et la syntaxe et l'orthographe sont des sciences occultes pour beaucoup. Or, la réussite d'un enfant dépend du nombre de mots qu'il possède à l'issue de la maternelle, donc la maîtrise de la langue conditionne la réussite scolaire. Comment voulez-vous qu'un parent qui ne maîtrise pas bien la langue française l'enseigne à son enfant ? Je ne remets pas en question la richesse apportée par le plurilinguisme.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis C est supprimé et les amendements CS537 de Mme Anne-Laure Blin et CS54 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.

Article 21 bis D : Possibilité pour l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation de s'entretenir avec les parents et la personne en charge de l'instruction entre la déclaration d'instruction en famille et le premier contrôle pédagogique

La commission est saisie des amendements de suppression CS657 des rapporteurs, CS755 du Gouvernement et CS112 de M. Pierre Cordier.

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Il est proposé de supprimer cet article, puisque la partie du texte qui rétablit la déclaration préalable n'existe plus et que la possibilité pour l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation de s'entretenir avec l'enfant et sa famille a été rétablie à l'article 21.

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Je suis déçu de constater qu'il n'existe pas d'esprit de coconstruction entre les deux chambres du Parlement afin d'améliorer un texte. Il existe parfois des oppositions profondes, comme c'est le cas sur le projet de loi sur la bioéthique, mais aujourd'hui, il ne s'agit que d'ajustements. La langue française nous préoccupe tous, sans distinction partisane, pourtant vous procédez à la suppression systématique de tout ce que le Sénat a adopté. Nous sommes nombreux à le regretter.

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Ce n'est pas vrai. D'une part, nous reprenons certains apports du Sénat, et, d'autre part, il faut se souvenir de la façon dont les choses s'y sont passées. Le texte issu des travaux en commission au Sénat aurait pu permettre une commission mixte paritaire conclusive, mais en séance publique, le débat était tout autre, certainement déterminé par les débats internes au groupe Les Républicains. Il est donc très compliqué de reprendre des dispositions caricaturales issues des débats en séance au Sénat.

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Je ne peux pas laisser M. Ravier inverser les responsabilités. Avant la commission mixte paritaire, à laquelle Mme Genevard participait également, nos échanges avec les sénateurs Les Républicains avaient été très clairs. Ils nous ont opposé deux lignes rouges : la question du voile et le régime d'autorisation pour l'instruction en famille. Nous avons constaté nos désaccords profonds sur ces deux points, donc l'impossibilité d'avancer. Mais ce n'est pas de notre seul fait.

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Nous savons que des sujets nous opposent, et le débat démocratique permet d'en poser les termes. Mais il n'est pas acceptable que le rapporteur général nous prête des obsessions pathologiques et que M. Vuilletet évoque des dispositions caricaturales. Mme Blin l'a dit, nous avons tous fait un travail sérieux sur ce texte. Nous avons auditionné, reçu, exploré les possibilités, formulé des propositions. Il n'est pas acceptable que ce travail soit ainsi déprécié. Cette conception du débat démocratique soulève des interrogations.

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Les termes parfois choquants employés au début de notre réunion et tendant à caricaturer les positions n'ont pas été tenus par les députés de la majorité. Nous sommes en désaccord avec vous, c'est vrai, sur l'égale robustesse qu'aurait un système d'autorisation a priori par rapport à un système de déclaration a posteriori, que vous privilégiez. Des mots tels que « liberticide » et d'autres caricatures sur lesquelles je ne reviens pas participent du travestissement de nos opinions. Pour notre part, nous respectons les vôtres, et la caricature n'a pas toujours été du côté que vous indiquez.

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J'estime que la réécriture de l'article 21 proposée par le Gouvernement et la rapporteure est un très bon travail. À titre personnel, je suis plus favorable à un régime de déclaration que d'autorisation, par attachement à la liberté d'enseignement. Par parallélisme, ce régime d'autorisation devrait s'appliquer aux écoles sous contrat ou hors contrat.

Je trouve aussi que les députés Les Républicains ont bien travaillé et démontré qu'ils ne souhaitent pas laisser aller le dispositif en proposant de réintroduire des contrôles a posteriori très sérieux qui répondent aux préoccupations. Nous aurions pu trouver une voie pour instaurer une déclaration avec un dispositif de contrôle intégrant toutes les mesures prévues par le texte.

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Les propos du rapporteur général sont très choquants. S'il estime que qualifier l'article 21 de liberticide est une injure, ce n'est pas un démocrate. Il ne s'agit pas d'une caricature, mais de la vérité : un régime de déclaration n'est pas un régime d'autorisation ; il limite la liberté, donc il est liberticide.

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Nous avons été taxés de conservateurs réactionnaires idéologues et nos argumentaires, fondés en droit, ont été dénigrés. Je comprends le désaccord que le rapporteur général peut avoir sur certains propos tenus par M. de Courson, mais nous avons été accusés nous-même de liberticides car nous voudrions installer une police du vêtement !

Si nous sommes menacés par un islam politique radical, séparatiste, et même terroriste, ne pensez-vous pas qu'il soit préférable d'interdire le port du voile par les fillettes et le port de signes religieux ostentatoires par les accompagnants de sorties scolaires pour protéger nos enfants ou les usagers des services publics ? Ne faut-il pas interdire les signes ostentatoires dans les documents de propagande électorale ? C'est cela, lutter contre l'islam politique, plutôt que les mesurettes que vous proposez sur l'instruction en famille.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis D est supprimé et l'amendement CS539 de Mme Anne-Laure Blin tombe.

Article 21 bis E : Présentation d'une attestation de suivi médical pour les enfants instruits en famille dans le cadre du contrôle pédagogique

La commission est saisie des amendements de suppression CS658 des rapporteurs et CS756 du Gouvernement.

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L'exigence d'attestation de suivi médical dans le cadre du contrôle pédagogique est satisfaite par le rétablissement de l'article 21.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 2 bis E est supprimé.

Article 21 bis F : Interdiction pour les personnes définitivement condamnées par le juge pénal pour crime ou délit terroriste ou inscrites au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes d'être chargées de l'instruction en famille d'un enfant

La commission adopte successivement les amendements rédactionnels CS678 et CS679 des rapporteurs.

Elle adopte l'article 21 bis F ainsi modifié.

Article 21 bis G : Mise en demeure de scolarisation de l'enfant en cas de non-déclaration ou de déclaration frauduleuse d'instruction en famille

La commission est saisie des amendements de suppression CS659 des rapporteurs et CS764 du Gouvernement.

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Cet article, comme les précédents, est assis sur le régime de déclaration préalable de l'instruction en famille.

Par ailleurs, les procédures de mise en demeure de scolarisation en cas de défaut d'autorisation ou d'autorisation frauduleuse sont prévues à l'article 21.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis G est supprimé et les amendements CS546 et CS547 de Mme Anne-Laure Blin tombent.

Article 21 bis H : Mise en place de cellules de protection du droit à l'instruction

La commission est saisie des amendements de suppression CS673 des rapporteurs et CS763 du Gouvernement.

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Le contenu de cet article a été repris à l'article 21.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis H est supprimé et les amendements CS57 et CS58 de Mme Emmanuelle Ménard tombent.

Article 21 bis I : Possibilité pour le maire de mettre en place un traitement automatisé des données possédées par l'administration fiscale pour procéder au recensement des enfants d'âge scolaire

La commission est saisie des amendements de suppression CS654 des rapporteurs et CS757 du Gouvernement.

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Cet article prévoit la transmission de données fiscales, et la mise en place par le maire d'un traitement automatisé de ces données, en vue de recenser les enfants en âge scolaire. Il soulève des problèmes d'ordre juridique et opérationnel.

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J'ai toujours été d'une grande prudence à l'égard de la constitution de fichiers et de leur interconnexion, par respect des libertés publiques. Mme Blin a évoqué l'exemple de la commune de Nîmes, je ne sais pas comment il a été possible d'accéder à tous ces fichiers.

Quelle est la position du Gouvernement et des rapporteurs sur l'utilisation de fichiers pour détecter des enfants non scolarisés qui bénéficient de prestations familiales ou qui sont déclarés fiscalement ?

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Pour la recherche des enfants hors des radars, nous avons agi de différentes façons. La mise en place de l'identifiant national élève sera une grande avancée sur laquelle nous ne revenons pas : l'article 21 bis est le seul du chapitre que le Sénat ait voté conforme ! Il permettra d'améliorer le suivi des enfants en âge d'être instruits.

Le code de l'éducation prévoit déjà certaines possibilités de croisements de fichiers, après une demande préalable à la CNIL, notamment des fichiers des caisses d'allocations familiales. Il me semble que ce fut le cas à Nîmes.

La transmission des données possédées par l'administration fiscale ne semble donc pas pertinente, les dispositions du code de l'éducation permettront cette recherche et nous prévoyons la création d'instances afin de travailler sur ces données.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'article 21 bis I est supprimé.

Article 21 ter A : Conditionnement du versement de l'allocation de rentrée scolaire à la présentation d'un certificat de scolarité

La commission est saisie d'un amendement de suppression CS660 des rapporteurs.

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S'il est nécessaire de conditionner le versement de l'allocation de rentrée scolaire (ARS) à l'inscription effective dans un établissement d'enseignement scolaire, il n'est pas cohérent de l'insérer parmi les mesures consacrées aux contrôles des enfants instruits en famille, puisque ces derniers ne perçoivent pas l'ARS.

L'amendement est adopté.

En conséquence, l'article 21 ter A est supprimé et l'amendement CS160 de Mme Anne-Laure Blin tombe.

Article 21 ter (supprimé) : Organisation à titre expérimental d'une journée pédagogique de la citoyenneté pour les enfants instruits en famille

La commission est saisie des amendements identiques CS457 des rapporteurs, CS432 de Mme Perrine Goulet, CS542 de M. Pierre-Yves Bournazel et CS572 de Mme Fabienne Colboc.

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Nous souhaitons rétablir l'article 21 ter, relatif à l'introduction d'une journée pédagogique.

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Cette journée pédagogique est très importante. Elle portera sur la citoyenneté et les principes républicains, mais aussi l'éducation au corps et les droits de l'enfant. Nous l'avons rappelé au cours de nos débats sur la violence éducative ordinaire : les enfants doivent apprendre que l'éducation ne se fait pas par les coups.

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Cette journée pédagogique de la citoyenneté s'adresserait aux enfants instruits en famille et serait organisée à titre expérimental.

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Une telle journée permettra aux enfants instruits en famille d'établir un lien avec les établissements d'enseignement scolaire et de garantir la bonne transmission de certaines informations et principes essentiels.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Je suis favorable à l'instauration de cette journée pédagogique. Cet article devrait nous rassembler : nous avons tous souligné que l'instruction en famille ne devait jamais être contraire à la sociabilité, et cette disposition offre justement un élément de sociabilité républicaine.

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Est-il besoin d'une loi pour créer cela ? Il me semble que c'est une mesure de nature réglementaire, d'autant qu'elle est prévue à titre expérimental, uniquement dans les écoles volontaires. Beaucoup de directeurs d'école s'en abstiendront en vous expliquant qu'ils sont déjà débordés et qu'ils n'arrivent pas à tenir le programme.

Cet article ne me semble pas d'une grande portée législative. Il serait préférable que le ministre s'engage à mener cette expérimentation par voie d'instruction.

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Je salue l'intérêt de cette mesure. Je regrette effectivement qu'elle soit prévue à titre expérimental. Je ne vois pas pourquoi on n'oserait pas assumer une journée de la citoyenneté alors que ce texte promeut l'affirmation des principes républicains. Et pourquoi réserver cette journée aux écoles volontaires ? Elle devrait se dérouler dans toutes les écoles.

Nous estimons que cet amendement ne va pas assez loin, et nous proposerons de supprimer le caractère expérimental et volontaire de cette mesure en séance publique.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Il n'y a pas de désaccord entre nous. Sur la forme, nous pouvons imaginer élargir la mesure lors de la séance publique. Et l'existence d'une telle mesure prouve que nous ne voulons pas supprimer l'instruction en famille : lorsqu'elle se passe bien, nous l'accompagnons de ce type de garantie.

L'amendement est adopté et l'article 21 ter est ainsi rétabli.

Section 2 Dispositions relatives aux établissements d'enseignement privés

Article 22 : Renforcement des contrôles sur les établissements d'enseignement privés hors contrat

La commission est saisie d'un amendement de suppression CS122 de M. Charles de Courson.

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Cet article a pour objet de permettre au préfet de prononcer la fermeture temporaire ou définitive d'un établissement d'enseignement privé.

Actuellement, c'est au juge judiciaire de se prononcer sur une telle fermeture, selon les motifs repris par le projet de loi : lorsque l'établissement a ouvert en méconnaissance des dispositions régissant l'ouverture des établissements d'enseignement privé et constitue alors un « établissement de fait » ; lorsqu'il a refusé de se soumettre à la surveillance et à l'inspection des autorités scolaires ; lorsqu'il est constaté à l'occasion d'un contrôle que les enseignements dispensés ne sont pas conformes à l'objet de l'instruction obligatoire ou que le fonctionnement de l'établissement porte atteinte à l'ordre public, et en l'absence d'amélioration après mise en demeure et nouvelle visite. Ces sanctions sont prononcées après la saisine par l'autorité académique du procureur de la République, afin qu'il engage des poursuites. Ce système a été simplifié et unifié récemment, à l'occasion de la loi dite Gatel, en avril 2018. Il est équilibré et proportionné.

Plutôt que de revenir purement et simplement sur ce régime de contrôle, il nous paraît plus judicieux de se pencher sur son application concrète. Ce n'est pas la loi qui est défaillante, ce sont les moyens concrets et pratiques du contrôle qui manquent. C'est sur cet aspect qu'il convient d'avancer. Par conséquent, cet amendement vise à supprimer le transfert du pouvoir d'ordonner la fermeture provisoire ou définitive d'un établissement d'enseignement privé du juge pénal au préfet.

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Je suis défavorable à la suppression de l'article 22, car il constitue un aspect essentiel du projet de loi.

Nous souhaitons renforcer le contrôle des établissements hors contrat pour nous assurer qu'ils respectent pleinement les droits des enfants, notamment le droit à l'instruction. Il faut poursuivre les avancées de la loi Gatel en prévoyant des mesures relatives à la fermeture des établissements.

Lorsque les contrôles mettent en lumière des insuffisances parfois graves, seule une décision judiciaire peut ordonner la fermeture. Or la procédure peut prendre un certain temps, compte tenu des délais de recours. Les parents sont mis en demeure d'inscrire leur enfant ailleurs, mais ne comprennent pas et n'appliquent pas cette mise en demeure tant que l'établissement reste ouvert. Par ailleurs, la mise en demeure est opposée aux parents dont les élèves sont scolarisés dans l'établissement au moment où elle est prononcée, mais pas aux inscriptions ultérieures, qui peuvent être enregistrées dans l'attente de la décision judiciaire.

L'article 22 permet de pallier les difficultés rencontrées concrètement par les services de l'éducation nationale sur le terrain.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Je suis également très défavorable à cet amendement de suppression de l'article 22, tout aussi important que l'article 21 sur lequel s'est focalisée toute l'attention politique. Il donne des outils effectifs pour fermer des écoles hors contrat qui ne respecteraient pas les principes de la République. C'est l'expérience qui nous fait souhaiter un dispositif juridiquement plus robuste pour les temps qui viennent. Lorsque nous obtenons gain de cause devant le juge judiciaire, l'appel est suspensif et les structures néfastes pour les enfants qui les fréquentent continuent à exister.

Cet article apporte une amélioration à la loi Gatel, et il n'est en rien attentatoire aux libertés puisque le juge administratif n'est pas moins protecteur des libertés que le juge judiciaire, contrairement à ce que vous sous-entendez. En revanche, il est certain que nous préserverons davantage la liberté et les droits des enfants en étant capables de fermer dès que c'est nécessaire une structure de ce type. Le travail législatif commencé en 2017 progresse donc, puisque, après les jalons posés par la loi pour l'école de la confiance et la loi Gatel, cette loi une fois votée, permettra d'avoir un cadre juridique complet portant sur les quatre formes de scolarisation que vous avez rappelées, et offrant précision et solidité à tous les acteurs.

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Je n'ai jamais dit qui, de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif, était plus protecteur des libertés publiques. Il y a toutefois un problème fondamental : l'administration peut se tromper, et quand on décide de porter atteinte à une telle liberté, seul le juge est compétent. C'est un problème que l'on retrouve à d'autres sujets. Je me suis souvent battu et j'ai souvent gagné sur ce point, y compris devant le Conseil constitutionnel. Celui-ci a toujours estimé que seul le juge pouvait priver d'une liberté, et pas des décisions administratives.

Selon votre thèse, vos services auront toujours raison. Mais ce n'est pas à vous d'en décider, c'est au juge. C'est là ma position de principe dans tous les domaines.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Je suis d'accord avec vous, ces décisions seront soumises aux juges, c'est pourquoi je disais que le juge administratif n'est pas moins protecteur des libertés. Le référé-liberté, le recours pour excès de pouvoir, l'appel et la cassation existent dans l'ordre judiciaire administratif. Le système que nous mettons en place est uniquement une mesure d'efficacité pour assurer la fermeture effective. Dans l'hypothèse d'abus scandaleux, le référé-liberté y portera remède, et je ne doute pas que le juge administratif condamnerait une mauvaise appréciation de la part de l'État.

Prenons garde, en utilisant l'argument de la protection des libertés, de ne pas porter atteinte aux droits des enfants. Souvent, je me trouve amené à me faire l'avocat des enfants tandis que le système adulte s'organise autour des libertés conçues par eux et pour eux, sans que les enfants puissent être réellement protégés. Je serais d'accord avec votre objection si le juge administratif ne garantissait pas une protection des libertés de grande qualité.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS173 de M. Éric Diard.

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Il s'agit de soumettre les établissements d'enseignement hors contrat à un régime d'autorisation avant l'ouverture. Dans la mesure où le projet de loi soumet l'instruction en famille à un régime d'autorisation, il semble pertinent, par parallélisme des formes, d'étendre ce régime aux établissements hors contrat.

De plus, selon la loi Gatel, faute d'opposition de la part de l'autorité compétente de l'État en matière d'éducation, du maire ou du procureur de la République, dans les trois mois suivant la déclaration, les établissements hors contrat ont la possibilité d'ouvrir. Un régime d'autorisation éviterait l'ouverture d'établissements en cas d'opposition formulée hors délai, ou tout simplement l'ouverture de nouveaux établissements dont seuls quelques détails différeraient afin de contourner une opposition à l'ouverture.

Je sais que la loi Gatel est récente, mais elle présente des failles que certains commencent à exploiter.

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Plusieurs de nos collègues ont déjà tenté de comparer la situation de l'instruction en famille et celle des établissements privés hors contrat au regard des systèmes d'autorisation et de déclaration. Or elles ne sont pas analogues.

D'une part, le Conseil constitutionnel a jugé que l'existence de l'enseignement privé constituait une composante essentielle de la liberté d'enseignement, ce qui n'est pas le cas pour l'instruction en famille. D'autre part, l'ouverture d'un établissement hors contrat ne peut avoir lieu tant que sa déclaration n'a pas été analysée, ce qui n'est pas le cas de la déclaration requise aujourd'hui pour l'instruction en famille.

En revanche, je partage complètement votre souci concernant les oppositions formées hors délai, qui est pris très au sérieux par l'éducation nationale. Il faut veiller à ce que ces situations ne se produisent plus.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS174 de M. Éric Diard.

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Puisque la rapporteure partage ma préoccupation sur les oppositions hors délai, cet amendement propose de fixer un délai pour le dépôt des demandes d'ouverture, afin de laisser le temps aux services compétents d'étudier le dossier.

Cette proposition se fonde sur l'expérience des services du ministère : des personnes déposent des dossiers pendant la période estivale en espérant passer sous les radars.

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Je partage votre préoccupation, mais toutes les dates ou les durées des contrôles doivent être décidées au niveau réglementaire.

Demande de retrait.

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Je comprends qu'il s'agit de mesures réglementaires, et j'aimerais que le ministre nous expose ses intentions à propos des délais appliqués aux demandes d'ouverture.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS123 de M. Charles de Courson.

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Je propose une procédure différente afin de trouver un équilibre entre la fermeture administrative des établissements hors contrat, souhaitée par le Gouvernement, et la fermeture judiciaire en vigueur.

Plutôt que de laisser le seul préfet décider de la fermeture d'une école hors contrat, cet amendement prévoit qu'il puisse décider d'une fermeture provisoire, pour une durée ne pouvant dépasser deux mois, afin de laisser au juge judiciaire le soin d'enquêter puis de statuer sur une éventuelle fermeture définitive. L'objectif est d'accélérer la décision de fermeture tout en laissant à l'autorité judiciaire compétente le soin de statuer après enquête.

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Avis défavorable. Le délai de deux mois ne permettra pas à l'autorité judiciaire de se prononcer – nous en avons plusieurs exemples.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS691 des rapporteurs.

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Il s'agit de supprimer la dernière phrase de l'alinéa 7, insérée par le Sénat, qui apparaît superflue. Dès lors que l'autorité de l'État prononce la mise en demeure de scolarisation, l'enfant doit être inscrit à l'école et ne peut être instruit en famille.

La commission adopte l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS317 de M. Xavier Breton.

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L'amendement tend à ce que le directeur de l'établissement et le représentant légal de l'organisme gestionnaire puissent, dans chaque académie, solliciter le référent académique pour la justice afin qu'il consulte, sur simple demande, le bulletin prévu à l'article 775 du code de procédure pénale de toute personne qu'ils souhaitent embaucher ainsi que les fichiers judiciaires automatisés d'auteurs d'infractions graves. Ce serait un moyen d'éviter que des personnes potentiellement dangereuses pour les enfants ne soient recrutées.

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Je comprends l'esprit de cet amendement mais ces dispositions sont partiellement satisfaites pour certaines et de nature réglementaire pour d'autres.

Les personnels des établissements d'enseignement privés hors contrat font déjà l'objet de contrôles par l'administration, qui consulte le casier judiciaire, le fichier des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT) et le fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV), au moment de la déclaration d'ouverture ou du changement de directeur et lors de la communication annuelle de la liste des enseignants. Elle peut également effectuer ce contrôle à l'issue d'une inspection, après consultation du registre des personnels.

L'employeur peut aussi, avant leur recrutement, demander à ses salariés le bulletin n° 3 de leur casier judiciaire.

Enfin, le ministère de l'éducation nationale réfléchit à la possibilité d'organiser la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire avant toute embauche dans un établissement privé.

Par ailleurs, les référents justice prévus pour les établissements publics et privés relèvent du règlement.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS318 de M. Xavier Breton.

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Ce sont les financements par des organisations ou des États étrangers, qui peuvent donner lieu à une ingérence de puissances étrangères dans les activités éducatives françaises, qui sont visés par les dispositions de l'alinéa 16. Aussi convient-il de restreindre l'obligation de communication des informations budgétaires et comptables à ces seuls financements.

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En pratique, l'État demandera ces informations quand il aura des soupçons. Il faut laisser la possibilité de contrôler les ressources d'un établissement en l'absence de suspicion de financements étrangers pour intégrer les cas de financement par des organisations nationales hostiles aux principes de la République, voire pour simplement contrôler la situation financière si celle-ci semble en péril, afin de mettre en place une régularisation et éviter la fermeture de l'établissement qui aurait pour conséquence de déscolariser les enfants.

Avis défavorable.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS141 de Mme Cécile Untermaier.

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Il s'agit de rendre obligatoire un contrôle des établissements privés hors contrat, au-delà de la première année d'exercice, tous les deux ans au moins. Si les écoles hors contrat n'ont pas d'obligation en termes de programme scolaire, l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation contrôle que l'enseignement qui y est dispensé respecte les normes minimales de connaissances requises et que les élèves de ces classes ont accès au droit à l'éducation tel qu'il est défini par la loi. Du fait de l'importance de ce contrôle, il est essentiel d'en renforcer le nombre et la régularité. Les soucis que vous pose l'instruction en famille sont sans doute assez proches de ceux que vous rencontrez au niveau des écoles privées hors contrat.

Ce contrôle pédagogique est distinct du contrôle des obligations de respect de l'ordre public, de prévention sanitaire et sociale et de protection de l'enfance et de la jeunesse, que nous proposons de renforcer également.

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Je partage votre souci de renforcer le contrôle. D'ailleurs, l'un des objectifs de ce projet de loi est d'améliorer notre système de contrôle des écoles privées hors contrat. Cependant, je ne souhaite pas que l'on impose la fréquence des contrôles par la loi. Laissons à l'inspection de l'éducation nationale le soin de les organiser selon une fréquence qui variera en fonction des établissements, voire de décider d'un contrôle inopiné. Je vous invite, par conséquent, à retirer votre amendement.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Même avis.

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Nous avions pris la précaution de préciser que le contrôle aurait lieu a minima tous les deux ans, ce qui laissait la possibilité d'en organiser avant. Il nous semble important d'encadrer aussi rigoureusement les écoles hors contrat que l'instruction en famille, d'autant que ces écoles ne sont pas soumises au régime d'autorisation préalable.

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Notre collègue a raison. L'adoption de cet amendement de bon sens n'empêcherait pas l'inspection de l'éducation nationale de contrôler un établissement tous les six mois si cela s'avérait nécessaire. Il permettrait, en revanche, d'éviter qu'un établissement ne soit pas contrôlé pendant des années avant que l'on s'aperçoive, un beau matin, que des événements inacceptables s'y sont produits. Aujourd'hui, à quelle fréquence les établissements privés hors contrat sont-ils contrôlés ?

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Le contrôle est systématique la première année. Tout dépend, ensuite, des inquiétudes que l'établissement suscite. Cette formule a le mérite de la souplesse. Par ailleurs, une telle précision ne relèverait pas forcément du domaine législatif même si elle correspond à ce qui se fait en pratique puisque les établissements qui le nécessitent sont fréquemment contrôlés. En revanche, il n'est pas nécessaire de contrôler tous les deux ans des établissements qui fonctionnent correctement.

Le conseil d'évaluation de l'école évalue tous les cinq ans les établissements publics mais aussi les établissements privés sous contrat. Il est donc normal que nous prêtions davantage attention, au travers de ce projet de loi, aux établissements privés hors contrat, et que nous prévoyions un dispositif suffisamment souple pour permettre d'adapter le contrôle aux établissements, certains appelant une vigilance plus forte que d'autres. Je partage l'esprit de votre proposition mais je préfère faire confiance à l'éducation nationale pour faire preuve de discernement.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie des amendements identiques CS692 des rapporteurs et CS747 du Gouvernement.

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Il s'agit de rétablir la version de l'alinéa 18 telle qu'issue des travaux de l'Assemblée nationale et du projet de loi initial par souci de clarification juridique, car la mention insérée par le Sénat pourrait être source de confusion.

La commission adopte les amendements.

La commission est saisie des amendements identiques CS693 des rapporteurs et CS748 du Gouvernement.

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Il s'agit de rétablir la version de l'alinéa 20 telle qu'issue de nos travaux. Il ne semble pas opportun de fixer un délai d'un mois au directeur d'un établissement privé hors contrat pour répondre à la mise en demeure d'un représentant de l'État dans le département ou l'autorité compétente en matière d'éducation. En effet, les situations peuvent largement différer d'un établissement à l'autre.

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Cette position ne me semble pas prudente. Il faut fixer un délai maximal pour répondre sinon ce serait trop facile et toutes les manœuvres dilatoires seraient permises ! Si le délai vous semble trop court, portez-le à deux mois.

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Les délais dépendent des situations et il appartient au contrôleur de fixer le délai de réponse à sa mise en demeure à l'issue du contrôle. C'est ainsi que procèdent tous les corps de contrôle. Il serait dangereux d'imposer un seul délai.

La commission adopte les amendements.

La commission est saisie des amendements identiques CS694 des rapporteurs et CS749 du Gouvernement.

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Il s'agit de rétablir la version de l'alinéa 22 telle qu'issue des travaux de l'Assemblée nationale. Mentionner que la mise en demeure prononcée par le préfet ou l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation sur le motif des insuffisances de l'enseignement doit veiller à respecter la liberté de choix des progressions, des programmes, des supports et des méthodes scolaires relatifs aux établissements privés hors contrat n'apparaît pas nécessaire dès lors qu'elle reprend des dispositions figurant déjà à l'article L. 442-3 du code de l'éducation.

La commission adopte les amendements.

La commission est saisie d'un amendement CS319 de M. Xavier Breton.

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Substituer un régime de fermeture administrative à un régime de fermeture par le juge judiciaire n'est ni utile ni prudent, d'autant moins s'agissant d'une liberté publique fondamentale comme la liberté d'enseignement. Il est plus prudent de ne pas donner la possibilité à l'administration de décider de mettre un terme à l'exercice d'une liberté, et de garder l'intervention préalable du juge judiciaire, agissant a priori.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette l'amendement.

La commission est ensuite saisie des amendements identiques CS690 des rapporteurs et CS750 du Gouvernement.

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Il s'agit de supprimer l'alinéa 29 qui ne relève pas du domaine de la loi.

La commission adopte les amendements.

Elle adopte l'article 22 ainsi modifié.

Article 22 bis : Interdiction de diriger ou d'être employé dans un établissement d'enseignement scolaire public ou privé pour toute personne ayant commis un crime ou délit contraire à la probité ou aux mœurs, y compris un crime ou délit à caractère terroriste

La commission adopte l'article 22 bis sans modification.

Article 23 : Augmentation des sanctions à l'encontre des chefs d'établissements d'enseignement privés hors contrat méconnaissant différentes mises en demeure

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission rejette successivement les amendements CS322, CS320 et CS321 de M. Xavier Breton.

Elle adopte successivement les amendements CS674 des rapporteurs et CS676 de la rapporteure, tous deux rédactionnels.

La commission est saisie d'un amendement CS661 des rapporteurs.

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Cet amendement vise à rétablir l'article 23 dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, en supprimant la mention insérée par le Sénat, cette précision étant satisfaite par le droit en vigueur.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 23 ainsi modifié.

Article 23 bis : Proposition d'une charte des valeurs et principes républicains et d'un agrément aux établissements d'enseignement privés hors contrat et agrément des établissements d'enseignement à distance

La commission est saisie d'un amendement CS662 des rapporteurs.

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Il s'agit de rétablir l'article 23 bis dans la rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, en limitant son contenu à la seule charte des principes et valeurs républicains proposée aux établissements privés hors contrat.

Le Sénat a précisé qu'il devait également être proposé à ces établissements un agrément attestant la conformité de l'enseignement dispensé au regard de l'objet de l'instruction obligatoire et de l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture. Or il ne s'agit pas d'un agrément mais du strict respect du droit, qui s'impose à tous ces établissements.

Par ailleurs, le Sénat a précisé que le régime de déclaration du choix de l'instruction en famille s'appliquait au choix du recours aux organismes privés d'enseignement à distance agréés. J'y suis opposée.

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Pourquoi êtes-vous hostile à cette dernière précision ?

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Certains collègues souhaiteraient que ces organismes privés d'enseignement à distance soient agréés par le ministère de l'éducation nationale, ce qui dispenserait les familles qui y ont recours de tout contrôle. Nous y sommes opposés. Les familles qui choisissent l'enseignement à distance restent responsables de l'instruction de leur enfant. Par ailleurs, la question de l'agrément, en l'espèce, est délicate, en particulier lorsqu'il s'agit d'établissements étrangers que l'on ne pourrait pas agréer.

Une mission vient d'être lancée, au sein de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, pour approfondir le sujet de l'enseignement hybride et à distance.

La commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 23 bis ainsi modifié.

Article 23 ter : Signature d'une charte éducative de confiance formalisant le respect et la confiance que les parents accordent aux enseignants et aux autres personnels de l'établissement

La commission est saisie d'un amendement de suppression CS663 des rapporteurs.

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L'amendement vise à supprimer l'article 23 ter qui relève du domaine réglementaire. En outre, l'article 1er de la loi pour une école de la confiance, adopté il y a moins de deux ans, codifié à l'article L. 111-3-1 du code de l'éducation, expose de manière explicite le lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l'éducation et dispose que ce lien implique le respect des élèves et de leur famille à l'égard des professeurs, de l'ensemble des personnels et de l'institution scolaire.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'article 23 ter est supprimé.

Article 24 : Condition de capacité à dispenser un enseignement par référence ou conforme aux programmes de l'enseignement public pour la conclusion d'un contrat avec l'État

La commission est saisie d'un amendement CS323 de M. Xavier Breton.

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Les écoles pilotées depuis l'étranger, qui valorisent une langue et une culture étrangères et mettent leurs élèves en contact avec des interlocuteurs dont les propos ou les actes ont été jugés contraires à l'ordre public, ne doivent pas passer sous contrat.

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Avis défavorable. Ces conditions sont déjà vérifiées dans le cadre des contrôles puisque l'établissement doit pouvoir dispenser les enseignements qui permettent l'acquisition du socle commun, lequel inclut, d'une part, la langue et la culture françaises, d'autre part, les valeurs fondamentales et les principes inscrits dans la Constitution, notamment la dignité.

L'article L. 111-1 du code de l'éducation définit également le droit à l'éducation, contrôlé dans le cadre de ces inspections.

La commission rejette l'amendement.

La commission est saisie d'un amendement CS751 du Gouvernement.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

L'amendement vise à supprimer une précision superflue ajoutée par le Sénat. En application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, les décisions de refus de passation de contrat doivent être motivées : comme toute décision de l'administration, elles peuvent être contestées devant les juridictions administratives.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.

Elle adopte l'article 24 ainsi modifié.

Article 24 bis A : Obligation de présence des directeurs et enseignants d'établissements d'enseignement privés hors contrat

La commission est saisie d'un amendement de suppression CS752 du Gouvernement.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Introduit par le Sénat, l'article 24 bis A prévoit que le directeur et les enseignants des établissements d'enseignement privé hors contrat puissent justifier respectivement d'une disponibilité et d'une présence effectives dans l'établissement.

Le Gouvernement partage l'objectif poursuivi par ces dispositions. Cependant, elles n'ajoutent rien s'agissant des enseignants, dont la présence effective dans l'établissement relève de leurs obligations contractuelles envers leur employeur et peut déjà être vérifiée dans le cadre des contrôles prévus à l'article L. 442-2 du code de l'éducation.

S'agissant des directeurs, dont la disponibilité effective est un enjeu d'importance, le cadre juridique existant permet d'ores et déjà de lutter contre la pratique des prête-noms et ce, contrairement à ce que prévoit cet article, dès l'amont, à l'occasion de l'ouverture de l'établissement ou de la nomination d'un nouveau directeur. Le Conseil d'État a rappelé, dans une décision du 16 avril 2021, que le recteur d'académie pouvait légalement s'opposer à la nomination d'un directeur si ce dernier n'était pas à même d'assurer les missions inhérentes à l'exercice de ses fonctions, faute notamment d'une disponibilité effective.

Suivant l'avis de la rapporteure, la commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'article 24 bis A est supprimé.

Article 24 bis : Amélioration de la mixité sociale, en lien avec les établissements scolaires publics et privés sous contrat et en concertation avec les collectivités locales

La commission adopte l'article 24 bis sans modification.

Article 24 ter (supprimé) : Mixité sociale au sein des établissements privés sous contrat

La commission est saisie d'un amendement CS695 des rapporteurs.

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L'amendement vise à rétablir l'article 24 ter supprimé par le Sénat . En effet, le rôle spécifique des commissions de concertation pour ce qui concerne les parties à un contrat, simple ou d'association, entre un établissement scolaire et l'État, est bien distinct du regard que peut avoir l'autorité de l'État compétente en matière d'éducation sur l'ensemble du service public de l'éducation. Aussi, la modification de l'article 24 bis apportée par le Sénat ne suffit pas à rendre cet article sans objet. Il convient donc de le rétablir.

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Jean-Michel Blanquer, ministre

Le sujet de la contribution des établissements privés à la mixité sociale est majeur. Nous en discutons régulièrement avec les représentants de l'enseignement privé sous contrat. D'ailleurs, un établissement privé sous contrat qui discriminerait un élève sur le fondement de sa situation sociale ou économique se placerait dans une situation illégale.

L'idée de confier à des commissions de concertation le soin d'examiner les contrats d'association pour veiller au respect de la mixité est intéressante et nous pourrons en discuter dans l'hémicycle. En tout état de cause, l'objectif est partagé puisque les intentions du candidat à la contractualisation doivent correspondre aux conditions de fonctionnement d'un établissement, qui comprennent des actions en faveur de la mixité sociale. Théoriquement, les établissements y veillent au travers de leurs conseils d'établissement.

Plutôt que de renforcer le carcan administratif, je préfère que nous nous dotions des moyens d'agir au niveau académique ou national, en nous appuyant éventuellement sur un rapport parlementaire qui évaluerait régulièrement la contribution des établissements sous contrat à la mixité sociale.

Je reste ouvert à la discussion mais mon avis sera défavorable.

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Je partage votre avis, monsieur le ministre. L'enseignement privé a fait de gros efforts pour renforcer la mixité sociale. Quelle serait la portée juridique de cet article ? Entre nous, madame la rapporteure, nous nous ferions plaisir en le votant, sans plus. Gardons l'objectif à l'esprit mais ne l'inscrivons pas dans la loi.

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Je voterai l'amendement des rapporteurs. Nous en avions d'ailleurs déposé un, en ce sens. Ce n'est pas rien que d'inscrire cet objectif de mixité sociale dans la loi pour les établissements sous contrat. Nous l'avons bien fait en 2013 pour les écoles publiques. Lorsque l'on veille, on surveille, on a connaissance des événements, on contrôle. C'est important.

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Je m'opposerai à cet amendement. Bien évidemment, nous ne sommes pas contre la mixité sociale mais à force, j'ai l'impression que l'on finit par nier le compte d'exploitation d'une école d'enseignement privé. Chaque année, elles négocient un forfait. Nous ne pouvons qu'encourager les collectivités à soutenir cet objectif. M. Pupponi nous a donné l'exemple de son territoire et nous nous en réjouissons, mais n'occultons pas l'aspect financier.

La commission adopte l'amendement et l'article 24 ter est ainsi rétabli.

Article 24 quater : Transmission annuelle par les services statistiques du ministère de l'éducation nationale des données sociales anonymisées des élèves relevant des établissements publics et privés aux communes, au conseil départemental et au conseil régional concernés

La commission adopte l'article 24 quater sans modification.

La séance est levée à douze heures cinquante-cinq.

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi confortant le respect des principes de la république

Réunion du mercredi 9 juin à 9 heures

Présents. - Mme Laetitia Avia, Mme Géraldine Bannier, M. Belkhir Belhaddad, Mme Anne-Laure Blin, M. Florent Boudié, M. Pierre-Yves Bournazel, M. Xavier Breton, Mme Anne Brugnera, Mme Marie-George Buffet, Mme Émilie Chalas, M. Francis Chouat, M. Éric Ciotti, Mme Fabienne Colboc, M. Charles de Courson, M. Éric Diard, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Christophe Euzet, Mme Isabelle Florennes, Mme Annie Genevard, Mme Perrine Goulet, Mme Florence Granjus, M. Sacha Houlié, Mme Anne-Christine Lang, M. Jean-Paul Mattei, Mme Valérie Oppelt, M. Patrice Perrot, M. Éric Poulliat, M. Julien Ravier, M. Pacôme Rupin, Mme Cécile Untermaier, Mme Laurence Vichnievsky, M. Guillaume Vuilletet

Excusés. - M. David Habib, M. Boris Vallaud

Assistaient également à la réunion. - M. Raphaël Gérard, M. Grégory Labille, M. Adrien Morenas