La commission a poursuivi l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (n° 1135 rect.), sur le rapport de M. Jean-Baptiste Moreau.
Mes chers collègues, nous reprenons nos travaux afin de poursuivre l'examen du projet de loi, modifié par le Sénat, pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Article 2 (article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime) Sanctions des manquements aux obligations contractuelles (suite)
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE418 de M. André Chassaigne et CE177 de M. François Ruffin.
Cet article 2 ne consacre que dix alinéas à la définition des faits passibles d'une amende administrative. Il conviendrait d'en insérer un onzième afin de sanctionner le fait d'acheter un produit en dessous du coût de production estimé par l'indicateur de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM) ou par les établissements mentionnés aux articles L. 621-1 et D. 684-1 du code rural et de la pêche maritime.
Je ne doute pas que mon amendement CE418, d'une très grande sobriété et d'une certaine délicatesse, emportera votre assentiment.
Au risque de passer pour peu délicat, je me vois dans l'obligation de donner un avis défavorable…
L'estimation des coûts de production sera définie par les interprofessions ; même si la vente à perte dégrade l'image des produits alimentaires au mépris du respect du travail des producteurs, un tel mécanisme est excessivement complexe et ses effets collatéraux sont difficiles à anticiper. Il n'y a pas un prix, mais une multitude de prix. Parfois même, il peut être dans l'intérêt du producteur de vendre à perte, notamment dans le secteur des fruits ou des légumes.
Cette proposition revient à dire que c'est à la puissance publique de fixer les prix, puisque l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires est évoqué. Une telle disposition est incompatible avec le droit communautaire ; ce n'est par ailleurs pas ce que nous souhaitons, car la responsabilité doit porter sur les interprofessions.
Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
Notre amendement CE177 est d'inspiration identique. J'entends les arguments du rapporteur, il est vrai que les agriculteurs ont parfois intérêt à vendre à perte, mais j'aimerais comprendre la logique qui pousse à brader le fruit de leur travail. Je prends, par ailleurs, acte des propos du ministre qui ne souhaite pas garantir aux agriculteurs que le travail soit a minima rémunéré à hauteur des frais qu'ils engagent. Il serait regrettable que la loi ne puisse pas interdire d'acheter à perte le travail des agriculteurs.
Cela nous ramène au débat précédent portant sur l'identité de celui qui doit former les prix, l'interprofession ou l'Observatoire. Peu importe qui fabrique la cartouche, puisque ce sont toujours les mêmes qui ont le fusil en main…
Je maintiens que parfois, et particulièrement dans le cas de denrées périssables, l'agriculteur a plus intérêt à vendre à perte qu'à ne pas vendre du tout.
Vous interprétez nos propos, Monsieur Prud'homme…
Tout à fait : vous êtes d'ailleurs coutumier du fait, et il est bon que vous l'assumiez. À aucun moment vous ne m'avez entendu dire que nous ne souhaitions pas protéger les producteurs dans un certain nombre de domaines.
J'ai simplement indiqué, en réponse à l'amendement de M. Chassaigne, que cette proposition revenait à considérer que l'OFPM, FranceAgriMer, etc., et donc la puissance publique, seraient responsables des indicateurs qu'ils valideraient. C'est justement ce dont nous ne voulons pas : notre souhait est que les interprofessions prennent leurs responsabilités et valident elles-mêmes les indicateurs par le biais de compromis qu'elles auront su trouver ensemble. Je n'ai pas dit autre chose.
La commission rejette successivement ces amendements.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE497 du Gouvernement.
Cet amendement propose la suppression de l'alinéa 2, qui vise à sanctionner d'une amende administrative le fait pour un acheteur d'imposer des clauses de pénalités de retard de livraison supérieures à 2 % de la valeur des produits livrés. Il va de soi que la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), dans le cadre de son action de contrôle des relations commerciales, reste très vigilante à la mise en oeuvre de telles clauses.
Nous sommes conscients des difficultés liées aux pénalités de retard, ainsi que nous nous y étions engagés devant le Sénat, la saisine de la Commission d'examen des pratiques commerciales (CEPC) est en cours, afin qu'elle établisse avant la fin de l'année des recommandations propres à éclairer les acteurs économiques sur les bonnes et mauvaises pratiques dans ce domaine. C'est pourquoi il convient de supprimer cette disposition prévue par l'alinéa 12 de l'article 2.
Une fois encore, on démaille le texte adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat. Il paraît curieux de supprimer la sanction pesant sur l'acheteur en supprimant une mesure protectrice des agriculteurs, et qui a été voulue par les États généraux de l'alimentation (EGA).
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE264 de M. Dominique Potier.
Cet amendement est identique à celui qu'avait déposé M. Thierry Benoit, il a donc une chance d'être adopté…
Il s'agit de sanctionner le fait, pour un acheteur, de ne pas apporter de justifications ou de contreparties à des obligations restant uniquement à la charge du vendeur. La formule est très générale et vise toute mesure injustifiée résultant d'un rapport de forces léonin et déséquilibré, que j'appellerai « abus de pouvoir ».
Cet amendement me semble parfaitement aller dans le sens de ce que souhaite la majorité, le Gouvernement ainsi que l'ensemble des députés rassemblés dans cette salle.
Cet amendement veut clarifier la notion de déséquilibre significatif qui existe déjà dans le code de commerce. Son adaptation au secteur agroalimentaire fait précisément l'objet de la demande d'habilitation du Gouvernement à l'article 10.
Le débat parlementaire introduit dans le texte l'obligation du retour formel de l'acheteur sur la proposition du contrat. Nous avons prévu la sanction applicable si l'acheteur n'adressait pas une réponse écrite en cas de refus du contrat, ce qui satisfait une partie de votre proposition.
Il n'y a donc pas lieu de rendre le dispositif plus complexe ; pour ces raisons, mon avis est défavorable.
Vos arguments ne m'ont pas convaincu : pour une fois qu'un amendement de portée générale propose de sanctionner toute négociation commerciale fondée sur un abus de pouvoir, lorsque l'acheteur pose des conditions inacceptables et injustifiées, il serait surréaliste de ne pas l'adopter.
Nous ne sommes jamais favorables à donner des habilitations pour que tout soit réglé par ordonnances. À plus forte raison lorsqu'un amendement pourrait sans problème inscrire la solution dans la loi : pourquoi renvoyer aux ordonnances ? Votre argumentation ne tient pas, c'est le pistolet sur la tempe : il faudrait laisser faire, tout imposer sans justification et sans réagir !
La commission rejette l'amendement.
Elle étudie ensuite l'amendement CE265 de M. Dominique Potier.
Parmi les comportements susceptibles de faire l'objet d'une sanction, nous avions relevé le blocage de la négociation avec le producteur dans le cas d'une production laitière ou de la production d'autres denrées périssables non collectées. Il s'agit donc de sanctionner le refus de collecte. Sans doute me répondrez-vous que cette sanction est déjà prévue ailleurs dans le texte, mais il ne me semble pas, en l'occurrence, que la répétition soit superfétatoire.
À défaut d'être prévues par ce texte, les modalités de collecte sont définies dans la loi, car elles sont déterminées par le contrat : si celui-ci n'est pas respecté et tant qu'il est en cours de validité, il ne peut y avoir d'arrêt de collecte ou de livraison. Dans le cas contraire, c'est le juge qui doit être saisi, dans le cadre de ce conflit privé. Avis défavorable.
Avis également défavorable pour les mêmes raisons.
L'amendement est retiré.
La commission adopte l'article 2 modifié.
Article 3 (article L. 631-26 du code rural et de la pêche maritime) Constatation des infractions
La commission examine les amendements identiques CE98 de M. Jérôme Nury et CE123 de M. Dino Cinieri.
Compte tenu du rôle capital des agents chargés de désigner les manquements mentionnés à l'article L. 631-25 du code rural et de la pêche maritime, il est nécessaire qu'ils soient mentionnés dans le texte de loi afin que, dans chaque cas, les agents compétents en la matière soient mandatés. Faute de quoi, les sanctions applicables aux fraudes éventuelles pourraient ne pas être correctement prononcées.
Mon amendement CE123 est identique : il s'agit surtout d'apporter une précision rédactionnelle.
L'intention du Gouvernement est d'ajouter les agents de FranceAgriMer à la liste des agents habilités à constater les manquements. Aujourd'hui, seuls les agents de la DGCCRF en sont chargés et ils n'ont procédé à aucun contrôle sur le fondement des articles L. 631-24 et suivants du code rural et de la pêche maritime.
Laissons au Gouvernement la possibilité d'ajuster la liste des personnes chargées de cette responsabilité, car l'inscrire dans la loi revient à l'obliger à passer par un projet de loi pour la modifier. Il faut conserver un peu de souplesse.
Un décret prévoira que les agents de FranceAgriMer seront également chargés des contrôles, ce que cet amendement ne fait pas ; avis défavorable.
La commission rejette les amendements.
Elle adopte ensuite l'amendement rédactionnel CE78 du rapporteur.
Puis elle adopte l'article 3 modifié.
Article 4 (articles L. 631-27, L. 631-28 et L. 631-29 du code rural et de la pêche maritime) Renforcement de la médiation agricole
La commission se saisit de l'amendement CE266 de M. Dominique Potier.
Il s'agit de contraindre plus avant le médiateur des relations commerciales agricoles à saisir le ministre de l'économie. La rédaction du projet de loi ne mentionne qu'une possibilité de saisine du ministre par le médiateur, or nous considérons que, lorsqu'il y a nullité d'un contrat jugé illicite, la saisine doit être obligatoire.
Nous restons dans le même débat : vous vous contentez de prévoir des facultés alors que certaines circonstances appellent des obligations. Le médiateur ne « peut » pas, il doit saisir.
Le médiateur, qu'il saisisse le ministre ou qu'il procède au name and shame – « nommer et dénoncer », pour parler français –, doit pouvoir garder une marge d'appréciation des outils à sa disposition. Pour cette raison, mon avis est défavorable.
Il n'est pas possible de rendre automatique la saisine du ministre de l'économie par le médiateur, car cette action pourrait dissuader le recours à la médiation. Or nous souhaitons qu'il y soit fait appel le plus souvent possible ; le texte actuel laisse au médiateur son pouvoir d'appréciation. Compte tenu de sa pratique, il pourra signaler au ministre les cas les plus problématiques.
À travers ce texte, nous recherchons l'apaisement des relations commerciales ; l'idée n'est donc pas d'introduire systématiquement des mesures coercitives, mais bien d'avoir à disposition des outils pertinents permettant d'agir rapidement et efficacement lorsque cela est nécessaire.
Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
La question n'est pas de s'en remettre à l'appréciation du médiateur lorsqu'un échec est constaté, une procédure bloquée ; et vous connaissez l'urgence qui caractérise ces situations. À un moment donné, il faut prendre acte que l'interprofession et le médiateur ont échoué, et il n'est pas possible de considérer que la saisine du ministre dépend du choix du médiateur.
Vous protégez systématiquement la liberté de négociation et vous redoutez que toute entrave vienne bloquer ces mécanismes ; vous faites mine d'ignorer que les rapports de force sont totalement déséquilibrés. Chaque fois que nous proposons de faire intervenir la puissance publique pour rétablir l'équilibre, vous vous y opposez en avançant des arguments qui ne nous convainquent pas.
La commission rejette cet amendement.
Elle étudie ensuite l'amendement CE481 du Gouvernement.
Il s'agit de supprimer l'information des parties par le médiateur en cas de saisine du ministre. Je rappelle que, dès lors que le ministre engage une action en justice, les parties en sont nécessairement informées, conformément aux dispositions du code civil.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Elle se saisit alors de l'amendement CE339 de M. Dominique Potier.
Toujours dans le registre des facultés laissées au médiateur, nous pensons qu'en cas d'échec de la négociation ou d'un déséquilibre abusif constaté dans l'accord-cadre, la puissance publique doit impérativement être saisie.
Éventuellement, si votre amendement s'était borné à ne prévoir que l'ajout de la saisine du ministre chargé de l'agriculture, j'aurais pu y donner un avis favorable. Mais j'insiste pour que les clauses abusives puissent être sanctionnées : votre rédaction supprime cette possibilité. Avis défavorable.
La commission rejette cet amendement.
Elle adopte ensuite l'amendement de coordination CE79 du rapporteur.
La commission examine les amendements identiques CE22 de M. Arnaud Viala et CE419 de M. André Chassaigne.
Mon amendement CE22 vise à éviter tout chantage à la collecte, en évitant, particulièrement pour la production laitière et autres denrées périssables, que le blocage des négociations n'entraîne l'arrêt de la collecte, le contrat précédent demeurant en vigueur jusqu'à l'établissement d'un nouvel accord.
Notre amendement CE419, identique, vise à éviter les pratiques de chantage à la collecte et au déréférencement exercées sur les producteurs, ce qui donnerait une force colossale de négociation aux acheteurs industriels. L'inversion de la construction des prix comporte en effet des risques, notamment dans le cas de la production laitière : la crainte de ne plus être collecté affaiblit la position du producteur vis-à-vis de son acheteur. Les industriels pourraient s'appuyer sur cet état de dépendance économique de fait pour faire accepter aux producteurs des conditions très inférieures à leurs besoins.
Tant qu'il n'est pas réformé ou rompu, un contrat lie les parties, faute de quoi les cocontractants, le livreur comme le livré, s'exposent à des sanctions judiciaires. Avis défavorable.
Ainsi que je l'ai déjà indiqué, je reconnais tout à fait que certains soient tentés d'exercer un chantage à la collecte et au déréférencement. Mais les dispositions du code de commerce assimilent l'arrêt de collecte à une rupture de contrat, et la menace de déréférencement à une pratique abusive répréhensible. Il n'est donc pas nécessaire de prévoir des dispositions supplémentaires : utilisons l'arsenal existant.
Par ailleurs, en imposant la poursuite du contrat pour une durée susceptible d'être longue, ces amendements s'opposent à la liberté contractuelle et lieraient les parties pour un temps qui pourrait avoir des effets dommageables pour les producteurs comme pour les acheteurs.
Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
Encore faudrait-il être assurés, Monsieur le ministre, des moyens qui sont ceux de la DGCCRF pour faire appliquer les textes en vigueur. J'ai vécu bien des situations dans lesquelles la DGCCRF ne disposait manifestement pas des moyens nécessaires, et je ne crois pas qu'il s'agissait d'exceptions. Je suis persuadé que c'est là que réside le problème.
La commission rejette les amendements.
Elle examine ensuite, en discussion commune, l'amendement CE5 de M. Arnaud Viala, les amendements identiques CE100 de M. Jérôme Nury et CE126 de M. Dino Cinieri, ainsi que les amendements identiques CE34 de M. Thierry Benoit et CE216 de M. Vincent Descoeur.
Mon amendement CE5 porte sur une difficulté importante rencontrée dans cette nouvelle lecture. Il tend à organiser une voie de recours en référé lorsque la médiation en matière d'accord-cadre ou de clause de renégociation n'a pas abouti.
J'insiste sur le fait que tous les participants aux EGA se sont accordés à juger que cette possibilité de saisine du juge est indispensable ; à défaut, ce texte sera d'une faiblesse affligeante.
Je partage le point de vue de M. Arnaud Viala, nous sommes sur un point dur : il s'agit de donner du poids au médiateur, et faire en sorte qu'il soit un arbitre capable de se faire entendre.
Mon amendement CE100 lui confère la faculté de rendre ses conclusions publiques, sans que cela soit conditionné à l'accord des parties, ce qui nous semblerait l'affaiblir. Nous ne pouvons nous satisfaire d'un médiateur dont le rôle serait seulement consultatif. Afin d'équilibrer les relations commerciales, il est impératif qu'il puisse pleinement tenir son rôle de manière exécutive. Mon amendement propose de supprimer toute restriction à ses pouvoirs.
Mon amendement CE126, identique au précédent, propose de donner la possibilité au médiateur des relations commerciales agricoles, en cas d'échec de la médiation, et après avoir justifié devant le juge son intérêt à agir, de saisir le juge des référés. Lui permettre de justifier son intérêt à agir suffit à lui donner un droit de saisine. Seules les parties étaient en mesure de saisir le juge à l'issue de la médiation ; en donnant ce pouvoir au médiateur, nous renforcerons la protection des parties et empêcherons les opérateurs de faire volontairement échec à la médiation.
Nous avons déjà débattu de cette question lors de la première lecture, et j'avais moi-même déposé un amendement prévoyant la saisine du juge en référé.
J'ai toutefois été convaincu depuis par l'ensemble des parties prenantes, notamment par le médiateur des relations commerciales agricoles ; j'avais indiqué au cours du débat en séance publique que, même si le médiateur avait la possibilité, par l'intermédiaire du ministère de l'économie, de saisir le juge en référé, il ne disposait pas moins avec le name and shame d'une arme particulièrement dissuasive pour amener les cocontractants à s'entendre et éviter les dérives. Qui plus est, prenant en compte vos remarques dans l'hémicycle, j'ai déposé un amendement CE71 supprimant la condition d'accord préalable des parties et revenant à la rédaction originelle de la commission des affaires économiques en première lecture. À entendre l'ensemble des parties prenantes, le name and shame est beaucoup plus efficace que la saisine du juge en référé : c'est une véritable arme nucléaire, c'est donc de la dissuasion nucléaire que nous allons jouer plutôt que de la saisine du juge en référé !
Pour ces raisons, mon avis est défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Comme nous ne cessons de le dire, permettre au médiateur de saisir un juge n'est ni possible, ni souhaitable. Au-delà de la question de l'intérêt pour agir, je maintiens que l'éventualité d'un recours en justice du médiateur risquerait de dissuader certaines des parties de recourir à ses services. Ce serait préjudiciable à la qualité des relations commerciales ainsi qu'à la mission du médiateur et même à l'objectif que nous visons : inciter les cocontractants à recourir le plus possible aux services du médiateur.
Pouvez-vous nous indiquer, Monsieur le ministre, combien de fonctionnaires seront recrutés par le ministère de l'économie pour faire face aux centaines de milliers de contrats qui seront en négociation et nécessiteront la saisine du juge ? Si seul le ministre est en mesure de saisir le juge, l'embouteillage est à craindre.
Par ailleurs, je ne souscris absolument pas à votre argument d'un risque d'affaiblissement du médiateur : au contraire, toutes les solutions de conflit impliquent une phase de médiation nécessairement adossée au recours ultime que constitue l'intervention de la justice. Tous les médiateurs de France, dans les affaires familiales par exemple, agissent en sachant qu'ils pourront toujours requérir la justice en cas d'échec, et cela n'affaiblit en rien leur position.
Nous voulions doter le médiateur de la capacité à afficher cette menace afin de lui donner plus de force dans ses relations avec les cocontractants ; je ne comprends donc absolument pas votre argument.
Dès lors que l'on considère que la mission du médiateur est de parvenir à un compromis avec l'ensemble des cocontractants, si nous lui donnons le pouvoir de saisir le juge, une des parties pourrait être dissuadée de faire appel à lui. C'est ce que j'ai toujours dit : pour saisir le médiateur, il faut être au moins deux. Si une des parties refuse de venir devant le médiateur au motif qu'il a la capacité de saisir le juge ensuite, son rôle en sera affaibli alors que nous souhaitons justement lui donner tout pouvoir de négociation afin de parvenir à un compromis, particulièrement dans le cadre de discussions sur les accords ou les indicateurs de coût.
J'ai du mal à comprendre votre raisonnement. Si les deux parties font appel au médiateur, c'est bien qu'elles sont dans une logique de recherche d'un compromis ; ou alors, effet pervers, un des interlocuteurs imposera une voie de sortie au médiateur s'il le juge incapable d'aller plus loin.
Je présenterai tout à l'heure un amendement proposant la publication du litige en cas de désaccord. À chaque fois qu'un médiateur intervient, qu'il s'agisse des collectivités locales, du doit public ordinaire, etc. c'est bien le recours à la justice en cas d'échec qui fait sa force. Il n'est alors absolument pas affaibli ; c'est même ce qui fait toute sa mission.
Encore une fois, vous semblez prendre bien des précautions pour protéger des parties prenantes dont on sait que, lorsque l'on parvient à saisir le médiateur, c'est qu'elles sont dans un rapport de forces totalement déséquilibré. Vous abandonnez les clés de la négociation commerciale aux mains des plus puissants, les transformateurs en position de quasi-monopole et la grande distribution en position d'oligopole.
Monsieur le ministre, vous avancez votre contre-argumentation en considérant que, si le médiateur a la possibilité de saisir le juge, une des deux parties pourrait décider de ne pas aller devant le médiateur. Mais même sans cette possibilité, si une partie s'y refuse, elle n'ira pas devant le médiateur. Nous proposons de doter le médiateur d'un réel pouvoir. Imagine-t-on disputer une finale de coupe du monde avec d'un côté la France et de l'autre la Croatie, et au milieu un arbitre sans sifflet ni carton jaune ou rouge ? Le match n'aurait aucun sens ni aucune destinée. Il faut donner la possibilité au médiateur d'être autre chose qu'un simple intervenant, mais un vrai arbitre au sens propre du terme, afin de permettre qu'une issue soit trouvée.
Je rappelle que nous avons ouvert au médiateur la possibilité de se saisir lui-même de dossiers qu'il juge conflictuels ou faisant apparaître un rapport de force manifestement problématique.
Je rappelle encore que le name and shame sera systématiquement autorisé, ce qui permettra au médiateur de dénoncer le comportement d'une des parties qui ne serait pas en accord avec l'esprit des textes en vigueur. Cette possibilité est bien plus forte que la saisine du juge, dont on sait par ailleurs qu'elle peut conduire à une longue procédure.
Je rappelle que le médiateur n'est pas un arbitre. Il y a entre les deux une différence fondamentale : le médiateur a pour rôle de trouver les bases d'un compromis, pas de juger d'une chose ou prendre une décision.
En revanche, Monsieur Dive, les parties peuvent saisir le juge ; mais, si le médiateur a cette possibilité, les parties ne feront plus appel à lui. Or une des assises de notre texte est que la médiation prenne tout son rôle, tout son poids et son importance dans la recherche de compromis entre les cocontractants, qu'il s'agisse de la rédaction et la validation des contrats ou de la validation des indicateurs de coût.
La commission rejette l'amendement CE5.
Elle rejette ensuite les amendements identiques CE100 et CE126.
Puis elle rejette les amendements identiques CE34 et CE16.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE269 de M. Dominique Potier.
Vous avez évoqué la capacité du médiateur à rendre annuellement compte de l'état des prix qu'il aura constaté au sein des différentes filières. Nous proposons, comme nous l'avons déjà fait en première lecture, de mesurer les effets de la contractualisation au sein d'une ou plusieurs filières – autrement dit, de ne pas se borner à un arrêt sur image, mais de faire le film de ces négociations, ce qui permettrait de les évaluer.
Le quatrième alinéa de l'article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime prévoit déjà que le médiateur des relations commerciales agricoles « peut émettre un avis sur toute question transversale relative aux relations contractuelles, à la demande d'une organisation interprofessionnelle ou d'une organisation professionnelle ou syndicale ». Le projet de loi ajoute d'ailleurs « ou de sa propre initiative ». Votre amendement est donc satisfait, c'est pourquoi l'avis est défavorable.
Cet amendement est satisfait puisque le médiateur peut déjà traiter de ce sujet à l'occasion d'une saisine. En outre, ce travail peut relever de la recherche économique ; il n'y a donc pas lieu d'inscrire cette mission dans la loi. Pour ces raisons, mon avis est défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine les amendements identiques CE99 de M. Jérôme Nury et CE124 de M. Dino Cinieri.
L'alinéa 11 prévoit que le médiateur est libre de rendre ses conclusions publiques sauf pour les litiges prévus à l'article L. 627 pour lesquels l'accord préalable des parties est nécessaire. Nos amendements CE99 et CE124 proposent de supprimer cette restriction afin que le médiateur puisse jouer pleinement son rôle et publier ses conclusions. Cette publication serait bénéfique aux producteurs puisqu'elle dissuaderait efficacement les comportements abusifs de la transformation ou de la distribution.
Je demande le retrait de ces amendements au profit de mon amendement CE71, qui prévoit une simple information des parties. Mais l'esprit est le même : garder cet alinéa en l'état bloquera toute initiative de name and shame du médiateur.
Ce dispositif de publication, qui existe déjà pour les manquements aux règles des délais de paiement, a fait preuve de son efficacité. Avis défavorable.
La commission rejette ces amendements.
Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CE71 du rapporteur et CE267 de M. Dominique Potier.
L'issue d'une médiation peut avoir valeur d'exemple pour l'ensemble des opérateurs placés dans une situation comparable, que la solution dégagée soit susceptible d'être reproduite, ou au contraire pour souligner une situation de blocage imputable à l'une ou l'autre ou aux deux parties, ce que l'on appelle le name and shame, « nommer et dénoncer ». Il est important que ce dispositif introduit par l'Assemblée nationale et conservé par le Sénat ne soit pas conditionné par l'accord préalable des parties à la médiation, et qu'il fasse seulement l'objet d'une information des parties.
Le but de l'amendement CE71 n'est effectivement pas que le « nommer et dénoncer » soit systématique, mais qu'il soit comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de ceux qui ont fait appel au médiateur afin d'aboutir à un accord équilibré, et non au seul profit de la partie la plus puissante.
La commission adopte l'amendement CE71 du rapporteur.
En conséquence, l'amendement CE267 tombe.
La commission examine l'amendement CE268 de M. Dominique Potier.
Cet amendement propose, après l'alinéa 11, d'insérer un alinéa ainsi rédigé : « Sur demande du ministre chargé de l'économie ou de l'agriculture, le médiateur peut produire un rapport présentant le bilan des médiations qu'il a menées et émettre des recommandations sur les évolutions législatives et réglementaires qui lui paraissent nécessaires pour améliorer son action ».
L'esprit est le même que celui du groupe Socialiste et Républicain lors de l'examen du texte au Sénat : pousser le médiateur dans sa capacité à produire des analyses et à aider la puissance publique et les parties prenantes à adapter un dispositif dont nous savons qu'il est faible par essence.
Là encore, je vous invite à lire l'article L. 631-27 du code rural et de la pêche maritime : « Il peut faire toutes recommandations sur l'évolution de la réglementation relative aux relations contractuelles mentionnées au deuxième alinéa du présent article, qu'il transmet aux ministres chargés de l'économie et de l'agriculture ».
De fait, je vous rassure, le médiateur a été largement consulté pour la rédaction de cet article ; avis défavorable.
Il est vrai qu'il est important que le médiateur puisse établir des rapports. Cela fait aussi partie de sa mission, il doit formuler des recommandations à l'intention du Gouvernement. Toutefois, il est nommé par le ministre de l'agriculture qui n'a nullement besoin de loi pour lui adresser une telle demande : il lui suffit de décrocher son téléphone ou de lui envoyer un courrier.
La commission rejette cet amendement.
Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE270 de M. Dominique Potier.
Elle en vient à l'examen des amendements identiques CE147 de M. Dino Cinieri et CE157 de M. Antoine Herth.
Mon amendement CE147 propose que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur la faisabilité de la mise en place d'un arbitrage public ainsi que sur les voies d'amélioration de la résolution des litiges amiable et contentieuse.
Les cas d'échec des renégociations, y compris à l'issue de la médiation, doivent trouver une issue satisfaisante et rapide. C'est pourquoi l'expertise que pourra mener le Gouvernement est indispensable, conformément aux préconisations de l'atelier n° 7 des EGA.
C'est le médiateur qui publie son propre bilan, y compris à la demande du Gouvernement ; mon avis est donc défavorable.
La commission rejette les amendements.
Puis elle adopte l'article 4 modifié.
Article 5 (article L. 632-2-1 du code rural et de la pêche maritime) Rôle des organisations interprofessionnelles agricoles
La commission examine les amendements identiques CE64 de Mme Lise Magnier et CE368 de M. Michel Delpon.
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette ces amendements.
Elle est alors saisie de l'amendement CE166 de M. Vincent Descoeur.
Les indicateurs de coûts de production et de prix élaborés par les interprofessions n'auraient, dans la rédaction actuelle, aucune valeur contraignante pour les opérateurs du secteur, y compris dans le cas où ils feraient l'objet d'un accord interprofessionnel étendu : ces indicateurs seraient « noyés » dans une multitude d'autres indicateurs possibles.
En aucun cas, le principe de « liberté contractuelle » ne peut être opposé à cette proposition : l'évolution souhaitée ne remet nullement en cause la réglementation européenne puisqu'elle laisse aux opérateurs la pleine liberté de négocier la façon de prendre en compte ces indicateurs interprofessionnels dans les contrats – ces indicateurs qui de surcroît seraient construits à l'issue d'une « libre négociation » entre les différents maillons de la filière au sein des interprofessions.
Une telle mention a été introduite à l'article 1er, alinéa 14, relatif aux indicateurs ; avis défavorable.
Cet amendement est satisfait. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CE203 de M. Frédéric Descrozaille.
La commission adopte cet amendement.
Elle examine l'amendement CE208 de M. Frédéric Descrozaille, qui fait l'objet du sous-amendement CE499 du Gouvernement.
L'amendement CE208 vise à reprendre les dispositions de l'OCM relatives aux missions pouvant être poursuivies par les interprofessions afin de les inscrire à l'article 5 du projet de loi.
Le sous-amendement CE499 propose donc de reprendre très exactement les termes de l'OCM pour le point ab) comme cela est fait pour le point ac) de cet amendement, à savoir « contribuer à une meilleure coordination de la mise sur le marché ».
La commission adopte le sous-amendement CE499 du Gouvernement.
Puis elle adopte l'amendement CE208 sous-amendé.
Ensuite, elle adopte l'amendement de coordination CE82 du rapporteur.
La commission examine l'amendement CE211 de M. Frédéric Descrozaille.
La commission adopte cet amendement.
Puis elle est saisie de l'amendement CE4 de M. Arnaud Viala.
L'amendement est retiré.
La commission étudie l'amendement CE271 de M. Dominique potier.
Il faudra m'expliquer pourquoi vous n'accepteriez pas cet amendement…
La loi précise que les accords de répartition de la valeur ajoutée au sein des filières ne peuvent pas faire l'objet d'accords étendus. On sait que la réglementation européenne interdit les accords étendus, mais le préciser dans le texte est inutile.
Des élections européennes vont bientôt avoir lieu, qui ne semblent pas nécessairement bien orientées pour le moment ; mais nous pouvons avoir de bonnes surprises. Si la possibilité de passer des accords de répartition équitable de la valeur ajoutée au sein des filières, telles que nous les souhaitons tous, était finalement admise par l'Europe, nous aurions juste l'air bête d'avoir créé cette négation inutile dans notre propre droit.
C'est pourquoi je propose un toilettage de la loi, qui supprime cette précision qui est inutile et serait dangereuse si dans l'avenir l'Europe évoluait dans le bon sens.
Je m'en remets à la sagesse de la commission, car M. Potier n'a pas été gentil. (Rires.)
Je peux vous dire que ce travail de précision a été fourni par les sénateurs du groupe Socialiste et Républicain ; on les traite de conservateurs, mais ils ont prévu les accords de demain qui n'existent pas encore aujourd'hui.
La commission adopte cet amendement.
La commission examine en discussion commune l'amendement CE35 de M. Thierry Benoit et les amendements identiques CE101 de M. Jérôme Nury et CE128 de M. Dino Cinieri.
Afin que les producteurs puissent bénéficier de plans de filière et d'indicateurs adaptés à leur situation, il est nécessaire que ces indicateurs puissent être proposés par les organisations professionnelles au sein des interprofessions. Leur proximité avec les secteurs agricoles leur permettra d'adapter les critères fournis par l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires et les interprofessions. C'est le sens de l'amendement CE101.
Mon amendement CE128 est identique. Les groupements professionnels doivent être en mesure de donner des indicateurs utiles à la détermination des conditions du contrat, en plus de ceux fournis par l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires et des interprofessions.
Ces organisations interprofessionnelles sont plus à même de répondre aux besoins spécifiques des filières et des professions en cause. Elles bénéficient d'une plus grande proximité avec les secteurs agricoles.
Je donnerai un avis défavorable à l'amendement CE35. Même si l'idée est tentante, nous sommes contraints par le règlement OCM, dont l'article 157 dispose que les interprofessions poursuivent un but précis prenant en compte les intérêts de leurs membres et ceux des consommateurs, « qui peut inclure, notamment, un des objectifs suivants… ». Nous ne pouvons donc pas, malheureusement, les rendre obligatoires.
Quant aux amendements CE101 et CE128, ils sont déjà satisfaits par la combinaison de l'article 1er, alinéa 14, tel qu'adopté avec l'amendement du rapporteur – « Les organisations interprofessionnelles peuvent élaborer ou diffuser ces indicateurs qui peuvent servir d'indicateurs de référence. Elles peuvent, le cas échéant, s'appuyer sur l'observatoire mentionné… », et de l'article 5 : « Elles peuvent formuler des recommandations sur la manière de les prendre en compte pour la détermination, la révision et la renégociation des prix ». Je demande donc le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.
La commission rejette l'amendement CE35.
Puis elle rejette les amendements CE101 et CE128.
Elle adopte enfin l'article 5 modifié.
Article 5 bis A (nouveau) (article L. 632-3 du code rural et de la pêche maritime) Accords, au sein des organisations interprofessionnelles, sur les délais de paiement dérogatoires
La commission est saisie de l'amendement CE474 du Gouvernement.
Le code de commerce prévoit à l'article L. 443-1 la possibilité pour les interprofessions viticoles de déroger aux délais de paiement de droit commun – quarante-cinq jours fin de mois ou soixante jours après émission de la facture – par accord interprofessionnel étendu.
Les dispositions introduites par cet article 5 bis placent en réalité cette possibilité dérogatoire hors de tout contrôle des pouvoirs publics, qui ne seraient ainsi plus en capacité de veiller efficacement à l'équilibre des relations commerciales et de protéger la partie faible dans la relation contractuelle. J'estime qu'il est de la responsabilité de l'interprofession de justifier ces demandes de délais dérogatoires, comme il est de la responsabilité de l'État d'éviter les délais abusifs, par exemple lorsque le paiement ultime aurait été renvoyé au-delà de la consommation du produit fini lui-même.
Le Gouvernement propose de supprimer cet article afin de conserver le dispositif actuel, plus équilibré. Nous sommes cependant prêts à préciser les contours de l'examen, réalisé par les administrations, des demandes de dérogation des interprofessions en complétant l'instruction technique conjointe des ministères de l'économie et de l'agriculture – la DGCCRF et la direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises (DGPE) –, travail qui est d'ores et déjà engagé.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 5 bis A est supprimé.
Article 5 ter (article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime) Représentation des organisations de producteurs au sein des organisations interprofessionnelles agricoles
La commission examine en discussion commune les amendements CE72 du rapporteur et CE272 de M. Dominique Potier.
L'objet de cet amendement est de reprendre la disposition adoptée par l'Assemblée nationale qui prévoit que les organisations de producteurs ou leurs associations les plus représentatives, éventuellement organisées en collèges, puissent être présentes au sein des interprofessions, ceci sans porter atteinte à la liberté d'association dont disposent les interprofessions.
Cet amendement CE272 a une histoire : c'est le groupe Nouvelle Gauche qui avait introduit la présence des OP dans les interprofessions. Cela avait été considéré comme du bon sens. Mais le Sénat l'a jugée inutile, comme tant de choses précieuses que nous avions bâties ensemble. Il nous revenait légitimement de la rétablir.
Avis favorable à l'amendement CE72. Mais l'histoire rendra hommage à ceux qui ont oeuvré et commencé à travailler sur ce sujet.
La commission adopte l'amendement CE72 et l'article 5 ter est ainsi rétabli.
En conséquence, l'amendement CE272 tombe.
Article 5 quater (article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime) Rôle de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires dans la définition des indicateurs de coûts de production par filière
La commission examine l'amendement CE241 de Mme Monique Limon.
Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l'article 5 quater telle que proposée par notre groupe en première lecture et adoptée en séance publique. Il s'agit de renforcer le dispositif des indicateurs de coût de production, en permettant une saisine de l'OFPM, pour apporter un appui technique aux interprofessions. Néanmoins, il n'est pas souhaitable que l'organisme se substitue aux interprofessions pour la création de ces indicateurs ; c'est pourquoi nous proposons la suppression de la seconde phrase de l'alinéa 2.
La commission adopte l'amendement.
Elle adopte ensuite l'article 5 quater modifié.
Article 5 quinquies (article L. 611-2 du code de commerce et article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime) Sanction du défaut de publication des comptes
La commission est saisie, en discussion commune, de l'amendement CE475 du Gouvernement, des amendements identiques CE73 du rapporteur CE237 de M. Jérôme Nury et CE378 de M. Richard Ramos.
L'amendement CE475 a pour objectif de restaurer le principe d'une injonction de dépôt des comptes sous astreinte plafonnée à 2 % du chiffre d'affaires journalier moyen réalisé en France par la société, spécifique au secteur agricole ; de supprimer le principe, voté par le Sénat, d'une injonction plafonnée qui ne serait applicable qu'en cas de manquement répété.
Par ailleurs, le dispositif, mal inséré dans le chapitre Ier du titre Ier du livre VI relatif à la prévention des difficultés des entreprises, est déplacé au chapitre III du titre II du livre Ier du code de commerce relatif aux obligations des commerçants.
Enfin, la loi ne peut imposer au président du tribunal de commerce d'enjoindre à une entreprise, qui n'aurait pas déposé ses comptes : elle doit laisser au juge sa capacité d'appréciation. Il est toutefois proposé de compléter l'article L.232-24 du code de commerce afin de prévoir que le greffier alerte le président du tribunal de commerce en cas de non-dépôt des comptes.
Après avoir entendu les explications du ministre, je retire l'amendement CE73. J'ai compris que l'on ne peut adresser d'injonction au juge. La rédaction « peut adresser » semble la bonne, du point de vue constitutionnel.
L'amendement CE237 rejoint la préoccupation du ministre : si le rééquilibrage des relations commerciales dans le domaine agricole passe par le renforcement de la crédibilisation des agriculteurs, il est également nécessaire que toutes les parties respectent les règles édictées. C'est pourquoi nous proposons de rétablir la rédaction des deux premiers alinéas de l'article 5 quinquies adoptée par l'Assemblée. Il est toujours préférable d'opérer une dissuasion plutôt que de devoir agir et, a fortiori, de punir les sociétés qui ne déposent par leurs comptes dans les conditions et délais prévus aux articles L. 232-21 à L. 232-23 du code de commerce.
L'amendement CE73 est retiré
La commission adopte l'amendement CE475.
En conséquence, les amendements CE237, CE378, CE273, CE274 et CE11 tombent.
La commission examine alors l'amendement CE275 de M. Dominique Potier.
Cet amendement revient sur la simple faculté de publier la liste des entreprises refusant de communiquer les données nécessaires à l'exercice de ses missions par l'OFPM, et propose de la prévoir d'office. La philosophie et l'objet sont les mêmes que dans les amendements précédents.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle adopte l'article 5 quinquies modifié.
Article 6 (articles L. 441-8 et L. 441-8-1 [nouveau] du code de commerce) Assouplissement de la possibilité de renégociation des prix dans les contrats supérieurs à 3 mois
La commission examine l'amendement CE167 de M. Vincent Descoeur.
L'article L. 441-8 du code de commerce actuellement en vigueur ne prévoit aucune disposition visant à tirer les conséquences d'un échec de la renégociation du prix convenu. Cette lacune est dommageable. Afin d'y mettre un terme, un nouvel alinéa au sein de l'article L. 441-8 du code de commerce doit prévoir que chacune des parties pourra mettre un terme au contrat en cas d'échec de la renégociation et ce, dans les meilleures dispositions.
Vous voudriez que chacune des parties puisse mettre un terme au contrat en cas d'échec de la renégociation et ce, de bonne foi… Mais ne pensez-vous pas que le plus faible en fera à chaque fois les frais ? Les cas de déréférencement sont suffisamment décriés et source d'incertitude économique pour ne pas les rendre légaux. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Puis elle examine l'amendement CE74 du rapporteur.
Le mécanisme de révision automatique des prix prévu par le II de l'article 6 soulève des difficultés, économiques et juridiques.
D'un point de vue économique, il uniformiserait de façon très rigide le comportement des opérateurs, qui seraient privés de toute liberté pour moduler la répercussion des hausses de prix. Un fournisseur innovant ne pourrait pas profiter de ses gains de productivité pour absorber une hausse. Une telle automaticité n'inciterait pas à l'efficacité et pourrait créer des situations de rente et des spirales inflationnistes, préjudiciables à la compétitivité des produits et au pouvoir d'achat des consommateurs. Par ailleurs, les acheteurs seraient sans doute enclins, pour compenser la présence de cette clause, à durcir les négociations lors de la conclusion du contrat, contrairement aux objectifs du projet de loi. Je propose donc, par cet amendement, de supprimer les alinéas 9 à 14.
Je ne comprends pas cet amendement, qui vise à supprimer le mécanisme de révision des prix institué par le Sénat. Ces clauses constituaient une protection supplémentaire pour les producteurs, en cas d'augmentation importante des coûts de production et de hausse des matières premières. Une fois de plus, on est en train de pénaliser les producteurs, qui étaient protégés par cet article introduit par le Sénat.
En l'occurrence, on ne protège pas du tout les producteurs, mais bien les transformateurs. Ces amendements ont du reste été suggérés par les industries de la charcuterie et des pâtes alimentaires. Mais en réalité, les transformateurs n'en tireraient aucun avantage : les négociations de contrats seraient beaucoup plus dures. Pour moi, c'est une fausse bonne idée.
La commission adopte l'amendement CE74.
En conséquence, les amendements identiques CE102 de M. Jérôme Nury et CE127 de M. Dino Cinieri tombent.
La commission adopte l'article 6 modifié.
Article 7 (article L. 694-4 du code rural et de la pêche maritime et L. 954-3-5 du code de commerce) Application de la contractualisation à Saint-Pierre-et-Miquelon
La commission est saisie de l'amendement CE91 du rapporteur.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 7 modifié.
Article 8 Habilitation du Gouvernement à rénover, par ordonnances, la coopération agricole
La commission examine l'amendement CE66 du rapporteur.
Cet amendement est la preuve que le travail avec le Sénat a été utile.
La proposition de rédaction rétablit le champ de la demande du Gouvernement à légiférer par ordonnances en ce qui concerne les relations entre les sociétés coopératives agricoles et les associés coopérateurs. Le champ de l'habilitation est précisé afin d'intégrer plus finement les intentions du Gouvernement telles que présentées lors de l'examen en première lecture du présent projet de loi. La rédaction a été élaborée à partir d'une proposition des sénateurs formulée lors des discussions menées en commission mixte paritaire.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements CE358 et CE348 du rapporteur.
L'amendement CE358 est issu d'une discussion que j'ai eue avec M. Henri Nallet, président du Haut Conseil de la coopération agricole (HCCA) et ancien ministre de l'agriculture.
Le HCCA est doté de pouvoirs de contrôle et de sanction du respect de la mise en oeuvre du droit coopératif. Ces deux fonctions étant étroitement liées, il convient de préciser le champ de l'habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnances sur ce sujet, afin que le HCCA puisse prendre de réelles sanctions quand l'engagement coopératif n'est pas respecté par certaines coopératives.
L'amendement CE348 est également issu de la même discussion avec les représentants du HCCA.
Je suis favorable à l'amendement CE358.
En revanche, je demanderai le retrait de l'amendement CE348. Il existe actuellement un comité directeur qui est composé de sept représentants des coopératives agricoles, et qui est élu par un collège. Une discussion est engagée sur le renouvellement du HCCA. Il n'est pas évident que la présence des syndicats agricoles au sein du comité directeur du HCCA soit une solution adéquate – ce qui n'interdit pas qu'ils puissent être associés aux orientations émises pas ce dernier. En tout état de cause, je ne veux pas préjuger de la concertation en cours avec les organisations syndicales et le HCCA. D'où cette demande de retrait.
L'amendement CE348 est retiré.
La commission adopte l'amendement CE358.
Puis elle adopte l'article 8 modifié.
Article 8 bis AA (nouveau) Rapport du Gouvernement sur l'opportunité de mettre en place une prestation pour services environnementaux pour les agriculteurs
La commission est saisie d'un amendement de suppression CE476 du Gouvernement.
Le Sénat a prévu par cet article un rapport sur l'opportunité de mettre en place un paiement pour services environnementaux (PSE), ainsi que l'expérimentation d'un tel dispositif dans les territoires sortant des zones défavorisées simples (ZDS).
Ces modifications de pratiques sont déjà prises en compte dans le cadre de la PAC 2014-2020 à travers les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC). Un rapport commandé par mon ministère en 2016 montre que les MAEC sont une forme de paiement pour les services environnementaux.
Par ailleurs, les premières propositions de la Commission européenne sur la PAC post 2020 ont repris la demande de la France de mise en place d'une forme de PSE, appelé « eco-scheme » en nomenclature anglaise. L'enjeu des prochains mois sera de peser dans les négociations européennes.
Je ne vous refais pas l'ensemble du dispositif sur lequel nous sommes en train de travailler actuellement avec vingt-deux pays européens. Je suivrai ce sujet avec attention. Il s'inscrit dans un pas de temps de la prochaine PAC. Mais sans attendre la prochaine PAC, nous avons affiché, dans le cadre du plan biodiversité, notre volonté d'aller plus loin en mobilisant les agences de l'eau.
Je vous invite donc à supprimer cet article en votant cet amendement.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 8 bis AA est supprimé.
Article 8 bis A (supprimé) Reconnaissance législative des contrats tripartites : convention interprofessionnelle alimentaire territoriale
La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CE103 de M. Jérôme Nury et CE129 de M. Dino Cinieri, ainsi que l'amendement CE276 de M. Dominique Potier.
L'amélioration de la qualité des relations commerciales agricoles nécessite une plus grande écoute et une meilleure coopération entre tous les acteurs, et notamment entre les producteurs, les acheteurs et les distributeurs. C'est ce que permet la mesure proposée dans cet amendement CE103.
Mon amendement CE129 est identique. Je voudrais juste rajouter qu'une telle négociation permettrait d'éviter qu'un distributeur ne fasse pression sur un acheteur aux fins de lui imposer un prix d'achat.
Notre amendement CE276 a trait aux conventions territoriales tripartites, qui font partie des innovations que nous avions essayé d'apporter. Ces conventions pluriannuelles organisent un partage équitable de la valeur entre les producteurs, les transformateurs et les distributeurs. Ces conventions pourraient être signifiées, à titre expérimental, au consommateur dont on ferait un acteur du changement. Toutes sortes d'initiatives sont en train de fleurir sur des circuits courts ou sur des segments très étroits du marché : l'idée est d'en faire une expérimentation à une échelle plus industrielle.
Ces conventions tripartites avaient été adoptées par la majorité lors du passage de ce texte en première lecture. Je ne doute pas que ce sera à nouveau le cas. Nous ne pouvons que regretter que le Sénat n'ait pas retenu ce qui n'est qu'une expérimentation, estimant que l'on risquait d'alourdir la réglementation ; je réfute cet argument.
Je suis favorable aux amendements identiques présentés par M. Nury et M. Cinieri.
En revanche, je suis défavorable à l'amendement de M. Potier. M. Jumel avait défendu en séance un sous-amendement reprenant cette idée de labellisation, sur lequel j'avais émis un avis défavorable. Il est intéressant de stimuler ces initiatives, mais je ne suis pas certain que leur labellisation ou l'intervention de la puissance publique favorise leur développement : elles existent déjà, et sont déjà développées par certaines marques de la grande distribution.
Avis de sagesse pour les amendements identiques CE103 et CE129 ; avis défavorable pour l'amendement CE276.
La différence entre ces deux amendements et le nôtre, c'est que nous proposons une expérimentation de labellisation. Vous étiez favorable en première lecture, et maintenant vous y êtes défavorable… Je ne comprends pas cette évolution.
En première lecture, nous n'avions pas accepté pour autant le sous-amendement de M. Jumel.
Qui introduisait la notion de personne morale !
D'accord. Mais pourquoi ce rejet total ? Désormais, il n'y a rien sur les conventions tripartites dans la loi.
L'amendement CE103 rétablit l'article 8 bis A tel qu'il avait été adopté à l'Assemblée nationale, et qui permet les négociations tripartites. Mais dans l'hémicycle, nous avion émis un avis défavorable au sous-amendement de M. Jumel, qui proposait une labellisation publique. Et il avait été rejeté.
La commission adopte les amendements CE103 et CE129.
En conséquence, L'article 8 bis A est ainsi rétabli et l'amendement CE276 tombe.
Article 8 bis (article L. 523-7 du code rural et de la pêche maritime) Affectation des subventions publiques au compte de résultat des coopératives agricoles
La commission est saisie de l'amendement CE87 de M. Arnaud Viala.
L'amendement est retiré.
L'article 8 bis est adopté sans modification.
Article 9 Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance et pour deux ans sur leur relèvement du seuil de revente à perte et sur l'encadrement des promotions
La commission examine l'amendement CE482 du Gouvernement.
L'objet de cet amendement est de rétablir la rédaction de l'article 9 tel qu'il a été voté par l'Assemblée nationale, avec un léger réajustement rédactionnel, qui consiste à faire référence à des « produits » en ce qui concerne les animaux de compagnie, au lieu de « denrées ».
Nous ne souhaitons pas retenir la rédaction introduite par le Sénat, qui soulève plusieurs difficultés : elle laisse de côté les produits donnant lieu à une convention particulière, puisqu'elle ne couvre que les produits relevant de la convention unique et les marques de distributeurs ; elle a recours à une notion de volume annuel insuffisamment précise ; enfin, elle prévoit des modalités d'entrée en vigueur peu opérantes puisqu'il suffirait aux opérateurs de la grande distribution qui souhaiteraient se soustraire au dispositif d'encadrement des promotions, de conclure des conventions avant le 1er mars 2019. Autant de raisons pour lesquelles nous préférons la rédaction de l'Assemblée nationale.
Je tiens également à vous informer, à propos du projet d'ordonnance en cours de préparation par le Gouvernement sur la base du futur article 9, que nous vous proposerons d'ici la fin du mois une réunion de travail afin de vous présenter une première version de ce projet d'ordonnance.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé et les amendements CE359 de M. Rémi Delatte, CE439 de M. Julien Aubert, CE104 de M. Jérôme Nury et CE132 de M. Dino Cinieri tombent.
Article 9 bis (supprimé) Interdiction des termes « gratuité » et assimilés dans les promotions marketing des produits alimentaires
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE277 et CE278 de M. Dominique Potier.
Défavorable également.
La commission rejette les amendements.
L'article 9 bis demeure supprimé.
Article 10 Habilitation du Gouvernement à clarifier et à adapter, par ordonnance, le code de commerce
La commission est saisie de l'amendement CE279 de M. Dominique Potier.
Défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE492 du rapporteur.
Les conditions générales de vente (CGV) du fournisseur constituent le socle de la négociation commerciale, c'est-à-dire le point à partir duquel vont s'élaborer le prix convenu et, plus généralement, l'ensemble des éléments contractuels de la relation commerciale. Ainsi, dans le cadre de la négociation commerciale, le distributeur ne formule pas de demandes de dérogations proprement dites aux CGV, mais exprime plutôt de nouvelles demandes, qui font l'objet d'une négociation entre les parties et se traduisent finalement dans la convention unique. Il est donc important de remplacer le terme « dérogation » par « refus d'acceptation ».
Cette précision n'est pas seulement rédactionnelle : d'une part, le code de commerce prévoit que les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d'acheteurs de produits ou de demandeurs de prestation de services ; d'autre part, elle correspond à la réalité de la négociation commerciale entre le fournisseur et le distributeur.
Le Gouvernement est favorable à l'amendement du rapporteur, qui correspond mieux à la réalité de la négociation commerciale entre le fournisseur et le distributeur, mais également aux dispositions du code de commerce régissant les conditions générales de vente.
La commission adopte l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE236 de M. Jérôme Nury.
Cet amendement vise à supprimer l'alinéa 8 de l'article 10, qui a pour objet de continuer à améliorer et renforcer la position des agriculteurs au niveau des relations commerciales. Conserver comme date unique des négociations commerciales le 1er mars, c'est-à-dire en même temps que le salon de l'agriculture, permettra de continuer à utiliser cet événement comme caisse de résonance des revendications des agriculteurs.
La question revient chaque année : faut-il raccourcir, allonger ou déplacer les négociations commerciales ? Laissons au Gouvernement le soin de consulter les opérateurs pour décider ce qu'il convient de faire dans le cadre de ces ordonnances. Donc, avis défavorable.
Le Gouvernement a interrogé les acteurs économiques concernés, dont une partie estime que le calendrier des négociations commerciales est inadapté à la vie des affaires. Nous souhaitons donc prévoir la possibilité de le modifier dans le respect de la concertation qui sera menée auprès des professionnels, afin que les conditions dans lesquelles elles se déroulent soient mieux adaptées aux réalités et contraintes des acteurs économiques. Il serait dommage de se priver de cette possibilité. Je suis donc défavorable à cet amendement.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine alors en discussion commune les amendements CE88 et CE89 de M. Arnaud Viala, CE280 de M. Dominique Potier et CE409 de M. André Chassaigne.
Alors que le projet de loi prévoit de relever le seuil de revente à perte des distributeurs à 110 % du prix d'achat, l'article 10 prévoit une ordonnance afin d'élargir le champ d'action en responsabilité prévue à l'article L. 442-9 du code de commerce, relatif au prix abusivement bas.
L'amendement CE88 vise à définir précisément le prix abusivement bas, à élargir son champ d'application et à définir son dispositif de saisine. Actuellement, le projet de loi est trop flou et ne donne aucune garantie sur le niveau d'ambition de l'ordonnance. Les interprofessions, les instituts techniques et l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires pourront être sollicités à propos de la conception de ce coût de production.
Quant à l'amendement CE89, il vise à s'assurer qu'un dispositif de saisine efficace existe pour que les plaintes concernant le prix abusivement bas ne restent pas lettre morte. Les délais d'action doivent être courts pour éviter des sanctions et une réparation du préjudice trop tardives.
Bien qu'opposés au recours aux ordonnances, les auteurs de l'amendement CE409 souhaitent préciser le contenu du cadre d'élargissement du champ d'application de l'action en responsabilité prévue à l'article L. 442-9 du code rural et de la pêche maritime. Cet article n'apporte pas de précision sur la définition d'un prix de cession abusivement bas ; il apparaît indispensable que cette définition puisse s'appuyer à la fois sur les coûts de production constatés et sur la nécessaire rémunération du travail agricole.
Par ailleurs, il convient de prévoir un dispositif efficace et simple de saisine pour les producteurs afin qu'ils puissent effectivement demander réparation du préjudice.
J'émettrai un avis défavorable sur l'ensemble de ces amendements.
Sur l'amendement CE88, le champ de l'habilitation du Gouvernement semble de nature à le satisfaire.
Pour ce qui est de l'amendement CE89, ce n'est pas en rajoutant ces précisions que le mécanisme fonctionnera mieux. Tous les dispositifs législatifs doivent être simples, réactifs et efficaces.
Avis également défavorable sur les amendements CE280 et CE409.
Le Gouvernement est défavorable à ces quatre amendements.
La rédaction de cette habilitation a été bien travaillée lors de la première lecture, et elle est à la fois complète et précise. En outre, l'article L.442-9 du code de commerce prévoit une action en responsabilité ; elle est incompatible avec la référence à un coût de production moyen, défini par l'OFPM, puisqu'elle implique que le prix abusivement bas soit apprécié au cas par cas.
S'agissant des délais, le délai d'un mois pour saisir les autorités compétentes, analyser la situation et réparer le préjudice éventuel, est manifestement trop court. En tout état de cause, il n'est pas possible de contraindre le juge dans un délai.
La commission rejette successivement les amendements.
Elle est alors saisie de l'amendement CE483 du Gouvernement.
Cet amendement propose de revenir à la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale pour le II de l'article 10, et donc à un délai de six mois pour modifier par voie d'ordonnance les dispositions du titre IV du livre IV, plus trois mois pour ajuster les autres codes et harmoniser les critères.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 10 modifié.
Article 10 bis AA (nouveau) (article L. 442-6 du code de commerce) Ajout des pénalités de retard aux pratiques restrictives de concurrence
La commission est saisie de l'amendement de suppression CE485 du Gouvernement.
L'article 10 bis AA, ajouté par le Sénat, introduit une nouvelle pratique restrictive de concurrence au code de commerce. Il interdit les pénalités pour retard de livraison lorsque ces dernières sont fixées sans prise en compte des contraintes d'approvisionnement liées à la qualité et à l'origine propres à certaines filières de production.
Cet article ne va pas dans le sens d'une simplification des textes souhaitée par l'ensemble des participants aux États généraux de l'alimentation (EGA). Le code de commerce, au titre du déséquilibre significatif ou de l'avantage sans contrepartie, permet déjà de poursuivre de telles pratiques et, d'ailleurs, la jurisprudence a déjà eu l'occasion de sanctionner des clauses imposant des taux de service très élevés sur le fondement de cet article du code de commerce. La DGCCRF, dans le cadre de son action de contrôle des relations commerciales, reste très vigilante quant à la mise en oeuvre de telles clauses.
Par ailleurs, viser très spécifiquement une pratique en particulier pourrait conduire le juge à refuser de qualifier comme abusives d'autres pratiques illicites imposées en matière de pénalités logistiques.
Pour l'ensemble de ces raisons, je vous invite à adopter cet amendement de suppression.
La commission adopte l'article CE485.
En conséquence, l'article 10 bis AA est supprimé.
Article 10 bis A (articles L. 441-7 et L. 442-6 du code de commerce) Application, aux négociations commerciales délocalisées à l'étranger, des dispositions relatives à la convention unique et aux pratiques restrictives de concurrence prohibée
La commission examine l'amendement de suppression CE484 du Gouvernement.
L'article 10 bis A adopté par le Sénat précise que l'article L. 442-6 du code de commerce sur les pratiques restrictives de concurrence et l'article L. 441-7 sur la convention unique sont des lois de police au sens du règlement européen dit « Rome I ».
Le Sénat poursuivait un objectif louable : s'assurer que les entreprises qui commettent des pratiques illicites ne puissent échapper au droit français au motif qu'elles sont établies hors de France. Or le ministre de l'économie a déjà réussi à obtenir la condamnation d'entreprises étrangères, dès lors que des pratiques illicites avaient été commises en France. C'est précisément pour éviter de fragiliser son action que le Gouvernement souhaite la suppression de cette disposition.
La notion de lois de police est avant tout une notion définie par les conventions internationales et mise en oeuvre par le juge. À notre sens, il n'existe pas de dispositions nationales qualifiées expressément de lois de police par le législateur.
Nous allons travailler sur cette question. Il nous semble préférable de laisser au juge le soin de qualifier ces textes de lois de police. Notre crainte est que si l'on qualifie ces seuls textes de lois de police, d'autres dispositions importantes se retrouveront a contrario dépourvues d'une telle qualification.
Je vous invite donc à adopter cet amendement du Gouvernement.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 10 bis A est supprimé.
Article 10 quinquies (supprimé) Promotion de l'agriculture de groupe
La commission examine en discussion commune les amendements identiques CE105 de M. Jérôme Nury et CE131 de M. Dino Cinieri, et l'amendement CE281 de M. Dominique Potier.
L'amendement CE105 vise à rétablir l'article 10 quinquies A qui reconnaît le groupement d'agriculteurs en vue d'une mise en commun bénéfique de connaissances, de ressources et de matériels. Compte tenu de la mondialisation et de la taille toujours plus imposante des acteurs de la distribution, il est impératif d'encourager les agriculteurs à se solidariser et à s'entraider pour mieux faire porter leur voix et mieux faire face aux défis colossaux que sont la transition écologique, la mutation des territoires ruraux et la concurrence internationale.
L'amendement CE131 vise à revenir à la rédaction de l'article 10 quinquies adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale.
Nous avions fait passer sept amendements en première lecture, dont trois dont nous étions assez fiers : le premier sur les conventions tripartites labellisées – mais vous avez refusé de reprendre la labellisation ; le deuxième sur la reconnaissance de la haute valeur environnementale (HVE) – elle aussi cassée par le Sénat et mal reprise par le Gouvernement ; le troisième enfin, repris par cet amendement CE281, sur l'agriculture de groupe.
Il existe tout un réseau, constitué d'une dizaine d'organisations en manque de reconnaissance, et nous avons discuté plus particulièrement avec trois d'entre elles. La plupart des lois qui traitent des formes d'agriculture de groupe comme les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA), les groupes d'étude et de développement agricole (GEDA) et autres remontent aux années soixante ou soixante-dix – sauf les groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE), créés par la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014.
Il fallait actualiser leurs missions et reconnaître symboliquement leur fonction dans la société et dans le monde rural. Les collectifs d'agriculteurs y tiennent beaucoup : c'est une question de reconnaissance, de dignité, mais aussi la possibilité pour eux de mobiliser demain des moyens réglementaires ou budgétaires, en s'appuyant sur une définition de l'agriculture de groupe.
Ce n'est pas un amendement « lobby » que nous aurions repris ou recopié. Il m'a demandé beaucoup de travail, en concertation avec des parties prenantes assez dispersées. Chaque mot a été pesé.
Il avait été repris, mais amputé d'un élément auquel ces organisations tiennent beaucoup : leur reconnaissance comme personnes morales. Ce n'est pas de « l'Uber-développement », des réseaux informels : ce sont des associations ou des coopératives qui existent, qui se réunissent ; leur organisation peut être souple, mais ce n'est pas n'importe quoi. Par concession, on avait conservé la définition des collectifs d'agriculteurs, mais laissé de côté leur reconnaissance comme personnes morales. Je me réjouis que nos collègues du groupe Les Républicains, qui l'avaient abandonnée au Sénat, la reprennent aujourd'hui ici.
Pour ma part, je redépose notre amendement dans sa rédaction initiale qui précise que ces collectifs sont des personnes morales. Pour tous nos amis des GEDA, des CUMA, de tous ces réseaux de développement, il est important d'être reconnus comme tels.
C'est un combat qui me tient énormément à coeur – quitte à ne pas être le signataire de l'amendement qui sera retenu pour des raisons de cohérence politique. Ma formation politique, mon engagement dans le monde économique sont partis de ces réseaux. Je pense qu'il faut les reconnaître comme des personnes morales. Je ne vois vraiment pas ce qui l'empêcherait.
Je suis favorable à l'amendement CE281 et je demande le retrait des amendements identiques CE105 et CE131.
Il est important de promouvoir toutes les formes d'organisation collective qui permettent de soutenir la transition agro-écologique de l'agriculture. C'est ce que nous faisons en accompagnant, outre les chambres d'agriculture, la plupart des réseaux qui sont présents sur le territoire, les centres d'initiatives pour valoriser l'agriculture et le milieu rural (CIVAM), les coopératives d'utilisation de matériel agricole (CUMA), mais aussi en suscitant l'émergence de collectifs d'agriculture à travers des groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE) par exemple ou du dispositif dit 30 000.
La commission des affaires économiques avait décidé de supprimer cette disposition : effectivement, il n'est pas nécessaire de légiférer pour inciter au développement de ces outils. Néanmoins, je peux entendre le besoin d'envoyer un signal pour encourager encore plus ce type d'initiative.
Sur ces amendements, je m'en remets à la sagesse de la commission.
La commission rejette les amendements identiques CE105 et CE131.
Puis elle adopte l'amendement CE281.
L'article 10 quinquies est ainsi rétabli.
Article 10 septies A (nouveau) Rapport du Gouvernement sur les aides et dispositifs spécifiques à l'outre-mer
La Commission examine l'amendement CE479 du Gouvernement.
Cet amendement vise à supprimer l'article 10 septies A.
Le programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI) a déjà fait l'objet de deux évaluations au niveau français, puis, d'une évaluation européenne. Ces évaluations ont mis en évidence qu'il s'agit d'un programme à même de suivre l'évolution de la réalité des territoires ultramarins. La pérennisation du POSEI n'est pas remise en cause. Lorsque nous défendrons la politique agricole commune (PAC), nous défendrons également le POSEI.
Les ambitions portées par le Gouvernement lors des assises des outre-mer consistent à faire du POSEI un véritable outil d'accompagnement des projets alimentaires territoriaux (PAT) et de développement de la bioéconomie.
Un nouveau rapport n'est donc pas nécessaire. C'est pourquoi le présent amendement propose sa suppression.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
L'article 10 septies A est supprimé.
Article 10 octies Rapport du Gouvernement sur la fin des quotas betteraviers
La commission est saisie de l'amendement CE1 de M. Julien Dive.
Cet amendement, adopté en première lecture en séance publique, avait obtenu le soutien appuyé de M. le rapporteur, et je l'en remercie à nouveau. Malheureusement, je ne comprends pas pourquoi le Sénat l'a supprimé.
Nous demandons que le Gouvernement remette un rapport au Parlement sur la construction des prix dans le secteur betteravier. Comme on l'a dit tout à l'heure, le marché du sucre est en train de s'effondrer : certains acteurs coopératifs et non coopératifs baissent les prix tandis que d'autres jouent encore le jeu. Il serait intéressant de pouvoir analyser à moyen terme les effets de la fin des quotas betteraviers sur la construction du prix dans la filière betterave à sucre.
Ce rapport avait été voté contre l'avis du Gouvernement en première lecture. Depuis, je n'ai pas changé d'avis. Si la problématique de l'analyse des prix d'achat de betteraves, notamment dans le nouveau contexte de la fin des quotas sucriers, participe d'une meilleure connaissance du marché et d'une plus grande transparence dans la chaîne de valeur du secteur sucrier, il ne me semble pas nécessaire d'inscrire cette demande de rapport dans la loi. Avis défavorable.
La commission adopte l'amendement.
L'article 10 octies est ainsi rétabli.
Article 10 nonies (nouveau) (article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) Rapport annuel du Gouvernement sur les finalités de la politique agricole et de l'alimentation
La commission en vient à l'amendement CE478 du Gouvernement.
Cet amendement a pour objet de supprimer la remise d'un nouveau rapport annuel au Parlement, car il existe déjà de nombreux rapports d'évaluation sur les engagements de la France dans le cadre européen et international sur les finalités de la politique en faveur de l'agriculture et de l'alimentation.
La PAC a fait l'objet de nombreuses évaluations au niveau européen pour préparer les réformes à venir. La Commission réalise en particulier des études d'impact préalablement à toute réforme et, dans le cadre de ses propositions de la future PAC post-2020, la Commission a proposé le 1er juin une nouvelle approche de cette politique fondée sur la performance et les résultats : chaque État devra adopter un plan stratégique qui décline les différentes interventions, les objectifs et les cibles à atteindre tout au long de la programmation.
Il convient également de relever que, depuis 2016, le Gouvernement rend compte chaque année devant le Parlement de la stratégie du commerce extérieur de la France et de la politique commerciale européenne dans le cadre du rapport annuel des impacts des accords commerciaux. Ce rapport, qui concerne l'ensemble des produits et des services, inclut également les produits agricoles et les produits agroalimentaires.
Enfin, pour répondre aux préoccupations qui se sont exprimées lors de la signature du CETA (Comprehensive economic and trade agreement) entre l'Union européenne et le Canada, le Gouvernement a adopté un plan d'action qui comprend les études d'impact pour assurer une application du CETA conforme à l'objectif d'assurer des niveaux élevés de protection à la fois de l'environnement, de la santé et cohérente avec les objectifs de l'accord de Paris.
Je vous demande donc d'adopter cet amendement de suppression.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 10 nonies est supprimé.
Article 10 decies (nouveau) (article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) Limitation des obligations législatives et réglementaires prévues pour l'application du droit de l'Union européenne
La commission est saisie de l'amendement CE477 du Gouvernement.
Le Gouvernement partage la volonté d'éviter au maximum toute sur-transposition inutile. Toutefois, il peut se trouver des cas où pour des raisons de protection sanitaire par exemple, les autorités françaises décident de prendre des initiatives plus rapidement que les autres États membres de l'Union. Il ne faut pas exclure cette possibilité dont il faut savoir user bien évidemment avec parcimonie. L'étiquetage de l'origine est un autre exemple de sur-transposition pour laquelle il y a un large consensus.
Le Gouvernement s'est saisi de la question générale de la sur-transposition des normes européennes dans tous les secteurs d'activité, y compris dans le domaine agricole. Cet amendement vise donc à supprimer l'article 10 decies.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 10 decies est supprimé.
Article 10 undecies (nouveau) Rapport du Gouvernement sur le classement en « zone intermédiaire de type Piémont »
La commission étudie l'amendement CE480 du Gouvernement.
L'article introduit par le Sénat mentionne un classement en « zone intermédiaire de type Piémont » pour les communes sortant de la carte des zones défavorisées simples. Les communes sortant du zonage n'ont pas vocation à être incorporées dans un nouveau zonage qui n'existe pas aujourd'hui au plan européen et qui n'aurait que peu de sens et donc pas de légitimité.
Je suis défavorable au rapport demandé et je vous invite à adopter le présent amendement de suppression de l'article 10 undecies.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 10 undecies est supprimé.
TITRE II MESURES EN FAVEUR d'une alimentation saine, de qualitÉ, durable et accessible À tous et respectueuse du bien-Être animal
Chapitre Ier Accès à une alimentation saine
Avant l'article 11
La commission est saisie de l'amendement CE37 de M. Thierry Benoit.
Il s'agit d'ajuster l'intitulé du titre II en précisant que l'alimentation doit être naturellement respectueuse du bien-être de l'animal, et surtout qu'elle doit garantir une juste rémunération aux producteurs.
Je comprends et je partage l'énoncé de vos priorités, mais cet amendement ne ferait qu'ajouter de la confusion là où les différents titres visent au contraire à mieux séparer les différents sujets. Défavorable.
Vous proposez de modifier l'intitulé du titre II. Si je comprends votre volonté, je considère qu'il n'est pas nécessaire de rallonger les différents intitulés du texte à ce stade de la discussion. Je vous invite donc à retirer l'amendement.
La commission rejette l'amendement.
Article 11 (articles L. 230-5-1, L. 230-5-2, L. 230-5-3 et L. 230-5-4 [nouveaux] du code rural et de la pêche maritime) Amélioration de la qualité des produits servis en restauration publique
La commission est saisie, en discussion commune, de l'amendement CE224 du rapporteur et de l'amendement CE286 de M. Dominique Potier.
L'amendement CE224 fait l'objet du sous-amendement CE508 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, des sous-amendements CE504 et CE505 de M. Thierry Benoit, du sous-amendement CE501 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, du sous-amendement CE506 de M. Antoine Herth et du sous-amendement CE502 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
L'amendement CE224 tend à rétablir l'article 11 dans la rédaction votée à l'issue de nos nombreux et très, très longs débats sur l'article 11 à l'Assemblée nationale.
Le sous-amendement CE508 propose de compléter l'amendement CE224 afin d'inscrire dans la loi les objectifs sur lesquels nous avons discuté assez longuement, à savoir l'objectif de 50 % de produits de qualité supérieure servis en restauration collective, dont 20 % de produits issus de l'agriculture biologique.
Le sous-amendement CE501 vise à reprendre une disposition votée par le Sénat sur les produits alimentaires ultramarins, en proposant une conditionnalité sur la montée en gamme de ces produits et un engagement sur leur qualité tel qu'on l'a indiqué dans la liste des produits rentrant dans les 50 % de produits de qualité supérieure servis en restauration collective.
Le sous-amendement CE506 vise à intégrer tout ce qui est issu du commerce équitable dans les fameux 50 % de produits de qualité supérieure servis en restauration collective.
Le sous-amendement CE502 vise à reprendre là aussi une disposition votée par le Sénat qui introduit une gouvernance territoriale pour animer justement l'organisation des filières et associer les différentes parties prenantes. Pour ma part, je propose que ce soit le préfet qui anime cette gouvernance territoriale et non le président de région : c'est l'autorité préfectorale qui veille à la garantie et à la neutralité de l'approche et à inclure tous les représentants des collectivités territoriales dans sa gouvernance.
Comme vient de le rappeler le rapporteur, l'édifice a été construit laborieusement. Le groupe Nouvelle Gauche n'a qu'un petit point de divergence, que je voudrais rappeler ici.
Le bio est désormais inscrit « en dur » et il représentera 20 % à l'horizon 2022. Pour le reste, les conditions ne sont pas limitées et quantifiées. On parle des produits sous signes d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO), du commerce équitable, des écolabels, mais aussi de certification de niveau 2. Dans un pas de temps raisonnable, il nous faut absolument passer à une haute valeur environnementale (HVE) de niveau 3, prévue dans le Grenelle de l'environnement et définie par décret, autrement dit qui peut évoluer le cas échéant pour répondre aux attentes de ce nouveau marché de la restauration hors domicile (RHD). Si nous en restons à la certification de niveau 2 correspondant aux seules bonnes pratiques agricoles, qui n'ont rien d'exceptionnelles, le marché de la commande publique ne tirera pas suffisamment l'agriculture par le haut. Bien sûr, un délai est nécessaire pour passer du niveau 2 au niveau 3, d'où mon amendement qui prévoit l'application de cette disposition à compter de 2025. Si on ne le fait pas, on risque d'avoir dans nos cantines certes un affichage à 50 % mais en réalité, à part les 20 % de bio, des produits agricoles sans défauts mais somme toute assez banals. Il faut passer à la certification de niveau 3 pour donner un signal à la production agricole.
Actuellement, telle qu'elle est définie dans le périmètre de la loi, la RHD représente environ 5 % des repas servis. Avec 20 % de produits bio, on aboutit à une obligation de bio de 1 %. Pour le reste, on a recours à une agriculture conventionnelle, classique. Il y a donc là une sorte de leurre puisqu'on ne définit pas de quantités dans le bouquet sur tout ce qui n'est pas bio. Cette exigence d'atteindre la certification HVE3, qui est réaliste, qui est à notre portée, nous semble être un levier absolument nécessaire si nous voulons donner du crédit à ce nouveau menu proposé dans les cantines de nos gamins et des moins jeunes.
Je suis favorable aux sous-amendements CE508, CE501 et CE502 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, et défavorable aux sous-amendements CE504, CE505 et CE506 et à l'amendement CE286.
Monsieur Potier, effectivement dans les 50 % il n'y a que 20 % de produits bio, mais 30 % de produits sous signes officiel de qualité, ce qui n'est pas banal puisque ce sont des engagements avec des cahiers des charges.
Je suis favorable à l'amendement CE224, sous réserve qu'il puisse être sous-amendé par plusieurs des sous-amendements présentés.
Je suis favorable au sous-amendement CE508 de Mme Maillart-Méhaignerie, qui vise à rétablir les 20 % de bio car c'est un objectif important du Gouvernement.
Je suis défavorable au sous-amendement CE504 de M. Benoit : prendre en compte les coûts imputés aux externalités environnementales – et non les seuls critères de développement durable comme proposé – liées au produit pendant son cycle de vie est une manière de promouvoir le développement durable, d'autant qu'elles ont également l'intérêt d'être encadrées par le droit de l'Union européenne et dans les codes des marchés publics.
Je suis également défavorable au sous-amendement CE505 parce que cela reviendrait à prendre les certifications de conformité du produit (CCP). Or ces démarches de valorisation sont hétérogènes et ne concernent pas forcément des objectifs de qualité et de développement durable et ils ne font pas l'objet de contrôles officiels.
Je m'en remets à la sagesse de la commission sur le sous-amendement CE501 de Mme Maillart-Méhaignerie : les produits qui ont le logo RUP sont un moyen de valoriser les produits des régions ultrapériphériques maritimes mais ils ne concourent pas forcément aux objectifs de développement durable.
S'agissant du sous-amendement CE506, le texte prévoit déjà à l'alinéa 10 de l'article 4 que des personnes morales de droit public développent l'acquisition de produits issus du commerce équitable. Par ailleurs, une part importante de produits du commerce équitable sont également issus de l'agriculture biologique.
Je suis favorable au sous-amendement CE502. Il existe déjà une instance de concertation, le comité régional d'alimentation qui existe par voie réglementaire ; je suis disposé à donner plus de corps à cette instance, de façon à permettre la mise en relation de l'offre et de la demande, les échanges de pratiques sur la mise en oeuvre de l'article 4 et d'échanges sur les dispositifs de formation et de lutte contre le gaspillage.
Enfin, je suis défavorable à l'amendement CE286 qui ajoute les produits issus d'un approvisionnement local. Cette disposition est contraire à la réglementation sur les marchés publics qui ne permet pas de spécifier l'origine des produits. L'amendement CE224 soutenu par le Gouvernement propose une rédaction plus claire et plus ambitieuse qui satisfait un grand nombre des autres propositions formulées.
L'article 11 prévoit l'introduction d'un minimum de produits bio dans les repas servis dans les restaurants collectifs. Cela a un coût. Initialement, cette obligation n'était prévue que pour les personnes morales de droit public, avant d'être étendue aux établissements scolaires et universitaires privés par l'adoption d'un amendement du Gouvernement en première lecture à l'Assemblée.
La nouvelle version issue du Sénat qui nous est présentée évoque les établissements, sans préciser s'ils sont publics ou privés. Je vous propose donc de réécrire votre amendement, Monsieur le rapporteur. Vous réintroduisez la spécificité pour le privé au 5° du III, mais cet article omet une donnée importante qu'on n'a toujours pas réglée : le financement de cette mesure. Si le financement est assumé par la collectivité pour les établissements publics, ce n'est pas le cas pour le privé. Nous savons tous que, pour le primaire par exemple, les frais annexes dont font partie les frais de cantine sont diversement pris en compte par les communes – et je ne parle même pas de l'enseignement agricole privé, le ministre le sait très bien. Si, dans certaines communes, la collectivité prendra en charge ce surcoût, quelle que soit l'école fréquentée par les élèves, dans de très nombreuses autres, à plus forte raison avec les contraintes qui pèsent sur le budget des collectivités, les familles se retrouveront seules à supporter le surcoût de la disposition prévue et verront leur facture de cantine augmenter.
Il me semble donc important et juste que nous prenions en compte cette différence et que cette nouvelle obligation créée par l'article 11 ne soit effective que si la collectivité territoriale compétente décide de prendre en charge le surcoût de cette obligation. C'est une question d'équité pour les familles et de justice en matière de pouvoir d'achat.
J'ai bien relu les comptes rendus de nos débats qui ont été très longs. Deux obligations sont quantifiées. La première concerne 50 % du panier global des produits qu'on a décrit. Dans ce panier, il y a 20 % de produits bio. Dans le reste du panier, le choix est laissé entre des produits certifiés de niveau 2 au titre de la certification environnementale issue du Grenelle de l'environnement, des SIQO, et il aurait pu y avoir aussi des produits issus du commerce équitable, etc. Mais rien ne dit quelle est la quantité de chacun d'eux. Cela étant, je ne souhaite pas qu'elle soit fixée, sinon ce serait l'enfer pour les gestionnaires.
Un établissement peu scrupuleux appliquera ces 20 % de bio parce que c'est écrit dans le texte ; et pour compléter il ira chercher 30 % de produits certifiés HVE2. N'importe quel agriculteur un peu organisé, performant économiquement, techniquement, pourra obtenir ce niveau 2 de certification qui ne constituera pas un bouleversement agronomique et des pratiques environnementales de son exploitation, et prendre ce marché public de proximité au détriment d'autres formes d'agriculture plus exigeantes et peut-être plus pédagogiques dans les transformations que nous souhaitons en matière d'agro-écologie.
Je souhaite simplement que ce HVE2 devienne en 2025 un HVE3 qui n'est pas du bio mais une bonne agriculture au sens de l'agronomie et de l'agro-écologie telle que définie dans la loi d'avenir de 2014. Sinon, n'importe quel paysan bien organisé pourra prendre le marché avec une HVE2 et on aura baissé l'exigence qu'on a l'illusion de donner aujourd'hui par la définition actuelle.
Monsieur le rapporteur, je ne parle pas de banalisation mais bien d'une certaine exigence : il s'agit de tirer ce petit marché qui représente la moitié de 5 % de l'alimentation totale afin qu'il devienne une sorte de laboratoire de l'excellence pour nos campagnes.
Je crois me souvenir que j'étais en commission lorsque nous avons adopté les termes suivants, que j'avais dû soutenir : « acquis selon des modalités prenant en compte les coûts imputés aux externalités environnementales liées au produit pendant son cycle de vie ». Nous pensions avoir une bonne idée, mais je pense que c'est une fausse bonne idée, parce que c'est pratiquement impossible à définir. Vous avez dit, Monsieur le ministre, qu'il existait des règles européennes en la matière, mais je suis assez dubitatif quand je relis cet alinéa. Pour commencer, les circuits courts peuvent être très longs en termes de transport. Il sera donc impossible d'appliquer cet alinéa car il sera très difficile d'évaluer l'ensemble du cycle de vie du produit : il faudrait par exemple prendre en compte l'utilisation d'intrants, le labourage, etc. Je crains surtout que cela ne neutralise les autres alinéas qui sont beaucoup plus clairs ; je dirai même que l'ambition recherchée concernant les modalités prenant en compte les coûts imputés aux externalités environnementales est incluse dans les alinéas suivants, par exemple sur les certifications, sur un écolabel.
Il conviendra d'y réfléchir avant l'examen du texte en séance publique, car je crains qu'on ne mette en place une forme d'usine à gaz.
Je vous indique que la présente intervention que je viens de faire servira de défense des amendements suivants que j'ai déposés sur cet article.
Je vous informe que l'adoption de l'amendement CE224 du rapporteur ferait tomber tous les autres amendements déposés à l'article 11.
Au vu de l'épée de Damoclès qui pèse sur les amendements que j'ai déposés, je prends la parole maintenant.
Quand on prévoit 50 % de produits sous signes de qualité, dont 20 % de produits bio, cela veut dire qu'il reste 10 % de produits bio sur le total.
Il faut donc que la formulation soit très précise, parce que quelqu'un de peu scrupuleux pourrait dire qu'il prend 20 % des 50 %, soit 10 % du total. C'est pourquoi je proposais pour ma part un taux de 40 %, de produits bio afin que 20 % de la totalité soit bien du bio. Cela peut paraître anecdotique, mais je pense que c'est important si l'on veut vraiment que les ambitions se concrétisent.
L'amendement du rapporteur vise à promouvoir l'alimentation biologique pour le bien-être de ceux qui mangent dans les restaurants collectifs. Il nous paraît important de se prémunir du risque de voir un gestionnaire acheter des produits les plus chers, par exemple de la viande de porc bio, ce qui nécessite de se fournir dans les pays scandinaves car il y en a peu en France. Cela ne favoriserait donc pas notre agriculture bio nationale. Éviter de parler de pourcentages « en valeur » permet d'introduire des volumes dans la restauration collective et – cela nous paraît essentiel pour le bien manger et le bien produire – d'appuyer la dynamique des projets alimentaires territoriaux.
Je vais maintenant donner la parole à M. Matthieu Orphelin à qui je souhaite la bienvenue dans notre commission.
Je vous remercie, Monsieur le président. C'est toujours un plaisir de venir ici.
J'ai déposé un amendement à l'article 11 relatif au plan de diversification des protéines. En première lecture, nous avions trouvé une solution pour diversifier les protéines sur la table des cantines scolaires : elle consistait à mettre en place, dans toutes les cantines qui servent plus de 100 couverts par jour, un plan dit de diversification des protéines. En séance publique, après un vote un peu mouvementé où le président de séance n'avait pas donné les bonnes indications quant à la position du ministre et du rapporteur, ce seuil était passé à 200 puis à 300 au Sénat. Je proposais de rétablir le seuil des 200 couverts par jour.
Puisque tous les amendements suivants déposés à l'article 11 risquent de tomber, je souhaite intervenir maintenant.
L'article 11 vise à imposer à la restauration collective publique de s'approvisionner avec une part significative de produits issus de l'agriculture biologique locaux ou sous signes de qualité, à compter du 1er janvier 2022 ; cette part sera définie par décret en Conseil d'État. Alors que le Gouvernement s'engage publiquement sur un objectif contraignant à 50 %, rien dans la rédaction actuelle du texte ne permet de croire en la sincérité du Gouvernement. De plus l'objectif du 1er janvier 2022 semble plus que difficile à tenir. Laisser moins de quatre années aux collectivités pour atteindre de tels objectifs semble inconséquent.
Si l'on peut souscrire à cette vision à moyen terme de parvenir à 50 % de produits de qualité supérieure servis en restauration collective, mon collègue M. Jérôme Nury qui vient de rejoindre l'hémicycle et moi-même souhaiterions donner plus de temps aux restaurants collectifs et aux collectivités pour atteindre cet objectif, car dans certaines parties du territoire les filières sont encore insuffisamment organisées et on risque de favoriser les produits bio d'importation et non les filières françaises qui, si j'en crois le texte, doivent l'être. En tout cas, c'est ce qui est recherché dans ce projet de loi en général.
La commission adopte successivement les sous-amendements CE508, CE501 et CE502.
Elle rejette successivement les sous-amendements CE504, CE505 et CE506.
Enfin, elle adopte l'amendement CE224 modifié.
En conséquence, l'article 11 est ainsi rétabli et tous les autres amendements portant sur l'article tombent.
Article 11 bis AA (nouveau) Rapport sur les surcoûts potentiels des nouvelles règles d'approvisionnement de la restauration collective publique
La commission est saisie de l'amendement CE232 du rapporteur.
Cet amendement vise à repousser la date de remise du rapport à au moins un an après la publication de la loi, ce qui semble plus pertinent que six mois après la publication.
La commission adopte l'amendement.
Elle étudie ensuite l'amendement CE225 du rapporteur.
C'est un amendement de précision juridique : il ne s'agit pas de contraindre démesurément la commande du rapport et de privilégier une réflexion large. Je propose donc de remplacer les termes « surcoûts potentiels » par « impacts budgétaires » puisque les exemples qui ont déjà été mis en oeuvre montrent qu'il ne s'agit pas forcément d'un surcoût potentiel.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'amendement CE412 de M. André Chassaigne tombe.
La commission adopte l'article 11 bis AA modifié.
Article 11 bis AB (nouveau) (article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) : Rythmes alimentaires
La commission étudie l'amendement CE392 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
L'article 11 bis AB introduit par le Sénat vise à ajouter aux missions du programme national pour l'alimentation (PNA) un rôle de promotion du rythme alimentaire dans les domaines de l'éducation et de l'alimentation.
Si l'objectif de sensibilisation, en particulier des jeunes générations, aux enjeux liés à un rythme alimentaire sain fait l'objet d'un large consensus, il ne nous apparaît pas nécessaire de le préciser dans l'article L. 1 du code rural et de la pêche maritime. La notion d'équilibre alimentaire, qui constitue l'un des objectifs que doit promouvoir le PNA, intègre déjà la question des rythmes alimentaires.
La commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 11 bis AB est supprimé.
Article 11 bis A Expérimentation de l'affichage des menus dans les services de restauration collective
La commission est saisie des amendements identiques CE140 de M. Dino Cinieri, CE240 de Mme Monique Limon et CE287 de M. Dominique Potier.
L'amendement CE240 fait l'objet du sous-amendement CE498 du Gouvernement.
L'article 11 bis A, tel que nous proposons de le rétablir par notre amendement CE140, prévoit une expérimentation sur trois ans permettant aux collectivités, lorsqu'elles le souhaitent, de rendre obligatoire l'affichage de la composition des menus dans les services de restauration collective qu'elles dirigent.
L'amendement CE240 vise à rétablir l'article 11 bis A tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en première lecture. L'une des attentes fortes des consommateurs, et nous l'avons tous ressenti au cours des échanges que nous avons pu avoir en première lecture, consiste à disposer d'informations plus transparentes sur l'étiquetage des produits alimentaires ainsi que sur le contenu des menus servis dans la restauration collective scolaire.
Cet amendement, qui avait été défendu par notre collègue Mme Danielle Brulebois en première lecture, vise à encourager les collectivités territoriales à afficher le contenu des menus servis en restauration collective, et notamment l'origine de ces derniers – fait maison, surgelés, etc. – afin de renforcer l'information des consommateurs.
Le sous-amendement CE498 a pour objet de simplifier les dispositions de l'amendement CE240 en renvoyant à un décret simple la définition des conditions de mise en oeuvre et de suivi de l'expérimentation et en supprimant l'établissement d'une liste des collectivités territoriales concernées dans la mesure où l'expérimentation proposée ne concerne que les collectivités volontaires. Le sous-amendement supprime enfin la disposition prévoyant la transmission au Parlement d'un rapport sur les résultats de l'expérimentation.
La commission adopte le sous-amendement CE498.
Elle adopte ensuite les amendements identiques modifiés.
En conséquence, l'article 11 bis A est ainsi rétabli.
Article 11 ter (article L. 541-10-5 du code de l'environnement) Expérimentation relative à l'interdiction de certains contenants alimentaires
La commission est saisie, en discussion commune, de l'amendement CE226 du rapporteur, de l'amendement CE380 de M. Philippe Bolo, de l'amendement CE342 de Mme Frédérique Lardet, et des amendements identiques CE155 de Mme Perrine Goulet et CE421 de M. Patrice Perrot.
L'amendement CE226, présenté en deux temps, vise à rétablir l'expérimentation prévue à l'article 11 ter dans sa rédaction issue du vote de l'Assemblée nationale en première lecture, en conservant l'interdiction des pailles et des touillettes en plastique, adoptée par le Sénat.
L'amendement CE380 vise à rétablir la rédaction issue de l'Assemblée nationale tout en gardant l'ajout, par les sénateurs, de l'interdiction des pailles et bâtonnets mélangeurs pour boissons à partir de 2020.
Le Sénat avait prescrit un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) auquel nous ne sommes pas favorables. Nous proposons donc de supprimer l'alinéa 1 de l'article 11 ter.
J'avais défendu mon amendement CE342 en première lecture, et il a été repris partiellement par le Sénat. L'objectif est d'interdire en 2020 à la fois la vente de pailles et bâtonnets mélangeurs pour boissons en plastiques et la mise à disposition de ces derniers.
Je souhaite appeler l'attention de la commission sur l'interdiction de la mise à disposition de pailles en matière plastique en 2020.
Si le bien-fondé environnemental de cette interdiction n'est pas à remettre en question, on ne peut pas prévenir les fabricants de pailles plastiques un an avant leur interdiction, contrairement aux fabricants des autres couverts en plastique qui ont été prévenus depuis 2016. Il faut savoir qu'il n'existe pas actuellement de technologie de paille en plastique biodégradable en compost domestique : il n'existe que des bioplastiques compostables en compost industriel.
De plus, à côté de la technique du bioplastique, il existe celle de la paille papier, mais elle est détenue uniquement par les Chinois. Or j'appelle votre attention sur les conséquences environnementales qu'aurait l'importation des pailles sur notre sol, sachant qu'à l'heure actuelle nos entreprises sont exportatrices de pailles plastiques.
J'appelle également votre attention sur le fait que les machines françaises ne sont pas encore correctement réglées pour passer à la fabrication de pailles en papier, que cela a un coût élevé, et surtout que les délais de livraison sont supérieurs à neuf mois, ce qui met en difficulté les entreprises de ce secteur.
C'est pourquoi je vous propose par mon amendement CE155 de mettre fin, au 1er janvier 2020, à la mise à disposition des pailles en matière plastique non recyclables industriellement et de reporter au 1er janvier 2025 la fin de la mise à disposition des pailles en matière plastique, sauf celles compostables en compostage domestique. C'est donc une évolution en deux temps que je vous propose.
Enfin, je suis assez étonnée que l'on parle des pailles et de certains couverts en plastique, mais pas des fourchettes, des couteaux ou des bouteilles. Aussi, pourquoi stigmatiser les pailles et mettre en difficulté notre industrie qui représente des emplois sur notre territoire ?
Selon une étude menée par une association, 3,2 milliards de pailles en plastique sont consommées chaque année en France uniquement dans l'industrie de la restauration rapide. Ces pailles sont également parfois fournies dans d'autres types de restauration et vendues en supermarché. Ces pailles, fabriquées en plastique non biodégradables, sont à usage unique et contribuent grandement à la pollution de la planète : jamais triées, elles sont traitées avec les ordures ménagères et certains objets en plastiques à usage unique représentent 80 % de la pollution dans nos océans.
Pourtant des solutions alternatives existent, comme des pailles biodégradables, biosourcées, ou même des pailles réutilisables.
Mon amendement CE421, en conformité avec l'objectif fixé par le plan biodiversité qui vise zéro plastique rejeté dans l'océan d'ici à 2025, est donc d'interdire dès 2022 à la fois la vente de pailles en plastique non biodégradables et la mise à disposition de ces pailles dans la restauration. Nos industriels se préparent à cette transition, mais ils ont besoin d'un certain délai pour adapter leurs machines.
Attaché à mon amendement CE226, je ne peux qu'être défavorable aux amendements CE380, CE342, CE155 et CE421.
Je suis favorable à l'amendement du rapporteur et je demande le retrait des autres – à défaut, j'émets un avis défavorable à leur égard.
Je suis préoccupé par la dimension industrielle. Un délai d'un an, ou presque, serait très court. Or les industriels ont besoin de temps pour se retourner. Je vois bien l'impact, compte tenu du nombre de pailles qui traînent dans les fêtes de village et un peu partout, et je suis conscient que 2025 serait peut-être une date lointaine, mais ne pourrait-on pas trouver une piste d'atterrissage en 2022, par exemple, afin de laisser davantage de temps ? On peut trouver que ces produits ne sont pas en phase avec les attentes de la société, mais n'oublions qu'il y a aussi des gens qui travaillent dans ce secteur. On ne peut pas balayer d'un simple revers de la main des productions et des métiers parfaitement acceptés jusque-là : une telle décision a des conséquences, que l'on me paraît prendre un peu à la légère. On est beaucoup plus attentif quand il s'agit des pétroliers…
Nos industriels ont une réelle volonté de modifier leur modèle de production, notamment en allant vers des pailles en papier. Les problèmes qui se posent sont de nature technique : il faut avoir accès aux machines outils permettant d'assurer la transition.
Je demande au rapporteur et au ministre de réétudier le problème. Les autres couverts en plastique ont bénéficié d'un délai de quatre ans pour se mettre aux normes – les industriels sont au courant depuis l'adoption de la précédente loi, en 2016. Mais pour les fabricants de pailles, vous exigez une mise en conformité en quatorze ou quinze mois, alors que la technologie n'est pas prête en France. Laissez-leur un peu de temps afin d'éviter du chômage dans les circonscriptions où ces entreprises sont implantées.
La commission adopte l'amendement CE226.
En conséquence, les amendements CE380, CE342, CE155 et CE421 tombent.
La commission examine ensuite, en discussion commune, l'amendement CE437 de Mme Laurianne Rossi, les amendements identiques CE494 du rapporteur et CE496 de M. Philippe Bolo, ainsi que l'amendement CE180 de M. Loïc Prud'homme.
L'amendement CE437, qui a déjà été présenté en première lecture, vise à interdire l'utilisation de contenants alimentaires en matière plastique pour la cuisson, le réchauffage et le service dans la restauration collective au sein des établissements scolaires et universitaires, ainsi que dans les établissements accueillant des enfants de moins de six ans. L'interdiction prendrait effet à partir de 2025 pour les communes de plus de 2 000 habitants et en 2028 partout ailleurs.
Compte tenu de la densité et de l'importance des débats que nous avons eus lors de l'examen de cet amendement en séance, et du résultat du scrutin public, j'ai la conviction qu'il est nécessaire de reprendre nos travaux sur cette question de santé publique et environnementale, susceptible de nous engager pour les décennies à venir. J'ai entendu les arguments du ministre et du rapporteur relatifs aux coûts qui pèseraient sur les collectivités territoriales, à l'impact sur la filière et aux doutes entourant les arguments scientifiques dans ce domaine. Dans l'intervalle, j'ai continué à travailler activement avec la communauté scientifique, notamment les chercheurs du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), chez qui il existe un consensus quant à la migration, avérée, de molécules du contenant vers le contenu, à chaud comme à froid. J'ai également continué à échanger avec les collectivités territoriales, en particulier l'Association des maires de France (AMF) et les élus en charge de la restauration collective scolaire, dont j'ai pu constater la mobilisation sur ce sujet.
Par ailleurs, l'amendement CE437 s'inscrit pleinement dans l'ambition qui anime le plan pour la biodiversité présentée par le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, M. Nicolas Hulot – je pense à l'action 15, qui vise à favoriser des substituts au plastique. Comme tous les cosignataires de l'amendement, qui sont d'ailleurs un peu plus nombreux aujourd'hui qu'en première lecture, je suis convaincue qu'il est urgent d'agir en instaurant un tel principe de précaution, afin de répondre à l'impératif de santé publique et environnementale qui se pose.
Mon amendement CE494 vise à rétablir l'expérimentation que nous avions prévue en première lecture dans ce domaine.
L'amendement CE496 est identique. Je crois qu'il ne faut pas faire de discrimination entre les produits, comme cela a été dit tout à l'heure. Il serait positif de mener une expérimentation pour voir comment on peut s'organiser en termes de manutention, de renouvellement et d'utilisation.
Je ne reviens pas sur l'argumentaire que Mme Laurianne Rossi a développé, sinon pour dire que je le partage entièrement. Mon amendement CE180 est un peu plus ambitieux en ce qui concerne la date d'application du dispositif, puisqu'elle serait avancée au 1er janvier 2020, et peut-être un peu moins du point de vue du périmètre : mon groupe propose de ne viser que la restauration collective dans les établissements scolaires et ceux accueillant des enfants.
L'expérimentation qui nous est suggérée vise, en réalité, à enterrer le sujet. J'ai réalisé le même travail que Mme Laurianne Rossi : il est avéré scientifiquement que des molécules migrent. Pour sortir du tout plastique, c'est toute une organisation qui doit se mettre en place. Cela fait partie de la réinvention de la restauration collective, notamment scolaire, que l'on doit mener afin de la rendre plus proche de nos concitoyens et plus qualitative. Cela exige aussi de l'investissement dans la durée : personne ne s'engagera pour seulement trois ans dans une refonte de son système de restauration, afin d'aller vers ce qui est vertueux, c'est-à-dire une évolution consistant à se passer des contenants en plastique, notamment en matière de réchauffage et de service.
J'émets un avis défavorable aux amendements CE437 et CE180, pour les mêmes raisons qu'en première lecture.
Le Gouvernement est pleinement mobilisé sur ce dossier : nous menons une action au niveau européen pour faire émerger une approche cohérente et ambitieuse en ce qui concerne les perturbateurs endocriniens. Sur le sujet plus particulier des contenants en plastique, je souhaite une évolution par étapes. C'est pourquoi je suis favorable à ce que l'on mène, dès la promulgation de la loi, une expérimentation dans des collectivités volontaires – on pourrait d'ailleurs inciter certaines collectivités à participer. Nous suivrons ce qui sera fait. Cela permettra d'obtenir les données nécessaires en matière d'évaluation scientifique, notamment à propos de l'exposition à certains perturbateurs endocriniens dont on suspecte la migration depuis certaines matières plastiques vers les produits alimentaires. Cela permettra aussi de mesurer les surcoûts en matière d'approvisionnement, de logistique et d'organisation dans les services de restauration : une politique de substitution du plastique faisant appel à des contenants en verre ou en inox entraîne, en effet, des changements assez lourds pour les gestionnaires des services de restauration scolaire. Par conséquent, je suis favorable aux amendements CE494 et CE496, qui rétabliront le principe d'une expérimentation, et défavorable aux autres.
Comme nous l'avions souligné en première lecture, certaines collectivités locales ont d'ores et déjà mis en pratique une telle substitution : l'expérimentation souhaitée existe dans les faits. Nous disposons éléments chiffrés et techniques nécessaires, et il ne me semble pas opportun de repousser encore le changement : cela reviendrait, je l'ai dit, à enterrer le sujet.
La commission rejette l'amendement CE437.
Puis elle adopte les amendements CE494 et CE496.
En conséquence, l'amendement CE180 tombe.
La commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements identiques CE365 de M. Matthieu Orphelin et CE495 de M. Philippe Bolo, ainsi que les amendements identiques CE242 de Mme Monique Limon, CE366 de M. Matthieu Orphelin, CE381 de M. Philippe Bolo et CE394 de Mme Laurence Maillart-Méhaignerie.
L'amendement CE365 vise à mettre fin à l'utilisation des bouteilles d'eau en plastique dans tous les services de restauration collective, tandis que le CE366 ne concerne que les établissements de nature scolaire. Je salue à nouveau la classe de CM1 de Plougasnou, qui nous a soufflé ces amendements…
L'amendement CE495 tend aussi à faire disparaître les bouteilles d'eau en plastique dans la restauration collective. Je voudrais insister, en effet, sur la quantité de déchets auxquels leur usage conduit et sur le travail qualitatif mené par les collectivités territoriales en matière d'eau potable.
L'amendement CE242 vise à rétablir l'interdiction des bouteilles d'eau plate en plastique dans les services de restauration collective, que nous avions adoptée en première lecture à l'initiative du groupe Les Républicains. Nous nous étonnons que le Sénat ait supprimé cette disposition. Dans un esprit constructif, car nous avons entendu les craintes exprimées par les sénateurs, nous proposons dans un premier temps de restreindre l'interdiction aux établissements scolaires. Cette mesure ira donc dans le sens de la réduction en douceur de l'usage du plastique. Je rappelle aussi que beaucoup d'écoles, de collèges et de lycées utilisent des pichets ou des bouteilles en verre depuis des années.
Par l'amendement CE394, nous proposons également de rétablir l'interdiction supprimée par le Sénat tout en la limitant, dans un esprit de consensus, à la restauration collective scolaire, et en précisant que cette disposition ne s'appliquera pas aux services de restauration collective implantés dans les communes non desservies en eau potable – c'est important afin de ne pas entraîner une rupture d'égalité ou, en tout cas, des difficultés.
J'émets un avis défavorable aux amendements CE365 et CE495 et, naturellement, favorable aux amendements identiques à celui que j'ai déposé.
Je donne un avis favorable aux amendements CE242, CE366, CE381 et CE394, qui se limitent à la restauration collective scolaire, et défavorable aux autres.
Les amendements CE365 et CE495 sont retirés.
La commission adopte ensuite les amendements CE242, CE366, CE381 et CE394.
Puis elle adopte l'article 11 ter modifié.
Article 11 quater A (nouveau) (article L. 1313-3 du code de la santé publique) : Saisine parlementaire de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)
Article 11 quater A (nouveau) (article L. 1313-3 du code de la santé publique) : Saisine parlementaire de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)
La commission est saisie de l'amendement CE465 du Gouvernement
Cet article, tel qu'il a été adopté par le Sénat, donne la possibilité aux commissions permanentes de l'Assemblée nationale et du Sénat chargées de l'environnement, du travail, de la santé et de l'alimentation de saisir l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). Une telle disposition empiéterait sur la compétence du Gouvernement, en particulier celle des ministères responsables de la gestion des risques qui assurent la tutelle de l'agence. Par ailleurs, cela aurait pour effet d'introduire un nouvel interlocuteur pour l'ANSES, ce qui modifierait sa gouvernance et son fonctionnement. En pratique, il existe un risque important que les commissions parlementaires concernées remettent en cause, par l'effet de saisines non anticipées et en nombre important, le programme d'activité concerté entre les tutelles et le conseil d'administration de l'agence. C'est pourquoi l'amendement CE465 vise à supprimer cet article du projet de loi.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 11 quater A est supprimé.
Article 11 quater B (nouveau) (article L. 1313-3 du code de la santé publique) : Coordination de l'action de l'ANSES avec l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA)
La commission examine l'amendement CE466 du Gouvernement.
Je vous propose de supprimer l'article 11 quater B, introduit par le Sénat, qui oblige l'ANSES à assurer ses missions en coordination avec l'EFSA. Un règlement précise déjà que l'ANSES doit agir en étroite coopération avec les agences sanitaires européennes. La disposition adoptée par le Sénat est donc inutile.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
En conséquence, l'article 11 quater B est supprimé.
Article 11 quater (supprimé) (article L. 230-5 du code rural et de la pêche maritime) Information des convives de restauration collective sur la qualité alimentaire et nutritionnelle des produits servis
La commission examine, en discussion commune, l'amendement CE288 de M. Dominique Potier et les amendements identiques CE467 du Gouvernement, CE289 de M. Dominique Potier et CE344 de Mme Sandrine Le Feur.
L'amendement CE288 vise à obliger les gestionnaires, publics et privés, des services de restauration collective à organiser régulièrement une information et une consultation des usagers et, ce qui est très important, à faire en sorte que chaque établissement se dote d'un plan de progrès détaillant les dispositions à prendre pour améliorer la qualité des repas servis. Ce deuxième élément avait été adopté en première lecture à l'initiative de M. Guillaume Garot, actuellement retenu dans l'hémicycle.
Le Gouvernement a déposé l'amendement CE467 afin de rétablir l'article 11 quater, qui est relatif à l'information et à la consultation des usagers. Il s'agit d'améliorer la transparence de l'information et de répondre à des attentes sociétales fortes tout en promouvant les producteurs. Pour certains établissements scolaires et universitaires ainsi que dans les établissements accueillant des enfants de moins de 6 ans, des comités d'usagers existent déjà. Leur généralisation, dans l'ensemble des établissements, est cohérente avec les dispositions prévues à l'article 11.
Notre amendement CE289 est identique à celui du Gouvernement ; il s'inscrit dans le même esprit que le CE288 tout en étant moins complet.
J'émets un avis défavorable à l'amendement CE288 et favorable aux autres, qui rétablissent la rédaction adoptée en première lecture.
Je suis également défavorable à l'amendement CE288 : ma préférence va, naturellement, à celui qui a été déposé par le Gouvernement et aux deux amendements identiques à celui-ci.
La commission rejette l'amendement CE288.
Puis elle adopte les amendements CE467, CE289 et CE344.
L'article 11 quater est ainsi rétabli.
Article 11 quinquies : Rapport au Parlement sur l'extension de l'article 11 du projet de loi aux opérateurs de restauration collective privée
La commission adopte l'article 11 quinquies sans modification.
Article 11 sexies (article L. 654-23 du code rural et de la pêche maritime) : Interdiction de certaines dénominations commerciales associées aux produits d'origine animale
La commission est saisie de l'amendement CE183 de Mme Mathilde Panot.
L'article 11 sexies me paraît être la négation de toutes les expertises scientifiques sur ce que doit être, aujourd'hui, un système agricole et alimentaire soutenable. Il doit l'être à la fois sur le plan environnemental et sur celui de la qualité de l'alimentation : il y a un consensus sur le fait que la part des protéines végétales directement consommées par l'homme doit augmenter. Cet article du projet de loi est particulièrement malvenu : ceux qui défendent l'usage d'une dénomination très stricte, et prétendument réservée de manière traditionnelle aux seules denrées alimentaires d'origine animale, se trompent de combat. Cela revient à refuser de voir qu'il va vraiment falloir changer les habitudes en diminuant la part des protéines carnées dans l'alimentation, et peut-être aussi en améliorant leur qualité. Le régime alimentaire actuel devra changer de manière significative dans les prochaines années. C'est la raison pour laquelle nous vous proposons de supprimer cet article.
Je suis bien sûr totalement défavorable à cet amendement. Son exposé sommaire évoque un « lobby français de la viande ». Pour ma part, je parle d'éleveurs et d'industrie agroalimentaire. Notre logique n'est donc pas tout à fait la même… Que la diversification de l'alimentation, au moyen de protéines végétales, soit une tendance, c'est vrai, mais la diminution de la consommation de viande en France n'a pas attendu cette loi : c'est une réalité depuis bientôt vingt ans. L'inscrire ou non dans la loi ne changera rien. Vous prétendez défendre les éleveurs, et vous leur expliquez qu'ils doivent cesser leur métier… C'est assez paradoxal.
J'émets aussi un avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite l'amendement CE503 du rapporteur.
Par cet amendement, je vous propose de rétablir la rédaction que nous avions adoptée en première lecture.
Je demande le retrait de cet amendement au profit du CE491 qui a été déposé par le Gouvernement. En effet, l'amendement du rapporteur ne permettra plus d'appeler « steaks » des produits carnés contenant d'autres éléments, tels que des oignons ou des tomates. La cible doit être les protéines végétales qui se substituent aux protéines animales.
Je vous propose de présenter dès maintenant l'amendement du Gouvernement, car il tombera si celui du rapporteur est adopté.
Je vous remercie. L'amendement CE491 a pour objet d'améliorer la rédaction de l'article 11 sexies, qui vise à éviter toute confusion dans l'esprit des consommateurs. Je vous propose ainsi d'interdire l'utilisation des dénominations traditionnellement utilisées pour désigner des denrées alimentaires d'origine animale à propos de denrées alimentaires « comportant des protéines végétales se substituant aux protéines animales ». La rédaction actuelle de l'article 11 sexies est trop large, car elle reviendrait à interdire l'usage de protéines végétales ajoutées dans des préparations à base de protéines animales, comme les steaks à l'oignon ou à la tomate. Il convient, je l'ai dit, de ne cibler que les préparations à base de protéines végétales utilisées pour se substituer à des protéines animales.
Je voudrais revenir sur la réponse caricaturale que le rapporteur m'a faite tout à l'heure. Il a déclaré que les protéines végétales n'ont pas attendu cette loi pour progresser dans nos rations alimentaires : dès lors, je ne comprends pas pourquoi vous obstinez à mettre des freins dans ce texte. Laissons les producteurs de protéines végétales faire ce qu'ils doivent faire, et laissons notre alimentation évoluer sans contrainte, au lieu d'évoquer des motifs fallacieux.
La commission adopte l'amendement CE503.
En conséquence, l'amendement CE491 tombe.
La commission adopte ensuite l'article 11 sexies modifié.
Article 11 septies A (supprimé) (article L. 115-1 [nouveau] du code de la consommation) Différentes règles d'étiquetage d'ordre environnemental
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE290 de M. Dominique Potier et CE347 de Mme Sandrine Le Feur.
L'amendement CE290, qui est relatif à l'affichage environnemental des aliments, a été adopté en première lecture malgré l'avis défavorable du rapporteur ou du Gouvernement – il faudrait revoir précisément l'historique. Le Sénat a décidé de supprimer cette innovation, que je partageais plutôt, sur le plan philosophique, même si tous les attendus n'étaient pas pertinents à mes yeux. Par ailleurs, j'ai trouvé que des sénateurs du groupe Socialiste et Républicain ont défendu une idée intéressante à propos du glyphosate, qui fait parfois l'objet de débats un peu stupéfiants.
Comme je l'ai dit en séance, ce qui m'a d'ailleurs valu un certain nombre de reproches sur le terrain, je ne suis pas favorable à ce que la loi détermine la durée de vie du glyphosate. Nous avons, en France et dans l'Union européenne, des agences de sécurité sanitaire, qu'il faut d'ailleurs renforcer en leur donnant de l'autonomie et des moyens, et en améliorant leur communication. Il ne revient pas au Parlement de déterminer pour quelle durée ou dans quelles conditions une molécule est autorisée. Si l'on procédait de cette manière pour des médicaments destinés à l'homme, cela ne donnerait pas des résultats très probants… Ces sujets exigent de la raison, et non de la passion, et de la démocratie.
En revanche, je suis tout à fait partisan de l'idée consistant à ajouter le glyphosate à une liste de produits faisant l'objet d'un affichage environnemental à l'horizon 2023, où l'on est à peu près sûr que l'on n'utilisera plus cette substance en France – c'est en effet ce que prévoit la norme européenne. On peut souhaiter que l'interdiction prenne effet plus tôt mais, en tout cas, il n'y aura plus de glyphosate en 2023. En revanche, nous continuerons à importer des produits pour lesquels du glyphosate a été utilisé, en provenance du Mercosur, du Canada ou de n'importe quelle autre partie du monde : il serait tout à fait justifié, et cohérent, que le consommateur en soit informé.
C'est pourquoi l'amendement CE290 prévoit notamment que la présence de résidu de produits phytopharmaceutiques contenant la substance active « glyphosate » devra être signalée à partir de 2023. Cela me paraît la moindre des choses quand on demande aux agriculteurs français de faire l'effort de s'affranchir d'une molécule qui leur offre pourtant beaucoup de commodité. Il doit aussi y avoir une exigence d'information à l'égard des produits importés, qui viendront concurrencer ceux produits en France.
J'ai effectivement émis un avis défavorable en séance publique, et je le maintiens.
Ces mentions peuvent paraître une bonne idée, mais elles posent un réel problème juridique : l'incompatibilité avec le droit de l'Union européenne nous expose à un grand nombre de contentieux qui ne sont pas souhaitables.
En outre, certaines mentions risquent de produire des effets pervers très importants. Si le consommateur voit qu'une pomme a subi treize traitements phytosanitaires, il va penser qu'on l'empoisonne : cela crée un climat très anxiogène. En ce qui concerne des pommes importées, en revanche, le nombre de traitements ne sera pas connu.
Autre problème pratique, il sera très difficile pour le distributeur de rassembler de telles informations, ce qui risque d'engendrer des coûts importants. Les données sont enregistrées par les producteurs, les trois quarts du temps, mais il y a des problèmes de compatibilité entre les logiciels utilisés.
Enfin, et je reviens sur ce point, cela fera du mal aux produits français, car les distributeurs n'auront pas la possibilité d'indiquer sur l'étiquette des produits importés le nombre de traitements phytosanitaires, le nombre d'intermédiaires, et l'éventuelle alimentation de l'animal avec des organismes génétiquement modifiés (OGM). Ces informations ne seront pas recensées pour les produits importés, à la différence des produits français qui respecteront la loi. On risque donc d'encourager fortement les consommateurs à aller vers des produits étrangers.
Améliorer l'information du consommateur constitue pour le Gouvernement une priorité majeure, et je suis bien évidemment favorable à une plus grande transparence en matière d'étiquetage.
Néanmoins, ces deux amendements visent à inscrire dans la loi des dispositions qui relèvent en partie de la réglementation européenne – nous sommes, rappelons-le, dans un marché unique.
En ce qui concerne l'étiquetage des modes de production, j'ai proposé au Conseil national de l'alimentation une expérimentation qui doit aller jusqu'à son terme afin d'être prise en compte dans de bonnes conditions. Je voudrais, par exemple, attirer votre attention sur le fait qu'un animal « nourri à l'herbe » peut, en réalité, avoir été élevé en bâtiment. Il faut que ce soit contrôlable.
S'agissant des OGM, il existe des difficultés d'application qui concernent les quantités consommées par l'animal et la durée de l'alimentation avec des OGM. Par ailleurs, ce que ces deux amendements demandent est incontrôlable : on ne peut pas savoir si un animal a été nourri avec des OGM ou non. Les OGM des plantes ne se retrouvent pas dans la génétique animale. Par ailleurs, un tel étiquetage entraînerait un surcoût compris entre 20 et 30 % pour les producteurs. Je rappelle en outre que l'étiquetage « nourri sans OGM » existe déjà, à titre facultatif.
En ce qui concerne les produits phytosanitaires, l'obligation d'étiquetage ne vaudrait que pour les produits français, comme le rapporteur l'a souligné. Ce ne serait pas le cas pour les produits venant d'autres pays, notamment européens, ce qui entraînerait une distorsion de concurrence manifeste.
Pour toutes ces raisons, j'émets un avis défavorable.
Je maintiens l'amendement CE290, par fidélité envers ceux qui l'ont soutenu, même si cela ne déchaîne pas forcément l'enthousiasme dans les rangs du groupe La République en Marche. Je partage une grande partie des réserves qui viennent d'être formulées. Quelques supermarchés allemands ont commencé à dire qu'il ne fallait pas de produits ayant subi plus de trois traitements phytosanitaires, alors que l'on sait bien que trois traitements peuvent être plus dangereux, sur le plan de la toxicité, que cinq traitements bien répartis dans le temps. Les risques de démagogie sont donc importants.
Vous avez bien compris que je défends surtout cet amendement à titre d'appel. Il faut penser à l'effort demandé aux producteurs français, par exemple en ce qui concerne le glyphosate, devenu un sujet passionnel et même à mes yeux irrationnel. Nous avons besoin de signaux à l'égard de produits pour lesquels il sera permis, en dehors de l'Union européenne (UE), d'utiliser cette commodité qu'est le glyphosate : ces produits ne doivent pas venir concurrencer les nôtres et causer des problèmes sanitaires qui conduisent à interdire l'usage de cette substance sur le sol européen.
Le glyphosate pourrait faire l'objet d'un amendement intéressant en séance, car une mention me paraît tout à fait possible. On ne se heurte pas à un problème lié à la réglementation intra-européenne : ce produit sera interdit à l'échelle de l'UE à partir de 2023. Il faut au moins étudier la question et engager une expérimentation afin de donner un vrai signal aux producteurs. Ce serait un signal, et une forme de justice par rapport à l'effort qui leur est demandé. Quant aux consommateurs, on ne peut pas les terrifier en mettant en avant le caractère cancérigène du glyphosate et considérer, dans le même temps, que c'est un produit tout à fait sain lorsqu'il est importé dans le Mercosur ou dans le cadre de l'Accord économique et commercial global (CETA). Ce serait une forme d'incohérence.
En ce qui concerne les autres mentions prévues par l'amendement CE290, j'ai envie de dire « joker », mais il y a de vrais sujets à traiter. S'agissant du glyphosate, j'insiste sur le fait qu'il y a un amendement à préparer en vue de la séance, et je vous propose d'y travailler ensemble au lieu de nous affronter.
La commission rejette successivement ces amendements.
En conséquence, la commission maintient la suppression de l'article 11 septies A.
Article 11 nonies A (supprimé) (article L. 412-7 [nouveau] du code de la consommation) Étiquetage de l'origine du vin
La commission est saisie des amendements identiques CE113 de M. Jérôme Nury, CE141 de M. Dino Cinieri, CE254 de Mme Monique Limon et CE291 de M. Dominique Potier, qui font l'objet du sous-amendement CE507 du Gouvernement.
Protéger les agriculteurs, et dans ce cas précis les viticulteurs, implique aussi de protéger leurs savoir-faire, leurs connaissances et leurs terroirs. Tel est l'objet de l'amendement CE113 qui rétablit l'article 11 nonies A. Il est en effet inacceptable que des vins étrangers, sous couvert de pratiques marketing douteuses, trompeuses, voire malhonnêtes, usurpent l'identité des vins français pour mieux se vendre, tout en violant impunément le droit communautaire.
C'est un affront à notre culture et au travail laborieux que nos viticulteurs effectuent depuis des siècles. Il est donc indispensable de voter cet amendement.
Mon amendement CE141 vise également à rétablir l'article 11 nonies A pour clarifier la réglementation en vigueur et assurer une meilleure information des consommateurs.
Mon amendement CE254, identique, répond aux nombreuses attentes des consommateurs et améliore la traçabilité et la lutte contre la fraude en matière viticole. Les récentes révélations sur les ventes de bouteilles de vin rosé illustrent le besoin de renforcer les contrôles et l'étiquetage.
Notre sous-amendement CE507 améliore la rédaction de ces amendements, qui sont très attendus par les professionnels et les élus des territoires vitivinicoles. Il permet d'en rendre la rédaction compatible avec le droit de l'Union européenne.
In vino veritas… Avis favorable au sous-amendement du Gouvernement, et aux amendements ainsi sous-amendés.
Le sous-amendement CE507 est adopté.
Les amendements, ainsi sous-amendés, sont adoptés et l'article 11 nonies A est ainsi rétabli.
Article 11 nonies E (article L. 665-6-1 [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Origine du vin servi dans la restauration et dans les débits de boissons
La commission est saisie de l'amendement CE244 de Mme Monique Limon.
Cet amendement a aussi pour objet de revenir à la rédaction de l'article adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, qui avait fait l'objet d'un consensus dans l'hémicycle. C'est une mesure de bon sens afin que dans les restaurants, les cartes fassent apparaître l'origine géographique des vins vendus en bouteilles, mais également en pichets ou au verre.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
L'article 11 nonies E est adopté, modifié.
Article 11 nonies F (nouveau) (article L. 644-6 du code rural et de la pêche maritime) Déclaration de la récolte de raisins de cuve par les viticulteurs
L'article est adopté, sans modification.
Article 11 nonies (article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises) Encadrement du recours à la dénomination « équitable » des produits
La commission est saisie de l'amendement CE227 du rapporteur.
Cet amendement vise à rétablir l'article 11 nonies dans sa rédaction issue du vote de l'Assemblée nationale en première lecture.
La commission adopte l'amendement et l'article 11 nonies est ainsi rédigé.
Article 11 decies (article L. 412-4 du code de la consommation) Origine du miel
Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la commission rejette l'amendement CE3 de M. Julien Dive.
Elle examine ensuite l'amendement CE464 du Gouvernement.
L'obligation d'étiquetage des origines des miels par ordre décroissant d'importance impose une contrainte très excessive aux conditionneurs de miel, qui devraient changer leur étiquetage chaque fois que leurs sources d'approvisionnement varient.
L'étiquetage des ingrédients composant un même aliment par ordre d'importance décroissante est déjà imposé pour l'ensemble des denrées alimentaires. Il s'agit d'une obligation différente de l'étiquetage des pays d'origine d'un même ingrédient par ordre d'importance décroissante, qui serait bien plus contraignante.
Par ailleurs, l'étiquetage des pays d'origine par ordre décroissant n'est pas prévu par la directive 201463UE du Parlement européen et du Conseil du 15 mai 2014 modifiant la directive 2001110CE du Conseil relative au miel, et constitue une sur-transposition qui n'est pas souhaitable.
Il convient d'éviter les effets pervers qui pourraient conduire des mélangeurs à ne placer qu'une quantité modérée de miel français dans leurs pots, et de mettre l'origine « France » en première occurrence, pour tromper le consommateur. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'article 11 decies est sans modification.
Article 11 undecies A (nouveau) (article L. 236-1 A [nouveau] du code rural et de la pêche maritime) Lutte contre les produits et denrées agricoles importées ne respectant pas les standards européens et nationaux
La commission est saisie de l'amendement CE327 du rapporteur.
La distribution et la commercialisation des produits désignés dans cet article introduit par le Sénat sont déjà interdites, puisqu'ils ne respectent pas les réglementations en vigueur sur notre territoire. Cet article a donc une portée normative limitée, et vise explicitement à interpeller le Gouvernement sur des pratiques commerciales déloyales et sur la nécessité de renforcer les contrôles effectués par les services d'inspection.
L'amendement CE327 précise les pratiques visées et supprime la référence à la réglementation nationale qui, sur ces sujets, est étroitement liée à la réglementation européenne.
La situation qui résultera de l'adoption de cet amendement nous exposera à un contentieux devant la Cour de justice de l'Union européenne, où nous perdrons à coup sûr. Je propose d'adopter cet amendement, mais je soumettrai un sous-amendement afin de sécuriser cette proposition lors du débat en séance publique.
La commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'article 11 undecies A modifié.
Article 11 undecies (article L. 1 du code rural et de la pêche maritime) Divers objectifs de la politique agricole
La commission examine l'amendement CE457 du Gouvernement.
Cet amendement vise à supprimer la mention particulière du maintien des abattoirs à proximité́ des élevages, introduite par le Sénat. En effet, le 9° du I de l'article L. 1 du code rural fait déjà mention de l'ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles. Cette rédaction couvre l'ensemble des établissements agroalimentaires et notamment les abattoirs pour ce qui concerne le volet production. Par conséquent, il n'est pas justifié de citer plus précisément les abattoirs plutôt que d'autres établissements de la chaîne alimentaire.
Suivant l'avis favorable du rapporteur, la commission adopte l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CE185 de M. François Ruffin.
Nous souhaitons réserver une part de la surface agricole utile à l'agriculture biologique. Cet amendement est symbolique : les lois précédentes qui ont fixé de tels objectifs n'ont malheureusement jamais été respectées. Nous espérons que l'objectif de consacrer 15 % de la surface à l'agriculture biologique pourra être affectée. Nous voulons dessiner une trajectoire pour que 20 % de la surface agricole soit dédiée à l'agriculture biologique en 2022, 50 % en 2025, et que la transition soit complète en 2035. Cela permet de dessiner l'avenir que l'on souhaite pour notre modèle agricole, dont on discute beaucoup.
Avis défavorable. Essayons déjà d'atteindre l'objectif de 15 % à l'horizon 2022 ; nous verrons ensuite si nous pouvons aller plus loin.
Consacrer 15 % de la surface agricole utile (SAU) à l'agriculture à l'horizon 2022 est déjà un objectif ambitieux, mais réaliste, qui tient compte des perspectives de conversion en agriculture biologique. La conversion totale de la SAU française en production biologique en une quinzaine d'années n'est pas réaliste. Avis défavorable.
La commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CE294 de M. Dominique Potier.
J'espère vous convaincre, car il s'agit d'un point très important – je pense au dernier rassemblement de chefs d'État sur la question du Sahel, et aux migrations induites par la misère et le changement climatique. Après que le Sénat et le Gouvernement ont redéfini l'aide alimentaire et la lutte contre la précarité, il s'agit de rappeler que l'action de la France en matière d'aide au développement est orientée vers une agriculture vivrière, familiale et compatible avec la transition écologique. C'est le discours de M. Nicolas Hulot, c'est ce que vous dites, Monsieur le ministre, quand vous êtes à la Food and agriculture organization (FAO), c'est la pratique de l'Agence française de développement (AFD), dont j'ai la chance et l'honneur d'être administrateur ; c'est la politique de la France.
Ce serait bien la première fois qu'un texte d'orientation agricole n'affirme pas nos priorités en intégrant la lutte contre le changement climatique et la priorité à l'agriculture familiale, comprise comme agriculture à taille humaine : une agriculture de fermes, par opposition à l'agriculture de firmes.
Je n'ai pas compris pourquoi cette proposition a été repoussée en première lecture, alors que ce sont des éléments qui nous rassemblent et qui nous honorent. J'espère que nous serons entendus, cette fois-ci.
Je comprends bien que c'est un amendement d'appel au Gouvernement. Il paraît contre-productif de fixer à notre politique de coopération internationale en matière agricole des objectifs de transition écologique et de mise en avant de l'agriculture vivrière, d'autant plus que l'alinéa que vous modifiez indique que la France respecte en priorité la « souveraineté alimentaire » de ces pays. Avis défavorable.
Nous avons débattu de cette question importante en première lecture. L'ajout proposé, tel que l'amendement est rédigé, semble conditionner l'appui à l'agriculture vivrière ou familiale aux cas où les agriculteurs sont déjà entrés dans des démarches de transition écologique, ou bien sous-entendre que l'agriculture vivrière et familiale s'inscrit par nature dans une démarche de transition écologique, ce qui n'est pas forcément toujours le cas.
La proposition ne paraît pas de nature à atteindre l'objectif que nous partageons : préciser les buts de la politique de coopération internationale de la France, en spécifiant que cette dernière soutiendra la transition écologique des pays partenaires. Il n'y a pas de valeur ajoutée de ce point de vue. Avis défavorable.
Je veux bien que nous travaillions à une rédaction complémentaire ou plus précise, mais cette mention figure déjà dans les lois d'orientation agricole, dans tous les textes ratifiés par la France ; nous ajouterions uniquement la référence à la transition écologique.
Aujourd'hui, nous connaissons le rôle des sols et de leur résilience dans la lutte contre le changement climatique, il est fondamental. Peut-être confondez-vous, Monsieur le rapporteur, souveraineté politique et souveraineté alimentaire. La souveraineté politique des pays avec qui nous coopérons ne peut pas être mise en cause, c'est une question de diplomatie, de droits humains et de vision politique. Pour contribuer à la souveraineté alimentaire, il faut que notre acte de coopération, nos investissements, nos ingénieurs et nos coopérants, favorisent ce type d'agriculture. Il n'y a aucune contradiction : en respectant la souveraineté politique des pays tiers, nous pouvons favoriser cette agriculture que nous avons retenue pour nous-même, qui nous met à l'honneur à la FAO et qui est la ligne conductrice de l'AFD.
Je veux bien perdre aujourd'hui, mais je propose de réfléchir à une rédaction commune, partagée par l'ensemble des groupes, que nous pourrions adopter en séance avec votre collaboration, Monsieur le ministre. Ainsi, nous adopterions une disposition à sa juste place dans le texte, qui ferait honneur à votre travail, à celui de M. Nicolas Hulot et de vos prédécesseurs.
Au vu du signal amical du ministre, qui m'indique que nous pouvons travailler à une telle rédaction consensuelle, je retire l'amendement.
L'amendement est retiré.
La commission examine l'amendement CE413 de M. André Chassaigne.
Cet amendement vise à préciser l'objectif concernant l'aide alimentaire, en réitérant le souhait de la France d'un maintien et d'un renforcement du programme d'aide alimentaire européen dans une perspective de long terme.
Vous proposez d'insérer cet amendement à un endroit où il n'a pas sa place. Le contenu du cadre communautaire en matière d'aide alimentaire échappe aux objectifs nationaux de la politique agricole : il doit être négocié par l'État mais nous ne pouvons pas fixer son renforcement comme un objectif à atteindre. Avis défavorable.
Votre amendement présente un défaut de rédaction. Il précise que l'aide alimentaire s'inscrit dans le cadre communautaire. Il s'agit d'affirmer le souhait de la France du maintien du fonds européen d'aide aux plus démunis, et nous sommes mobilisés sur ce sujet dans le cadre des discussions sur le cadre financier pluriannuel européen.
Cependant, la contribution des crédits européens à la lutte contre la précarité alimentaire est déjà mentionnée dans les dispositions du code de l'action sociale et des familles, modifiés par l'article 12 du projet de loi. Il est donc inutile de préciser davantage la disposition. Avis défavorable.
L'amendement est retiré.
La commission examine, en discussion commune, les amendements CE403 de M. Patrice Perrot et CE414 de M. André Chassaigne.
L'amendement CE403 vise à inscrire dans la loi le modèle agricole promu par la France, son niveau d'exigences sanitaire et environnementale, et d'exprimer le refus d'importer tout produit qui ne respecterait pas les normes de production visant à protéger l'environnement, la santé des consommateurs et le bien-être des animaux, et qui déstabiliserait les filières d'élevage qui ont investi dans le respect de normes garantissant la qualité de l'alimentation et notre sécurité sanitaire.
Nous souhaitons par notre amendement CE414 compléter cet objectif en introduisant dans les fondements de notre politique agricole et alimentaire les principes de souveraineté et de sécurité alimentaires pour les peuples, qui apparaissent complémentaires à la volonté affichée de promouvoir l'indépendance alimentaire de la France.
Avis défavorable à ces deux amendements.
S'agissant de l'amendement CE403, la notion d'« importations ne respectant pas strictement les normes de production » est très vague, et de surcroît contraire à nos engagements européens et auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). La rédaction actuelle de l'alinéa 7, dont je suis d'ailleurs à l'origine, est à mon avis meilleure.
Quant à l'amendement CE414, ses objectifs sont louables mais il mentionne les niveaux européens et internationaux : les objectifs de la politique agricole fixés dans la loi ne peuvent faire référence à ce qui s'assimile à des injonctions de négociation dans les traités internationaux.
La commission rejette les amendements.
Elle est ensuite saisie de cinq amendements en discussion commune, l'amendement CE255 de M. Dino Cinieri, les amendements CE393, CE402 et CE391 de M. Patrice Perrot et l'amendement CE430 de Mme Josiane Corneloup.
L'amendement CE255 vise à affirmer le principe de réciprocité énoncé à l'alinéa 9 du présent article, en exigeant que toute viande entrant sur le marché européen respecte les mêmes normes de production que celles imposées aux producteurs européens.
En effet, les accords de libre-échange en voie de ratification ou en cours de négociation, notamment le CETA et le projet d'accord avec le Mercosur, prévoient l'ouverture du marché communautaire à plusieurs centaines de milliers de tonnes de viandes issues de bovins ou de porcins non tracés, engraissés aux farines animales ou aux antibiotiques.
Ces pratiques, qui sont strictement interdites au sein de l'Union européenne, ne font aujourd'hui l'objet d'aucune restriction aux importations ; c'est dire à quel point il est nécessaire d'adopter cet amendement.
L'amendement CE430 a le même objet.
Nos trois amendements CE393, CE402 et CE391 sont surtout des amendements d'appel, pour exprimer notre souhait que les mêmes exigences pèsent sur les importations que sur la production nationale, notamment sur la question des antibiotiques, des farines animales, et de la traçabilité des animaux.
On ne peut qu'être d'accord avec le principe global de ces amendements, mais l'inscrire dans la loi serait contraire à l'ensemble de nos engagements internationaux.
Un certain nombre de critères qui figurent dans ces amendements sont invérifiables sur le produit fini, notamment le recours aux antibiotiques comme activateurs de croissance, qui n'est pas détectable sur la viande arrivant en France. Il faut renforcer ces moyens de contrôle, et dans les accords internationaux, négocier des normes de production qui préservent nos modèles de production européens.
Ces questions sont très importantes, mais l'inclure dans un projet de loi à l'heure actuelle contraindrait de façon excessive les futures négociations dans le cadre des accords internationaux. Avis défavorable.
L'ajout proposé ne concerne que deux filières, et deux éléments seulement de leur mode de production actuel, d'ores et déjà contestés par le Gouvernement dans les instances européennes et internationales. C'est ce que j'ai fait hier, dans une déclaration lors du conseil des ministres européens de l'agriculture à Bruxelles. Nous avons obtenu le refus des importations des viandes traitées aux antibiotiques à la fin juin 2018 : c'est une information importante.
Avis défavorable sur tous ces amendements.
La commission rejette successivement les amendements CE255, CE393, CE402, CE391 et CE430.
La commission examine l'amendement CE295 de M. Guillaume Garot.
Cet amendement réaffirme l'importance de favoriser l'information sur la santé, l'alimentation, le bien-être, le sport et la lutte contre le gaspillage à l'attention des enfants, notamment dans les écoles, au collège et au lycée.
Pour moi, cette précision va de soi et il n'est pas nécessairement utile de l'inscrire dans la loi. Avis défavorable.
Avis défavorable : l'article 15 bis du projet de loi, adopté dans les mêmes termes à l'Assemblée et au Sénat, prévoit de modifier le code de l'éducation pour préciser que l'éducation à l'alimentation et à la lutte contre le gaspillage alimentaire est dispensée dans l'ensemble des établissements d'enseignement scolaire.
L'amendement est retiré.
La commission en vient aux amendements CE296, CE297 et CE292 de M. Dominique Potier.
Cet amendement CE296, je ne suis pas près de le retirer… Vous l'avez voté à l'unanimité lors de l'examen de la proposition de résolution européenne (PPRE) défendue par M. André Chassaigne et M. Alexandre Freschi.
Cette proposition de la Nouvelle Gauche vise à adopter à l'échelle européenne des dispositions pour encadrer le marketing alimentaire. Il n'est pas question d'interdiction, nous avons tiré les leçons de vos contraintes de protection du budget des chaînes publiques et des médias, au détriment de la santé publique. Elles seront très difficiles à expliquer aux générations qui viennent. Mais nous pouvons comprendre ces contraintes, qui ne viennent pas du ministère de l'agriculture mais du Gouvernement, et auxquelles nous avions déjà cédé auparavant. Acceptez au minimum cet amendement qui reprend l'esprit de l'injonction que nous avions formulée dans la proposition de résolution européenne.
Il est proposé d'encadrer la publicité et le marketing alimentaire auxquels sont exposés les enfants : il est impossible d'y échapper.
Mme Dominique Voynet est venue dans ma circonscription, parler au conseil départemental des plans alimentaires territoriaux, et participer à des réunions populaires avec des associations de consommateurs. J'ai fait vérifier les chiffres : le diabète de niveau 2 et l'obésité, liés à l'alimentation dans 80 % des cas, et dont sont victimes les populations les plus pauvres, les plus fragiles et les plus sensibles, notamment les enfants des milieux populaires, peu cultivés ou confrontés à des problèmes économiques, représente un coût en termes de prise en charge de 28 milliards d'euros dans notre pays ! C'est trois fois le budget de la part revenant à la France de la politique agricole commune !
Si nous ne sommes pas capables de dire en amont que nous allons encadrer la publicité et le marketing qui pousse à manger du gras, du sucré et de mauvais produits par nos gamins qui ne sont pas protégés par le capital culturel de leurs parents, je ne sais pas à quoi nous servons au sein de cette assemblée. Je préférerais en traiter en commission, sans passion, et adopter ici cet amendement plutôt que d'en faire un sujet de polémique. Mais j'ai une colère au ventre, et je voudrais la partager avec vous.
Il n'est pas possible de s'en remettre à des lois de l'économie qui ne sont pas bonnes, y compris sur le plan économique, car nous dépensons trois fois le budget de la PAC dans ce pays pour soigner des maladies liées à l'alimentation.
L'amendement CE297, je vous le concède, est un amendement d'appel pour faire constater l'impérieuse nécessité de mesures d'urgence sur le foncier pour l'installation des jeunes.
L'amendement CE292 tend à faire reconnaître l'existence d'une exception agri-culturelle : la terre comme la nourriture ne sauraient être considérées comme des marchandises comme les autres.
S'agissant de l'amendement CE296, je partage l'objectif de principe et le fond : c'est notamment une demande de l'ONG « Foodwatch » avec laquelle nous avons discuté. Mais je ne pense pas que ce projet de loi soit adéquat. Nous travaillons avec Mme Anne-Laurence Petel à un amendement de cette nature sur le futur projet de loi audiovisuel, qui sera débattu à l'Assemblée à la fin de l'année. Il me semble plus pertinent d'encadrer la publicité et le marketing alimentaires dans ce projet, avec le ministère de la culture, qui est le premier concerné par les effets d'un tel amendement. Avis défavorable à l'adoption de cet amendement dans ce texte.
Les autres amendements sont des amendements d'appel. Nous avons déjà débattu de l'exception agri-culturelle en première lecture et nous avions tranché en rédigeant l'alinéa 7 de l'article.
Sur l'amendement CE296, nous avions choisi de retravailler et de revoir la charte du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) pour renforcer son contenu et l'étendre aux différents supports, dans le cadre du projet de loi audiovisuel qui sera examiné en fin d'année. Avis défavorable, même si je partage les arguments de fond sur cette question éminemment importante.
Je porte un intérêt particulier à l'installation des jeunes agriculteurs et aux problèmes fonciers. Nous y travaillons au ministère, d'autres travaux menés par votre rapporteur, Mme Anne-Laurence Petel et M. Jean-Bernard Sempastous seront finalisés à l'automne. Nous attendons leurs résultats pour en reprendre un certain nombre d'éléments.
Sur l'exception agri-culturelle, le débat s'est tenu en première lecture, j'en ai également débattu au Sénat avec les sénateurs du groupe Socialiste et Républicain ; je reste défavorable à cet amendement en l'état.
La commission rejette successivement les amendements CE296, CE297 et CE292.
Puis elle adopte l'article 11 undecies modifié.
Mes chers collègues, nous allons suspendre nos travaux. Nous avons examiné 286 amendements ; il nous en restera 100 à examiner ce matin.
Membres présents ou excusés
Réunion du mardi 17 juillet 2018 à 21 h 30
Présents. – M. Damien Adam, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Thierry Benoit, M. Grégory Besson-Moreau, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Éric Bothorel, M. Alain Bruneel, M. Dino Cinieri, Mme Michèle Crouzet, M. Julien Dive, Mme Christelle Dubos, Mme Valéria Faure-Muntian, Mme Véronique Hammerer, M. Guillaume Kasbarian, Mme Célia de Lavergne, Mme Marie Lebec, Mme Annaïg Le Meur, Mme Monique Limon, M. Didier Martin, Mme Graziella Melchior, M. Jean-Baptiste Moreau, M. Mickaël Nogal, M. Jérôme Nury, Mme Anne-Laurence Petel, M. Dominique Potier, M. Benoit Potterie, M. Vincent Rolland, M. Nicolas Turquois
Excusés. – M. Jean-Claude Bouchet, M. José Evrard, M. Roland Lescure, Mme Bénédicte Taurine
Assistaient également à la réunion. – M. Thibault Bazin, M. André Chassaigne, Mme Perrine Goulet, Mme Frédérique Lardet, Mme Nicole Le Peih, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, M. Matthieu Orphelin, M. Alain Perea, M. Patrice Perrot, M. Loïc Prud'homme, Mme Laurianne Rossi, M. Arnaud Viala