La réunion débute à 15 heures.
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.
La Commission poursuit l'examen du projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs (n° 2367) (M. Jean Terlier, rapporteur).
Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen du projet de loi ratifiant l'ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du code de la justice pénale des mineurs. Si nous n'avions pas terminé à l'appel, en séance publique, de la proposition de loi visant à réformer l'adoption, nous pourrions reprendre cette discussion demain à quinze heures. En effet, nous débattrons demain matin de la proposition de loi « visant à garantir la prééminence des lois de la République », inscrite à l'ordre du jour par le groupe Les Républicains. Bref, je vous invite à la concision.
Après l'article unique (suite)
La Commission examine l'amendement CL136 de M. Ugo Bernalicis.
Je propose de supprimer la possibilité de pratiquer l'assignation à résidence sous surveillance électronique (ARSE), pour les mêmes raisons qui m'ont conduit à m'opposer à la détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE). Ces dispositifs illustrent le fait que le code pénal des majeurs irrigue le droit applicable aux mineurs, alors que ce dernier devrait être placé sous le régime de l'exception.
J'imagine que vous souhaitez introduire cette peine pour éviter d'avoir recours à la détention provisoire. Depuis le début de la crise du covid, on a libéré des gens de prison, ou on ne les a pas envoyés en détention, sans pour autant les soumettre à l'ARSE ou à la DDSE, car le contexte sanitaire rendait difficile le recours à l'expertise technique nécessaire pour appliquer ces peines. On a redécouvert des mesures, non dénuées de vertus, qui n'exigent pas de surveillance électronique et qui sont suivies par les intéressés, à l'image de la libération conditionnelle. Auparavant, on se rassurait en appliquant un bracelet électronique, que ce soit en présentenciel ou au titre de la peine. Je constate qu'on n'est pas capable de tirer tous les enseignements de la période récente, surtout pour les mineurs, ce qui est très regrettable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL101 de M. Michel Zumkeller.
L'amendement vise à rendre impossible la détention provisoire des mineurs de moins de seize ans. Cela revient à élever le seuil, aujourd'hui fixé à treize ans. La détention provisoire n'est en effet jamais une bonne solution à cet âge.
Nous partageons cet objectif. Le code de la justice pénale des mineurs prévoit que « la détention provisoire d'un mineur ne peut être ordonnée ou prolongée […] que si cette mesure est indispensable et s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure et des éléments de personnalité préalablement recueillis, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un des objectifs » poursuivis. Cette mesure s'inscrit donc dans un cadre très restrictif, mais est utile dans certains cas. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CL228 de M. Ugo Bernalicis.
Cet amendement vise à interdire toute possibilité de placement en détention provisoire d'un enfant de moins de 14 ans – et non de moins de 13 ans, comme le texte le prévoit. Je rappelle que, de manière générale, nous nous opposons à la détention provisoire, qui ne nous paraît pas de bonne justice.
Nous avons eu un débat, hier soir, sur l'âge auquel on pouvait présumer le discernement. Le code retient 13 ans pour le prononcé des peines et des mesures de sûreté, ainsi que pour l'inscription des mentions afférentes dans un certain nombre de fichiers. Si mes souvenirs sont bons, lors de son audition dans le cadre de la mission d'information relative à la justice des mineurs, le Défenseur des droits M. Jacques Toubon avait considéré qu'il était raisonnable de retenir cet âge. Pour toutes ces raisons, l'avis est défavorable.
Je suis sûr que l'ancien Défenseur des droits, dans sa volonté de convaincre et de ne pas trop perturber la majorité et le législateur, s'était dit que le maintien de l'âge de 13 ans était la position la plus consensuelle. Toutefois, l'avis qu'il a rendu à l'époque n'allait pas dans le sens d'une adhésion à la réécriture proposée. Il a d'ailleurs dénoncé une confusion sur la temporalité. Mme Louis affirmait que la justice devait agir avec promptitude : je suis d'accord, mais elle ne doit pas aller trop vite non plus. Pour l'essentiel, le code vise à accélérer la procédure, non pas pour être prompt, mais pour être rapide, ce qui n'est pas la même chose.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL66 de Mme Marie-George Buffet.
Par cet amendement, nous entendons nous opposer à une éventuelle mise en détention provisoire des mineurs de moins de 13 ans ; nous estimons que le juge des enfants doit obligatoirement prononcer une mesure éducative.
Votre amendement est satisfait : un mineur de moins de 13 ans ne peut être placé en détention provisoire. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL10 de M. Éric Ciotti.
La Commission en vient à l'amendement CL236 de Mme Alexandra Louis.
Cet amendement vise à résoudre une difficulté : le projet de code ne prévoit plus l'intervention du juge des libertés et de la détention (JLD), hormis en matière d'instruction. Le JLD statuait jusqu'alors sur l'opportunité du placement d'un mineur en détention provisoire. Cette mission, lourde de conséquences, incomberait désormais au juge des enfants, afin de donner toute sa force au principe de spécialisation. Toutefois, ce choix fait fi de l'exigence d'impartialité, tout aussi protectrice des droits de la défense – donc des intérêts du mineur –, et reconnue tant par la Constitution que par l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'Homme.
En effet, le texte ne prévoit aucune garantie de nature à éviter qu'un même juge des enfants statue sur une mesure de placement en détention provisoire, puis sur la culpabilité, voire sur le prononcé de la peine. Plusieurs professionnels et auteurs ont appelé notre attention sur ce point, parmi lesquels Haritini Matsopoulou, professeur en droit et en sciences criminelles, et Rémi Heitz, procureur de la République de Paris. Un juge qui a statué sur la détention provisoire s'est déjà fait une idée du dossier ; il aura nécessairement des préjugés lorsqu'il devra se prononcer par la suite sur la culpabilité ou la sanction. Voilà pourquoi il faut des garde-fous.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme conclut à une violation de l'article 6, paragraphe 1, de la convention si la connaissance antérieure de l'affaire par le juge a pu susciter chez les parties des doutes sérieux ou des appréhensions. Les juges européens prennent particulièrement en considération l'implication du magistrat dans l'analyse du dossier. Si l'analyse dépasse un examen sommaire des faits reprochés, il y a un risque de partialité. Or, l'article L. 334-2 du projet de code prévoit que la détention provisoire d'un mineur ne peut être prolongée ou ordonnée que si cette mesure est indispensable au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure et des éléments de personnalité. Cela nécessite une analyse minutieuse et non un simple examen sommaire.
Il serait donc judicieux de réinvestir le JLD de cette mission, ou d'assortir l'intervention du juge pour enfants de garanties. Monsieur le ministre, vous avez évoqué, lors de la dernière réunion, la spécialité du JLD. De fait, la conciliation des principes en présence pourrait être assurée par la spécialisation du juge des libertés et de la détention.
Cet amendement d'appel soulève la question de la constitutionnalité du texte et met en question le pouvoir du juge des enfants d'ordonner une mesure de détention provisoire. Peut-être le ministre pourrait-il nous faire part de ses observations à ce sujet ?
Madame la députée, vous soulevez une question essentielle. Je ne fais pas du tout la même lecture que vous de cette disposition. Ce qui est contraire au principe d'impartialité, c'est d'accomplir les diligences utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et se prononcer ensuite, dans le cadre du jugement, sur la culpabilité du mineur. Un juge d'instruction ne saurait ainsi – si vous me permettez ce parallèle – être juge de l'affaire quand elle est renvoyée devant une juridiction correctionnelle ou criminelle. C'est ce que Badinter appelait « Maigret et Salomon ».
Dans le cadre de la nouvelle procédure de mise à l'épreuve éducative, le juge des enfants n'accomplit plus les diligences en dehors de l'audience de culpabilité. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs validé en 2002 la procédure de présentation immédiate, dans laquelle le juge des enfants statue sur le placement en détention provisoire puis préside l'audience de jugement devant le tribunal pour enfants. Je vous demande donc de retirer votre amendement ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Monsieur le ministre, je souscris davantage à l'argumentation de Mme Louis qu'à la vôtre. En effet, la détention provisoire d'un mineur est rare, donc sensible. Qui plus est, pour qu'elle soit prononcée, les faits doivent être d'une particulière gravité et les investigations complexes. Aussi le magistrat qui aura, le cas échéant, à prononcer une telle mesure sera-t-il amené à apprécier le dossier. Or, dès lors qu'il apprécie, il entre dans la fonction de juger. La question de l'impartialité objective se pose donc, de fait – et non en droit, vous avez raison.
J'ajoute que, dans un arrêt du 4 juin 2020, la Cour de cassation a jugé, à propos d'un JLD qui avait présidé la formation de jugement, que le principe d'impartialité n'était pas garanti. Certes, dans le cas d'espèce, il avait autorisé des visites domiciliaires, ce qui n'est pas exactement la même chose, mais ce qui est en jeu, là aussi, c'est son appréciation.
Au plan de l'impartialité subjective, je crains que de nombreuses procédures ne tombent parce que l'on aura réussi à démontrer que le magistrat qui s'est prononcé sur la détention provisoire n'était pas impartial lorsqu'il s'est prononcé sur le fond.
Pour des raisons de pur pragmatisme, il me paraît donc sage d'avancer dans la direction proposée par Alexandra Louis, qui a le soutien du groupe LaREM.
C'est moins la question de l'impartialité que celle d'un double regard sur la détention d'un enfant qui m'intéresse. Peut-être le JLD peut-il avoir un regard sur la décision de placement en détention prise par le juge des enfants. En tout cas, il nous paraît plus intéressant d'examiner la question sous cet angle plutôt que sous celui de l'impartialité, qui me semble devoir être écarté compte tenu des éléments produits par le Garde des sceaux.
À l'instar des députés du groupe LaREM membres de la commission des Lois, je soutiens cet amendement. Peut-être faut-il le retravailler d'ici à la séance publique. Le placement en détention provisoire doit-il être décidé par le JLD plutôt que par le juge des enfants ? Faut-il un double regard ? En tout cas, nous tenons à ce qu'une solution soit apportée au problème soulevé ; il faut la trouver d'ici à la séance publique.
Madame Avia, l'arrêt de la Cour de cassation que vous invoquez ne correspond pas à la situation que nous examinons. Vous avez du reste reconnu avec beaucoup d'honnêteté que le JLD avait pris un certain nombre de mesures d'investigation.
Je vais citer un autre exemple, qui devrait nous mettre d'accord. En comparution immédiate, il arrive qu'une détention soit ordonnée et que, le renvoi ayant été demandé par la défense, le même tribunal statue ensuite sur la culpabilité ; cela ne pose strictement aucun problème. Par ailleurs, je vous l'ai indiqué, le Conseil constitutionnel a déjà statué sur une situation analogue à celle qui nous occupe. Dès lors, l'impartialité n'est pas en cause. Puisqu'il s'agit d'un texte spécifique et de juges spécialisés, je préfère, pour ma part, un regard attentif à un double regard. Le juge des enfants est le mieux à même, c'est mon sentiment, de prendre la décision. Les exemples tirés de notre code de procédure pénale, notamment celui de la comparution immédiate, m'incitent à émettre derechef un avis défavorable.
J'avoue être sensible à l'idée du regard attentif. Il est vrai que celui du juge des enfants est différent de celui d'un autre magistrat, compte tenu de la spécificité de la matière, de sa connaissance de la juridiction des mineurs, voire du mineur lui-même. Mais la proposition des députés LaREM me semble plus en adéquation avec la justice telle que nous la vivons aujourd'hui, une justice qui se veut de plus en plus exemplaire en matière de respect de nos grands principes, en particulier celui selon lequel un même magistrat ne peut pas se prononcer à la fois sur la détention provisoire et sur l'affaire au fond.
De fait, lorsqu'un juge décide de placer un mineur en détention provisoire, il le fait avec la main qui tremble. Il prend donc d'infinies précautions en s'approchant au plus près de la vérité du dossier et de la situation. Ce faisant, il va bien évidemment préjuger le dossier. Ainsi l'appréciation ab initio des faits peut porter préjudice à la bonne exécution de l'acte de juger.
Monsieur le Garde des sceaux, il ne m'arrivera pas souvent d'être en désaccord avec vous sur ce texte. Mais, au nom des principes et de l'expérience que l'on peut avoir de ces dossiers en tant que professionnels, je crois qu'une déconnexion est préférable. Cela dit, une solution intermédiaire consisterait à s'assurer que le même juge des enfants ne peut pas et statuer sur la détention et connaître du fond. Mais certaines juridictions de petite taille ne comptent qu'un seul juge des enfants.
Je suis sensible aux arguments développés par mes collègues. Néanmoins, il convient de prendre en considération la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur la question de l'impartialité qu'a évoquée M. le ministre. Mme Avia a indiqué qu'il s'agissait d'un amendement d'appel. Peut-être pourrait-il être retiré afin que nous y retravaillions avec le Garde des sceaux d'ici à la séance publique ?
Cette question n'est pas anodine. Si le principe d'impartialité n'est pas remis en cause, le risque existe qu'il le soit ou que la partialité soit ressentie, ce qui ne participe évidemment pas d'une bonne administration de la justice. Nous pouvons, certes, instaurer des garde-fous en prévoyant, par exemple, qu'un autre magistrat siège à l'audience de jugement et que, dans les juridictions de petite taille, un JLD prenne le relais. Mais on aboutit à une situation incongrue dans laquelle le mineur serait en définitive moins bien protégé que le majeur, puisque celui-ci ne peut être placé en détention que sous le regard d'un autre juge, le JLD.
Cette disposition me semble donc marquer un recul et constituer un risque. La notion d'impartialité, qui a aussi une valeur conventionnelle, doit être regardée de près. Une solution pourrait en effet être envisagée d'ici à la séance publique. En tout cas, les choses ne peuvent pas rester en l'état.
L'amendement me paraît intéressant, car le JLD peut offrir des garanties, pour peu qu'il soit spécialisé. J'insiste d'autant plus sur ce point que, dans votre amendement, il prendrait la décision à la place du juge des enfants. Si encore il contrôlait les actes de celui-ci, je pourrais, à l'extrême limite, accepter qu'il ne soit pas spécialisé, mais ce n'est pas ce que vous proposez. Allez donc jusqu'au bout de votre raisonnement.
Il y a évidemment les principes, auxquels on ne peut pas déroger. Mais, d'un point de vue pragmatique, les risques de détention provisoire sont plus élevés si c'est le JLD qui statue plutôt que le juge des enfants, qui connaît bien le gamin. Voilà mon sentiment.
Par ailleurs, il n'y a, me semble-t-il, aucun problème du point de vue de l'impartialité objective. J'ajoute que votre amendement risquerait de provoquer une rupture dans la continuité du suivi, dont le maintien est l'objet même de la réforme. Enfin, puisque vous avez évoqué les majeurs, je précise que le processus est exactement le même en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel. Si l'avocat de la défense a demandé un renvoi, qui a statué sur la détention et qui statue sur la culpabilité ? Ce n'est pas inconstitutionnel : c'est dans notre code de procédure pénale.
Cet amendement présente de véritables risques ; je suis donc très attaché à ce qu'il ne soit pas retenu.
Une fois n'est pas coutume, je suis d'accord avec le Garde des sceaux. En la matière, le JLD aurait moins d'expérience, une moindre connaissance et une moins bonne appréciation du dossier pour se prononcer sur le placement en détention provisoire. Par ailleurs, une chose m'agace prodigieusement dans nos débats : la crainte de la censure du Conseil constitutionnel. Nous faisons la loi. L'ordonnance de 1945 n'a pas valeur constitutionnelle, comme le Conseil constitutionnel l'a rappelé dans une décision de 2002. Le seul principe constitutionnel qui vaille, ici, c'est le respect de la loi que nous faisons. Nous pouvons donc, sans risque, préciser ce dispositif. Nous ne nous exposerons aucunement à la censure du Conseil constitutionnel, qui estimera que telle est la volonté du législateur. S'agissant de l'amendement lui-même, il me semble que rester devant le juge spécialisé ne soulève pas de difficultés.
Le renvoi de l'affaire par le tribunal correctionnel en cas de comparution immédiate n'est pas comparable à la décision des juges des enfants sur une éventuelle détention en attendant la comparution devant le tribunal. Les délais de détention en cas de comparution immédiate sont très courts, sans rapport avec la détention provisoire pour la mise en état d'une affaire dont il est question en l'espèce. Surtout, le renvoi en cas de comparution se fait à la demande de la défense, lorsque le dossier n'est pas en l'état et que la personne qui comparaît ne veut pas être jugée immédiatement.
Le double regard permis par l'intervention du JLD fonctionne avec le filtre du juge des enfants, qui envisagera la mise en détention provisoire et transmettra le dossier au JLD. Les JLD ne prendront donc pas plus de décisions de mise en détention provisoire que les juges des enfants, puisque ces derniers interviendront en amont de la saisine du JLD.
Enfin, nous ne craignons pas la censure du juge constitutionnel, mais nous sommes pétris de principes constitutionnels et nous pouvons spontanément appliquer ceux qui nous semblent pertinents.
Ceux qui ont pratiqué en tant qu'avocat savent que la décision de placement en détention provisoire masque souvent un préjugement de culpabilité. Que la personne qui a décidé le placement en détention participe à l'audience de jugement suscite des interrogations.
Je suis convaincue par les propos du Garde des sceaux. Nous devons concrétiser la possibilité d'un double regard pour limiter la mise en détention. C'est dans cette voie qu'il faudrait travailler en vue de la séance.
Ce débat impose de concilier deux principes qui nous sont chers : la spécialisation et l'impartialité du juge.
Dans la pratique, le JLD tient une part très importante dans la justice pénale des mineurs, puisqu'il décide du placement en détention provisoire. Le juge des enfants apprécie le dossier, et la décision se joue devant le JLD.
Pour concilier ces principes, soit nous garantissons que jamais le même juge des enfants ne statuera sur la détention provisoire et sur le fond, soit nous prévoyons l'intervention du JLD pour la détention.
Notre collègue Bernalicis a raison, si nous voulons pousser la spécialisation jusqu'au bout, le JLD doit jouer sa pleine part. D'expérience, je pense que ce double regard est très intéressant. Les magistrats travaillent avec beaucoup de professionnalisme, mais après avoir étudié un dossier, il est normal et humain de s'être formé des préjugés. Et il sera très difficile de s'en défaire si l'on est amené à en juger une seconde fois.
Comme le notait M. Mazars en réponse au ministre, les délais en comparution immédiate ne sont pas du tout comparables. Sinon, le même magistrat pourrait décider de la détention provisoire et juger du fond dans d'autres situations. La Cour européenne des droits de l'homme a une jurisprudence abondante sur la question, dont j'invite chacun à prendre connaissance. La rédaction prévue dans le code prévoit une analyse minutieuse du juge, et je crains que nous ne prenions un risque.
J'aimerais qu'avant la séance publique, nous puissions trouver une solution satisfaisante qui permettra de maintenir cet équilibre si précieux.
Je suis peut-être utopiste, mais j'ai envie de continuer à croire dans les valeurs fondamentales de notre droit pénal. Dans un placement en détention provisoire, je ne veux pas voir un préjugement ou une précondamnation, parce qu'il existe des dizaines de causes différentes de placement en détention provisoire : l'interférence possible avec l'enquête ou les garanties de représentation, par exemple. On ne peut pas considérer qu'un placement en détention provisoire présage de la culpabilité.
Si nous voulons que la justice des mineurs diffère de celle des majeurs, le JLD doit y intervenir de façon différente, et la personnalité du mineur doit être prépondérante dans la décision de placement en détention provisoire. Qui serait mieux capable de l'apprécier que le juge en charge du dossier, qui en a une connaissance complète, sait ce qu'il veut faire avec le mineur et comment il souhaite l'accompagner par la suite ? Dans ces conditions, nous pouvons considérer que ce magistrat est seul compétent pour trancher.
Ce débat est compliqué. Ce n'est pas parce que la défense est à l'origine d'une demande de renvoi que le juge ne doit pas faire preuve d'impartialité.
La détention n'est pas le fond. C'est tellement vrai que lorsque les avocats évoquent le fond devant la chambre de l'instruction, on leur rappelle qu'il n'est question que de la détention. Les magistrats et les avocats parmi nous ont tous vécu cela des centaines de fois. La détention se décide sur des critères objectifs, qui sont détachés de l'examen de la culpabilité.
Je suis très attaché à l'unicité du juge, tandis que vous êtes attaché au double regard. Juridiquement, je pense que vous avez tort, mais il ne s'agit pas d'un combat entre nous. Je tiens à ce que le juge des enfants décide, dans cette procédure dérogatoire et spécialisée, mais je vous propose que nous travaillions ensemble sur cette question.
Suite à cet engagement du Garde des sceaux, je vais retirer mon amendement. Nous en proposerons en séance un autre, fondé sur les travaux que nous aurons réalisés ensemble.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CL240 de Mme Alexandra Louis.
Cet amendement vise à renforcer le suivi éducatif du mineur qui fait l'objet d'un placement en détention provisoire.
Dans la rédaction actuelle, lorsque le mineur est placé en détention provisoire, le juge a la faculté de prononcer une mesure éducative judiciaire provisoire. Nous souhaitons que le prononcé de cette mesure soit obligatoire, pour que la détention provisoire ne soit pas une parenthèse dans le parcours éducatif du mineur. La détention provisoire est une mesure exceptionnelle dans ce texte, et nous entendons la limiter.
Ces mesures éducatives judiciaires visent à mieux insérer le mineur dans un travail éducatif qui se traduira par un accompagnement individualisé, construit à partir d'une évaluation de sa situation personnelle, familiale, sanitaire et sociale. Nous sommes attachés au maintien de ce travail éducatif.
L'article L. 334-3 prévoit : « Lorsque le mineur est placé en détention provisoire, le juge des enfants, le tribunal pour enfants ou le juge des libertés et de la détention peut prononcer une mesure éducative judiciaire provisoire. » Vous proposez de rendre cette mesure obligatoire, cela me semble aller dans le bon sens. Avis favorable.
Le Gouvernement est favorable à cet amendement. Il me semble qu'il apporte de l'eau à mon moulin dans la discussion précédente.
La Commission adopte l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL111 de M. Michel Zumkeller.
Il s'agit toujours du placement en détention provisoire des mineurs de moins de seize ans. Nous souhaitons ajouter une condition cumulative concernant la récidive. Autrement dit, nous souhaitons ne placer en détention provisoire que les enfants récidivistes.
Cette proposition ne me paraît pas pertinente. La détention provisoire peut être nécessaire en matière criminelle sans attendre une récidive, notamment si le mineur est dangereux. De plus, ses conditions sont très encadrées par l'article L. 334-4. Elle n'est possible « qu'en cas de violations répétées ou de violation d'une particulière gravité des obligations imposées au mineur dans le cadre d'un contrôle judiciaire ».
Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient à l'amendement CL67 de Mme Marie-George Buffet.
Nous nous opposons à la détention provisoire des adolescents impliqués dans des affaires correctionnelles. La détention des mineurs âgés de treize à seize ans ne peut se justifier que dans le cadre d'affaires criminelles.
Je partage votre souhait de limiter autant que possible la détention provisoire pour les mineurs. Elle est néanmoins encadrée de manière très stricte, ajouter de nouvelles conditions ne me paraît pas pertinent.
Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL382 du Gouvernement.
Le Gouvernement propose d'ajouter un article pour inverser le principe autorisant la visioconférence pour le placement en détention provisoire.
L'article 706-71 du code de procédure pénale prévoit les hypothèses dans lesquelles il peut être recouru à un moyen de télécommunication audiovisuelle. Il peut y être recouru en matière de détention provisoire, sauf refus de la personne jugée et en l'absence de risque de trouble grave à l'ordre public ou d'évasion. Il n'existe à ce jour aucune disposition spécifique aux mineurs.
Il est proposé que dans la matière toute particulière de la détention provisoire, ce recours à la visioconférence ne soit pas possible à l'égard des mineurs, excepté en cas de risque de trouble grave à l'ordre public ou d'évasion.
Cet amendement va restreindre les circonstances dans lesquelles il sera possible de recourir à la visioconférence, mais je tiens à répéter l'opposition de tout mon groupe à l'utilisation de la visioconférence en toute matière s'agissant des mineurs.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CL233 de Mme Alexandra Louis.
Il s'agit d'une déclinaison de l'amendement CL236, qui a été retiré. Nous avons décidé d'y retravailler avec le Garde des sceaux en vue de la séance.
L'amendement est retiré.
La Commission examine les amendements identiques CL137 de M. Ugo Bernalicis et CL259 de M. Jean-Michel Clément.
L'amendement CL137 vise à préciser, à l'article L. 411-1 du code de la justice pénale des mineurs, que l'on retient l'âge « au moment des faits, sauf pour les mineurs de plus de 16 ans, pour lesquels l'âge au moment du prononcé de la peine sera pris en compte lorsqu'il est envisagé un travail d'intérêt général (TIG). » La rédaction actuelle reviendrait à appliquer une mesure plus sévère pour les mineurs que pour les majeurs.
L'article L. 411-1 prévoit que l'âge du mineur à prendre en compte lors de la procédure préalable au jugement est l'âge qu'a le mineur au jour de la mesure dont il fait l'objet. L'amendement CL259 prévoit que l'âge pris en compte soit celui du mineur au moment des faits, sauf pour les TIG prononcés uniquement devant le tribunal pour enfants, qui peuvent présenter un intérêt pour l'enfant.
L'objectif est d'offrir une solution autre que l'incarcération pour un mineur qui aurait commis une infraction grave avant 16 ans, mais qui serait jugé après cet âge. Prendre en considération l'âge à la date de la commission de l'infraction plutôt qu'à celle du prononcé de la mesure va donc dans le bon sens. Avis défavorable.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine les amendements identiques CL138 de M. Ugo Bernalicis et CL260 de M. Jean-Michel Clément.
L'amendement CL138 vise à s'assurer de la présence de l'avocat en toutes circonstances, quels que soient le cas de figure ou la problématique. Il dispose, lorsque l'enfant ou l'adolescent n'a pas sollicité l'assistance d'un avocat, que « cette demande peut également être faite par ses représentants légaux, qui sont alors avisés de ce droit lorsqu'ils sont informés en application de l'article L. 412-1 » ou que le bâtonnier peut missionner un avocat commis d'office, le cas échéant.
L'article L. 412-2 du code de la justice pénale des mineurs prévoit une exception à la présence de l'avocat. Pourtant, dans quels cas de figure le juge peut-il se dire qu'un avocat n'est pas nécessaire, même en audition libre ? Je ne comprends pas cette exception.
Ma petite expérience militante m'a montré que des tas de jeunes, entendus à la suite de mobilisations lycéennes, par exemple contre Parcoursup, avaient vus l'audition libre se transformer en garde à vue. Les enfants témoignent qu'ils étaient informés qu'ils pouvaient avoir l'assistance d'un avocat, mais on leur disait que cela se passerait mal pour eux s'ils en prenaient un. C'est du vécu, des témoignages ont été recueillis.
Il faut se donner toutes les garanties, pour faire en sorte qu'un avocat puisse être présent aux côtés des mineurs quelles que soient les circonstances.
Dans le droit-fil, nous pensons que les mineurs ont le droit d'être assistés d'un avocat. Ce droit ne saurait souffrir d'exception : l'intérêt supérieur de l'enfant doit demeurer une considération primordiale.
Nous avons déposé une série d'amendements qui semble pouvoir régler la difficulté. Je vous demanderai de retirer les vôtres à leur profit car ils éclairent notamment le dernier alinéa du dispositif sur l'audition libre. À défaut, avis défavorable.
Je ne retire absolument pas l'amendement CL138. Hier, on m'a dit que des amendements protecteurs avaient été déposés sur la visioconférence, et qu'elle serait réservée à des cas très particuliers, ce qui est un recul par rapport au droit actuel où la visioconférence n'est pas possible. Je ne veux pas me faire avoir par des réactions parcellaires. Vous votez contre l'amendement CL138, chacun prendra sa position. Si vos amendements améliorent le dispositif, un peu résigné, je les voterai, en repli.
La Commission rejette les amendements.
Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL342 du rapporteur, CL63 de M. Stéphane Peu, CL102 de M. Michel Zumkeller, CL163 de Mme Cécile Untermaier et CL234 de Mme Alexandra Louis ainsi que l'amendement CL51 de M. Antoine Savignat.
L'amendement CL63 vise à supprimer la possibilité de déroger à la présence de l'avocat en audition libre. Actuellement, le juge peut écarter cette présence en cas de « faits simples » même si « l'intérêt de l'enfant » doit rester une « considération primordiale ». On ne doit pas laisser celui-ci à la libre appréciation du juge.
Nous abordons un sujet fondamental, celui des droits de la défense, d'autant qu'il s'agit de mineurs. Une audition libre n'est pas un acte anodin, au contraire. On ne sait jamais ce qui peut s'y passer : on peut convoquer un mineur pour un vol à l'étalage, et se rendre compte que d'autres faits existent. Il faut absolument pouvoir lui garantir l'assistance d'un avocat à tous les stades.
C'est pourquoi nous avons déposé l'amendement CL234, afin de supprimer ces exceptions, dont la formulation était plus que critiquable. Leur rédaction floue laisse une marge trop importante pour décider de la présence d'un avocat. Nous voulons revenir au principe d'assistance d'un avocat, et le consacrer sans exception. Cela satisfera d'ailleurs certains de nos collègues.
L'amendement CL51 me tient également à cœur. J'ai suivi les débats depuis le début, et j'entends l'argumentation du Garde des sceaux, disant que les parents peuvent parfois brider la parole. L'avocat, qui tient la main de ces gamins, me paraît essentiel car, comme le médecin, il peut libérer la parole, accompagner, conseiller. Il n'est pas là pour juger ou reprocher.
Il me semble indispensable qu'il soit présent à leurs côtés. C'est la raison pour laquelle, en plus des dispositions des amendements identiques, l'amendement CL51 vise à ajouter la mention « dans l'intérêt supérieur des enfants » à l'article L. 412-2 du code de la justice pénale des mineurs.
J'étais à l'origine défavorable à cet amendement. Chacun le sait, l'enfer est pavé de bonnes intentions. Si l'avocat est exigé dans le cadre d'une audition libre, n'y a-t-il pas un risque de la transformer avec beaucoup de facilité en une garde à vue ? Par ailleurs, le délai de carence pose problème : lorsqu'un avocat est prévu mais qu'il met du temps à venir sur les lieux, est-il utile qu'un gamin reste trois heures dans les locaux du commissariat de police, alors que son audition durerait un quart d'heure ? Voilà les questions qui se posaient, d'un point de vue pragmatique.
Et puis – c'est la force du débat, de l'échange, de la discussion – je me suis renseigné car je sais à quel point vous insistiez. Dans la pratique, l'avocat est déjà très majoritairement présent lors des auditions libres. Mes réserves se sont ainsi évaporées, et je suis favorable aux amendements.
La Commission adopte successivement les amendements CL342, CL63, CL102, CL163 et CL234. En conséquence, l'amendement CL51 tombe.
Elle est ensuite saisie de l'amendement CL29 de M. Stéphane Peu.
L'amendement vise à supprimer la procédure de retenue, qui est une mesure de privation de liberté, pour les enfants âgés de 10 à 13 ans. Nous avons eu récemment dans l'actualité des cas d'enfants très jeunes, qui ont ainsi été retenus pour être interrogés par les forces de police ou de gendarmerie, sous la contrainte. Retenir des enfants de cet âge pose problème.
Il peut être utile malgré tout, dans certaines circonstances et dans un cadre très restrictif, de pouvoir retenir des mineurs de 10 à 13 ans. Certains réseaux de trafiquants les utilisent en effet, notamment pour faire le guet. Il faut pouvoir disposer aussi de ces outils, qui sont parfois adaptés.
Les conditions de la retenue sont très strictes : elle ne peut concerner que les mineurs âgés de 10 à 13 ans, à l'encontre desquels il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'ils ont commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement.
Cette mesure doit être l'unique moyen de parvenir à l'un au moins des objectifs mentionnés à l'article 62-2 du code de procédure pénale – « permettre l'exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne » ; « garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l'enquête », notamment.
Il faut également l'accord préalable et le contrôle du procureur de la République ou du juge d'instruction. La durée que le magistrat détermine ne peut en outre pas excéder douze heures. Enfin, la retenue est strictement limitée au temps nécessaire à la déposition du mineur et à sa présentation devant le magistrat compétent.
Le cadre de la retenue présente donc des conditions très restrictives, qui permettent de dire qu'il faut pouvoir continuer de bénéficier du dispositif malgré tout.
Si l'on avait une présomption irréfragable pour un mineur de moins de 13 ou 14 ans, on ne se poserait pas la question. En Allemagne ou en Espagne, où l'on ne peut pas utiliser ce dispositif, d'autres mesures, éducatives notamment, sont prises. C'est bien.
Les délits punis de plus de cinq ans d'emprisonnement qui ont été commis ont choqué. Je n'ai pas le détail mais, au doigt mouillé, les gamins qui ont été retenus et auditionnés à la suite de l'hommage à Samuel Paty avaient 13 ans, ou moins. Sur des faits d'apologie du terrorisme, on peut aller très vite vers le quantum de peine. Est-ce une bonne justice des mineurs ? Je ne le crois pas. Je ne suis pas pour que l'on ne fasse rien, mais je suis pour que l'on ne puisse pas faire cela. C'est pourquoi je soutiens l'amendement CL29.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL139 de Mme Danièle Obono et CL261 de M. Jean-Michel Clément ainsi que l'amendement CL262 de M. Jean-Michel Clément.
Dans la continuité du débat précédent, l'amendement CL139 vise à empêcher toute retenue d'un enfant de moins de 13 ans – quoique nous soyons favorables à une présomption irréfragable au-dessous de 14 ans. Pour reprendre un exemple récent, je ne suis pas certain – c'est une litote – qu'une garde à vue permette de régler le problème des enfants qui ne respectent pas l'hommage rendu à un professeur lâchement assassiné. Je pense que l'on s'honorerait à ne pas avoir recours à des dispositions aussi disproportionnées. Or, même si l'on fait confiance aux juges et aux enquêteurs, le fait de les autoriser rend possible l'utilisation de telles mesures. Tout comme les autres membres de mon groupe, j'y suis farouchement opposé.
L'amendement CL261 tend à limiter l'application du dispositif prévu par l'article L. 413-1 aux enfants de plus de 13 ans.
L'amendement CL262 est de repli.
Reprenons l'exemple de l'enfant de moins de 13 ans utilisé dans le cadre d'un trafic de stups. Pour lui, ce sera la double peine : non seulement il est exploité, réduit à une situation de quasi-esclavage, mais en plus, il pourra être retenu par un officier de police judiciaire et la puissance publique lui appliquera des mesures coercitives, et non protectrices ! C'était là toute la force de l'ordonnance de 1945 et des principes qu'elle affirmait : faire prévaloir l'éducatif sur le répressif. Un enfant qui est en conflit avec la loi, c'est d'abord un enfant à protéger – surtout s'il a moins de 13 ans !
La Commission rejette successivement les amendements identiques et l'amendement CL262.
Elle passe à l'amendement CL30 de Mme Marie-George Buffet.
La procédure de retenue est une mesure de privation de liberté pour les enfants âgés de 10 à 13 ans, qui pourront ainsi être interrogés par la police ou la gendarmerie sous la contrainte : je le répète, nous y sommes opposés.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Puis elle rejette successivement, suivant les avis du rapporteur, les amendements CL31 de M. Stéphane Peu et CL32 de Mme Marie-George Buffet.
Elle en vient à l'amendement CL141 de Mme Danièle Obono.
Cet amendement vise à préciser que l'examen médical est réservé à l'appréciation de la compatibilité de l'état du mineur avec la retenue et ne peut pas être utilisé par exemple pour évaluer la minorité de l'enfant.
Vous jugerez peut-être, monsieur le ministre, qu'il s'agit d'un débat « marginal », mais la justice des mineurs concerne aussi les mineurs non accompagnés ou isolés – la terminologie varie en fonction des années. On voit bien comment on modifie le code pour, en la matière, gérer les flux, plutôt que les cas individuels.
Cet examen médical a pour seule vocation de vérifier la compatibilité de l'état du mineur avec la retenue ; en aucun cas, il ne peut donner lieu à une vérification de la minorité. L'amendement étant satisfait, j'en demande le retrait ; à défaut, mon avis serait défavorable.
Je crois qu'on nage en pleine confusion. L'examen médical destiné à vérifier la compatibilité de l'état de santé du gamin avec la mesure dont il fait l'objet n'a strictement rien à voir avec celui aux fins de détermination de l'âge, lequel consiste en un examen radiologique osseux strictement encadré par le code civil et qui ne peut en aucun cas consister en un examen des caractéristiques pubertaires.
C'est précisément ce qu'indique l'amendement ! Il s'agit de circonscrire le dispositif pour éviter d'éventuelles dérives – qui, vu les dysfonctionnements actuels, sont tout à fait possibles. Quant aux tests osseux, ils sont certes prévus par le code civil, mais ils sont aussi contestés, notamment pour ce qui est de savoir s'il s'agit d'un trait discriminant pour dire si une personne est mineure ou majeure. Il existe un contentieux sur le sujet, et nous sommes bien placés pour le savoir, ayant eu l'occasion de l'évoquer lors de l'examen d'autres textes, comme le projet de loi dit asile et immigration – mais vous n'étiez pas encore en poste, monsieur le ministre.
La Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL33 de M. Stéphane Peu.
Elle passe à l'amendement CL142 de Mme Danièle Obono.
Nous souhaitons garantir que la notification au mineur de ses droits sera faite par écrit et à l'oral dans une langue qu'il comprend et qu'il lui en sera fait lecture s'il ne sait pas lire. Je ne doute pas que, dans la plupart des cas, ce soit une réalité, mais ça va mieux en l'inscrivant dans le code. La non-effectivité de cette notification trouve d'ailleurs un écho dans la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, qui prévoit à titre expérimental l'oralisation de la notification des droits de la personne gardée à vue, y compris si elle est mineure.
Avis défavorable, car l'amendement est satisfait : les conditions de la notification des droits du mineur, qu'elle soit écrite ou orale, sont déjà prévues par le code de procédure pénale aux articles 62 et 66, auxquels il est fait référence à l'article L. 413-6.
Elles le sont aussi à l'article 803-6 du code de procédure pénale, dont la lecture aurait évité le dépôt de cet amendement !
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL52 de M. Antoine Savignat.
Cet amendement fait un peu « vieille droite », j'en conviens, mais si l'on fait fi du vernis, il correspond à une réalité du terrain. Il s'agit de donner aux services de police la possibilité de prolonger la garde à vue d'un mineur qui aurait refusé de décliner son identité, dès lors que la détermination de celle-ci nécessite des recherches complémentaires de leur part. Si cet amendement n'était pas adopté, il leur faudrait relâcher dans la rue le mineur qui refuse de parler, le laissant livré à lui-même.
Il s'agit, j'y insiste, du seul cas de figure ici visé ; cela n'a rien à voir avec les faits qui lui seraient reprochés. La finalité de la mesure est de protéger le mineur, en faisant en sorte que les services de police le remettent, dans un cadre sécurisé, à des adultes responsables, qu'il s'agisse de ses parents ou des services chargés de son suivi.
Avis défavorable, l'amendement posant un double problème. Sur le plan des principes, on ne peut interdire de placer en garde à vue les mineurs de moins de 13 ans, à l'exception des mineurs non accompagnés ! En outre, sur le plan pratique, il semble difficile de rendre compatible la durée de la garde à vue avec l'identification du mineur, notamment dans le cadre de la coopération internationale.
C'est vous, monsieur le député, qui avez suggéré qu'il pourrait s'agir d'un amendement « vieille droite »… No comment. Avis défavorable.
Je vais suivre votre exemple et me livrer à un exercice que je refuse habituellement. Si, demain, ma fille est interpellée par les services de police et, ayant peur de ma réaction, refuse de donner son identité, je préférerais pour ma part qu'elle reste quelques heures de plus au commissariat, le temps qu'on l'identifie et que je vienne la chercher, plutôt qu'on la relâche dans la rue sans que je n'en sache rien parce que les fonctionnaires de police y seraient tenus par la disposition que nous aurions adoptée. Je le répète : il ne s'agit pas de commettre un amalgame ; ce ne sont pas les mineurs non accompagnés (MNA) qui sont visés par cette disposition. Ce que je souhaite, c'est protéger l'enfant et éviter qu'il se trouve lâché dans la nature. C'est en cela que l'amendement n'est pas « vieille droite ».
On dit que les paroles s'envolent, mais que les écrits restent… Dans l'exposé sommaire, vous évoquez bien les MNA, monsieur le député ! C'est parce que vous savez que je m'occupe du sujet – en liaison avec vous, d'ailleurs, puisque nous allons bientôt partir ensemble au Maroc pour essayer de régler cette question – que, d'un coup, vous changez de discours…
Je tiens à saluer le talent de M. Savignat, qui parvient à nous dire tout sourire qu'il souhaite protéger les mineurs, alors que chacun sait que son amendement porte sur les MNA – d'ailleurs, c'est écrit noir sur blanc dans l'exposé sommaire. Bravo, cher collègue : si nous n'avions pas le texte de l'amendement sous les yeux, nous aurions presque pu y croire !
La question est sérieuse. Je suis pour ma part convaincu que les MNA ont besoin de protection et d'être remis aux services sociaux plutôt que laissés dans la rue, à la merci des réseaux. C'est pourquoi j'ai donné cet exemple dans l'exposé sommaire ; mais j'ai dit que je refusais tout amalgame avec les MNA et je ne les ai mentionnés qu'à ce titre, entre parenthèses. L'objectif de l'amendement est de protéger le mineur et de veiller à ce qu'il ne soit pas lâché dans la nature, à la merci de ceux qui voudraient l'exploiter. Je pars du principe que passer trois ou quatre heures dans un service de police est plus bénéfique qu'être livré pendant plusieurs semaines aux exactions d'un réseau.
La question est tellement sérieuse que la commission des Lois vous a confié une mission sur le sujet, monsieur Savignat !
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL144 de M. Ugo Bernalicis et CL264 de M. Jean-Michel Clément ainsi que l'amendement CL104 de M. Michel Zumkeller.
Il s'agit de renforcer les droits des mineurs de 16 à 18 ans placés en garde à vue. Nous proposons d'interdire l'utilisation d'un moyen de télécommunication audiovisuelle, c'est-à-dire de la visioconférence, pour la présentation du mineur au procureur de la République ou au juge d'instruction compétent en vue d'une prolongation de la garde à vue.
Je signale au passage que, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire, une ordonnance a prévu – sans que cela n'émeuve grand monde – qu'il n'était plus obligatoire de présenter au procureur de la République les demandes de prolongation de garde à vue des mineurs de 16 à 18 ans. L'attention s'est focalisée sur la détention provisoire, mais on a aussi été capable de prendre ce genre de décisions !
L'amendement CL264 vise à ce que le régime de la garde à vue s'applique de manière identique à tous les mineurs, y compris ceux âgés de 16 à 18 ans, et que l'on ne puisse donc pas avoir recours à un moyen de télécommunication audiovisuelle pour la présentation d'un mineur au procureur de la République ou au juge d'instruction.
Il s'agit de marquer notre circonspection quant au caractère approprié de l'utilisation des moyens de télécommunication audiovisuelle, dans le cadre de la prolongation d'une garde à vue des mineurs.
Il est important de maintenir des régimes différents de prolongation de garde à vue entre les mineurs de moins de 16 ans et ceux de plus de 16 ans. Dans le cadre du CJPM, nous ne sommes ni moins ni mieux-disants, en matière de visioconférence, par rapport aux dispositions de l'ordonnance de 1945. La visioconférence ne sera utilisée que dans l'intérêt du mineur, pour éviter par exemple d'attendre plusieurs heures l'arrivée d'un procureur. J'émets donc un avis défavorable.
Nous avons déjà évoqué ces questions hier. Dans certaines juridictions, certains ressorts, il faut plus d'une heure et demie à deux heures pour que le procureur arrive et l'absence de visioconférence a pour effet d'allonger la durée de garde à vue du gamin. Ce n'est que dans ce type d'hypothèses très spécifiques qu'on a recours à la visioconférence et les magistrats sont très demandeurs d'ailleurs. Mais si l'objectif est d'allonger la garde à vue du mineur, cela me paraît totalement contraire à ses intérêts.
Je ne comprends pas. Ou alors, précisez dans votre amendement cette notion de temps de route supérieur à une heure et demie. Mais je n'ai pas l'impression que ce soit l'idée. On a précédemment donné l'exemple de ce qui se passe à Bobigny, où les prolongations de garde à vue de mineurs âgés de 16 à 18 ans sont courantes et où l'utilisation de la visioconférence permettrait d'aller plus vite. Rien à voir avec les deux heures de route. On voit bien comment vous nous présentez les choses aujourd'hui et comment elles seront appliquées ensuite, parce que tout le monde est surchargé et essaiera de gagner du temps. Sauf que ce gain de temps s'accompagne d'une perte d'humanisation du fonctionnement de la justice.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient aux amendements identiques CL145 de M. Ugo Bernalicis et CL265 de M. Jean-Michel Clément.
Par cet amendement, nous nous opposons à l'élargissement des conditions de prolongement de la garde à vue des mineurs.
Nous considérons de même que ces conditions sont trop larges et inadmissibles s'agissant de mineurs.
Quelles mêmes raisons ? Nous parlions jusqu'à présent de la visioconférence. Il s'agit ici de l'élargissement des conditions de prolongation de la garde à vue. Vous pouvez toujours dire qu'il y a de bonnes raisons de la prolonger, mais nous marquons notre désaccord, dans le cas des mineurs. Je ne sais pas quelles sont vos raisons, mais sans doute procèdent-elles de la même logique idéologique et intellectuelle. Me répondre de la sorte, c'est un peu cavalier !
La Commission rejette ces amendements.
Elle est saisie des amendements identiques CL146 de Mme Danièle Obono et CL266 de M. Jean-Michel Clément.
Cet amendement vise à imposer l'effectivité de l'enregistrement des déclarations en matière de justice des mineurs. Cet enregistrement nous semble en effet fondamental et incontournable pour préserver les droits des enfants. Or, trop souvent, des motifs d'impossibilités techniques sont opposés, sans qu'aucun contrôle puisse être exercé. Nous proposons de renforcer les garanties en prévoyant que la mention de l'impossibilité technique soit obligatoire sous peine de nullité de la procédure, le procureur de la République ou le juge d'instruction devant en être obligatoirement informés.
Je tiens à préciser que les moyens de télécommunication audiovisuelle ne sont pas la même chose que les moyens de captation et d'enregistrement audiovisuels ; je ne parlerai même pas de la diffusion, qui raviverait des sujets problématiques pour la majorité. Nous sommes attachés à cette captation, pour peu qu'elle intervienne en plus, et non à la place, du reste de la procédure. Je sais que la tentation existe, en matière de procédure pénale, de remplacer la procédure écrite du procès-verbal par la captation vidéo. Je ne crois pas que nous soyons mûrs pour le faire. En revanche, permettre que ce soit un plus et faire que l'incapacité technique soit un motif de nullité de la procédure me semble de bonne justice.
Nous considérons aussi que l'enregistrement des déclarations en matière de justice des mineurs est fondamental et que la mention de l'impossibilité technique doit être obligatoire sous peine de nullité.
Nous sommes défavorables à ces amendements. La procédure n'est pas nulle en l'absence d'enregistrement audiovisuel de l'interrogatoire d'un mineur en garde à vue, simplement, cet interrogatoire est limité dans sa force probante, ce qui semble tout à fait satisfaisant, d'autant que l'audition du mineur se déroule en présence d'un avocat.
Le procès-verbal ne peut pas être atteint de nullité, pour la simple raison qu'il faudrait démontrer en quoi il pourrait constituer un faux. L'enregistrement ne constitue qu'une garantie et s'il n'a pas pu être effectué, pour des raisons techniques, c'est en réalité la force probante du procès-verbal qui est mise en cause, c'est-à-dire que ce dernier ne peut pas servir de preuve. Mais techniquement, il ne peut pas être annulé, ce n'est ni possible ni conforme aux conditions d'annulation que pose le code de procédure pénale.
J'ajoute que la sanction du caractère probant est tout à fait satisfaisante d'autant que l'audition du mineur se fait en présence d'un avocat. Il faudrait vraiment ne pas avoir de chance : la technique qui lâche, l'avocat qui est une potiche et qui laisse la police écrire le contraire de ce que dit le gamin ! Bien sûr, on peut douter de tout et se complaire dans le complot…
Il me semblait que, dans la plupart des cas, des enregistrements vidéo étaient réalisés quand il s'agissait de mineurs... La survenue d'un problème technique est toujours embêtante parce que, au-delà de son efficacité, la vidéo permet d'éviter d'interroger plusieurs fois le mineur sur un même sujet. Je l'ai constaté dans des cas de harcèlement. Les enfants peuvent être traumatisés de devoir répéter x fois la même chose et c'est toujours mieux quand l'interrogatoire peut être enregistré. Mais de là à prévoir une condition de nullité, je ne suis pas sûr que ce soit une bonne idée.
Je remarque que lorsqu'il s'agit de faire de la visioconférence dans le cadre de prolongations de garde à vue, on est très allant. En revanche, lorsqu'il s'agit de filmer pour se donner des garanties quant à la procédure – et je rejoins les arguments de notre collègue Balanant –, on nous répond que l'état actuel du droit est suffisant. Je ne sais pas s'il y a des complots, je ne suis pas expert comme vous, monsieur le ministre...
… ou peut-être en complot contre vous, uniquement.
Ce que je sais, c'est que cette captation vidéo est utile et appréciable et qu'il faut se donner les moyens qu'elle fonctionne. D'ailleurs, cela veut dire que celui qui se trouve confronté à un problème technique va réfléchir à deux fois, procéder quand même à l'audition, et se débrouiller pour qu'il n'y ait pas de problème technique.
Il est important de rappeler que, dans la pratique, les auditions sont filmées. Mais, cher collègue Balanant, cela n'empêche pas des répétitions. Dans la procédure, on ne revisionne pas les vidéos, ou seulement dans des situations particulières. Qui plus est, le ministre l'a rappelé, l'avocat est présent tout au long de la procédure : c'est une sécurité pour les droits de la défense. Si l'avocat estime qu'ils ne sont pas garantis, il peut faire des observations, saisir le procureur et réagir. J'ai assisté à beaucoup d'auditions de mineurs qui étaient filmées et je peux vous dire que, dans la pratique, les policiers se démènent pour que ça fonctionne.
Ce sont ceux qui s'opposent systématiquement à la vidéosurveillance dans nos communes qui souhaitent aujourd'hui filmer les fonctionnaires de police partout, afin de se procurer des preuves. C'est un peu paradoxal…
C'est même très paradoxal. Pour répondre à M. Balanant, les enregistrements sont là pour opérer un contrôle, pas pour être visionnés et survisionnés. Ils existent en cas de contestation du procès-verbal d'audition, mais c'est uniquement alors qu'on procède à leur visionnage.
Il faut distinguer deux situations. Pour les victimes, l'enregistrement a pour but de ne pas les soumettre au calvaire d'auditions à répétition. Devant la juridiction criminelle, par exemple, on visionne et on voit dans quel état est l'enfant qui raconte ce qu'il a subi. Les choses sont différentes pour les auteurs de délits, pour qui l'enregistrement représente une garantie supplémentaire. Mais, s'agissant en l'occurrence de mineurs, elle est superfétatoire puisque l'avocat est présent.
On peut tout dire, tout envisager mais je ne peux pas entendre que la police pourrait se débrouiller pour qu'il y ait un problème technique. Quel intérêt aurait-elle à bidouiller l'audition d'un gamin ? Ça suffit ! Vous êtes dans la suspicion permanente et cela crée un vrai problème dans notre pays, alors qu'on parle de rapprocher les citoyens de leur police. Vous êtes un responsable politique, monsieur Bernalicis, et vous racontez que le policier se démerde pour qu'un enregistrement ne fonctionne pas !
La Commission rejette ces amendements.
Elle en vient à l'amendement CL147 de M. Ugo Bernalicis.
Je vais en profiter pour répondre au ministre afin que cela figure au compte rendu. Je n'ai jamais dit que les policiers essaieraient de bidouiller les aspects techniques. J'ai juste dit que face à un problème technique, parce que le code en ouvre la possibilité, on peut avoir la tentation de dire qu'on le note au procès-verbal et de mener l'audition quand même, là où la vidéo serait une garantie supplémentaire. Des avocats m'ont dit que chez eux cela ne marchait jamais et qu'on ne faisait pas de vidéo. Voilà la réalité. Soit on se dit qu'on s'en fiche et que ce n'est pas un problème, soit on réfléchit à comment mieux faire. C'est d'ailleurs vous, monsieur le ministre, qui êtes responsable des moyens techniques de la police judiciaire : j'imagine qu'avec votre budget en hausse de plus de 8 %, le problème ne se posera plus. Vous voyez, le problème est réglé et si vous ne savez pas le régler, je m'en occupe.
Cet amendement supprime la disposition que le Gouvernement a prévue afin de ne pas garantir à la défense la délivrance d'une copie de l'enregistrement. Le groupe de La France insoumise ne s'étonne plus du peu d'intérêt dont fait preuve le Gouvernement – surtout le ministre – à l'égard des droits de la défense, cependant, il reste ébahi quant à son manque de discrétion. Aussi, afin que soient respectés les droits de la défense, cet amendement prévoit qu'une copie de l'enregistrement de l'audition soit communiquée à l'avocat qui en fait la demande.
Cela vous pose un problème, monsieur le ministre, ou il y a un complot avec les avocats ?
La réunion, suspendue à seize heures trente, reprend à seize heures trente-cinq.
L'amendement CL417 prévoit qu'une copie de l'enregistrement de l'interrogatoire du mineur en garde à vue est délivrée à l'avocat qui en fait la demande. L'enregistrement des auditions des mineurs a pour objet de permettre de vérifier si le procès-verbal (PV) est conforme à la réalité de l'interrogatoire, en cas de contestation du contenu de ce PV, et uniquement dans ce cas. Il n'est donc pas nécessaire de prévoir que l'avocat peut en obtenir une copie à sa demande, même en l'absence de toute contestation.
Dans mon ancienne vie, je me suis prononcé pour un certain nombre de mesures et je me suis notamment battu en faveur de l'enregistrement audiovisuel de la garde à vue.
Il est utile en cas de distorsion entre les propos du mineur, ou le majeur d'ailleurs, et ce que fait apparaître le PV. L'avocat étant présent lors de la garde à vue, il ne lui sert à rien de disposer de la copie de l'enregistrement si le procès-verbal est conforme à ce qu'il a entendu. En outre, l'intégralité du dossier sera mise à sa disposition. Je suis donc également défavorable à l'amendement.
La Commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CL53 de M. Antoine Savignat.
Lorsqu'il est nécessaire que le mineur justifie son assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle, l'amendement vise à ce que cette justification soit également demandée à ses représentants légaux, afin de les responsabiliser et faire en sorte qu'ils veillent à ce que le mineur dont ils ont la charge exécute les obligations auxquelles il est soumis.
Suivant l'avis du rapporteur et du ministre, la Commission adopte l'amendement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL343 du rapporteur.
Elle en vient aux amendements identiques CL149 de M. Ugo Bernalicis et CL269 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Cet amendement, proposé par le Conseil national des barreaux, laisse aux représentants légaux du mineur la possibilité d'excuser leur absence pour une raison motivée au lieu, comme en dispose le texte du Gouvernement, de ne prévoir qu'une sanction pour les représentants légaux du mineur qui ne répondent pas à une convocation.
En outre, l'amendement prévoit que les représentants légaux pouvant être l'objet d'une sanction doivent avoir la possibilité d'être assistés d'un avocat, et s'en faire désigner un en cas de ressources insuffisantes.
Nous sommes également favorables à ce que les représentants légaux du mineur puissent motiver leur absence et éviter une peine d'amende, en la remplaçant par un stage de responsabilité parentale s'il en est besoin.
Je ne suis pas favorable à ces amendements qui visent à ce que les représentants légaux puissent motiver leur absence lorsqu'ils ne se présentent pas à la convocation du procureur, notamment lorsque ce dernier prononce des mesures alternatives aux poursuites. L'implication des parents du mineur est nécessaire, voire essentielle quand il s'agit d'appliquer de telles mesures. Il est donc impératif qu'ils soient présents.
La Commission rejette les amendements.
Elle passe à l'amendement CL267 de M. Jean-Félix Acquaviva.
L'article 41-1 du code de procédure pénale prévoit les mesures alternatives aux poursuites et le procureur de la République peut faire procéder à une mission de médiation entre l'auteur des faits et la victime.
Lorsque la mission de médiation implique des mineurs, l'amendement propose que le médiateur soit une personne reconnue dans le domaine de la médiation pour mineurs et que les conditions requises pour mettre en place une médiation pénale pour mineur soient définies par la loi.
Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement car il est satisfait : la partie réglementaire du code de procédure pénale prévoit déjà qu'en cas de médiation pénale, les médiateurs soient spécialisés. La médiation sera donc adaptée au mineur.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine ensuite les amendements identiques CL148 de M. Ugo Bernalicis et CL268 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Cet amendement, proposé par le Conseil national des barreaux, prévoit un cadre spécifique pour la médiation pénale pour mineurs, défini par la loi et dont les modalités seraient prises par décret, après concertation avec les professionnels concernés. La médiation pénale pour mineurs ne saurait être assimilée à celle des majeurs, par simple renvoi au droit commun et en présence des représentants légaux.
La médiation pénale pour mineurs nécessite une réflexion plus approfondie : elle doit permettre à l'enfant d'être partie prenante à la médiation, donc au règlement à l'amiable ; en outre, il convient d'être plus souple sur la présence des parents, qui peut constituer un frein à l'accord envisagé du fait d'un conflit de loyauté ou d'une confusion d'intérêt de l'enfant avec ses représentants légaux.
Enfin, le médiateur, tout comme les professionnels sollicités, doit être une personne reconnue dans le domaine de la justice et de la médiation pénale pour enfant.
Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement car il est partiellement satisfait : il reprend ce qui est déjà prévu dans le code s'agissant des modalités de recours aux alternatives aux poursuites par le parquet à l'égard des mineurs.
Cet amendement reprend dans un nouvel article 422-2-1 les dispositions déjà prévues par les articles 422-1 et 422-2. J'y suis donc défavorable.
Le rapporteur indique que notre demande n'est que partiellement satisfaite. Nous allons donc maintenir l'amendement.
La Commission rejette l'amendement.
Elle passe à l'amendement CL105 de M. Michel Zumkeller.
Cet amendement vise à interdire le recours à la composition pénale pour les mineurs. Cette dernière, qui permet au procureur de proposer une sanction afin d'éviter le procès lorsque l'accusé reconnaît sa culpabilité, demande une forme de maturité et n'est donc pas adaptée aux mineurs.
Mon avis sera défavorable. La composition pénale peut être utile dans certains cas très précis. En outre, elle est particulièrement encadrée : elle n'est ouverte qu'aux mineurs âgés d'au moins treize ans, si elle est adaptée à la personnalité de l'intéressé ; avant toute proposition du procureur de la République, la protection judiciaire de la jeunesse doit être saisie en vue d'établir un recueil de renseignements socio-éducatifs ; la proposition du procureur doit également être transmise aux représentants légaux du mineur, qui doivent donner leur accord ; la composition pénale proposée à un mineur doit être validée par le juge des enfants ou, pour les contraventions des quatre premières classes, par le juge compétent du tribunal de police ; avant de la valider, le juge peut procéder à l'audition du mineur ou de ses représentants légaux ; enfin, la durée d'exécution des mesures proposées aux mineurs ne peut excéder six mois.
J'entends vos arguments, monsieur le rapporteur. Mais c'est une forme de dévoiement de l'esprit de la composition pénale. Lors de sa création, la « négociation » entre le ministère public chargé de défendre les intérêts de la société et l'auteur d'un fait était au cœur de la procédure. Or, pour un mineur, la négociation a lieu par procuration, avec les représentants légaux de l'auteur des faits, et non avec l'auteur des faits lui-même. Une telle « négociation », avec un tiers, n'est donc pas pertinente si nous nous plaçons du point de vue de l'intérêt de l'enfant, qui doit comprendre la gravité des actes qui lui sont reprochés et la nécessité de réparer.
La Commission rejette l'amendement.
Elle en vient aux amendements identiques CL150 de Mme Danièle Obono et CL270 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Dans le même esprit que l'amendement précédent, nous proposons de supprimer la procédure de composition pénale prévue à l'article L. 422-3 du code. En effet, elle est contraire aux dispositions de l'article 40 de la Convention internationale des droits de l'enfant (CIDE) selon lequel « les États parties reconnaissent à tout enfant suspecté, accusé ou convaincu d'infraction à la loi pénale le droit à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui renforce son respect pour les droits de l'homme et les libertés fondamentales d'autrui, et qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration dans la société et de lui faire assumer un rôle constructif au sein de celle-ci ». À cette fin, et compte tenu des dispositions pertinentes des instruments internationaux, les États parties doivent en particulier veiller à ce que le mineur ne soit pas contraint de témoigner ou de s'avouer coupable, à interroger ou faire interroger les témoins à charge, et à obtenir la comparution et l'interrogatoire des témoins à décharge dans des conditions d'égalité.
Sauf à être émancipé, un mineur n'a pas la capacité à s'engager et ne peut donc pas se déclarer coupable. En outre, je rejoins M. Brindeau, la négociation n'est pas de bonne justice et n'a pas de vertus pédagogiques pour les mineurs.
Nous pensons également que la composition pénale n'est pas adaptée aux enfants et proposons sa suppression.
Pour les raisons précédemment évoquées, mon avis sera défavorable. La procédure est très strictement encadrée et apporte toutes les garanties – l'avocat est présent, les parents sont auditionnés, le juge peut auditionner le mineur d'office. Je le répète, la composition pénale peut être utile dans certaines circonstances.
Monsieur le rapporteur, ce ne sont pas les garanties qui sont en cause. Tant mieux si elles existent, mais c'est la composition pénale, dans sa philosophie et dans son objectif, qui constitue une atteinte aux droits de l'enfant au regard de la CIDE et des principes éducatifs que nous devons poursuivre. Nous sommes déjà très critiques concernant la composition pénale pour les majeurs ou les conventions judiciaires d'intérêt public pour les personnes morales, car elles impliquent de négocier avec la justice. Nous le sommes donc encore plus pour les mineurs.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine l'amendement CL106 de M. Michel Zumkeller.
Cet amendement de repli prévoit que la composition pénale n'est possible qu'à partir de seize ans afin de s'assurer d'un minimum de maturité de l'enfant concerné pour comprendre cette procédure. Malgré toutes les garanties rappelées par le rapporteur, n'oublions pas que cette composition pénale ne sera pas discutée avec le mineur auteur des faits mais avec ses représentants légaux.
Avis défavorable. Bien sûr, nous devons rester prudents mais, en l'espèce, le juge appréciera in concreto si cette procédure est adaptée ou non à la personnalité de l'intéressé. À mon avis, c'est la meilleure garantie que nous puissions offrir.
La Commission rejette l'amendement.
Elle passe aux amendements identiques CL151 de M. Ugo Bernalicis et CL271 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Les magistrats retiennent assez peu la procédure de la composition pénale qu'ils ne trouvent pas suffisamment adaptée aux enfants, ce qui est un signe.
Cet amendement de repli CL151 vise par conséquent à maintenir la composition pénale pour les seules affaires où il n'y a pas de victime identifiée, donc pas de partie civile. Les victimes sont les grandes absentes de nos amendements, de nos réflexions, de nos échanges. S'il y a vraiment une procédure dans laquelle la victime n'a pas sa place, c'est bien celle de la composition pénale.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette les amendements.
Elle étudie l'amendement CL18 de M. Éric Ciotti.
Cet amendement est particulièrement intéressant. On peut tout y voir et, pour en revenir aux débats précédents, c'est une sorte d'amendement centriste en ce qu'il offre aux magistrats une alternative à la détention pure et sèche d'un mineur de plus de 16 ans, tout en rappelant au jeune la gravité de ses actes. Ainsi, au regard du parcours du jeune, de sa personnalité, des faits commis, il pourrait décider de le placer en fin de semaine dans un établissement pénitentiaire pour mineurs, dans la limite de quatre week-ends consécutifs. Cette peine permettrait de maintenir le jeune dans un parcours éducatif accompagné et de respecter le temps scolaire.
Je suis circonspect. Soit les conditions sont réunies pour que le jeune soit placé dans un établissement pénitentiaire, soit elles ne le sont pas et il n'y a pas de raison de ne l'y envoyer qu'en fin de semaine. Avis défavorable.
Une mesure se rapproche de celle que vous proposez : la semi-liberté. Je ne sais pas d'où vient cet amendement et vous vous êtes bien gardés de nous le dire : est-il sorti de l'imagination de la jeune droite dynamique, humaniste, plus au centre ?
Les mots ont un sens. L'amendement « quatre week-ends » : il ferait presque rêver ! « Le placement » : la prison n'est pas un foyer. Soit on est incarcéré, soit on ne l'est pas. Les établissements pénitentiaires retiennent des personnes incarcérées, ils ne sont pas des foyers. Je suis totalement et pénitentiairement défavorable à votre amendement.
(Sourires.)
Je ne vois vraiment pas en quoi cet amendement serait centriste ! Le très vieux centre, peut-être ? Ou bien le vieux centre réactionnaire s'il a existé un jour, ce dont je doute. Plus sérieusement, cher collègue Antoine Savignat, vous venez d'inventer la super colle. Lorsque j'étais pensionnaire, il m'arrivait assez souvent d'être collé le samedi matin. Vous proposez de votre côté que l'on puisse coller les enfants tout un week-end, en prison de surcroît. Je pense qu'on ne peut pas faire mieux pour l'équilibre des enfants. Continuez sur cette lancée si vous voulez, mais vous êtes très loin du centre !
La super colle, dont j'ai été moi aussi un expert, présentait quelques vertus pédagogiques et elle était admise par la société. En l'espèce, elle éviterait à un mineur d'être emprisonné. Cette mesure ne serait qu'un aménagement de la peine d'emprisonnement qui permettrait de ne pas altérer le parcours scolaire de l'enfant.
Quant à savoir où se situe le centre, seuls les centristes peuvent le dire.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL272 de M. Jean-Félix Acquaviva.
L'article L. 422-4 du code de la justice pénale des mineurs prévoit les modalités de mise en œuvre de la composition pénale. L'amendement vise à supprimer cet article en cohérence avec l'amendement qui visait à supprimer l'article L. 422-3.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL344 du rapporteur.
Elle en vient à l'amendement CL72 de Mme Marie-George Buffet.
Il s'agit de supprimer l'article L. 423-1 du code de la justice pénale des mineurs qui prévoit la compétence du tribunal de police pour les contraventions des quatre premières classes.
Le tribunal de police n'est pas une juridiction spécialisée pour mineurs. Les mesures qu'il peut prononcer sont limitées et inadaptées à leurs problématiques, en particulier l'amende. Il est préférable de redonner la compétence au juge des enfants ou au tribunal pour enfants.
J'ai expliqué hier soir les raisons pour lesquelles je préfère maintenir la compétence du tribunal de police pour juger des contraventions de la première à la quatrième classe. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL152 de Mme Danièle Obono.
Nous souhaitons que les enfants soient jugés par des magistrats spécialisés, sans exception, qu'il s'agisse du juge des libertés et de la détention ou de celui qui siège au tribunal de police, au parquet. Les principes généraux posés en introduction à ce texte doivent se concrétiser.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL345 du rapporteur.
Puis, elle est saisie, en discussion commune, des amendements CL153 de Mme Danièle Obono et CL55 de M. Stéphane Peu.
Il s'agit de supprimer la procédure dite exceptionnelle qui permet de saisir le tribunal pour enfants afin qu'il statue en audience unique. Les principes de la justice des mineurs doivent conduire à toujours laisser le temps au mineur d'évoluer lorsqu'il s'agit de faits susceptibles d'entraîner le prononcé d'une peine. La sanction prononcée dans l'immédiateté n'est pas efficace contre la délinquance des mineurs. Il ne faut pas confondre précipitation, rapidité et promptitude, pour reprendre les termes de nos collègues de la majorité, avec lesquels je suis, pour une fois, d'accord. Agir promptement, c'est agir sans tarder, mais au bon moment et au bon rythme, sans se précipiter.
L'amendement CL153 vise également à relever le quantum de peine à partir duquel le dispositif s'applique, en passant de la peine d'emprisonnement de trois ans prévue par l'ordonnance à une peine supérieure à cinq ans.
L'amendement CL55 vise à supprimer la procédure de jugement en audience unique, qui permet à la juridiction de statuer lors d'une audience unique sur la culpabilité et la sanction. De ce fait, elle va à l'encontre du principe de la priorité accordée à l'éducatif dans le jugement des enfants délinquants.
Cette procédure était très attendue par les professionnels que nous avons auditionnés avec Mme Untermaier dans le cadre de la mission d'information sur la justice des mineurs. Elle a remplacé la présentation immédiate des mineurs, la fameuse PIM, qu'il était difficile d'appliquer pour plusieurs raisons.
Cette nouvelle procédure est strictement encadrée, notamment par des dispositions liées au quantum de la peine. Elle a également reçu l'aval du Conseil constitutionnel dans une décision du 3 mars 2017 relative à la présentation immédiate du mineur. Rappelons enfin qu'elle est entourée de toutes les garanties nécessaires. Le procureur de la République, si toutes les conditions sont réunies, pourra ainsi, à titre exceptionnel, poursuivre le mineur devant le tribunal pour enfants aux fins de jugement en audience unique qui permettra à la juridiction saisie de statuer sur la culpabilité et la sanction. Il faut dire que le mineur, parfois multirécidiviste, peut être bien connu du juge des enfants. Par ailleurs, si la juridiction considère que les conditions ne sont pas remplies, l'article L. 521-27 du code de la justice pénale des mineurs lui permet, après avoir recueilli les observations des parties présentes à l'audience et par décision motivée au regard de la personnalité et des perspectives d'évolution du mineur, de statuer selon la procédure de mise à l'épreuve éducative.
Cette procédure est utile et le juge des enfants pourra intervenir pour s'assurer que les conditions ont été réunies. Avis défavorable.
Le rapporteur a excellemment présenté les raisons pour lesquelles le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle étudie l'amendement CL57 de M. Stéphane Peu.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL184 de Mme Cécile Untermaier.
L'amendement vise à renforcer la motivation de la décision, qui doit rester exceptionnelle, dans le cas où le parquet ordonne une poursuite devant le tribunal des enfants en audience unique. C'est en réalité une sorte d'amendement de précision.
Il existe, pour le parquet, le principe de l'opportunité des poursuites. Faire motiver en sus la décision par le juge des enfants viendrait alourdir la procédure, comme cela a été dit lors de nos auditions. Des garanties supplémentaires seront apportées a posteriori, puisque le juge des enfants pourra vérifier que les conditions pour appliquer la procédure sont remplies et, si tel n'est pas le cas, renvoyer à la procédure principale. L'article L. 521‑27 satisfait votre amendement. Avis défavorable.
Le procureur a l'appréciation des poursuites, dont les modalités sont définies de façon très stricte par la loi. L'application de la loi définit en soi la motivation. Qui plus est, la convocation rappelle les textes, auxquels, bien évidemment, le procureur de la République ne peut pas échapper.
Mais cette motivation existe dans d'autres procédures ordonnées par le parquet. Il serait tout de même bon d'inscrire dans le code de justice pénale des mineurs, à des fins de clarté, qu'il faut une décision motivée du procureur, puisque nous ne sommes pas tous des juristes éclairés.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL185 de Mme Cécile Untermaier.
L'amendement vise à augmenter le quantum des peines donnant lieu à audience unique. Dans la mesure où cette procédure doit rester exceptionnelle, nous proposons de la circonscrire aux peines supérieures ou égales à sept ans et à cinq ans, au lieu de cinq et trois ans.
L'article L. 521-27 dispose que la juridiction peut statuer « par décision motivée au regard de la personnalité et des perspectives d'évolution du mineur ». En fonction de ces critères très fins et de l'appréciation concrète de la situation du mineur et de sa personnalité, le juge des enfants pourra choisir de passer ou non par cette procédure. Votre amendement est en réalité satisfait.
Je viens en renfort de cet amendement. Chez les mineurs de 16 à 18 ans, les peines de trois ans d'emprisonnement sont majoritaires. Aussi, que se disent en ce moment les juges des enfants au sujet de la réforme ? Que vu le stock de dossiers en cours et les critères établis, la plupart de leurs dossiers passeront en audience unique, alors même que vous posez le principe de la césure et de l'exception. Statistiquement, beaucoup de dossiers pourront entrer dans ce cadre et beaucoup de juges seront poussés à utiliser cette procédure pour passer un peu de temps sur les autres. Votre dispositif relève une fois encore de la simple gestion de flux et non d'un idéal de fonctionnement de la justice des mineurs.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL186 de Mme Cécile Untermaier.
Le procureur peut requérir, à l'occasion du défèrement, le rapport concernant le jeune qui a déjà fait l'objet d'une mesure judiciaire d'investigation éducative, d'une mesure de sûreté ou, le cas échant, d'une déclaration de culpabilité. Cette possibilité me paraît assez désinvolte eu égard au travail réalisé par le ministère public et à l'utilité du dossier. C'est pourquoi nous proposons de substituer « est » à « peut être ».
La Commission rejette l'amendement.
Mes chers collègues, il nous reste cent trente amendements. Il en reste dix-sept sur le texte relatif à l'adoption actuellement examiné en séance, sans compter les explications de vote. Nous pouvons continuer à travailler ici pendant une bonne heure et demie. J'aurais bien aimé terminer l'examen du projet de loi relatif à la justice pénale des mineurs cet après-midi, mais certains d'entre vous participent à la discussion générale sur la proposition de loi visant à réformer l'adoption. Je ne peux continuer jusqu'à vingt heures que si ces derniers l'acceptent.
Je ne peux prendre la responsabilité de faire revenir les collègues demain à quinze heures !
La Commission examine l'amendement CL56 de M. Stéphane Peu.
Nous souhaitons que le rapport dont parlait Mme Untermaier comporte des éléments permettant une connaissance suffisante de la personnalité du mineur, de sa situation sociale et familiale.
Votre amendement est satisfait, dans la mesure où le procureur ne peut recourir à l'audience unique que s'il dispose d'éléments permettant d'avoir une connaissance suffisante de la personnalité du mineur, de sa situation sociale et familiale. Demande de retrait.
L'amendement est retiré.
La Commission adopte l'amendement rédactionnel CL346 du rapporteur.
Elle examine l'amendement CL196 de M. Erwan Balanant.
Proposé par le Conseil national des barreaux, cet amendement prévoit que l'avocat puisse purger les nullités jusqu'à l'audience de culpabilité, afin de faire bénéficier au mineur déféré d'une défense de qualité. En effet, l'expression « les observations de l'avocat » peut donner lieu à diverses interprétations. Le texte, tel qu'il est rédigé, ne permet pas de savoir si les nullités pourront être purgées à l'audience de culpabilité.
Votre amendement est satisfait, puisque les demandes de nullité sont toujours formées in limine litis, donc nécessairement dans le cadre de l'audience de culpabilité.
La Commission rejette l'amendement.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL347 du rapporteur.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL154 de M. Ugo Bernalicis, CL273 de M. Jean-Félix Acquaviva, CL107 de M. Michel Zumkeller et CL170 de Mme Cécile Untermaier.
L'amendement vise à définir un délai de convocation de la première audience dans un délai tenable et réaliste, le délai de trois mois ne tenant pas compte de la réalité des moyens de la justice, de l'exercice des droits de la défense et du temps nécessaire qui doit être pris s'agissant de mineur. On a beaucoup parlé de la notion de discernement, qui peut faire l'objet d'expertises et de contestations par la défense. Mais cela demande du temps. Il ne faut pas confondre vitesse et précipitation. Je comprends votre tentation, du point de vue de la gestion des dossiers dans des tribunaux surchargés. Mais je ne suis pas sûr que ce soit l'objectif que l'on doive poursuivre.
Quant à l'argument selon lequel quand on va vite c'est nécessairement de bonne justice, les professionnels de la PJJ préfèrent un rythme raisonnable, afin de pouvoir échanger des réflexions avec le jeune et d'instaurer quelques mesures, de sorte que l'audience soit plus efficace. Ce n'est pas forcément une perte de temps. Si l'exemple des audiences qui se présentent après trois ou quatre ans est assurément excessif, normer les choses de la sorte me paraît non pas tant ambitieux que déconnecté des enjeux et de la réalité.
Selon nous, il vaudrait mieux que le délai fixé pour l'audience ne soit pas inférieur à un mois. Il est essentiel que les mineurs comprennent la procédure applicable et ses enjeux, ce qui va bien au-delà de l'acte commis : elle engage leur avenir.
L'amendement CL107 vise lui aussi à préserver l'intérêt du mineur en lui permettant de préparer sa défense : dix jours, c'est un peu court, même si l'on comprend l'objectif visé, à savoir réduire le temps d'audiencement.
La réforme que vous proposez est tout à fait intéressante, mais elle ne réussira que si elle reçoit l'assentiment de l'ensemble des professionnels. Or ces derniers demandent de ralentir le rythme. Fixer des délais est essentiel, mais on ne peut pas imposer leur réduction systématique. Selon les professionnels, ceux qui sont envisagés ne seront pas tenus. Savoir l'entendre, c'est faire preuve de responsabilité. Nous proposons un délai minimum de vingt jours, soit dix de plus que ce qui est prévu : ce n'est pas grand-chose.
Avis défavorable à l'ensemble de ces amendements. La convocation entre dix jours et trois mois à l'audience d'examen de la culpabilité est le cœur du dispositif. Du reste, vous savez très bien – en tout cas ceux d'entre vous qui ont assisté aux auditions – qu'en réalité, pour les mineurs, la question de la culpabilité pose assez peu de difficultés dans la très grande majorité des cas. Attendre entre un et trois mois avant de statuer sur la culpabilité est contreproductif, y compris pour le mineur lui-même. Si, lors de l'audience, la culpabilité fait l'objet d'un débat et que le juge aperçoit la moindre difficulté, il aura la possibilité de renvoyer l'affaire, mais dans le cas d'un vol de portable où le mineur reconnaît les faits, il n'est pas nécessaire de repousser l'audience.
Dominique Perben, lors de son audition, a eu en substance la formule suivante : « Plus c'est long, moins c'est utile sur le plan pédagogique. » Je suis assez d'accord : la reconnaissance de la culpabilité du mineur, suivie par la mesure éducative, permet d'enclencher un processus important. Les délais envisagés me paraissent donc très utiles.
Dix jours, cela va vite : c'est de la justice de proximité. Si l'on attend un mois, l'enfant se perd dans la nature, disparaît des radars, et cela sans raison. Car vous me dites que l'avocat doit préparer l'audience, mais soyons sérieux : dans la pratique, ce ne sont pas des affaires remplissant quinze tomes, comme aux assises. La plupart du temps, les dossiers arrivant chez le juge des enfants ne sont pas très épais : il n'y a que quelques procès-verbaux. Ceux d'entre vous qui disent avoir consulté beaucoup de juges des enfants doivent le savoir. Même quand le dossier est plus complexe, comme l'avocat reste le même du début à la fin de la procédure, il a le temps de préparer l'audience. Il n'y a pas besoin de dix jours pour cela. Notre objectif est d'aller vite : les enfants ne doivent pas être laissés à la dérive pendant un mois. Je suis donc évidemment défavorable à ces amendements.
Je ne crois pas que ces enfants soient laissés à la dérive : en un mois, ils ont justement le temps de voir leur avocat, de préparer leur dossier et de se mettre en condition.
Je sais, monsieur le rapporteur, que c'est le cœur de la disposition : trois mois maximum…
… et une justice sévère, dont vous faites le corollaire de la pédagogie.
J'entends bien : c'est pour l'audience d'examen de la culpabilité – en dehors des cas traités par une audience unique, petites exceptions, à vous entendre, mais qui n'ont rien d'anecdotique.
Vous prévoyez trois mois maximum, mais, en réalité, les dossiers les plus simples sont d'ores et déjà traités assez rapidement. Lorsque des dossiers demandent plus de temps, c'est parce qu'il faut mener des actes d'instruction supplémentaires et procéder à des enquêtes. Les enquêteurs ne vont pas assez vite : c'est l'un des problèmes que l'on rencontre – car enquêter suppose des moyens.
La question n'est pas de savoir si l'on va trop vite ou pas assez : la justice doit être rendue dans de bonnes conditions, et ce pour tout le monde – mais principalement, bien sûr, dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Vouloir à tout prix s'encadrer dans un délai de trois mois, ce n'est pas de bonne justice. Même quand la culpabilité semble avérée, certains enfants disent qu'ils sont innocents. Préparer l'audience d'examen de la culpabilité suppose d'effectuer un travail qui permet d'ailleurs de faire en sorte que cette audience soit utile pour l'enfant, et c'est encore plus vrai pour le prononcé de la sanction.
La Commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL35 de Mme Marie-George Buffet.
Elle examine, en discussion commune, l'amendement CL274 de M. Jean-Félix Acquaviva et l'amendement CL171 de Mme Cécile Untermaier. Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement ces amendements.
La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL352, CL353, CL350, CL351 et CL348 du rapporteur.
Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL68 de Mme Marie-George Buffet, CL155 de M. Ugo Bernalicis et CL275 de M. Jean-Michel Clément, ainsi que les amendements identiques CL156 de M. Ugo Bernalicis et CL276 de M. Jean-Michel Clément.
Nous proposons, à travers l'amendement CL155, une révision automatique de la détention provisoire tous les trois mois. Maintenir un mineur en détention n'est pas une décision neutre : il convient de se demander régulièrement si c'est nécessaire et s'il n'y aurait pas autre chose à faire. Cela me semble de bonne justice.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.
Elle en vient à l'amendement CL54 de M. Antoine Savignat.
Cet amendement aurait été de cohérence si les précédents avaient été adoptés. Je le retire.
L'amendement est retiré.
La Commission en arrive aux amendements identiques CL158 de M. Ugo Bernalicis et CL277 de M. Jean-Michel Clément.
Je n'ai même pas pu défendre mon second amendement dans la discussion commune précédente, et encore moins répliquer. C'est dommage. Certes, nous avons des délais à tenir, et la séance et la commission se chevauchent – l'ordre du jour est chaotique, comme d'habitude, et ce ne sera pas mieux la semaine prochaine, avec deux textes de notre commission qui se suivront en séance –, mais ce n'est pas une raison ! Nous avons beau protester en Conférence des Présidents contre cette situation, tout le monde s'en fiche. Comme toujours, nous sommes à votre merci.
À travers l'amendement CL158, nous demandons la suppression de l'article L. 434-2, qui permet de renvoyer devant la cour d'assises un enfant ayant commis un crime avant ses 16 ans. Cet article contrevient à certains des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, tels que l'atténuation de la responsabilité des mineurs en fonction de l'âge, le jugement des enfants par une juridiction adaptée et la nécessité de rechercher leur relèvement éducatif et moral par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité.
On se gargarise avec les grands principes depuis le début de ces débats, y compris quand il s'agit de rejeter certains amendements, présentés par la droite, qui sont objectivement très problématiques, pour ensuite disposer, au fil des articles du code, des exceptions comme celle-ci, qui posent des problèmes majeurs. L'an dernier, le Défenseur des droits écrivait qu'on ne pouvait pas à la fois proclamer de grands principes et consacrer dans les codes des exceptions qui remettent en cause leur effectivité. Je partage cette analyse.
Votre lecture de l'article L. 434-2 est erronée : il traite de la cour d'assises des mineurs, sans prévoir une quelconque exception ni marquer de rupture par rapport aux principes.
Ce qu'écrit le Défenseur des droits, ce n'est pas mal, mais cela ne dispense pas de lire ce qui est écrit dans le texte. En l'occurrence, comme vient de le dire à juste titre M. le rapporteur, ce que vous avez dit, monsieur Bernalicis, est complètement à côté de la réalité – mais nous avons eu le plaisir de vous entendre sur cette question.
En tant que de besoin, madame la présidente, et autant que le permettent notre Constitution, notre règlement et les garanties accordées par notre État de droit.
Le complotisme systématique visant le Défenseur des droits et ses avis, ça va cinq minutes ! Respectez un peu cette institution !
La Commission rejette les amendements.
Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL157 de M. Ugo Bernalicis et CL278 de M. Jean-Michel Clément et l'amendement CL108 de M. Michel Zumkeller.
L'amendement CL157 vise à limiter à quinze jours au lieu de deux mois la durée de la détention provisoire pour les enfants de moins de 16 ans en matière correctionnelle, conformément à la volonté affichée par le Gouvernement de réduire la détention provisoire.
L'amendement CL108 a pour objet de réduire la durée de la détention provisoire de deux mois à un mois, renouvelable une fois.
C'est le dernier amendement que je défendrai, car je dois aller dans l'hémicycle où se discute la proposition de loi relative à l'adoption. L'organisation de nos travaux est tout de même problématique !
Avis défavorable. Le code de la justice pénale des mineurs réduit déjà considérablement la durée de la détention provisoire. Dans le cas visé, il faut permettre au juge d'instruction de maintenir en détention provisoire un mineur de moins de 16 ans pour une durée de trois mois lorsqu'il ordonne son renvoi devant le tribunal pour enfants.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle examine les amendements identiques CL188 de M. Ugo Bernalicis et CL279 de M. Jean-Michel Clément.
Nous souhaitons limiter la durée de la détention provisoire à un mois, renouvelable une fois.
Limiter la détention provisoire était censé être le grand objectif de ce texte – puisqu'elle constitue la part majoritaire des incarcérations. Je ne voudrais pas que, de par la célérité des audiences – audiences de culpabilité et/ou audiences uniques –, les placements en détention provisoire diminuent et que les peines d'emprisonnement augmentent d'autant. Le nombre d'enfants enfermés dans ce pays serait alors le même. C'est une crainte que beaucoup partagent, et il est dommage que nous ne puissions pas avancer sur ces aspects, dans l'intérêt des mineurs.
La Commission rejette les amendements.
Elle est saisie des amendements CL191 de M. Ugo Bernalicis et CL280 de M. Jean-Michel Clément.
La Commission rejette les amendements.
Elle adopte successivement l'amendement rédactionnel CL354 et l'amendement de cohérence CL355, du rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL176 de Mme Cécile Untermaier.
Puis elle est saisie des amendements identiques CL177 de Mme Cécile Untermaier, CL192 de M. Ugo Bernalicis et CL281 de M. Jean-Félix Acquaviva.
Cet amendement prévoit que l'enfant victime a droit d'être assisté d'un avocat, spécialement formé.
Il est vrai que l'on parle souvent des victimes dans cette commission ou à la tribune de l'hémicycle, sans jamais évoquer la façon dont elles sont assistées, accompagnées. Nous avons déjà évoqué ici la justice restaurative, mais nous touchons là à une matière particulière, celle de la justice des mineurs, et à un point particulier, l'enfant victime. Cet amendement devrait pouvoir faire l'unanimité.
Je n'en comprends pas la raison d'être, puisqu'un enfant victime, au même titre que les adultes victimes, a droit à un avocat.
Je ne comprends pas davantage : l'enfant victime a le droit d'être assisté. L'article 706-51-1 du code de procédure pénale rend obligatoire l'assistance par un avocat des mineurs victimes de certaines infractions, d'une particulière gravité. Dans notre pays, la victime a droit à un avocat, qu'il s'agisse de la procédure pénale ou de la procédure pour les mineurs.
Si tout le monde est d'accord, adoptons l'amendement ! Le principe, lorsque l'on construit un code, est de réunir dans un même document tous les éléments qui sont à notre disposition. Bien sûr, on peut renvoyer à d'autres dispositions, mais je propose de l'inscrire ici. Cela constituera un point d'appui, à partir duquel on pourra décliner l'aide juridictionnelle, ainsi que l'aide juridictionnelle de droit, nonobstant les ressources de ses parents puisque c'est l'enfant qui doit être considéré – qu'il soit auteur ou victime, d'ailleurs.
La préoccupation de notre collègue est légitime mais sa volonté satisfaite, puisque le code de procédure pénale prévoit que la victime, qu'elle soit mineure ou majeure, peut bénéficier d'un avocat. Beaucoup de barreaux, d'ailleurs, organisent des permanences. Je ne vois pas trop l'intérêt d'inscrire une telle disposition dans ce code de justice pénale, car le droit général s'applique.
La Commission rejette les amendements.
Puis elle examine l'amendement CL356 du rapporteur.
Lors de son audition, M. Laurent Gebler, vice-président au tribunal pour enfants de Bordeaux, a souligné qu'il pourrait être délicat pour le juge d'évoquer certains faits lors des audiences de culpabilité. Cet amendement permet donc au juge d'ordonner aux autres parties de se retirer lorsque la situation personnelle du mineur sera examinée. Dans le respect du contradictoire, les avocats du mineur resteront.
Je défendrai ultérieurement un amendement sur le même sujet. Lors de l'audience, des informations très sensibles, sur l'état de santé ou la scolarité du mineur par exemple, peuvent être délivrées en présence des autres parties, ce qui peut avoir des répercussions. Il arrive aussi que les magistrats, pour ménager le mineur, ne les évoquent pas : cela prive l'audience d'un élément intéressant.
La Commission adopte l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL282 et CL283 de M. Jean-Michel Clément.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL357 du rapporteur.
La Commission examine les amendements CL193 et CL194 de M. Ugo Bernalicis.
Nous proposons de supprimer l'intervention du tribunal de police. Je ne désespère pas de vous faire entendre raison !
La Commission rejette successivement les amendements.
Puis elle examine les amendements identiques CL69 de Mme Marie-George Buffet et CL195 de M. Ugo Bernalicis.
Cet amendement garantit la publicité restreinte des audiences, y compris lorsque la personne est devenue majeure. Aucune dérogation aux règles de la justice des mineurs ne peut être envisagée, sauf si l'intérêt supérieur de l'enfant le commande et dans les cas énumérés par le code. Seul l'accusé devenu majeur peut faire une telle demande : un co-accusé ne doit pas pouvoir solliciter la publicité de l'audience. Le texte marquerait une grande régression si l'accord d'un co-auteur ou du magistrat était suffisant. Si le ministère public le demande, ce ne doit être que dans l'hypothèse d'une publicité restreinte, dans l'intérêt du mineur devenu majeur qui souhaite des débats publics.
Sur la forme, Madame la présidente, les amendements CL193 et CL194 ont certes le même objet mais j'aurais préféré vous donner mon accord avant que vous ne considériez le second comme défendu.
Votre amendement est satisfait. L'article L. 513-3 prévoit que « le prévenu mineur au moment des faits, devenu majeur au jour de l'ouverture des débats devant le tribunal de police ou le tribunal pour enfants, peut demander à ce que l'audience soit publique, sauf s'il existe un autre prévenu qui est toujours mineur ou qui, mineur au moment des faits et devenu majeur au jour de l'audience, s'oppose à cette demande. »
La Commission rejette les amendements.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL358 du rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL284 de M. Jean-Michel Clément.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL359 et CL360 du rapporteur.
La Commission est saisie de l'amendement CL8 de M. Éric Ciotti.
Avis très défavorable sur cet amendement qui propose de supprimer la phase de mise à l'épreuve éducative.
Il faut oser, quand même ! La chance sourit aux audacieux, mais pas toujours.
Monsieur Savignat, nous dirons à Éric Ciotti avec quel brio, avec quelle conviction vous avez défendu ses amendements !
(Sourires.)
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL190 de M. Ugo Bernalicis.
L'article 521-2 prévoit les cas où la juridiction, après avoir recueilli les observations des parties présentes à l'audience et par décision motivée, peut statuer lors d'une audience unique sur la culpabilité du mineur et la sanction.
Par cet amendement, nous précisons que ce recours à l'audience unique ne peut être mis en œuvre que si une mesure éducative est envisagée à titre de sanction. Il s'agit d'un amendement de repli, vous l'aurez compris.
Nous avons déjà discuté des conditions de l'ouverture de l'audience unique et des garanties qui l'acccompagnent. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle est saisie de l'amendement CL187 de M. Ugo Bernalicis.
Nous en revenons à la distinction entre vitesse et précipitation, entre promptitude et célérité… Le délai de trois mois prévu à l'article L. 521-3 poussera les juges à adopter des cadences peu conformes à l'intérêt des enfants. Avec une telle procédure, on ne renforce pas les droits des enfants ! Il est loin le temps où Nicole Belloubet, dans l'hémicycle, cherchait à nous rassurer en affirmant que cette ordonnance ne procéderait qu'à une codification à droit constant, qu'il s'agirait d'un simple époussetage…
Le délai de trois mois, lorsque l'affaire n'est pas en état d'être jugée et que l'audience est reportée, me semble suffisant pour permettre des investigations supplémentaires. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine les amendements identiques CL189 de M. Ugo Bernalicis et CL285 de M. Jean-Michel Clément.
L'article L. 521-3 prévoit que la juridiction peut renvoyer d'office l'examen de l'affaire à une prochaine audience dans un délai qui ne peut excéder trois mois si elle estime que l'affaire n'est pas en état d'être jugée. Même si le magistrat sait très bien que les investigations seront plus longues, eh bien, le délai de trois mois s'applique pour un nouveau rendez-vous. Comment peut-on considérer que cela soit satisfaisant alors qu'en l'état du droit, le magistrat peut organiser une audience après quatre ou cinq mois, à la fin des investigations, lorsque les éléments de preuve sont rassemblés ? Une telle disposition ne manquera pas d'alourdir la procédure.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL58 de M. Stéphane Peu.
Elle examine l'amendement CL232 de Mme Alexandra Louis.
L'amendement est retiré.
La Commission examine l'amendement CL172 de Mme Cécile Untermaier.
Il convient de desserrer l'étau temporel pour que la profession n'entre pas dans ce dispositif à reculons mais avec enthousiasme, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Nous avons déjà débattu de ce délai de dix jours à trois mois concernant l'audience d'examen de la culpabilité. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL9 de M. Éric Ciotti et CL173 de Mme Cécile Untermaier.
Amendement qui réduit à néant l'argumentation précédemment développée car rapprochant la vieille droite de la jeune gauche et soumis à une discussion commune avec l'amendement de Cécile Untermaier…
(Sourires)
Plus sérieusement, il convient de raccourcir le délai entre les prononcés de la culpabilité et de la peine, preuve, s'il en est, que nous pouvons nous rapprocher même si je ne suis pas certain de l'opportunité d'une discussion commune avec l'amendement CL173.
Avis toujours défavorable à cet amendement de repli par rapport à celui visant à supprimer la mise à l'épreuve éducative.
La Commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL36 de M. Stéphane Peu.
Elle examine l'amendement CL209 de M. Ugo Bernalicis.
Lorsque la culpabilité a été déclarée par le juge des enfants en cabinet, si le prononcé de la sanction est renvoyé devant le tribunal pour enfants, celui-ci ne pourra prononcer que des mesures éducatives.
Cet amendement corrige également une erreur de rédaction à la dernière phrase de l'article L. 521-9 disposant que « Lorsqu'elle déclare un mineur coupable des faits qui lui sont reprochés, la juridiction ordonne l'ouverture d'une période de mise à l'épreuve éducative, statue sur les mesures mentionnées à l'article L. 521-14 auxquelles le mineur est soumis durant cette période et renvoie le prononcé de la sanction à une audience ultérieure. La période de mise à l'épreuve éducative court jusqu'à l'audience de prononcé de la sanction », ce qui renvoie à la question du travail qui peut être accompli dans des délais aussi restreints.
M. le rapporteur a fait état d'un rapport permettant au juge de se prononcer sur la personnalité du mineur mais quel sera son contenu ? Il est toujours possible de considérer qu'il faut aller vite dès lors que l'on dispose des éléments de preuve mais l'instruction n'est plus menée à charge et à décharge et l'individualisation de la peine est quant à elle réduite à néant.
Nous avons déjà débattu de cette question. Il me semble important que le juge puisse prononcer une peine dans le cadre d'une audience unique. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL378 du Gouvernement.
Cet amendement vise à corriger un oubli dans la rédaction concernant la possibilité de révoquer une mesure d'assignation à résidence sous surveillance électronique (ARSE).
En l'état du texte, la possibilité d'une telle révocation en cas de manquement n'est possible que pour les mineurs de 16 ans déférés, avant l'audience de culpabilité – article L. 423-12. Il s'agit ici d'aligner la possibilité de révoquer l'ARSE sur la révocation du contrôle judiciaire, au stade de l'audience de culpabilité – article L. 521-10 – et au stade de la mise à l'épreuve éducative – article L. 521-16.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission adopte l'amendement.
Elle examine les amendements identiques CL210 de M. Ugo Bernalicis et CL286 de M. Jean-Michel Clément.
Selon l'article L. 521-11, lorsque la juridiction constate qu'une période de mise à l'épreuve éducative est en cours pour des faits antérieurs, la juridiction renvoie le mineur pour le prononcé de la sanction à l'audience déjà fixée pour le prononcé de la sanction des faits antérieurs, sous réserve que celle-ci intervienne dans un délai d'au moins dix jours.
Or, un tel délai ne garantit pas le temps nécessaire à l'avocat pour organiser décemment la défense du mineur. Le droit au procès équitable doit bénéficier à tous.
L'amendement prévoit donc que la juridiction renvoie le mineur pour le prononcé de la sanction et l'audience fixée pour le prononcé des derniers faits commis dans un délai qui ne peut être inférieur à un mois.
L'article L. 521-11 dispose que : « Par dérogation aux dispositions de l'article L. 521-9, lorsque la juridiction constate, à la date à laquelle elle statue, qu'une période de mise à l'épreuve éducative est en cours pour des faits antérieurs, elle n'ouvre pas, sauf décision contraire motivée, une période de mise à l'épreuve éducative pour les nouveaux faits pour lesquels le mineur est déclaré coupable. La mise à l'épreuve en cours s'étend à ces faits », ce qui me semble tout à fait pertinent. Avis défavorable.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine l'amendement CL211 de M. Ugo Bernalicis.
Nous permettons au juge des enfants de pouvoir superviser les mesures qu'il ordonne et qu'il suit « à son initiative » et non dans l'attente d'être saisi. Le juge des enfants pourra ainsi prescrire, modifier ou lever la mesure éducative judiciaire provisoire pour adapter au mieux ces mesures aux évolutions du mineur selon son âge, en privilégiant le plus possible l'éducatif sur le répressif.
Cet amendement me semble satisfait. L'ajout de « à son initiative » ne me semble pas un apport significatif. Avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission adopte l'amendement de cohérence CL379 du Gouvernement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL212 de M. Ugo Bernalicis et CL287 de M. Jean-Michel Clément.
Cet amendement pose des garde-fous nécessaires comme le sont ceux du droit au recours et du maintien de la primauté éducative. Il vise à maintenir la possibilité de faire cesser la mise à l'épreuve éducative de manière anticipée et à maintenir une voie de recours contre ces dispositions.
Avis défavorable. Il convient d'en rester à la rédaction de l'article L. 521-19 disposant que « Si l'évolution de la situation du mineur pendant la période de mise à l'épreuve éducative le justifie, le juge des enfants peut, dans les conditions prévues au second alinéa de l'article L. 521-9, modifier la date de l'audience de prononcé de la sanction, etc. » Là encore, je ne suis pas sûr de l'apport de votre rédaction.
La Commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission adopte successivement les amendements de cohérence CL380 et CL381 du Gouvernement.
Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL361 du rapporteur.
Elle examine les amendements identiques CL213 de M. Ugo Bernalicis et CL288 de M. Jean-Michel Clément.
La remise en liberté de l'enfant en détention provisoire pendant la période de mise à l'épreuve éducative doit être automatique si le juge pour enfants ne répond pas dans les cinq jours. Cette question est d'autant moins anodine que la très grande majorité des mineurs incarcérés le sont dans le cadre de la détention provisoire. Les enfants doivent bénéficier de toutes les garanties pour éviter d'en passer par là.
Avis défavorable. Il convient de s'en tenir à la rédaction de l'article L. 521-23 disposant que le juge se prononce dans un délai de cinq jours sur la demande de remise en liberté : « Faute par le juge des enfants d'avoir statué dans le délai fixé par le premier alinéa, le mineur peut saisir la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel qui, sur les réquisitions écrites et motivées du procureur général, se prononce dans les cinq jours de sa saisine faute de quoi le mineur est mis d'office en liberté sauf si des vérifications concernant sa demande ont été ordonnées. » Il ne me paraît pas opportun d'aller au-delà en prévoyant une automaticité.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine l'amendement CL214 de M. Ugo Bernalicis.
Il convient de restreindre la procédure de l'audience unique au prononcé des seules mesures éducatives. Nous reviendrons à la charge autant de fois que cela sera nécessaire car ce n'est pas anodin.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL109 de M. Michel Zumkeller.
Elle examine les amendements identiques CL215 de M. Ugo Bernalicis et CL289 de M. Jean-Michel Clément.
Il convient de supprimer la deuxième question de l'article L. 522-1 portant sur l'exclusion de l'accusé mineur du bénéfice de l'excuse de minorité et d'en rester aux grands principes liminaires du code de la justice pénale des mineurs.
Nous avons longuement débattu hier soir de l'excuse de minorité et des possibilités d'y déroger ou non. Avis défavorable.
En effet. De surcroît, notre temps est assez précieux, même si j'entends qu'il soit nécessaire de se répéter deux ou trois fois. Madame la présidente, je découvre avec gourmandise que, s'il y a parfois des dialogues, des monologues se succèdent aussi en cascade !
Selon le règlement, il a le droit de venir en commission lorsqu'il le souhaite, et tous les ministres sont les bienvenus dans notre commission !
La Commission rejette les amendements.
Elle est saisie de l'amendement CL227 de M. Ugo Bernalicis.
Monsieur le ministre, il faudra vous armer d'un peu de courage pour la séance, car nous déposerons d'autres amendements.
L'amendement CL227 vise à nouveau à retirer sa compétence au tribunal de police, qui revient souvent dans le texte.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL174 de Mme Cécile Untermaier, CL290 de M. Jean-Michel Clément et CL208 de M. Ugo Bernalicis.
Nous abordons là un nouveau sujet, puisqu'il s'agit de fixer un délai maximum de deux mois à la cour d'appel pour statuer sur le jugement de culpabilité pris en premier ressort.
Nos amendements sont, pour l'essentiel, le fruit de l'expertise d'un collectif qui regroupe plusieurs organisations : le Conseil national des barreaux, la Conférence des bâtonniers, le Barreau de Paris, le Syndicat de la magistrature, le Syndicat des avocats de France, le Syndicat national des personnels de l'éducation et du social - protection judiciaire de la jeunesse/Fédération syndicale unitaire (SNPES-PJJ/FSU), la Confédération générale du travail (CGT), la Fédération syndicale unitaire (FSU), la Ligue des droits de l'homme, Genepi, la section française de l'Observatoire international des prisons (OIP), le Syndicat national unitaire des assistants sociaux de la fonction publique (SNUASFP-FSU), Défense des enfants international (DEI)-France, le Syndicat national unitaire de la territoriale (SNUTER), Solidaires, Sud santé sociaux, le Syndicat national de l'ensemble des personnels de l'administration pénitentiaire (SNEPAP-FSU), Solidaires justice et la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE 75).
Que vous me témoigniez parfois du mépris, ce n'est pas très grave, mais lorsque vous vous contentez de dire « défavorable », que vous jugez nos amendements pas très intéressants, qu'on n'a pas bien lu le code, qu'on n'y comprend rien, c'est au mépris du travail qui a été fourni, et ces contre-arguments ne s'adressent pas à moi seul. Dites-vous bien que je continuerai à soutenir ces amendements qui nous sont proposés, y compris en séance, parce que nous avons, de notre côté, la force du nombre et de la représentation majoritaire, contrairement à vous.
Ce délai de deux mois fixé à la cour d'appel pour statuer me paraît un peu trop contraignant. Avis défavorable.
Il s'agit effectivement là d'un nouveau sujet, madame Untermaier, et vous avez bien compris que mes propos, tout à l'heure, ne vous étaient pas destinés.
Monsieur Bernalicis, quand on a dit quinze fois les choses, on peut être, à un certain moment, un peu ulcéré. Naturellement, vous avez la liberté de dire ce que vous voulez, et je n'entends pas vous contraindre, de quelque façon que ce soit, monsieur le député, mais, moi aussi, j'ai le droit de dire ce que je pense, et je n'ai pas l'intention de m'en priver.
Je suis défavorable aux amendements.
Je me réjouis que M. le ministre soit présent et participe à l'ensemble de notre discussion en commission. Par ailleurs, contrairement à ce qui a été dit, nous avons eu un vrai débat de fond, ce qui est essentiel pour nos travaux.
Monsieur le rapporteur, il aurait été dommage que je n'aie pas parlé pas du fond de l'amendement si vous aviez donné un avis favorable… mais j'avais bien anticipé. Depuis le début, vous rejetez systématiquement nos propositions, y compris celles qui, sans aller jusqu'à les qualifier de « cosmétiques », ne vous coûteraient pas grand-chose politiquement. En l'occurrence, il s'agissait d'un amendement important. Cela ne vous empêche pas de soutenir que nous avons eu un débat approfondi. J'ai plutôt l'impression, pour ma part, d'être encore dans une chambre d'enregistrement. À vos yeux, ce dossier traîne depuis un an et, à présent, il faut aller vite. On doit se dépêcher de défendre nos amendements parce qu'un autre texte arrive bientôt en séance. La semaine prochaine, on va y consacrer deux jours, puis à nouveau deux jours la semaine suivante. Il s'agit, rappelons-le, de modifier les grands principes de l'ordonnance de 1945 ! Permettez-moi de déclamer mon mécontentement et d'user pleinement de ma liberté de parole, à l'instar du ministre.
Suspendre le prononcé de la peine jusqu'à l'annonce de la décision de la cour d'appel sur la culpabilité du mineur me semble un principe essentiel. Je ne comprends pas qu'on le traite avec tant de légèreté.
Mon cher collègue Ugo Bernalicis, la qualité de votre investissement est indéniable : vous travaillez les textes et vous apportez des pièces au débat. Mais pourquoi vous présenter en victime ? Personnellement, j'ai recueilli des avis défavorables sur nombre de mes amendements. Cela ne m'empêche pas d'instaurer un dialogue. J'ai commencé à le faire, d'ailleurs, avant même la réunion de la commission.
Nous avons la chance d'avoir un Garde des sceaux dont le cabinet est accessible. Je suis sûr que, si vous y mettiez les formes – car l'invective n'y incite pas –, vous obtiendriez des réponses et pourriez faire avancer des sujets. Avec M. le Garde des sceaux, nous avons des appréciations différentes, ce qui ne nous empêche pas de travailler ensemble sur un dossier dans le dialogue et l'écoute. C'est certainement plus simple pour progresser.
Je ne doute pas un instant de votre sincérité et de votre volonté de faire aboutir vos propositions, mais je suis sûr que vous y arriveriez bien mieux si vous faisiez preuve, en certaines circonstances, d'un peu moins d'outrance et de davantage de sympathie envers vos collègues.
Ce projet de loi en particulier a fait l'objet d'un long travail parlementaire, dans le cadre d'une mission d'information rassemblant des représentants de chaque groupe. Je n'y peux rien, monsieur Bernalicis, si vous ne souhaitez jamais participer à ce type de travaux !
C'est minable ! Je ne vous ai pas vue aux auditions de la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire.
Vous êtes un représentant de la nation. Je vous demande de respecter ma présidence et de vous exprimer dans un langage courtois, c'est la moindre des choses que vous devez aux citoyens que vous représentez.
J'ai été courtois. C'est vous qui êtes discourtoise. Vous me mettez en cause sans que je puisse me défendre. Et vous prétendez défendre le principe du contradictoire !
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle examine l'amendement CL239 de Mme Alexandra Louis.
Avant de défendre mon amendement, je tiens à souligner la qualité de nos débats : nous avons pu discuter des dispositions fondamentales du texte, et c'est important. J'ajoute que nous n'avons aucun mépris pour quelque organisation que ce soit. Nous avons tous pris le temps de les entendre et de discuter avec elles de la façon la plus constructive possible. Les membres du groupe de contact n'étaient, certes, pas toujours d'accord, mais ils se sont toujours montrés constructifs et impliqués. Du reste, nous avons tous voté un amendement historique sur l'audition libre. Reconnaissez, monsieur Bernalicis, que c'est un grand pas en avant, qui satisfait d'ailleurs les organisations que vous citez.
L'amendement CL239 tend en quelque sorte à harmoniser les procédures de première instance et d'appel. Lorsque la cour d'appel infirmera le jugement de relaxe de première instance, elle devra ouvrir une période de mise à l'épreuve éducative, comme cela est prévu pour le tribunal pour enfants ; elle devra statuer sur les mesures provisoires et renvoyer le dossier au juge des enfants compétent pour le suivi des mesures et la fixation de l'audience sur la sanction. Comme en première instance, il sera possible pour la cour d'appel de recourir à une audience unique si elle s'estime suffisamment informée sur la personnalité et ne juge pas nécessaire d'ouvrir une période de mise à l'épreuve éducative.
Il s'agit d'un amendement pratique et de cohérence.
Avis favorable. Les ajouts que vous proposez s'inscrivent dans les objectifs de la réforme et améliorent à l'évidence les dispositions relatives à l'appel.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CL220 de M. Ugo Bernalicis.
Il s'agit de supprimer l'intervention du tribunal de police dans l'article relatif à la procédure d'appel.
Je tiens à dire à notre collègue Balanant, qui n'est pas avare de conseils, que je l'embaucherai peut-être en tant qu'assistant parlementaire sous la prochaine législature – qui sait ?
Croyez-vous que je n'ai pas formulé, ici même, en tant que président de la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance de la justice, des demandes de rencontre avec le Garde des sceaux ? On m'a envoyé balader ! Lorsque nous l'avons auditionné sur le projet de loi de finances, le ministre a refusé de me répondre. Voilà la situation ! Alors, oui, je défends mes amendements et je préfère le faire ici, au vu et au su de tous.
Avec Cécile Untermaier et quelques autres, notamment le groupe GDR, nous avons organisé un colloque qui a duré toute une journée – les vidéos sont en ligne. Moi aussi, j'ai organisé des auditions et discuté avec des professionnels. J'ai également assisté à quelques-unes des auditions organisées par Mme Untermaier et M. Terlier, dans la mesure où mon agenda me le permettait. Je ne reproche jamais à ceux de mes collègues qui n'ont pas pu venir aux auditions de la commission d'enquête que je préside de ne pas y avoir assisté, car je sais quelles sont nos conditions de travail. Je trouve odieux, madame la présidente, que vous en fassiez un argument, en séance publique comme en commission. C'est insupportable ! Je n'ai pas à rougir de mon implication dans les travaux de l'Assemblée nationale. Vous pouvez me reprocher beaucoup de choses sur le fond, mais pas cela !
Je ne vous reproche strictement rien, monsieur Bernalicis. Je rappelai simplement que, sur le texte relatif à la justice pénale des mineurs, les travaux de notre commission avaient été longs et complets et que vous ne pouviez pas vous plaindre de la rapidité exagérée avec laquelle nous l'examinerions.
Dès que je vois les mots « tribunal de police », j'émets un avis défavorable.
La Commission rejette l'amendement.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL71 de Mme Marie-George Buffet.
La Commission examine les amendements identiques CL219 de M. Ugo Bernalicis et CL291 de M. Jean-Michel Clément.
La compétence du juge des enfants pour les jeunes majeurs de moins de 21 ans telle que définie à l'article 611-2 doit demeurer le principe et la saisine du juge d'application des peines l'exception.
Lorsque le mineur atteint l'âge de 18 ans, il est logique que l'application de la peine puisse être confiée à un juge de l'application des peines (JAP). En pratique, tant que le mineur est dans un établissement pour mineurs, la question ne se pose pas, mais lorsque, jeune majeur, il est en détention avec des majeurs, il est soumis au droit des majeurs, qui est mieux connu du JAP. Cette mesure concerne principalement des mineurs condamnés à de longues peines. Quoi qu'il en soit, dès lors qu'on offre cette possibilité, il s'agit d'une mesure d'administration judiciaire qui ne peut pas faire l'objet d'un recours. Avis défavorable.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine les amendements identiques CL218 de M. Ugo Bernalicis et CL292 de M. Jean-Michel Clément.
En cohérence avec un précédent amendement sur l'article 611-5, nous souhaitons le maintien de la compétence du juge des enfants pour les jeunes majeurs de moins de 21 ans.
Il est logique que le mineur devenu majeur le jour de son jugement, et qui va donc être incarcéré dans un établissement pénitentiaire pour adultes, soit suivi par le juge de l'application des peines, qui est mieux spécialisé pour suivre les conditions de son incarcération. Cependant, l'article L. 611-6 maintient une possibilité de dérogation et le juge des enfants peut rester compétent pour la dimension éducative de la peine, jusqu'à l'âge de 21 ans. Avis défavorable.
Tout à l'heure nous avons examiné des amendements qui tendaient à permettre aux mineurs incarcérés de rester dans les quartiers pour mineurs jusqu'à l'âge de 21 ans. Il a été proposé que nous en rediscutions d'ici à la séance publique, certains évoquant l'hypothèse de la création de quartiers réservés aux détenus âgés de 18 à 21 ans – je ne crois pas que ce soit utile, mais pourquoi pas ? Quoi qu'il en soit, si nous nous engageons dans cette voie, il serait cohérent que le juge des enfants reste compétent pour ces jeunes majeurs. Pour ma part, je préfère qu'il demeure compétent le plus longtemps possible, dans la continuité du travail qu'il a amorcé, sachant par ailleurs qu'ayant suivi la même formation initiale que les autres magistrats, il n'intervient pas à côté du fonctionnement classique de la justice.
La Commission rejette les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL363 du rapporteur.
La Commission est saisie des amendements identiques CL217 de M. Ugo Bernalicis et CL293 de M. Jean-Michel Clément.
S'agissant des mesures à prononcer, l'âge à prendre en compte doit être celui du moment de la commission des faits, y compris lors des audiences d'application des peines.
Avis défavorable. À partir de 18 ans, le jeune majeur est en mesure de prendre des décisions seul, quel que soit l'âge de la commission des faits. Ses représentants légaux n'ont plus les mêmes responsabilités. C'est pourquoi l'article L. 612-4 retire leur convocation et la notification qui leur est faite des ordonnances et jugements du juge des enfants.
La Commission rejette les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL364 du rapporteur.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL110 de M. Michel Zumkeller.
La Commission est saisie des amendements identiques CL216 de M. Ugo Bernalicis et CL294 de M. Jean-Michel Clément.
Les articles L. 631-1 et suivants prévoient l'inscription au casier judiciaire de toutes les mentions, y compris éducatives. Nous souhaitons que seules les peines soient inscrites au casier judiciaire B1 des mineurs.
À tout le moins, nous demandons que soient automatiquement effacées les mentions relatives aux déclarations de culpabilité assorties d'une dispense de peine, d'une dispense de mesure éducative ou d'une déclaration de réussite éducative, et les décisions prononçant des mesures éducatives.
Il n'est pas forcément dans l'intérêt du mineur d'effacer les mesures de dispense ou les déclarations de réussite éducative, qui plaident en sa faveur lorsque le casier est consulté. Avis défavorable.
Le bulletin B1 du casier judiciaire est un outil d'outil d'information pour le juge, il est normal que toutes les mesures qui lui permettent d'affiner sa décision y figurent. Avis défavorable.
La Commission rejette les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette l'amendement CL178 de Mme Cécile Untermaier.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL365 du rapporteur.
La Commission examine, en discussion commune, les amendements identiques CL226 de M. Ugo Bernalicis et CL295 de M. Jean-Michel Clément, et l'amendement CL179 de Mme Cécile Untermaier.
La solution la plus favorable pour l'enfant n'est pas que les mesures que vous considérez positives figurent au casier judiciaire, mais qu'il n'y ait aucune mention. Ainsi le regard du professionnel de justice peut-il s'orienter uniquement sur les faits et la personnalité de l'auteur qu'il a devant lui.
La centralité et l'influence du casier judiciaire sur les condamnations en comparution immédiate à des peines de prison ferme avec mandat de dépôt n'est plus à démontrer. L'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante a instauré un régime spécifique apportant d'importantes atténuations à l'institution du casier judiciaire. Cette spécificité s'est toutefois réduite petit à petit, en particulier avec la loi du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, dite Perben 2.
Nous proposons de clarifier le droit en supprimant les peines correctionnelles et les mesures éducatives du casier judiciaire, à la majorité ou à l'expiration d'un délai de trois ans, afin de prendre en compte la condition de minorité et les principes de la justice des mineurs.
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements.
Suivant l'avis du rapporteur, elle adopte l'amendement CL296 de M. Jean-Michel Clément.
Suivant l'avis du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL180 de Mme Cécile Untermaier et CL297 de M. Jean-Michel Clément.
La Commission examine l'amendement CL231 de Mme Alexandra Louis.
Nous proposons de donner au magistrat la possibilité de déroger à l'obligation d'inscrire les mineurs de plus de 13 ans au fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAISV) en cas de crime de nature sexuelle.
Le caractère systématique de cette inscription n'est pas adapté à la particularité de ces jeunes mineurs, qui requièrent un véritable suivi et dont le taux de récidive n'est pas important. Très souvent, d'ailleurs, ces mineurs sont eux-mêmes victimes de violences sexuelles. L'inscription au FIJAISV n'est pas anodine dans la vie d'un enfant, surtout entre 13 et 16 ans. Si l'on peut comprendre que l'inscription soit de plein droit après 16 ans, il semble préférable de laisser cet office au juge avant cet âge.
Nous avons longuement débattu de l'âge du consentement à l'acte sexuel dans le cadre de la « loi Schiappa », et j'ai mené une mission d'évaluation sur le sujet. Si, pour la victime, l'âge du discernement est fixé à 15 ans, on peut s'interroger sur l'opportunité de l'inscription de plein droit au FIJAISV à 13 ans. Je propose donc que le juge puisse y déroger par décision spécialement motivée.
Effectivement, cet amendement apporte une souplesse en laissant la possibilité aux juges de décider de l'inscription au fichier des cas graves. Avis favorable.
Mme Louis a raison, l'inscription au FIJAISV peut laisser une marque indélébile. Avis favorable.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL298 de M. Jean-Michel Clément et CL225 de M. Ugo Bernalicis.
Le mineur doit avoir la possibilité de demander l'effacement de l'inscription au FIJAISV. La condition de minorité doit être prise en compte dans la durée du fichage. Il y a peut-être là un angle mort dans la réflexion sur les mineurs.
Cette précision ne me semble pas utile. L'article L. 632-4 ne prévoit aucune demande spécifique pour obtenir l'effacement, dès lors que les conditions fixées dans l'article sont réunies. Avis défavorable.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte l'amendement rédactionnel CL367 du rapporteur.
La Commission examine les amendements identiques CL224 de M. Ugo Bernalicis et CL299 de M. Jean-Michel Clément.
Opposés à la volonté du Gouvernement de ficher un enfant de moins de 13 ans, nous proposons de supprimer la fin de l'article L. 633-2, après le mot « fichier ».
Avis défavorable. L'article L. 633-1 précise bien qu'un mineur de moins de 13 ans ne peut pas être inscrit au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes (FIJAIT). Au-delà de cet âge, les mineurs pourront être inscrits, de manière exceptionnelle. Cela me semble légitime compte tenu de la nature de l'infraction.
La Commission rejette les amendements.
Elle est saisie des amendements identiques CL223 de M. Ugo Bernalicis et CL300 de M. Jean-Michel Clément.
Il s'agit de garantir le droit à l'oubli aux mineurs et aux jeunes majeurs inscrits dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes.
Ici encore, la précision ne semble pas utile. La disposition est satisfaite par l'article L. 633-3, qui n'exige pas que l'effacement fasse l'objet d'une demande au procureur dès lors que les conditions qu'il fixe sont remplies.
Même avis que le rapporteur. Ces mentions sont superfétatoires.
D'après le rapporteur, une fois les conditions réunies, aucune demande ne serait nécessaire pour retirer l'inscription. Dans les faits, il n'en va pas ainsi. Il arrive souvent que l'on ne soit pas retiré d'un fichier où l'on ne devrait plus figurer. Préciser dans la loi que l'on peut demander à ne plus y être et en obtenir la confirmation me paraîtrait la moindre des choses. Ce n'est pas une demande extraordinaire que nous formulons là.
La Commission rejette les amendements.
Elle examine, en discussion commune, les amendements CL221 de M. Ugo Bernalicis et CL181 de Mme Cécile Untermaier.
S'agissant du fichier de traitement d'antécédents judiciaires (TAJ), les mineurs et les jeunes majeurs de moins de 21 ans doivent pouvoir bénéficier du droit à l'oubli. L'inscription les poursuit comme un marqueur indélébile et, finalement, un destin judiciaire devient un destin social. Au regard des objectifs que nous poursuivons, en particulier de réinsertion des mineurs qui ont pu commettre des infractions pendant leur vie, c'est un problème.
Le droit à l'oubli a été demandé de manière pressante par les juges des enfants. Je voudrais savoir comment il s'organise s'agissant du fichier TAJ.
Les majeurs ont, comme les mineurs, un droit à la rectification des données, mais il n'a pas à être prévu dans le code de la justice pénale des mineurs dont nous traitons ici.
De nombreuses personnes restent fichées au TAJ pendant des années pour des faits qu'elles ont commis lorsqu'elles étaient mineures. Si l'on estime qu'il y a une excuse de minorité et des conditions particulières pour les mineurs, on doit en tirer les conclusions : l'inscription ne doit pas poursuivre les auteurs toute leur vie. Si l'on n'est pas dans ce registre, et que l'on garde une trace au cas où, on est dans une autre logique.
Pour ma part, j'essaie de m'inscrire dans la logique des principes qui ont été établis au début du texte, dans lesquels je me retrouve. Or, quand on rentre dans le détail, notamment sur la question du fichage, cela devient problématique, surtout connaissant les velléités de certains d'ériger en objectif politique la surveillance par les drones, les caméras-piétons, les caméras dans l'espace public et le croisement par le biais d'algorithmes avec le fichier TAJ.
La Commission rejette successivement les amendements.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL368 à CL372 du rapporteur.
Articles de l'ordonnance :
Suivant l'avis du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL24 de Mme Marie-George Buffet.
Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL373 et CL374, et l'amendement de coordination CL375 du rapporteur.
La Commission examine l'amendement CL205 de M. Erwan Balanant.
Le présent amendement vise à demander au Gouvernement de remettre au Parlement, au plus tard deux ans après l'entrée en vigueur de l'ordonnance, un bilan de l'application du nouveau code de la justice pénale des mineurs. Le rapport permettra de mesurer les avancées permises et de remédier aux éventuelles difficultés rencontrées
Le texte introduit, en effet, un changement important dans la procédure et de nouveaux délais. Nous devons pouvoir le faire évoluer si nous voyons que ces dispositions ne fonctionnent pas dans les deux ans.
Au regard de l'ampleur de la réforme, il paraît légitime qu'elle puisse être évaluée en profondeur après un délai de mise en œuvre de deux ans. Avis favorable.
La commission effectue un rapport d'évaluation d'une loi après trois ans. Ce rapport permettra donc de nourrir ses travaux.
La Commission adopte l'amendement.
Elle examine l'amendement CL198 de M. Erwan Balanant.
Cet amendement de repli vise à demander un rapport sur le respect du délai de trois mois pour tenir l'audience sur la culpabilité du mineur. Mais j'imagine que je n'obtiendrai pas un avis favorable pour trois rapports, mon prochain amendement étant de même nature…
Un rapport semble, en effet, suffisant. Avis défavorable sur cet amendement ainsi que sur le CL199.
L'amendement CL198 est retiré, de même que l'amendement CL199 de M. Erwan Balanant .
La Commission examine l'amendement CL6 de M. Éric Ciotti.
Cet amendement d'Éric Ciotti vise à demander au Gouvernement un rapport relatif à l'évaluation et l'utilité du service citoyen pour les mineurs délinquants de 16 ans – vu que vous venez d'en refuser deux à notre collègue Balanant, j'espère que vous allez accepter celui-là.
Avis défavorable : je ne suis pas sûr qu'une telle demande s'inscrive dans le cadre du présent texte.
J'eusse aimé vous faire plaisir, monsieur Savignat, mais le service citoyen ne relève en rien du code de la justice pénale des mineurs, ce qui me contraint à vous dire que je suis défavorable à cet amendement.
La Commission rejette l'amendement.
Elle examine l'amendement CL164 de Mme Cécile Untermaier.
Je m'étonne que d'autres amendements similaires n'aient pas été déposés : tous les professionnels, notamment les avocats et les juges des enfants, ont fait valoir qu'il était nécessaire de reporter la date d'application du texte. J'ai bien compris, monsieur le Garde des sceaux, que vous nous incitiez à aller de l'avant, mais, entre les stocks d'affaires à traiter et les effets conjugués de la crise sanitaire et des grèves, la situation est tout de même extrêmement dégradée dans les juridictions et un délai aussi réduit pour passer de l'ancienne procédure à la nouvelle peut faire peur. Certes, vous avez dit que vous alliez dépêcher dans les juridictions des assistants pour aider à écouler les stocks, mais nous ne sommes toujours pas prêts en matière informatique ; CASSIOPEE, la chaîne applicative supportant le système d'information oriente procédure pénale et enfants, ne fonctionne pas. Il serait plus raisonnable de reporter au 1er octobre 2021 – c'est-à-dire demain – la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance. Cela permettrait de préparer la réforme avec plus de sérénité.
Avis défavorable. L'entrée en vigueur de cette réforme a déjà été reportée, notamment pour satisfaire à l'engagement pris par Nicole Belloubet d'organiser préalablement un débat parlementaire – ce qui s'est avéré fort utile. En outre, l'audition du ministre à l'ouverture de nos travaux a fait très clairement apparaître que les moyens nécessaires avaient été mis en place pour que la réforme puisse être engagée au 31 mars 2021. La Chancellerie a porté une attention particulière aux juridictions dans lesquelles le stock était important. Je crois qu'il ne faut plus retarder la mise en application de la réforme.
Ce qui pose problème dans l'ordonnance de 1945 telle que nous souhaitons la modifier, c'est qu'en aucune matière elle ne fixe un délai. Certaines procédures, comme, je l'ai indiqué hier, les mises en examen, ne sont pas encadrées temporellement, d'où un stock endémique. Il faut rapidement mettre un terme à cette logique.
Nous avons évidemment pris les choses à bras-le-corps. D'abord, une circulaire a été envoyée aux services pour assurer le déstockage – nous en reparlerons. Ensuite, des moyens nouveaux ont été apportés ; les trames principales de CASSIOPEE seront prêtes pour l'entrée en vigueur de la réforme.
Enfin, j'ai demandé une inspection des services : il en ressort qu'il y a, en France, une dizaine de juridictions qui sont fragiles – nous allons les aider. S'y ajoute ce que j'ai déjà signalé, notamment l'accroissement du nombre de magistrats et les embauches au sein de la protection judiciaire de la jeunesse. Bref, nous souhaitons que l'on ne retarde plus l'entrée en vigueur d'une réforme que j'ai la faiblesse de penser indispensable pour les mineurs et que l'on attend depuis longtemps – on a commencé à y travailler en 2008, je crois.
Des magistrats, et non des moindres, appellent pourtant à la reporter. Je pense en particulier au président du tribunal judiciaire de Bobigny – qui a été, je crois, directeur des services judiciaires du ministère et qui doit connaître quand même un peu les enjeux internes et les moyens disponibles : quoique favorable à la réforme, il a déclaré publiquement que, dans les conditions actuelles, les délais étaient intenables.
Quand il a été auditionné par la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire, Stéphane Noël a déploré que la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice prévoie une dématérialisation des procédures alors que le logiciel n'était toujours pas prêt. Il a fallu reporter à deux reprises, par décret, la date d'application, alors que nous avions obtenu toutes les garanties et toutes les promesses de la part de la ministre, que ce soit en commission, dans l'hémicycle ou même par voie de presse !
Même si je suis contre vos réformes, j'estime que vous pourriez vous donner le temps nécessaire pour qu'elles fonctionnent, parce que sinon, cela crée du ressentiment ; ce fut le cas pour les cartes grises, c'est le cas pour les permis de conduire. S'accorder six mois de plus, ce n'est pas grave, si cela permet de faire en sorte que ça se passe bien !
Ces six mois de plus, nous les avons déjà eus, puisque la réforme a déjà été reportée. Vous ne voulez pas entendre ce que je dis, mais comme aucun délai n'est fixé, le stock est endémique : si vous attendez qu'il se résorbe pour mettre en œuvre la réforme, elle ne se fera jamais !
Vous évoquiez le président du tribunal judiciaire de Bobigny, qui était, effectivement, il y a peu de temps encore, à la Chancellerie : ce que demandent les juridictions, ce sont des moyens. Or, je ne sais pas si vous l'avez voté, monsieur Bernalicis, mais le budget que nous avons obtenu pour le ministère va permettre d'embaucher, comme jamais cela n'a été le cas depuis vingt-cinq ans, des personnels pérennes et non pérennes. Certains seront au boulot dès le 1er janvier.
Bien sûr, les juridictions ont besoin de moyens ; bien sûr, il ne suffit pas d'avoir une loi : encore faut-il qu'elle puisse être appliquée. Il ressort de l'inspection que j'ai sollicitée, précisément parce que ces questions sont importantes, que dix juridictions sont en situation de fragilité. Nous allons y remédier – je ne peux rien vous dire de plus.
La Commission rejette l'amendement.
Article unique du projet de loi (précédemment réservé) : Ratification de l'ordonnance
La Commission examine les amendements de suppression CL22 de Mme Marie-George Buffet et CL73 de M. Ugo Bernalicis.
Le véritable objectif politique qui sous-tend cette réforme n'est autre qu'une entrée en application rapide pour apurer les stocks par une gestion des flux efficace. Je ne suis pas d'accord avec cela. Vous annoncez des moyens supplémentaires, mais est-ce que votre budget en consacre dans ce domaine, monsieur le ministre ? Non.
Pas à hauteur de 8 %, en tout cas, ni dans les proportions que vous indiquez. En matière judiciaire, l'essentiel de l'augmentation de votre budget est consacré aux frais d'expertise – 127 millions pour être précis –, mais pas au recrutement de magistrats. Dans le budget pour 2021, 50 recrutements supplémentaires de magistrats sont inscrits, contre 100 en 2020. Vous êtes en ressac ! Je ne fais que lire les chiffres qui figurent dans le projet annuel de performance – ou alors on nous ment, ce qui ne serait pas étonnant.
Ce projet de réforme, par des délais contraints de procédure, conduira les juges des enfants à ne pas prendre le temps d'instaurer des mesures éducatives et à s'orienter rapidement vers des peines. Certes, pour le mineur confronté pour la première fois à la justice pour enfants, à qui ce seul électrochoc suffira à ce qu'on ne l'y revoit plus, cela ne changera rien ; cela ira même peut-être un peu plus vite, effectivement. Mais, pour tous les autres, les paliers dans l'escalade judiciaire seront franchis plus rapidement et on arrivera plus vite vers des mesures punitives. Voilà en quoi je considère ce texte comme plus répressif – bien que l'on prétende le contraire – que l'ordonnance de 1945, et pourquoi mon groupe s'y opposera, d'autant plus que tous nos amendements ont été rejetés.
Je suis évidemment très défavorable à cet amendement. La réflexion sur la codification de l'ordonnance de 1945 a commencé il y a deux ans. Dans le cadre de la mission d'information sur la justice des mineurs, conduite par Cécile Untermaier et moi-même, un vrai travail parlementaire a été effectué, les professionnels ont été auditionnés et consultés, contrairement à ce que vous dites. Vous voudriez, par votre amendement, supprimer non seulement ces deux ans de travail, mais également les plus de onze heures que nous venons de passer en commission à examiner 400 amendements, en présence du ministre et des parlementaires de chaque groupe qui se sont mobilisés pour donner au débat un caractère constructif. Toutes les questions ont pu être abordées et débattues : le discernement, l'excuse de minorité, la détention provisoire ou la garde à vue...
Je ne peux pas, d'un simple amendement de suppression, vous laisser remettre en cause plus de deux ans de travail à la recherche d'une réforme ambitieuse. Le débat parlementaire est souhaitable et vous avez le droit de ne pas être d'accord, mais, de grâce, ne parlez pas de suppression ! Ce n'est ni raisonnable ni respectueux du travail de l'ensemble des groupes.
Les bras m'en tombent ! Un travail colossal a été effectué, beaucoup de professionnels ont été consultés. Vous arrivez, sabre au clair, et il faudrait retirer cette réforme à laquelle nous croyons et pour laquelle nous avons beaucoup échangé. Ma porte est toujours ouverte, beaucoup de parlementaires le savent, non pas à l'obstruction mais à la discussion constructive ; elle l'est également pour vous, monsieur Bernalicis. À vous entendre, rien n'est bien fait, rien ne va. Vous n'apportez pas grand-chose de constructif, rien que de la critique nihiliste. Je suis totalement défavorable à votre amendement.
Les amendements de suppression font un très mauvais procès à ce projet de code de la justice pénale des mineurs. Ce texte n'est pas tombé du ciel du jour au lendemain ; il résulte d'un travail de fond, mené depuis de longues années, avec beaucoup d'écoute. Je ne suis pas sûre que toutes les personnes qui y ont travaillé pourraient être réunies dans une même salle !
Cette réforme ne serait là que pour gérer les flux, dites-vous…
Permettez-moi de répondre, je ne vous ai pas interrompu.
Les flux existent de manière endémique et ce n'est pas en reportant cette réforme que l'on changera fondamentalement les choses. En revanche, elle est de nature à redonner du sens à la justice pénale des mineurs. D'aucuns ne sont certes pas favorable à cette réforme, mais tout le monde s'accorde à dire que l'ordonnance de 1945, en l'état, n'est pas lisible et est vraiment en perte de sens.
Je ne partage pas votre analyse d'une escalade judiciaire. Je me préoccupe, comme vous, je pense, de ces mineurs qu'on voit revenir devant la justice, encore et encore, parce qu'ils sont inscrits dans des problématiques de délinquance qui, tel le trafic de stupéfiants, les prend dans un engrenage dont il est très difficile de les faire sortir. Cela demande une approche sur mesure. La réactivité en matière de culpabilité que nous proposons n'a rien d'une escalade : elle est importante pour la société et pour la victime, mais aussi pour le mineur, car elle envoie un message clair qui a un sens.
Le suivi éducatif est au cœur de la procédure : c'est du pragmatisme – ce n'est pas un hasard si la gauche et la droite y ont pensé. Le mineur est suivi depuis la période éducative jusqu'au prononcé de la peine qui est assortie de mesures éducatives – ce n'est pas non plus une escalade judiciaire. Dans la pratique, le juge pourra adapter la réponse vers plus ou moins de répression, en fonction des efforts du jeune.
Faisons confiance à nos magistrats, à nos éducateurs, qui connaissent les enfants. Ils exercent un métier difficile mais très beau, et je tiens à saluer leur travail et leur dévouement.
Cet amendement a le mérite de ramener le débat sur l'article 38 de la Constitution. J'étais, et je l'assume, de ceux qui critiquaient la démarche du Gouvernement de choisir de légiférer par ordonnance sur le code de justice pénale des mineurs. J'admets aujourd'hui que ce texte constitue une avancée positive, particulièrement en matière de procédure, et qu'il a été élaboré en concertation.
Je réitère cependant le regret, que j'avais formulé lors de la discussion générale, qu'il ne s'agisse que d'un code de justice pénale des mineurs et que nous ne soyons pas allés plus loin – faute de temps, m'a-t-on répondu. Le temps, nous l'aurions eu, mais le Gouvernement a fait le choix de s'enferrer dans la procédure de l'ordonnance, dont le délai de six mois qui l'encadre rendait impossible l'examen de deux textes. Et nous voilà ici, près de deux ans plus tard. Nous aurions pu mettre tout ce temps à profit pour faire ce travail, le Parlement en est tout à fait capable ; il aurait même fait mieux, même si l'avancée en matière de justice pénale des mineurs est à saluer.
Je tiens à saluer le travail mené au sein de la commission des Lois, en particulier celui de la mission d'information que j'ai co-rapportée avec Jean Terlier. Dans l'ordonnance, on retrouve nos préconisations, avec la procédure beaucoup plus dynamique, l'excuse de minorité et la fixation de la responsabilité pénale des mineurs par présomption simple à 13 ans. Il s'agissait d'éléments importants. Lors de nos débats sur le projet de loi de programmation et de réforme pour la justice, j'ai regretté la demande en séance de Nicole Belloubet d'habiliter le Gouvernement à procéder par voie d'ordonnance. Il est vrai que tout a été fait pour en atténuer les effets unilatéraux, grâce notamment au groupe de travail, mais cela ne doit pas ouvrir, entre projet de loi et ordonnance, une troisième voie consistant à débattre des ordonnances en commission. Reste que le sujet était important et que la Chancellerie a fait son travail et a été au rendez-vous de la négociation.
Néanmoins, les professionnels soulignent qu'un peu de souplesse n'aurait pas dénaturé l'esprit et la philosophie du texte. Ils attendaient une date de report après mars ; je vous laisse juge de la possibilité de le faire. Il convient de travailler en confiance avec eux, car ce nouveau code ne va pas résoudre le problème de la délinquance. Il va simplement aider les magistrats à régler les questions qui se posent. Soyons à la fois humbles, optimistes, mais aussi confiants dans les moyens que vous allouerez à cette politique et qui sont la clé.
Je vais me retrancher derrière l'avis émis par le Défenseur des droits le 13 décembre 2019, après la publication de l'ordonnance : « le code multiplie les dérogations et exceptions, ce qui nuit à sa lisibilité, et restreint considérablement l'effectivité des principes affirmés ».
Je le répète, je suis d'accord avec ces principes. Je suis pour qu'ils soient appliqués et déclinés dans le code, et non pour que l'on multiplie les dérogations et les conditions de procédures qui contraignent le travail des juges. Vous nous l'avez dit, il faut leur faire confiance. Si vous leur faites confiance, pourquoi les contraindre dans des délais intenables ? Pourquoi les obliger à aller vers les procédures les plus répressives, car ce sont aussi les plus rapides ?
Enfin, les moyens, ce sont des magistrats, des avocats, des greffiers. Or ils ne sont pas au rendez-vous dans les tribunaux pour enfants. Ainsi, les greffiers ne sont pas affectés auprès des juges des enfants, mais au sein d'une juridiction, les redéploiements étant ensuite du ressort de la gestion interne.
Nos travaux parlementaires datent effectivement d'il y a plus d'un an. Nos collègues Terlier et Untermaier ont rédigé un excellent rapport d'information. Je note d'ailleurs, qu'ayant repris, dans un amendement, une de leurs propositions consistant à accroître la formation des magistrats des parquets pour mineurs et à envisager une spécialisation de ces magistrats sur le modèle des juges des enfants, je me suis fait vertement renvoyer dans les cordes – ce n'était pas important ! Ne croyez pas que je ne m'intéresse pas à ce que font les collègues : le cas échéant, j'en retire des propositions d'amendement. Nous avons également organisé un colloque et invité tous les parlementaires, y compris ceux de la majorité. Certains sont passés voir, d'autres ont regardé les vidéos. Tout le monde a travaillé, je ne le conteste pas.
Ce sont les conditions du débat qui sont problématiques : une journée et demie de discussions en commission, dans la précipitation, puis des débats étalés sur deux semaines et mélangés avec ceux relatifs au parquet européen. Cela va être complètement décousu et va nuire à la lisibilité de nos échanges ! Je vous rappelle que nous avons connu le même problème sur le projet de loi de programmation et de réforme pour la justice.
Monsieur le ministre, une consultation dont vous ne tenez aucun compte ne sert à rien, si ce n'est à faire de l'affichage. La plupart des organisations syndicales que vous avez reçues partagent le même constat : une concertation, ce n'est pas juste recevoir les gens, les saluer, acter le désaccord et se dire au revoir !
Nous avons examiné ce texte d'une seule traite, entre hier après-midi et cet après-midi. Vous ne pouvez donc pas dire que les débats sont décousus. Vous avez disposé de la parole autant que les autres, voire plus.
Monsieur le ministre, je vous remercie pour votre présence constante en commission.
La Commission rejette les amendements.
Elle adopte l'article unique.
La Commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.
La réunion se termine à 19 heures 10.
Membres présents ou excusés
En raison de la crise sanitaire, les relevés de présence sont suspendus.