La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Suite de la discussion d'une proposition de loi
Ce matin, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la proposition de loi, s'arrêtant à l'amendement n° 306 à l'article 1er .
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 306 .
Il vise à intégrer une sensibilisation à l'impact environnemental des choix technologiques à la formation mentionnée à l'article 1er . Cette sensibilisation apportera aux élèves des informations sur certaines technologies et leur permettra d'appréhender les implications, notamment environnementales, de choix technologiques souvent présentés uniquement sous le prisme du progrès, les questionnements environnementaux – émissions de gaz à effet de serre ou pollution des eaux, entre autres – et sociaux – conditions de travail, notamment – sous-jacents à ces choix technologiques étant écartés. De futures générations de citoyens pourront ainsi mobiliser leurs connaissances et leur ouverture d'esprit ; c'est bien à l'Éducation nationale de former des citoyens dotés d'un esprit critique aigu et aiguisé. Cela favorisera des débats plus raisonnés et réfléchis, par exemple sur la technologie 5G.
La parole est à M. Vincent Thiébaut, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, pour donner l'avis de la commission.
Vous demandez, cher collègue, que la question de l'impact environnemental des choix technologiques, notamment de la 5G, soit intégrée à la formation. Or l'article 1er prévoit déjà une sensibilisation aux conséquences environnementales des outils numériques ainsi qu'à la sobriété numérique. Cette définition relativement large englobe tous les sujets évoqués. Votre amendement étant pleinement satisfait, je vous invite à le retirer. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la transition numérique et des communications électroniques, pour donner l'avis du Gouvernement.
Même avis, monsieur le président.
J'entends vos arguments, monsieur le rapporteur. Quoi qu'il en soit, l'article 1er n'est pas très contraignant. Il relève plutôt de l'incantation, dans la mesure où nous n'avons pas de pouvoir sur les programmes d'enseignement. Si vous pensez que les arrêtés et décrets pris ultérieurement intégreront effectivement la notion d'impact environnemental, je retire l'amendement.
L'amendement n° 306 est retiré.
L'article 1er est adopté.
L'article 1er bis est adopté.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 307 .
Il vise à intégrer dans les formations d'ingénieur un module relatif à la réparation et au réemploi des produits, notamment de ceux comprenant des éléments électriques ou électroniques. La lutte contre l'obsolescence programmée passe notamment par la possibilité, pour chaque utilisateur, de faire réparer ses objets – qu'il s'agisse d'un smartphone ou d'un ordinateur, par exemple. Mais, comme l'explique le sociologue Razmig Keucheyan, les réparateurs ont disparu de notre pays : en dix ans, la moitié d'entre eux ont fermé boutique. Il est donc urgent de renforcer la formation à la réparation des biens, notamment électriques et électroniques, d'autant plus qu'un mouvement est en train de naître dans les centres-villes, celui des « repair cafés » où les réparateurs démontrent un engouement pour le partage de leur savoir-faire. Ce mouvement issu de la société doit être encouragé, développé et structuré.
Je ferai la même réponse que sur l'amendement précédent, car celui-ci est également satisfait. L'article 2 rend obligatoire la formation à l'écoconception des produits au sens large, qui intègre donc la notion de réparation. Je vous rappelle par ailleurs que la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite AGEC, imposera d'afficher les indices de réparabilité et de durabilité des appareils. Cela incitera les vendeurs à viser la meilleure note, avec les appareils les plus réparables. J'émets donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Même avis.
Certes, les appareils seront sans doute plus facilement réparables, mais à quoi cela servira-t-il si nous ne disposons pas de la main-d'œuvre qualifiée et formée pour les réparer ? Je maintiens l'amendement.
L'amendement n° 307 n'est pas adopté.
L'article 2 est adopté.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 330 .
Cet amendement de ma collègue Sandrine Le Feur vise à intégrer la formation à l'écoconception suivie par les ingénieurs dans la formation aux métiers intervenant sur l'ensemble de la chaîne de valeur des produits.
Cet amendement est pleinement satisfait lui aussi, puisque l'article 1er bis rend obligatoire la formation à l'écoconception de tous les étudiants de l'enseignement supérieur. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 330 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 271 .
Permettez-moi d'abord de saluer le travail des sénateurs, en particulier de Patrick Chaize qui est à l'origine de la présente proposition de loi. Je salue également le travail très constructif effectué par nos rapporteurs, tant en commission des affaires économiques, saisie pour avis, qu'en commission du développement durable et de l'aménagement du territoire.
On le sait : le sujet de la sensibilisation et de la formation à la préservation de l'environnement et de la biodiversité est un enjeu majeur. Il a fait l'objet de débats au sein de la Convention citoyenne pour le climat ainsi qu'à l'occasion de l'examen du projet de loi climat et résilience , qui en découle. La proposition de loi que nous examinons prévoit notamment de former les jeunes générations à la sobriété numérique. L'amendement que je propose vise à sensibiliser les enseignants aux enjeux liés à la réduction de l'empreinte environnementale du numérique et à un usage sobre des outils numériques. Il me semble que l'intégration de cette sensibilisation à la formation des enseignants doit être mentionnée dans le texte, afin que les jeunes générations soient ensuite elles-mêmes sensibilisées.
Nous avons eu ce débat en commission et l'idée est très intéressante, c'est vrai. Après une relecture attentive du texte, je constate toutefois que votre amendement est satisfait, cher collègue. Vous évoquez la formation des futurs enseignants. Ceux-ci seront un jour étudiants de l'enseignement supérieur et bénéficieront des formations rendues obligatoires par l'article 1er bis que nous avons voté, relatives notamment à l'écoconception et à la sobriété numérique. J'émets donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Je rappelle que la sensibilisation au respect de la protection de l'environnement figure déjà dans les missions générales des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation (INSPÉ). Il me semble donc que pour cette raison, ainsi que pour celle évoquée par le rapporteur, l'amendement est satisfait. Le Gouvernement en demande donc également le retrait et émettra, à défaut, un avis défavorable.
Compte tenu des explications de M. le rapporteur et de M. le secrétaire d'État, je retire mon amendement.
L'amendement n° 271 est retiré.
L'amendement n° 110 tend à sensibiliser les élus locaux à l'éco-utilisation des services numériques, notamment grâce à des formations, et l'amendement n° 109 concerne la sensibilisation de la fonction publique aux mêmes enjeux. Il me semble important que les élus locaux, mais aussi les fonctionnaires, soient exemplaires en la matière.
Au-delà du fait que ces amendements relèvent davantage du domaine réglementaire que législatif, j'aimerais apporter deux précisions. À la fin de l'examen du texte, nous étudierons l'article 26, que j'ai retravaillé à la suite notamment des auditions de représentants des collectivités territoriales. Nous y évoquerons la présentation de la stratégie numérique responsable dans les territoires, qui inclura l'accompagnement et la formation des agents publics et des collectivités territoriales dans ce domaine. Cela répond à la proposition formulée à l'amendement n° 110 .
Tout en partageant par ailleurs la préoccupation exprimée à l'amendement n° 109 , j'indique que le schéma directeur de formation des agents publics prévoit, pour la période 2021-2023, la formation obligatoire des cadres supérieurs aux enjeux écologiques et numériques et la structuration d'une offre de formation, sur ces mêmes sujets, à destination de l'ensemble des agents publics. Les deux amendements étant satisfaits, j'émets, à défaut de leur retrait, un avis défavorable.
Tout comme vient de l'indiquer M. le rapporteur, et tout comme je l'indiquais au sujet de l'amendement de M. Colas-Roy, nous partageons votre avis, monsieur Zulesi, sur le fait que la mauvaise utilisation des outils numériques est en partie liée à une formation insuffisante en premier lieu des développeurs, dont un trop grand nombre ne sont pas sensibilisés à l'économie du code. Cette sensibilisation n'est pas systématique dans les formations – je vois que le député Mahjoubi aimerait faire des commentaires à ce sujet ! – et nous aurions intérêt à ce qu'elle le devienne. La formation des utilisateurs, qui proposent des sites internet à leurs clients, est également insuffisante. Il est donc nécessaire d'améliorer la sensibilisation.
Néanmoins, comme l'a évoqué le rapporteur au début de son argumentaire, il me semble que ce sujet est trop spécifique pour relever de la loi : il relève plutôt des politiques de formation des fonctionnaires et des élus locaux. Il me semble d'ailleurs que l'Assemblée a voté un projet de loi relatif à la formation des élus locaux ce matin. Celle-ci a fait l'objet d'une ordonnance en janvier 2021, qui prévoit notamment la création d'un référentiel de formation. C'est dans ce cadre que nous devons mener les discussions pour intégrer le sujet de l'écoconception. Le Gouvernement avait apporté la même réponse aux amendements sur ce sujet qui avaient été déposés à l'occasion de l'examen du projet de loi climat et résilience. Au bénéfice de cette explication, je suggère le retrait des amendements.
M. le secrétaire d'État a pris le temps d'exposer la volonté du Gouvernement d'avancer sur ces sujets et je souhaite à cet égard mettre en lumière le travail réalisé par Amélie de Montchalin sur la formation des élus et surtout de la fonction publique. Dans ces conditions, je retire mes deux amendements.
M. Mounir Mahjoubi applaudit.
Je propose de renommer l'observatoire dont l'article 3 prévoit la création en supprimant le mot « recherche » de son intitulé. Ses missions ne seront en effet pas des missions de recherche mais d'analyse, visant à mesurer et quantifier les impacts positifs ou négatifs du numérique. Parler d'observatoire de recherche reviendrait à restreindre son champ de compétence.
L'amendement n° 303 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
J'estime que l'observatoire créé à l'article 3 devrait aussi s'intéresser aux impacts potentiels du numérique en matière de santé, notamment sur le développement des enfants et sur l'évolution des comportements que peut induire l'usage des nouvelles technologies. Les incidences sur la santé des adultes peuvent également susciter des inquiétudes, en ce qui concerne la vue mais également bien d'autres aspects physiologiques. L'observatoire pourrait aussi être le lieu d'une sorte de veille scientifique sur les connaissances de ce type.
Je salue votre volonté de voir la santé environnementale prise en compte, mais j'estime que les missions de cet observatoire ne doivent pas trop s'éloigner de celles définies par le texte, consistant à analyser et à quantifier les impacts du numérique sur l'environnement.
En tout état de cause, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) peut déjà être saisie sur les sujets que vous évoquez – elle a d'ailleurs rendu récemment, à la demande du Gouvernement, un rapport sur les effets potentiels du réseau 5G sur la santé.
Je vous invite par conséquent à retirer cet amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.
Même avis. Comme vient de le dire M. le rapporteur, une part importante du travail de l'ANSES consiste à produire des études portant sur les effets sanitaires des ondes électromagnétiques et, plus largement, de l'utilisation du numérique. Confier à l'observatoire des attributions similaires pourrait avoir pour conséquence de rendre les choses moins claires, voire de fragiliser l'ANSES, à laquelle il me paraît préférable de laisser la pleine autorité sur les sujets sanitaires.
L'amendement n° 292 est retiré.
Si nous sommes tout à fait d'accord sur le fait qu'il faut accélérer la transition numérique, nous estimons qu'il faut pour cela construire son acceptabilité sur le terrain – ce qui commence par l'adhésion citoyenne et celle des élus locaux, notamment des maires. Tel est l'objet de cet amendement, rédigé en partant du constat que les risques de nuisances – en particulier sanitaires – liées aux ondes électromagnétiques provenant de mâts d'antennes-relais, qui peuvent affecter la santé des humains et des animaux lorsqu'ils sont posés sur des failles telluriques, posent de sérieuses difficultés sur le terrain.
Il n'existe pas à ce jour de preuves scientifiques de ces effets, comme l'indique un récent rapport de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur l'impact des champs électromagnétiques sur la santé des animaux d'élevage, commandé – et je l'en remercie – par Mme la présidente de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. On peut y lire que « concernant les possibles effets directs du champ électromagnétique sur les animaux d'élevage, les données disponibles sont beaucoup trop limitées et obtenues avec des protocoles très différents : les experts n'ont pas pu conclure. […] Les experts ont donc recommandé la poursuite de l'effort de recherche à la fois sur la méthode et sur les sujets évoqués. »
C'est pourquoi, avec l'amendement n° 105 , nous proposons de prendre en compte, dans les études d'impact, les effets du choix du lieu d'implantation des mâts d'antennes-relais sur l'empreinte environnementale du numérique, afin de mieux prendre en compte les risques de nuisances pour la santé des humains et des animaux. S'il s'agit là d'un sujet complexe et très particulier, il me semble que la résolution de ce problème serait de nature à faciliter la transition numérique que nous attendons tous.
Cher collègue, je me demande si vous ne vous êtes pas trompé d'argumentaire…
Je salue la pugnacité dont vous faites preuve sur un sujet qui, je le sais, vous tient à cœur. Cependant, celui-ci fait déjà partie des attributions de l'ANSES, avec laquelle l'observatoire peut très bien collaborer afin d'approfondir la question qui vous préoccupe, et je ne pense donc pas souhaitable d'élargir les missions de l'observatoire. Cela dit, le sujet que vous évoquez mérite sans doute qu'on lui porte une attention particulière à l'avenir. Pour ce qui est de votre amendement, je souhaite son retrait et émettrai à défaut un avis défavorable.
Monsieur le député, il me semble que l'argumentaire que vous avez exposé aurait plutôt sa place dans le cadre de l'article 23, car l'article 3, que nous examinons actuellement, ne concerne que les missions de l'observatoire des impacts environnementaux du numérique, et non les effets des ondes électromagnétiques. Dans la mesure où votre amendement ne remet pas en cause le fait que l'ANSES doit rester le seul décisionnaire en matière de sécurité sanitaire, je vous invite à le retirer.
Je veux bien retirer mon amendement sous réserve que le travail scientifique se poursuive et que des réponses soient apportées sur le terrain, où l'on se trouve parfois confronté à de vraies situations de blocage. J'insiste sur le fait que la notion d'acceptabilité est importante si nous voulons poursuivre le développement numérique.
L'amendement n° 105 est retiré.
La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour soutenir l'amendement n° 204 .
Dans une étude de septembre 2020, l'ADEME, l'Agence de la transition écologique, a montré que, même en tenant compte des effets rebond, le télétravail, qui s'est largement développé au cours des derniers mois, a pour effet d'améliorer de 52 % la balance environnementale globale. L'amendement n° 204 , purement rédactionnel, vise à souligner les externalités positives du numérique sur l'environnement.
Nous avons déjà eu ce débat en commission et je dois dire que ma position a évolué en la matière. La nouvelle rédaction que vous nous proposez me semble en effet tout à fait pertinente et en cohérence avec la nécessité, que j'ai soulignée lors de la discussion générale, d'évaluer les gains procurés par le numérique, notamment sous la forme d'une baisse des émissions de gaz à effet de serre. Je suis donc favorable à cet amendement.
C'est un amendement essentiel, monsieur le président !
Sourires.
L'amendement n° 204 est adopté.
La parole est à M. Pierre-Alain Raphan, pour soutenir l'amendement n° 166 .
Il est toujours difficile de passer après le talentueux Éric Bothorel, qui vient de remporter un franc succès avec son amendement.
Sourires.
L'amendement n° 166 , de précision et de cohérence, a pour objet d'inviter l'observatoire à étudier les gains potentiels apportés à la transition écologique et solidaire par l'intelligence artificielle. Dans une étude de la société de conseil PWC de novembre 2019, intitulée « Bâtir un avenir durable grâce à l'intelligence artificielle », on peut lire que le recours à l'intelligence artificielle (IA) pour des applications environnementales « pourrait contribuer à hauteur de 5 200 milliards de dollars à l'économie mondiale en 2030, soit une augmentation de 4,4 %. »
Selon la même étude, ce recours permettrait également de créer 40 millions d'emplois et de participer à la lutte contre le changement climatique – on pourrait, à l'horizon de 2030, réduire de 4 % les émissions mondiales de gaz à effet de serre, soit l'équivalent des émissions annuelles de l'Australie, du Canada et du Japon.
Je me réjouis de constater qu'un expert comme M. Bothorel approuve les termes de cette analyse… Au demeurant, mon amendement est conforme à la volonté exprimée par le Président de la République, le Gouvernement et la majorité. J'ose donc espérer qu'il sera adopté par notre assemblée.
Je vous remercie, cher collègue, pour cet amendement qui n'est assurément pas né d'une intelligence artificielle. Cela dit, si nous créons aujourd'hui cet observatoire, c'est en raison de la difficulté à laquelle nous sommes confrontés de disposer de référentiels communément admis, et même d'outils d'évaluation. Assigner dès le départ des missions très précises à cet observatoire, alors que celle consistant à quantifier l'impact du numérique sur l'environnement est déjà un véritable défi, reviendrait à le soumettre à une contrainte excessive. Laissons-le dans un premier temps s'organiser et définir ses référentiels : rien ne l'empêchera d'étudier les effets de l'intelligence artificielle. Demande de retrait, ou à défaut avis défavorable.
J'avais initialement quelques réserves vis-à-vis de cet amendement, car je ne voyais pas ce qui pouvait justifier de citer l'un des domaines du numérique, à savoir l'intelligence artificielle, en laissant penser que les autres domaines, tel le cloud, se trouvaient exclus. Cela étant, j'admets que sa rédaction est assez ouverte et compte tenu de l'excellente défense de votre amendement citant la société PWC, j'émets un avis de sagesse.
L'amendement n° 166 est adopté.
La parole est à M. Pierre-Alain Raphan, pour soutenir l'amendement n° 168 .
C'est sans doute grâce aux ondes positives que dégage M. Bothorel que mon précédent amendement a été adopté, aussi lui demanderai-je de rester près de moi le temps que je défende l'amendement n° 168 .
Sourires.
Il vise à remplacer les termes « transition écologique et solidaire » par l'expression « développement durable », puisque cette notion est clairement définie à l'article L.110-1 du code de l'environnement.
Cette précision permet de clarifier les finalités attendues, à savoir la lutte contre le changement climatique ; la préservation de la biodiversité, des milieux et des ressources ainsi que la sauvegarde des services qu'ils fournissent et des usages qui s'y rattachent ; la cohésion sociale et la solidarité entre les territoires et les générations ; l'épanouissement de tous les êtres humains ; la transition vers une économie circulaire.
Vous l'aurez compris, cet amendement vise à mettre les nouvelles technologies au service des objectifs de développement durable, les ODD, chers à notre collègue Lambert qui se bat au quotidien pour cette cause.
Les termes : « transition écologique et solidaire » me paraissent préférables, car plus précis que l'expression : « développement durable ». J'émets donc un avis défavorable à cet amendement.
Malheureusement pour vous, monsieur le député, je crois que le rapporteur a raison. Je vous demanderai aussi de bien vouloir retirer votre amendement. L'expression retenue dans la proposition de loi est plus précise.
C'est celle que je proposais, déjà incluse dans le code de l'environnement, qui me paraissait plus précise. Ce sont deux visions différentes et nous sommes là pour débattre, ce n'est pas grave. Toutefois, j'ai bien compris que le Gouvernement était bien dans l'état d'esprit de mettre les nouvelles technologies au service du développement durable et pour ne pas alourdir cette future grande loi, je vais retirer mon amendement.
L'amendement n° 168 est retiré.
Je propose de confier à l'observatoire le soin d'élaborer une définition de la sobriété numérique. Nous utilisons régulièrement cette notion, y compris dans ce texte de loi, et il me semble nécessaire de disposer d'une définition claire et compréhensible de tous.
L'amendement n° 279 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 297 .
Cet amendement, s'il est adopté, permettra à l'observatoire créé par cet article de disposer d'une plus grande maîtrise de ses objets d'études. Ses missions sont déjà clairement définies à l'alinéa 1 et il ne nous paraît pas utile de spécifier dans la loi le type d'études et d'analyses qu'il devra mener. Nous proposons donc de supprimer l'alinéa 2.
Cet amendement de mon collègue Anthony Cellier propose que les travaux de l'observatoire soient rendus publics de façon que les citoyens puissent se les approprier.
Avis favorable, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement de cohérence rédactionnelle.
Même avis.
Le sous-amendement n° 340 est adopté.
L'amendement n° 159 , sous-amendé, est adopté.
Nous proposons d'élargir la composition de l'observatoire en intégrant des représentants des citoyens. Il serait utile qu'ils soient associés à ses travaux qui devront être effectués en toute transparence.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 112 .
Mon amendement, proche du précédent, vise à prendre en compte les associations environnementales pour assurer l'indépendance de l'observatoire.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 342 et donner l'avis de la commission sur les amendements en discussion commune.
Les effets environnementaux du numérique recouvrent un large champ et il me semble important de laisser à l'observatoire la possibilité de choisir les chercheurs et les personnalités qualifiées auquel il fera appel en fonction des études ou analyses à mener. Mon amendement n° 342 offre davantage de latitude à l'ADEME et à l'ARCEP – l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes et de la distribution de la presse – que les amendements de Mme Sage et à Mme Jourdan qui sont trop restrictifs. Je leur demanderai donc de bien vouloir les retirer, à défaut mon avis sera défavorable.
Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements en discussion commune ?
Favorable à l'amendement du rapporteur ; demande de retrait ou avis défavorable pour les deux autres.
Les associations environnementales pourront-elles faire partie des personnalités qualifiées auxquelles l'observatoire fera appel, monsieur le rapporteur ?
Il est important de les associer à ces travaux, notamment parce qu'elles procèdent à des opérations de collecte de données environnementales. Le problème que soulignait M. Daniel dans son amendement, par exemple, n'aurait pas pu être reconnu sans ce travail mené par les associations, qui soumettent à discussion dans l'espace public les informations qu'elles recueillent.
Mon amendement est avant tout un amendement d'appel. L'observatoire est un organisme de recherche appelé à mesurer les conséquences environnementales du numérique et j'espère bien que parmi les personnalités qualifiées figureront des chercheurs.
Il faut que ses travaux soient vulgarisés afin de conduire les citoyens à modifier leurs comportements de consommation et d'usage des outils numériques et d'encourager l'adoption de nouveaux modèles. D'où l'intérêt d'associer des représentants de citoyens qui faciliteront le dialogue avec la société civile et l'aideront à donner une traduction concrète à ses travaux.
Cela dit, je veux bien retirer mon amendement, car je suis favorable à celui de Mme Jourdan comme à celui du rapporteur.
L'amendement n° 289 est retiré.
Ces amendements me donnent une belle occasion de revenir sur le terme de « personnalités qualifiées ». Les gens qui sont au contact des réalités du terrain en font aussi partie. Il ne s'agit pas seulement d'avoir des diplômes ou des connaissances scientifiques au sens classique. La science empirique, autrement dit la science des faits, importe aussi.
Ma question s'adresse davantage à M. le secrétaire d'État : l'observatoire aura-t-il vocation à mesurer l'impact du secteur de la logistique ? En 2015, Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, et Ségolène Royal, alors ministre de l'écologie, m'ont confié la présidence de la commission nationale de la logistique qui, en mars 2016, a présenté une proposition de stratégie nationale dénommée « France logistique 2025 » dont deux des cinq chapitres portaient sur le numérique et sa contribution à la transition écologique au service d'une performance logistique.
Nous avons besoin, je le dis depuis plusieurs années, d'améliorer le traitement des données pour mettre fin à la mobilité désordonnée des marchandises. Rappelons que la France est extrêmement mal classée en matière de performances logistiques : elle occupe le seizième rang mondial et le huitième rang européen. Et cela est dû à sa faiblesse dans le déploiement du numérique, particulièrement dans les PME et chez les artisans, et dans le traitement des informations qui, s'il était optimisé, faciliterait l'organisation de la circulation des marchandises.
Nous disposons là d'un formidable levier et c'est la raison pour laquelle je demande à M. le secrétaire d'État s'il prévoit de s'orienter vers les experts, encore opérationnels, bien évidemment, qui ont œuvré au sein de la mission que m'avait confiée Emmanuel Macron ?
Bien évidemment, la logistique et, de manière plus générale, la mobilité sont des secteurs où les gains en matière environnementale sont exceptionnels – je renvoie à ce que j'ai dit sur l'intérêt qu'il y a à mettre de l'information dans un système. J'oserai même dire qu'un gain d'efficacité de 15 % reviendrait à compenser toute la pollution liée au développement des antennes et à la multiplication des équipements. Ce sont donc des secteurs prioritaires qu'il faut mieux cerner.
Il y a d'ailleurs une forme d'hémiplégie dans la réflexion sur la pollution issue du numérique. Les gains potentiels sont très compliqués à mesurer car cela suppose d'intégrer une multitude de données dans les calculs. Cela conduit à se focaliser sur la pollution émise par les antennes et à prendre moins en compte certains éléments plus difficiles à identifier. Il est donc urgent de pouvoir quantifier ces bénéfices liés au déploiement du numérique. Parmi ces contributions, pour reprendre un terme cher à Éric Bothorel, la logistique occupe une place essentielle.
L'amendement n° 112 n'est pas adopté.
L'amendement n° 342 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 288 .
Nous venons d'indiquer que nous voulions laisser l'ADEME et l'ARCEP choisir la composition de l'observatoire. Par cohérence, nous proposons de supprimer la phrase de l'alinéa 3 précisant que la nomination de ses membres par le Gouvernement est renvoyée à un décret.
L'amendement n° 288 est adopté.
L'article 3, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Véronique Riotton, pour soutenir l'amendement n° 88 .
Le texte attribue un rôle important à l'ARCEP comme l'ADEME. Nous considérons toutefois que c'est cette dernière, en tant qu'agence de la transition écologique, qui devrait être désignée comme chef de file afin de coordonner les actions entreprises, compte tenu de la multiplicité des données numériques.
L'ADEME occupe une place centrale mais l'ARCEP travaille aussi sur ces sujets, notamment en élaborant un baromètre environnemental du numérique prévu par l'article 5 ter du projet de loi climat et résilience.
Par ailleurs, l'ARCEP mène actuellement une étude, conjointement avec l'ADEME, pour quantifier l'empreinte du numérique sur l'environnement. C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons complété en commission l'article 3 de manière que l'observatoire des impacts environnementaux du numérique soit rattaché à ces deux structures.
En outre, en matière de suivi des normes environnementales du numérique, nous pourrions aller plus loin. Pourquoi ne pas prendre également en compte la réduction de la consommation énergétique des bâtiments tertiaires, objectif qui figure dans la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ELAN) ? Cet enjeu qui vous est familier est en effet directement lié à l'empreinte environnementale du numérique puisque les bâtiments tertiaires abritent de nombreux équipements numériques.
Je comprends votre démarche, madame Riotton, mais je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 88 n'est pas adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 214 .
Il vise à supprimer l'article 4, qui introduit une formulation redondante à l'article L. 225-102-1 du code de commerce. Ce dernier porte en effet sur la totalité des enjeux sociaux et environnementaux des biens et des services fournis par les entreprises qui entrent dans le champ de l'obligation de déclaration de performance extrafinancière, et permet donc déjà de traiter les incidences environnementales des biens et des services numériques utilisés par les entreprises.
L'amendement n° 214 est adopté ; en conséquence, l'article 4 est supprimé.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 114 .
Il vise à intégrer la question de l'impact du numérique dans le dialogue social au sein des entreprises. J'avais déjà présenté cet amendement en commission et la réponse qui m'avait été opposée était que cette question ne relève pas du ressort des comités sociaux et économiques (CSE).
J'ai souhaité le redéposer car je considère que la question des effets du numérique peut tout à fait concerner le dialogue social et participe de l'information et de la sensibilisation des représentants du personnel.
Je ferai la même réponse qu'en commission : ce n'est pas l'objet du comité social et économique que de se pencher sur ces questions, d'autant plus que l'article du code du travail que vous proposez de modifier concerne les conditions de travail et les mesures de nature à affecter l'évolution des effectifs et la durée du travail, ce qui n'a pas de lien avec le sujet. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 114 n'est pas adopté.
Cet amendement vise à rétablir l'article 5 de la proposition de loi qui créait un crédit d'impôt à la numérisation durable des petites et moyennes entreprises, afin de leur permettre de couvrir 50 % des dépenses relatives à l'acquisition d'équipements numériques reconditionnés issus d'activités de préparation à la réutilisation et au réemploi, mais aussi des dépenses liées à la réalisation d'études destinées à mesurer l'impact environnemental des services numériques.
À l'heure actuelle, seules 63 % des TPE françaises disposent d'un site internet contre 91 % en Allemagne. Le groupe Les Républicains regrette la suppression de cet article en commission et propose de le rétablir tel qu'il a été rédigé par le Sénat.
M. le rapporteur a justifié cette suppression par l'existence d'aides à la numérisation instaurées afin d'aider les PME à faire face à la crise sanitaire. Cependant, ces aides sont limitées dans le temps et ne concernent que les dépenses de numérisation ou de diagnostic numérique. Elles n'encouragent nullement une consommation vertueuse.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 113 .
Cet amendement vise le même objectif de rétablissement de l'article 5. Concernant l'argumentation de Mme Duby-Muller, notre groupe estime possible de combiner subventions et crédit d'impôt.
Ce sujet a déjà été évoqué en commission ; malheureusement pour vous, mon avis n'a pas évolué…
…et je reste tout à fait défavorable à cette mesure pour plusieurs raisons.
La première, c'est qu'un ensemble de dispositifs existent déjà pour accompagner les entreprises, notamment en matière de numérisation. Nous l'avons constaté pendant la crise sanitaire, ces aides ont permis aux TPE et aux PME exerçant des activités commerciales de s'équiper en outils pour favoriser le click and collect ou le e-commerce.
Par ailleurs, je le dis clairement, nous n'avons pas les moyens actuellement de créer un tel dispositif ni de le contrôler sur le terrain. L'observatoire aura pour objectif de proposer des référentiels et des outils de mesure permettant de préciser la notion de sobriété numérique, pour laquelle nous ne disposons pas encore de définition exacte.
Que risque-t-il de se passer si nous instaurons un crédit d'impôt ? Nous créerons un appel d'air chez les prestataires informatiques qui iront voir leurs clients avec un discours du genre : « Tu dégages des impôts. Je te rachète une partie de ton parc et je te revends du matériel ». Nous inciterons ainsi à une surconsommation de matériels et de prestations, sans aucune capacité d'évaluation quant à leur pertinence, d'autant que l'expression « numérique durable » n'est pas précisément définie.
Je suis donc tout à fait défavorable à ce crédit d'impôt et je suis surpris qu'il soit défendu par le groupe Les Républicains, qui est très sensible à l'équilibre du budget de l'État et à la question de la dette, alors que ce dispositif entraînerait un véritable appel d'air et un gaspillage de l'argent public.
Même avis.
Je partage pleinement l'analyse du rapporteur, même si je suis surpris de cet avis. Je ne suis pas étonné en revanche que le groupe Socialistes et apparentés et le groupe Les Républicains veuillent ajouter de nouveaux crédits d'impôt : on a pu voir le succès du crédit impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui prétendait créer un million d'emplois ! Lorsqu'on accorde des crédits d'impôt aux entreprises sans aucune garantie ni sans aucun contrôle, c'est de l'argent public qui est très mal utilisé et qui disparaît. Je me réjouis donc que le Gouvernement et le rapporteur aient conscience que les crédits d'impôt ne sont pas nécessaires dans ce cadre, et que nous nous y opposions.
J'ai omis de préciser que ce crédit d'impôt s'adresse aux TPE et aux PME…
…pour une raison très simple : pour accéder aux subventions existantes, il faut disposer d'une logistique que n'ont pas forcément les petites entreprises. Cet amendement cible précisément ce type d'entreprises, qui ne peuvent pas accéder facilement aux subventions accordées.
Les amendements de ma collègue Aina Kuric qui seront examinés ensuite sont assez similaires et je vous propose de les évoquer dès à présent. Ce crédit d'impôt est en phase avec ce qui est proposé à l'article 14 de la proposition de loi, qui prévoit l'application d'un taux réduit de TVA. Si j'ai bien entendu les argumentaires de ce matin, cette TVA réduite ne pourra entrer en vigueur tant que l'Europe ne se sera pas prononcée sur le sujet. De ce fait, n'aurions-nous pas intérêt à aider les petites entreprises qui travaillent dans le secteur du reconditionnement ?
Je remercie M. le secrétaire d'État de son intervention tout à l'heure sur le sujet de la logistique notamment.
Je me permets de citer les propos d'Emmanuel Macron, alors ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, dans le cadre de la stratégie France logistique 2025 qu'il a présentée en Conseil des ministres en mars 2016, avec une ambition très claire : « Il s'agit de créer les conditions de la performance des PME, par la promotion des meilleures pratiques, afin qu'elles s'insèrent à tous les niveaux de la chaîne logistique. En effet, la majorité des PME n'ont pas accès aux outils et techniques de gestion performante de l'ensemble des flux logistiques et à des financements pour des investissements opérationnels. » C'était en mars 2016, nous sommes en juin 2021 : il serait peut-être temps d'appliquer ce qui avait été déclaré à l'époque.
Ensuite, comme l'a rappelé ma collègue Chantal Jourdan – je pense que c'est de nature à faire changer d'avis notre collègue Bastien Lachaud –, le crédit d'impôt s'adresserait aux TPE et aux PME. Vous avez peur de ceux qui, à la marge, abuseraient de nos décisions en matière de crédits d'impôt. Mais heureusement que le Gouvernement, soutenu par l'Assemblée nationale, a largement ouvert les vannes en faveur de nombreuses activités – notamment des restaurants – pendant la crise de covid-19 ! Je suis certain que vous connaissez tous nombre de restaurateurs ou de chefs de petites entreprises qui ont bénéficié du prêt garanti par l'État (PGE) alors qu'ils n'y avaient pas forcément droit.
L'objectif était de leur permettre de traverser une période dont on ne connaissait ni la fin ni les conséquences et de faire en sorte que le pays reste debout, autant que faire se peut.
En l'occurrence, M. le secrétaire d'État s'est montré très clair tout à l'heure en précisant que si nous améliorons de 15 %, voire plus, notre performance environnementale dans le secteur de la logistique, cela compenserait les émissions de gaz à effet de serre liées à l'usage croissant du numérique. Mais, pour cela, les entreprises françaises doivent changer de niveau et nous devons leur en donner les moyens grâce à ce crédit d'impôt que je soutiens.
S'il vous plaît, ne mettez pas tous les dispositifs de crédits d'impôt dans le même panier ! Arrêtons d'en donner une image stigmatisante. Le crédit d'impôt est un formidable outil dans certains secteurs, à partir du moment où il est bien ciblé et son usage bien contrôlé. Il permet d'éviter d'attribuer une subvention et donc de sortir de l'argent ; il s'agit d'une dépense de l'entreprise qui peut, ensuite, la défalquer de son impôt. C'est donc un formidable outil pour ceux qui n'ont pas les moyens d'investir. Je comprends que nous devons rester vigilants, qu'il peut entraîner des effets d'aubaine et des risques. Mais il s'est révélé utile dans de nombreux domaines pour soutenir des pans entiers de nos secteurs d'activité qui sont essentiels ; en outre, il permet de toucher les plus petites entreprises. Notre groupe est plutôt enclin à conserver cet outil. C'est pourquoi nous soutiendrons les amendements de Mme Aina Kuric.
En tant qu'ancien prestataire informatique, je peux vous dire que ces amendements feraient le bonheur des vendeurs de prestations et matériels informatiques. Je vous mets par ailleurs au défi de trouver un responsable de TPE ou de PME capable de dire s'il dispose d'une numérisation durable ou non. J'entends bien que vous voulez cibler les TPE et les PME. Mais l'assiette est tellement large qu'il est impossible aujourd'hui d'assurer un contrôle sur le terrain.
Je préfère privilégier les dispositifs existant – ceux de l'ADEME, par exemple –, qui sont soutenus par les régions et passent par des appels à projets.
Il y a un autre sujet que nous avons déjà évoqué avec M. le secrétaire d'État : quelles sont les personnes à même de déployer des systèmes d'information relevant du numérique durable ? Pas les chefs d'entreprise, qui ont pour souci premier de faire tourner leur boîte – un charpentier ne saura pas définir en quoi consiste, chez lui, une numérisation durable –, mais les prestataires informatiques. Je sais que M. le secrétaire d'État est sensible à cette question ; je sais aussi que la Fédération Syntec – qui représente les professionnels du numérique, de l'ingénierie, du conseil, de l'événementiel et de la formation professionnelle – travaille sur ce sujet, notamment sur des labellisations.
Je le redis, je suis défavorable à cette proposition de crédit impôt, pour les différentes raisons que je viens de développer. Cet avis est ferme et définitif.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l'adoption 10
Contre 43
Je présenterai également les amendements de repli n° 229 et 228. Il s'agit d'instaurer un crédit d'impôt lié au reconditionnement et à la réparation des produits électriques et électroniques. Puisqu'ils bénéficieront d'une TVA réduite dans quelques années, pourquoi un crédit d'impôt n'aiderait-il pas dès à présent les entreprises qui les commercialisent ?
Il vise à créer un « chèque réparation » sur le modèle du Coup de pouce vélo, qui a très bien fonctionné. J'ai lu dans la presse que le Gouvernement étudiait un dispositif de cette nature pour la filière du réemploi, en contrepartie de la rémunération pour copie privée. Où en est cette réflexion, monsieur le secrétaire d'État ?
Je me suis déjà largement exprimé sur le sujet, et mon avis reste défavorable.
Mon avis reste également défavorable à un tel crédit d'impôt. J'ai lu les mêmes informations que vous dans la presse, madame Forteza, mais je n'ai aucune annonce à faire pour le moment.
Sachant que le matériel d'occasion est déjà presque moitié moins cher que le matériel neuf, pourquoi prévoirait-on, en plus, un crédit d'impôt ? Laissons faire le marché. Si cette voie est intéressante pour les entreprises, elles s'y engageront.
Pourquoi laisser faire le marché ? On pourrait aussi se demander pourquoi laisser détruire la planète ! Il faut en finir avec le gaspillage induit par l'acquisition de produits neufs, dont les conséquences environnementales sont bien connues : pour un kilo de matériel électronique, sept à dix kilos de matière sont arrachés à la terre et, finalement, détruits. Il importe donc de conserver les matériels le plus longtemps possible, par divers moyens. Il y va aussi du pouvoir d'achat de nos concitoyens et de leur capacité à acquérir les meilleurs outils, ou à conserver ceux qu'ils possèdent.
Permettez-moi de rappeler les débats que nous avons eus ici même lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021. J'avais défendu un amendement, presque équivalent à ceux-ci, visant à instaurer un crédit d'impôt de 50 euros pour la réparation du matériel informatique, des équipements électroménagers ou encore des chaussures. Cela aurait aidé, par exemple, les personnes dont le réfrigérateur tombe en panne, et qui n'ont les moyens ni de le réparer ni d'en acheter un neuf. M. le rapporteur général du budget m'avait répondu qu'une telle mesure serait insupportable pour les finances de l'État. Dont acte. Or l'amendement suivant, déposé par Mme Bergé, proposait un crédit d'impôt de 50 euros pour tout abonnement à des journaux et périodiques – à Valeurs actuelles, notamment.
Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il a été largement adopté, au motif qu'il fallait sauver la presse, les médias et la culture. En d'autres termes, on accorde immédiatement un crédit d'impôt aux médias et à la culture ; mais quand il s'agit de faciliter le quotidien de nos concitoyens et de contribuer au bien de la planète et à la durabilité des produits, on remet ça à plus tard ! Oui, il faut aider la presse et la culture ; et oui, en même temps, il faut soutenir la transition écologique et le pouvoir d'achat de nos concitoyens.
Je me fais ici la porte-parole des membres de la Convention citoyenne pour le climat et du collectif GreenIT…
…qui proposent d'appliquer un malus aux écrans de grande taille. Cet amendement est assez flexible, puisqu'il laisse au Gouvernement la possibilité de fixer, par arrêté, le seuil à partir duquel ce malus s'appliquerait.
L'amendement n° 21 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
L'article 7 est adopté.
La parole est à Mme Paula Forteza, pour soutenir l'amendement n° 18 , portant article additionnel après l'article 7.
Il vise à renforcer les sanctions encourues dans le cadre du délit d'obsolescence programmée. Plusieurs dispositions de la proposition de loi vont déjà dans le bon sens ; pour aller plus loin, nous proposons d'instaurer un dispositif de « name and shame »…
…qui rendrait publiques les condamnations prononcées sur le fondement de ce délit, comme cela existe pour le travail dissimulé. Le délit d'obsolescence est difficile à prouver et n'a encore jamais donné lieu à des condamnations ; toute mesure permettant d'en renforcer l'application est donc bienvenue.
L'article 6, que nous avons adopté en commission, constitue déjà un grand pas dans la lutte contre l'obsolescence programmée. Il rendra opérant le délit d'obsolescence programmée, et permettra d'augmenter le nombre de condamnations sur ce fondement. Aussi ne semble-t-il pas nécessaire de rendre obligatoire la peine d'affichage ou de diffusion des décisions relatives à ce délit, en plus des sanctions pénales, qui sont déjà élevées : deux ans d'emprisonnement et 300 000 euros d'amende, celle-ci pouvant être portée, proportionnellement aux avantages tirés du délit, à 5 % du chiffre d'affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d'affaires annuels connus à la date des faits. Je demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement n° 18 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 7 bis est adopté.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 343 rectifié .
Il vise à mettre les dispositions de l'article 7 ter , qui a été adopté par la commission, en conformité avec le droit européen.
L'amendement n° 343 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Il a pour objet de supprimer la limitation temporelle introduite par la commission, qui ne permet au consommateur d'installer les logiciels de son choix qu'à l'issue de la durée de garantie légale de conformité. Je vous sais sensible à ce sujet, monsieur le rapporteur : pourquoi ne pas aller au bout de la logique ? Je précise que cet amendement a été rédigé avec l'aide de l'association April.
Nous devons dépasser l'idée selon laquelle l'ouverture du matériel à tout logiciel irait à l'encontre de la sécurité. Cette vision est datée, d'autant qu'il est déjà possible de contourner les restrictions d'utilisation prévues par les constructeurs – c'est ce qu'on appelle, en bon français, « jailbreaker ». Pourquoi ne pas permettre à tous les utilisateurs de maîtriser leur appareil ? L'idée que le matériel et le logiciel constitueraient un tout inviolable est révolue. Le sens de l'histoire est au contraire à l'ouverture.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 308 .
Je ne répéterai pas les arguments qu'a parfaitement exposés Mme Forteza. Doit-on attendre la fin du délai de garantie pour ouvrir un appareil à tous les logiciels ? Vous me répondrez que si l'on y procède avant l'expiration du délai, la garantie tombera, ou il sera plus difficile de la faire respecter. Mais le sujet n'est pas là : nous devons faciliter l'installation de logiciels libres par les utilisateurs. Souvent plus légers que les logiciels propriétaires, les logiciels libres consomment moins de puissance et contribuent à la longévité des appareils. La mesure que nous proposons participe donc d'un numérique plus vert, et garantit l'accès aux logiciels libres pour tous.
L'amendement que j'ai déposé en commission, et qui a donné lieu à l'article 7 ter , était inspiré d'une proposition similaire de l'association April, que j'ai travaillée dans le cadre la loi AGEC. J'estime toutefois qu'il ne faut interdire les restrictions logicielles qu'à l'issue des deux ans de garantie légale de conformité. En effet, on ne peut pas demander à un fabricant de garantir, durant cette période, un matériel dont on aura changé la configuration en intervenant sur son système d'exploitation – c'est-à-dire sur une partie du moteur qui fait fonctionner le système. Imaginez que vous achetiez chez Renault une voiture équipée d'un moteur à essence, et que vous décidiez, pendant la période de garantie, de l'équiper d'un moteur diesel : dans ces conditions, Renault ne pourra assurer la garantie. De même, toute intervention sur la partie exploitation d'un équipement a un effet sur le matériel lui-même : sans que vous le sachiez, cela peut accroître la consommation énergétique ou réduire l'autonomie de la batterie, par exemple. Le bien n'est alors plus conforme à son état d'origine.
Je suis favorable à l'installation de logiciels libres dans les matériels, monsieur Lachaud ; c'est justement l'objet de l'article 7 ter . Les personnes qui souhaitent utiliser ces logiciels moins énergivores pourront se tourner vers du matériel reconditionné sans être bloquées. Ce faisant, nous promouvrons le matériel reconditionné. Notez que cette disposition a été favorablement accueillie par les professionnels du reconditionnement, qui y voient l'occasion de vendre des systèmes plus légers, dont la durée de vie sera par conséquent allongée. Je demande donc le retrait des amendements ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Défavorable.
J'entends, monsieur le rapporteur, que cette disposition favorisera la vente de produits reconditionnés à ceux qui souhaitent utiliser des logiciels libres. Dont acte. Mais s'agissant des deux ans de garantie légale de conformité, votre argument ne tient pas : si l'appareil ne fonctionne pas dans la configuration d'usine, à laquelle il est facile de revenir, la garantie doit s'appliquer.
Votre argument est donc un peu fallacieux…
J'irai dans le même sens que le député Lachaud. Cet impératif de conformité des équipements est donné avant la commercialisation ; on pourrait donc connaître l'effet des logiciels dont nous parlons bien avant un délai de deux ans. J'observe par ailleurs que de nombreux logiciels, par exemple des ransomware ou des virus, ont également des effets sur les systèmes verrouillés. Je ne comprends donc pas pourquoi ces derniers seraient plus vertueux qu'un système ouvert permettant l'installation de logiciels libres.
L'article 7 ter, amendé, est adopté.
Il est le premier d'une série d'amendements destinés à réécrire les articles 8, 9 et 10 de la proposition de loi pour les rendre conformes aux directives européennes du 20 mai 2019 concernant respectivement certains aspects des contrats de fourniture de contenus numériques et de services numériques et des contrats de vente de biens. Nous avons d'ailleurs déjà abordé ces sujets lors de l'examen de la loi AGEC.
Cet avis vaudra pour les amendements n° 354 , 356 et 355 rectifié , qui visent à récrire respectivement les articles 8, 9 et 10.
Ces trois articles prennent en effet des dispositions similaires à des ordonnances en cours de rédaction par le Gouvernement et qui feront l'objet prochainement d'un projet de loi de ratification. Si la proposition de loi était adoptée après la rédaction de ces ordonnances, certains articles qu'elle modifie auront eux-mêmes été modifiés entre-temps. Afin d'éviter toute incertitude juridique, le rapporteur propose donc qu'ils soient rédigés dans les mêmes termes que ce que prévoyaient les ordonnances. Je ne doute pas que le Parlement sera heureux d'écrire dans la loi ce qui, sinon, aurait relevé d'ordonnances.
La situation nous laisse perplexes. Vous nous dites en effet que le Parlement s'apprête à légiférer sur le même sujet que le Gouvernement dans ses ordonnances, et que ce dernier nous demande d'adopter les dispositions qu'il avait prévu de faire ratifier. Si je comprends bien, une fois de plus, vous vous moquez de ce que pense le Parlement : vous lui demandez juste de voter ce que vous alliez de toute manière écrire. Franchement, monsieur le secrétaire d'État !
Monsieur Lachaud, ne racontez pas n'importe quoi ! Vous ne pouvez pas à la fois vous plaindre de la procédure des ordonnances, qui rendraient certaines dispositions inaccessibles au Parlement – vous nous avez fait le sketch cinquante fois –, et trouver anormal que l'on vienne vous en présenter le contenu à l'avance. Soyez cohérent : si vous êtes contre ces dispositions, vous devriez être heureux de pouvoir vous y opposer en toute connaissance de cause. Mais vous ne pouvez que vous féliciter que certains éléments soient inscrits dans la loi plutôt que dans les ordonnances. On ne vous oblige pas à les adopter ; jusqu'ici, vous avez encore la liberté de vote.
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.
L'amendement n° 354 est adopté ; en conséquence, l'article 8 est ainsi rédigé et les amendementsn° 9 et 65 tombent.
L'amendement n° 356 de la commission du développement durable a été défendu.
L'amendement n° 356 , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 9 est ainsi rédigé et les amendementsn° 240, 43, 115, 191, 309, 116, 241, 242 et 19 tombent.
Il vise à lutter plus efficacement contre l'obsolescence logicielle en faisant en sorte que les fabricants d'équipements numériques soient tenus pendant au moins dix ans de proposer des mises à jour compatibles avec un usage normal de l'appareil.
Le support technique, dont le coût est souvent inclus dans le prix d'achat d'un bien, est généralement assuré pendant une durée de trois à cinq ans, ce que nous jugeons très insuffisant. Trop d'équipements numériques, d'objets connectés, de logiciels deviennent rapidement inutilisables ou obsolètes du fait de lourdeurs ou d'incompatibilités.
Si nous voulons réduire la fréquence de renouvellement des terminaux, il faut demander aux fabricants et aux éditeurs de faire des efforts.
Je comprends l'objectif de votre amendement. Néanmoins, fixer à dix ans la durée pendant laquelle les mises à jour doivent demeurer compatibles avec un usage normal ne serait pas conforme au droit européen. Cette durée doit correspondre avec celle prévue par le contrat.
Connaissant le nombre de mises à jour qui sont faites en une seule année, pour les rendre disponibles pendant dix ans, il faudrait en stocker une quantité très importante sur des serveurs et informer les utilisateurs pour qu'ils trouvent la bonne conformité… Ce serait ingérable. Il faut raison garder et en rester à la logique des directives européennes, comme nous l'avons proposé à l'article 9. Je demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 188 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 355 rectifié de la commission du développement durable a été défendu.
L'amendement n° 355 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, l'article 10 est ainsi rédigé et les amendementsn° 243, 310 et 118 tombent.
La commission a supprimé l'article 11.
Je suis saisi de sept amendements, n° 311 rectifié , 46 , 31 , 45 , 44 , 157 et 189 , tendant à le rétablir et pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 31 et 45 sont identiques, de même que les amendements n° 44 , 157 et 189 .
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l'amendement n° 311 rectifié .
Il vise à porter à cinq ans la durée légale de conformité, et jusqu'à dix ans pour certaines catégories de produits tels que le gros électroménager, afin d'améliorer les possibilités de réparation et la disponibilité des pièces détachées.
Vous avez sûrement vu cette étude de l'association Halte à l'obsolescence programmée – HOP – parue aujourd'hui et qui concerne la durée de vie des téléviseurs. Elle est de sept ans et demi en moyenne, alors que, selon les auteurs, elle pourrait excéder onze ans sans difficulté. On voit bien là l'enjeu attaché à la durée légale de conformité, et c'est pourquoi nous regrettons la suppression de l'article 11 en commission. On ne peut pas d'un côté prétendre lutter contre l'obsolescence programmée et, de l'autre, supprimer les durées légales de conformité.
Monsieur le président, si vous le permettez, je défendrai également les amendements de repli n° 45 et 44. Je souhaite revenir au texte qui a été adopté à l'unanimité par le Sénat. Cette mesure, dont l'élaboration avait fortement mobilisé la société civile et la Convention citoyenne pour le climat, était l'une des plus fortes du texte, celle susceptible d'avoir l'impact le plus grand.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour soutenir l'amendement n° 31 .
L'article 11 de la présente proposition de loi visait à étendre de deux à cinq ans la garantie légale de conformité pour les équipements numériques, afin de renforcer la durabilité des produits et d'éviter le tout-jetable. Le groupe Les Républicains considère cette mesure pleine de bon sens…
…et il propose donc de la rétablir, en limitant toutefois cette durée à quatre ans. Le rapporteur avait justifié la suppression de l'article par la crainte de fragiliser la filière des métiers de la réparation. La garantie de conformité vise pourtant simplement à assurer au consommateur que le produit qu'il achète ne comporte pas de défauts. Les débouchés des réparateurs ne sauraient dépendre des défauts de fabrication !
Comme mes collègues, je souhaite rétablir l'article 11 de la proposition de loi dans le texte issu du Sénat. Nous proposons donc de compléter l'article L. 217-12 du code de la consommation par une disposition portant à cinq ans le délai de prescription légale de conformité pour les équipements numériques.
L'augmentation de la durée légale de conformité spécifique aux équipements numériques a été proposée tant par la Convention citoyenne pour le climat que par le Conseil national du numérique, en raison de l'importance des dégâts environnementaux associés au renouvellement rapide des terminaux. Alors que nous examinons une proposition de loi visant à réduire l'emprunte environnementale du numérique, nous ne comprendrions pas que le Gouvernement et sa majorité fassent barrage à une telle mesure.
La durée de conformité légale n'est pas une assurance contre la casse. Elle permet de protéger le consommateur en lui assurant que le produit qu'il a acheté est bien conforme au contrat de vente. Cette durée, qui est d'un an en moyenne dans les pays européens, est de deux ans en France. Un tel délai permet largement au consommateur de s'assurer que le produit est bien conforme à ce qu'il a acheté.
Quant à l'objectif d'améliorer la durabilité du produit, c'est ce que nous visions dans la loi AGEC en informant le consommateur sur la réparabilité du produit et en limitant toute restriction à l'accès aux pièces détachées, notamment pour les reconditionneurs.
Mais ce n'est pas en portant la durée de garantie à quatre, cinq, six ans qu'on garantira la conformité du bien. Restons donc cohérents. La durée de conformité légale n'est pas une assurance contre la casse : pour cela, il y a d'autres dispositifs, sans parler des initiatives commerciales de fabricants qui proposent déjà des garanties de trois ans pour certains de ces produits.
L'avis de la commission reste donc défavorable, d'autant plus que ces propositions sont complètement contre-productives au regard de l'objectif recherché puisqu'en cas de problème, on préfère souvent remplacer plutôt que réparer ce matériel. C'est pourquoi je reste très défavorable à vos propositions.
Mme Véronique Riotton applaudit.
Même avis, monsieur le président.
On nous explique, sur les bancs de la droite comme de la gauche, qu'en augmentant la durée légale de conformité on favoriserait l'emploi et la réparation : c'est un non-sens. Je voudrais simplement rappeler que lors de l'examen du projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, nous nous sommes battus pour étendre la durée légale de conformité aux appareils réparés, alors qu'allonger la durée de la garantie mettrait à mal tout le secteur de la réparation. Donc, de grâce, cessez de faire des propositions absolument contre-productives. Gardons plutôt une durée légale de deux ans et faisons ce qu'il faut pour développer le secteur de la réparation.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Les amendements n° 311 rectifié et 46 , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 56
Nombre de suffrages exprimés 56
Majorité absolue 29
Pour l'adoption 12
Contre 44
Cet amendement de ma collègue Batho vise à ce que les acheteurs publics prennent en compte l'impact environnemental des solutions numériques, pour favoriser les plus vertueuses.
Je donnerai un avis défavorable sur cet amendement, chère collègue, notamment parce qu'il pose un problème de répartition de la responsabilité entre vendeurs et fabricants.
L'amendement n° 296 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Il s'agit de deux rédactions possibles d'une même proposition. L'idée est ici de garantir au consommateur d'un appareil que sa batterie pourra être changée sans difficulté, afin qu'il ne soit pas incité à le jeter dès que la batterie ne fonctionne plus. Cette idée progresse au niveau européen, la Commission européenne ayant déjà rédigé une proposition de règlement en ce sens. La France pourrait être à l'avant-garde sur cette question, comme elle l'a été sur d'autres sujets comme la protection des données personnelles ou, plus récemment, le DSA – Digital Services Act –, dont elle a anticipé l'entrée en vigueur.
Il est défavorable sur les deux amendements. Je comprends leur objet, chère collègue, mais ils sont déjà en partie satisfaits par l'article 25 de la loi AGEC, dont les mesures sont en train d'entrer en vigueur. En effet, l'article L.441-3 du code de la consommation interdit déjà le recours à toute technique rendant impossible la réparation ou le reconditionnement d'un appareil hors de ses circuits agréés. De plus, comme vous l'avez dit, cette disposition relève davantage du droit européen que du droit national. La loi AGEC est aujourd'hui regardée de près à l'échelon européen : puissions-nous être précurseurs en ce domaine !
Même avis.
Je connais cette disposition de la loi AGEC, mais elle ne dit pas clairement que le consommateur lui-même doit pouvoir aisément changer la batterie : elle concerne surtout le fabricant. Je pense que nous pouvons aller encore plus loin en nous inspirant des réflexions en cours au niveau de l'Union européenne.
Cette proposition, que j'ai déjà défendue à plusieurs reprises et qui a été travaillée avec l'April, association de promotion et de défense du logiciel libre, vise à garantir un accès aux interfaces d'échange de données – API, pour application programming interface – des objets connectés.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 272 .
Plusieurs articles de la proposition de loi que nous examinons s'inscrivent dans la continuité de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire. Je voudrais à cet instant saluer cette initiative forte du Gouvernement, en particulier de Brune Poirson, qui a défendu le texte sur le banc du Gouvernement. Comme l'a rappelé ma collègue Véronique Riotton, cette loi anti-gaspillage a fait considérablement progresser la réglementation, en particulier s'agissant de la réparabilité des produits, dont on sait que c'est un enjeu majeur, puisque cela représente, on l'a dit, 75 % des émissions du secteur.
Il ne faut pas négliger non plus le sujet des logiciels dans la lutte contre l'obsolescence programmée. C'est tout l'objet de cet amendement, puisqu'il s'agit de permettre l'ouverture des interfaces d'échange de données des objets connectés afin d'en allonger la durée de vie et de prévenir l'obsolescence logicielle. En ouvrant le canal de communication et les interfaces de programmation des objets connectés, on garantirait la possibilité de faire évoluer ces objets et d'en allonger la durée de vie. C'est un enjeu majeur et je sais, monsieur le rapporteur, combien vous êtes sensible à ces sujets d'obsolescence logicielle.
Merci, chers collègues, pour votre persévérance sur le sujet ! Nous avons déjà eu ce débat en commission et mon avis reste défavorable, principalement pour deux raisons. Premièrement, si la mise à disposition des API, notamment des interfaces, permettrait effectivement de changer le comportement de l'appareil, elle poserait un problème de sécurité de l'objet connecté. À cela s'ajoute un risque de mauvaise programmation avec des conséquences en chaîne, notamment, puisque les objets connectés sont de plus en plus liés au réseau Internet, une mise en danger des données personnelles.
Même avis que le rapporteur. Je voudrais ajouter que nous avons lancé avec France Stratégie une étude sur l'impact environnemental des objets connectés, non seulement dans ses aspects négatifs, mais également sous l'angle de ce qu'ils peuvent apporter en la matière – on a parlé tout à l'heure de la logistique, mais c'est vrai également dans d'autres domaines – et des dispositions qui pourraient être prises pour limiter la pollution qu'ils engendrent. Nous ne sommes pas encore dans une période d'explosion de l'usage des objets connectés, même s'il connaît une forte augmentation. Dans l'attente des résultats de cette étude, qui devraient être connus dans les mois qui viennent, je vous suggère de surseoir à toute décision en la matière.
Opposer ainsi ouverture et sécurité n'a pas de sens et traduit une conception datée. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information, l'ANSSI, le prouve tous les jours en mettant en place des solutions très sécurisées basées sur du logiciel libre. Ainsi, la messagerie Tchap, qui est absolument sécurisée et utilisée par toutes les administrations et par le Gouvernement, est basée sur le logiciel libre Riot. Il est prouvé au contraire que plus le nombre de personnes pouvant auditer un système est élevé, plus celui-ci est sécurisé, comme le prouve le développement des pratiques de bug bounty, de plus en plus utilisées, même par le ministère des armées.
Ne nous faites pas dire que nous serions opposés au logiciel libre. Ce n'est pas du tout le cas, bien au contraire : aujourd'hui, nos administrations publiques sont pour la plupart équipées de logiciels libres. Ayant moi-même travaillé sur des solutions de logiciels libres, notamment des MIT, je peux vous dire que ce n'est pas ce dont il est question dans ces amendements qui visent à changer des interfaces de programmation. Ne mélangeons pas tout : ouvrir les interfaces de programmation des objets connectés, ce n'est pas la même chose. Les solutions utilisées au niveau du Gouvernement sont mises en œuvre par des professionnels qui sont des experts dans ce domaine.
Il s'agit d'une autre rédaction de notre proposition visant à faciliter le changement des batteries. Je le répète, cette solution permettrait d'allonger la durabilité et la réparabilité des appareils. Elle est en train de progresser au niveau européen : pourquoi la France ne pourrait-elle pas avancer sur ce sujet ?
L'amendement n° 47 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'ancien article 11 bis visait à ce que des règles en matière de qualité et de traçabilité des produits reconditionnés soit définies par un décret imposant notamment l'affichage des pays de provenance et de reconditionnement. Notre groupe regrette la suppression de cet article en commission et propose de le rétablir via le présent amendement. Pour écarter cette mesure, le rapporteur a évoqué le risque d'une aggravation des contraintes pénalisant les filières françaises du reconditionnement en l'absence de règles européennes. Pourtant, de telles précisions ne peuvent que renforcer la confiance des consommateurs à l'égard des terminaux reconditionnés. Ce ne serait ni la première ni la dernière fois que la France montrerait l'exemple au niveau européen ; cela serait en outre de bon augure pour la présidence française de l'Union européenne en 2022.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 119 .
Aux yeux de notre groupe, il est important de rétablir l'article 11 bis , qui visait à améliorer la traçabilité des produits. Comme le disait notre collègue Duby-Muller, cela permettrait en outre d'améliorer l'information sur l'ensemble des produits numériques. Notre objectif n'est pas d'ajouter des contraintes, mais bien d'améliorer l'information et la responsabilisation des consommateurs.
Mon avis n'a pas changé depuis l'examen du texte en commission. Pour être tout à fait clair, j'avais alors expliqué que ces dispositions étaient satisfaites par le décret prévu par la loi AGEC. Celui-ci a été notifié à la Commission européenne, qui y est favorable, et est en cours de finalisation.
Les deux amendements étant pleinement satisfaits par ce décret prévu par la loi AGEC, que nous avons adoptée, je demande, comme en commission, le retrait de ces amendements. À défaut, avis défavorable.
J'ajoute que la promotion des produits reconditionnés, dont vous aurez l'occasion de débattre tout à l'heure, est un élément central dans l'amélioration de l'impact énergétique du secteur numérique. À cet égard, plusieurs questions se posent.
Tout d'abord, il faut définir le terme « reconditionné », puisqu'il existe différents degrés de remise à niveau, une différence avec l'occasion…
Par ailleurs, pour des raisons environnementales évidentes, nous voulons tous favoriser les produits reconditionnés en France et, plus largement, en Europe. En effet, un téléphone portable vendu une première fois en Chine avant d'y être reconditionné et envoyé en Europe présente un bilan environnemental contestable compte tenu du transport qu'il a nécessité.
Enfin, le décret en cours de finalisation qui a été évoqué me semble satisfaire l'esprit des amendements, puisqu'il permettra notamment de définir la mention « reconditionné en France ». Cela pourrait même devenir un label permettant de distinguer les produits reconditionnés sur le territoire national des autres.
Au vu de la philosophie du décret en cours de rédaction, que je viens de vous exposer, il me semble souhaitable que vous retiriez vos amendements. À défaut, le Gouvernement y donnera un avis défavorable.
Ces amendements font écho à l'article 14 bis B, dont certains attendent l'examen avec impatience et qui aboutira peut-être à pénaliser lourdement les produits reconditionnés.
Les acteurs de l'économie du reconditionnement, notamment des appareils électroniques comme les tablettes et les smartphones, nous ont déjà alertés sur le fait qu'une fiscalité supplémentaire sur les matériels reconditionnés les inciterait probablement à délocaliser leur activité à l'étranger.
Nous devons donc prévoir des garde-fous et aider le consommateur, notamment en adoptant les amendements de nos collègues Duby-Muller et Jourdan tendant à rétablir l'article 11 bis .
Je partage l'avis de notre collègue François-Michel Lambert : l'article 11 bis n'est pas sans lien avec l'article 14 bis B dont nous discuterons ultérieurement. La crainte est bien que l'ensemble de la filière du reconditionnement se délocalise hors du territoire national, notamment en raison de l'assujettissement à la redevance pour copie privée et de la TVA. Les grandes plateformes et market places pourraient alors proposer des produits reconditionnés à des tarifs beaucoup moins élevés que ceux que l'on pourrait trouver sur le territoire national.
J'ai bien compris que le décret était en cours de rédaction, mais ce ne serait pas la première fois, monsieur le secrétaire d'État, que l'on déciderait d'inscrire dans la loi une obligation d'ordre réglementaire, surtout si elle permet de préciser les choses et de rassurer.
Certes, nous essayons de ne pas écrire de lois bavardes, mais il peut être nécessaire d'y inscrire certaines dispositions. Dans le cas présent, cela permettrait de donner lisibilité et clarté à l'ensemble de la filière du reconditionné, comme l'estimaient les sénateurs qui ont adopté le texte et plusieurs de nos collègues qui sont favorables au rétablissement de l'article 11 bis . Même si c'est redondant avec le décret, cela rassurerait l'ensemble des acteurs. La loi ayant une valeur supérieure au décret, cela nous permettrait en outre d'être sûrs de ce qui y figurera. Par conséquent, rétablir l'article 11 bis me semble une bonne idée : je voterai en faveur de ces amendements.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 54
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l'adoption 11
Contre 42
J'ai déposé cet amendement suite à nos échanges en commission sur l'article 11 bis . En effet, il me semble qu'il va être nécessaire de distinguer clairement les produits reconditionnés et assemblés en France des autres, notamment pour éviter les effets d'aubaine liés à l'importation de terminaux reconditionnés qu'a évoqués le rapporteur en commission.
En outre, cela nous permettrait de valoriser les filières locales, notamment celles de l'économie sociale et solidaire (ESS).
Je vous propose donc de prévoir dans le code de la consommation la création d'un label permettant de favoriser les entreprises qui reconditionnent en France et de distinguer ces activités dans le cadre de la rémunération pour copie privée (RCP), que nous aborderons tout à l'heure.
Monsieur Latombe, les débats que nous avons aujourd'hui sont retranscrits au Journal officiel, et ils font foi. Sur le sujet des labels pour les produits reconditionnés, j'ai dit tout à l'heure que le décret prévu par l'article 37 de la loi AGEC créerait la mention « reconditionné en France ».
Je veux bien que nous inscrivions les choses dans la loi pour faire plaisir à tout le monde – c'est d'ailleurs pour cela que nous avons réécrit les articles 8, 9 et 10 de la proposition de loi –, mais le décret sera sorti bien avant sa promulgation ! Les directives européennes elles-mêmes seront appliquées avant que la loi soit promulguée.
Cet amendement est donc pleinement satisfait, et j'en demande le retrait. À défaut, avis défavorable.
Même avis.
Cet amendement se situe dans la continuité des précédents.
Je crois, monsieur le rapporteur, que beaucoup de toutes petites entreprises sont angoissées. Elles se demandent si elles passeront l'été et si leur modèle économique leur permettra de survivre à la promulgation de la loi et à la fiscalité que son article 14 bis B pourrait leur imposer.
Vous dites que le décret répondra à leurs attentes mais, comme Maina Sage, je pense qu'il est absolument nécessaire de les rassurer par d'autres moyens – par exemple, l'inscrire dans la proposition de loi et le voter.
Ces derniers temps, nous avons souvent ajouté dans les textes des dispositions qui n'apportaient rien de plus que ce qui y figurait déjà – cela a encore été le cas il y a deux ou trois semaines. Je comprends que les concitoyens qui sont concernés se sentent rassurés que ces dispositions figurent dans la loi, et je tiens à ce que l'on rassure ceux qui ont eu le courage d'aller de l'avant et d'investir dans ces activités, notamment de reconditionnement. Ils y ont parfois mis tout l'argent dont ils disposaient, ont hypothéqué leur maison : nous ne voulons pas les abandonner.
Même si un décret est prévu, nous pouvons voter en faveur de cet amendement qui leur donnera l'assurance qu'ils pourront valoriser leur travail en rappelant aux consommateurs qu'ils reconditionnent les produits en France.
L'article 37 de la loi AGEC prévoit qu'il sera possible d'apposer une mention pour signaler que le produit est reconditionné – simplement « reconditionné ». Peut-être le décret permettra-t-il, comme vous le dites, de nuancer la situation et de préciser que le reconditionnement a eu lieu sur le territoire national. C'est très bien, mais cela ne doit pas nous empêcher de compléter aussi le code de la consommation pour insister sur le fait que le reconditionnement est effectué en France.
Cela permettra de favoriser les entreprises de l'économie sociale et solidaire, celles qui ont vraiment la mention « ESS » et qui pourront indirectement, grâce à ce label, bénéficier d'autres solutions et dispositifs préférentiels. On sait bien, par exemple, qu'il pourra jouer un rôle dans l'assujettissement à la redevance pour copie privée, dont nous débattrons tout à l'heure.
C'est pourquoi je maintiens mon amendement, qui ouvre la voie à la création d'un label « reconditionné en France ».
L'amendement n° 290 n'est pas adopté.
Il vise à créer le mécanisme de passeport-produit pour les biens comportant des éléments numériques, afin d'améliorer la confiance du consommateur envers le reconditionné et de garantir la qualité des équipements concernés. Cette sorte de carte grise permettra aux acheteurs d'obtenir des données complètes sur l'état des appareils qu'ils achètent et utilisent aux plans technique et juridique. En outre, l'État français et l'Union européenne pourront quantifier le flux de réemploi, et ainsi mieux articuler le flux des déchets destinés au recyclage avec celui des équipements fonctionnels destinés au réemploi. Enfin, le passeport-produit permettra aux autorités comme l'ARCEP et l'ADEME de disposer de données primaires fiables sur la vie et les usages des appareils numériques, afin d'affiner les analyses de marché. La liste précise des biens concernés sera établie par décret.
Je précise que cet amendement été rédigé avec GreenIT.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 120 .
Il est identique à celui présenté par M. Pahun. J'ajouterai que l'instauration d'un tel mécanisme est encouragée par le Parlement européen. En effet, la résolution du Parlement européen du 25 novembre 2020 « Vers un marché unique plus durable pour les entreprises et les consommateurs » indique : « Nous pouvons mettre à profit les outils numériques pour promouvoir un marché durable en établissant une base de données commune et un passeport-produit. Cela permettra de mieux tracer les produits et leurs composants tout au long de la chaîne de valeur, de partager des informations entre producteurs et consommateurs et de renforcer la surveillance des marchés. »
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 264 .
Cet amendement vise lui aussi à créer un mécanisme de passeport-produit pour les biens comportant des éléments numériques. Mme Jourdan vient de rappeler la position du Parlement européen, exprimée par une résolution du 25 novembre 2020 ; l'Allemagne soutient également cette mesure dans son agenda éconumérique du 2 mars 2020. Comme cela a été le cas dans la loi du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi AGEC, la France pourrait donc également agir en moteur de l'initiative éconumérique, grâce à un dispositif pilote que nous limiterions éventuellement, dans un premier temps, aux catégories d'équipement déjà concernées par l'indice de réparabilité qu'a instauré la loi AGEC : téléphones portables, ordinateurs portables ou encore téléviseurs. Nous en profiterions ensuite pour l'étendre, dans les textes européens, à l'ensemble des équipements numériques.
Initier ce mécanisme en France à l'occasion de cette proposition de loi nous permettrait à la fois de nous situer à l'avant-garde des pays européens et d'emporter leur adhésion dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, durant le premier semestre 2022. Restons donc une force motrice : essayons de mettre en place ce passeport-produit que nous sommes nombreux à réclamer en Europe.
Ces deux amendements prévoient la création gratuite, lors de l'achat d'un bien comportant des éléments électroniques, d'un passeport-produit, afin que les acheteurs et utilisateurs puissent se faire une réelle idée de l'état de leur appareil. Cette mesure est nécessaire ; elle sera bientôt instaurée au niveau européen. Il importe donc que la France envoie un signal fort. Nous devons avancer sans attendre : tant pis pour le droit de l'Union européenne, c'est lui qui suivra !
Sourires.
Cette proposition émane de tous les bancs de l'hémicycle, et je vois mal comment M. le rapporteur pourrait s'y opposer.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
Sourires.
En tout cas, je suis ravi de constater que l'on envisage de voir le droit européen emboîter le pas au droit français – pour une fois ! Trêve de plaisanterie, chers collègues : j'avoue m'être fait la même réflexion que vous ,
« Ah ! » sur divers bancs
Ce n'est pas une question de manque d'ambition : nous parlons de sujets et d'objets numériques. La plupart de ces produits ne sont pas fabriqués en France ; or ces dispositions ne s'appliqueraient qu'aux acteurs français du secteur. En outre, elles risqueraient fort d'être incompatibles avec les futures règles européennes du marché intracommunautaire. Je salue, moi aussi, les réflexions menées dans d'autres pays, mais une telle mesure ne peut être prise qu'à l'échelon européen. Des travaux sont en cours ; le plan d'action européen pour une économie circulaire prévoit que la Commission européenne propose une initiative législative concernant la politique des produits durables. Le même plan mentionne notamment des passeports de produits qui permettront de suivre l'itinéraire des biens, des composants, des matériaux. L'article 65 du projet de règlement européen sur les batteries dispose que, le 1er janvier 2026 au plus tard, sera créé un registre consignant un identifiant unique pour chaque batterie industrielle ; ce passeport sera lié aux informations concernant les caractéristiques de base de chaque type et modèle de batterie.
L'Europe conduit donc déjà une réflexion à ce sujet et s'engage en ce sens. Encore une fois, au vu de tout cela, nous n'allons pas adopter ici une mesure applicable aux seuls acteurs nationaux et qui se trouvera certainement en contradiction avec les dispositions actuellement en discussion au niveau européen ! Le simple bon sens m'amène à vous demander de retirer vos amendements ; à défaut, avis défavorable.
Même avis.
Monsieur le rapporteur, j'ai bien compris vos explications ; après avoir discuté du sujet avec Philippe Taton, je pense d'ailleurs que nous rencontrerions des problèmes de traçabilité concernant les produits numériques qui ne sont pas fabriqués en Europe. Pour autant, il est tout de même dommage que nous ne puissions agir à l'échelon national, car la France joue souvent le rôle d'accélérateur des décisions européennes sur le point d'aboutir. Je n'en citerai qu'un exemple : la taxation des GAFA, les géants du numérique. C'est la France qui a donné l'impulsion initiale ; désormais, le mouvement a gagné non seulement l'Europe, mais le reste du monde. Monsieur le secrétaire d'État, peut-être pourrions-nous trouver un moyen de faire quelque chose ? Cela vaudrait le coup de creuser cette idée en vue de la présidence française du Conseil de l'Union européenne. Je sais très bien qu'un tel dispositif serait compliqué à déployer ; je sais très bien que la traçabilité des produits importés de l'espace extra-européen – soit la quasi-totalité d'entre eux – poserait problème. Malgré tout, cela ouvrirait quelques perspectives intéressantes.
Je soutiendrai ces amendements pour deux raisons. La première porte sur la forme : à la longue, il devient difficile de s'entendre dire dans cet hémicycle que ce que nous pouvons souhaiter, promouvoir, y compris en précurseurs, se trouve limité. Or, que la majorité soit de droite, de gauche ou en marche, la situation ne varie pas. La seconde raison concerne le fond : il s'agit de reprendre la main face aux dérèglements actuels, non du climat, mais du marché mondial, notamment en matière de micro-électronique. Pour assurer une bonne connaissance des produits électroniques, rien de tel que ce passeport, cette carte grise, comme l'a dit Jimmy Pahun. De plus, ce dispositif permettrait de remonter au besoin jusqu'au véritable opérateur, parfois établi dans des pays où les conditions de travail sont bien éloignées de nos valeurs.
Je souscris donc pleinement à cette initiative. Au niveau européen, les choses évolueront ; mais nous ne pouvons continuer à reculer chaque fois qu'on oppose l'Europe à des propositions de bon aloi, émanant du centre, de la majorité, et qui permettraient de faire progresser notre société. Soyons au rendez-vous : adoptons ces amendements.
Il s'agit en effet de reprendre la main, mais aussi de faciliter le travail des « repair cafés », des acteurs de l'économie sociale et solidaire, qui bénéficieraient d'une vraie traçabilité des produits. C'est pourquoi je maintiens mon amendement.
L'amendement n° 176 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures vingt.
L'article 12 prévoit que des objectifs spécifiques de recyclage, de réemploi et de réparation soient fixés dans les cahiers des charges des éco-organismes. Mais la mise en œuvre de cette disposition est reportée au 1er janvier 2028, ce qui nous semble beaucoup trop éloigné. Il est donc proposé de ramener cette échéance à 2022. Il serait vraiment dommage de perdre un stock important d'équipements fonctionnels qui pourraient être réemployés, notamment du fait de la vague de remplacements que va susciter la 5G.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 64 .
Je soutiens évidemment tout ce que vient de dire Paula Forteza, car nos amendements sont complémentaires : toujours animée par des ambitions fortes, elle propose 2022 tandis que nous, un peu en repli, proposons 2025. Comme dans une bonne équipe de football, il faut toujours de solides arrières. En tout cas, le fond de ces amendements est le même : on ne peut pas attendre jusqu'en 2028.
Je soutiens les arrières que vient d'évoquer notre collègue puisque nous proposons en effet de ne pas attendre 2028, mais d'anticiper à 2025 l'inclusion des objectifs de recyclage, de réemploi et de réparation dans les cahiers des charges de la filière des déchets des équipements électriques et électroniques (DEEE). Je le rappelle à mon tour : 2028, c'est loin, alors que l'urgence nous impose aujourd'hui d'anticiper.
L'échéance de 2028, même si elle peut paraître lointaine, se justifie par le fait que les agréments des éco-organismes sont délivrés pour une période de six ans, sachant que ceux de la filière à responsabilité élargie des producteurs – ou filière REP – des déchets des équipements électriques et électroniques qui arrivaient à échéance à la fin de l'année 2020 ont été renouvelés quasiment à l'identique pour un an, la crise sanitaire ayant perturbé le calendrier de concertation et de préparation des nouveaux agréments. Ceux-ci tiendront compte des dispositions de la loi AGEC et entreront donc en vigueur le 1er janvier 2022 pour une durée de six ans.
Du reste, l'article 12 prévoit l'entrée en vigueur du dispositif « au plus tard le 1er janvier 2028 » : il sera donc possible aux éco-organsimes de modifier leur cahier des charges avant.
Les acteurs de la filière disposeront ainsi du temps nécessaire pour mettre en œuvre les nombreuses modifications apportées par la loi AGEC, un texte que je salue. Nous en parlons beaucoup dans cet hémicycle, et je sais qu'il est très cher à beaucoup de collègues ici présents, ce qui prouve bien que nous pouvons être très fiers de cette loi de référence en ce domaine. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Défavorable.
Je n'ai qu'une certitude pour 2028 : Emmanuel Macron ne sera plus Président de la République.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Mêmes mouvements.
Pour le reste, je m'inquiète que nous n'avancions pas suffisamment vite dans le domaine du recyclage, du réemploi et de la réparation. Étant élu depuis 2012, je me souviens que Delphine Batho, alors ministre de l'écologie, abordait ce sujet dès 2013… Et vous nous proposez l'échéance de 2028 ! Un bel écart de quinze ans ! Ce n'est vraiment pas possible. Quant aux arguments avancés par M. le rapporteur, à savoir que l'on ne peut revenir sur des agréments déjà délivrés, je rappelle que ce ne serait ni la première ni la dernière fois que le législateur ou l'exécutif ferait évoluer le contenu de contrats en cours, et c'est heureux. Très récemment, sous le gouvernement d'Édouard Philippe puis sous celui de Jean Castex, les contrats des éoliennes offshore ont été revus pour plusieurs milliards d'euros alors que les opérateurs disaient que c'était impossible ; et ici même ont été revus – je n'y étais pas favorable – les contrats passés avec des opérateurs du photovoltaïque que notre assemblée avait validés sous un précédent gouvernement, alors qu'ils n'étaient pas arrivés à terme. Nous avons la possibilité de faire évoluer des clauses quand nous avons la volonté non pas, en l'espèce, de servir l'intérêt des acteurs économiques, mais de prendre en compte l'urgence écologique, qui nous impose l'échéance de 2025 au plus tard.
M. Gérard Leseul applaudit.
L'amendement n° 26 n'est pas adopté.
Sur les amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié , je suis saisi par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'article 12 est adopté.
La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l'amendement n° 195 visant à supprimer l'article 12 bis A.
L'instauration d'une consigne aurait un impact non négligeable sur les producteurs, sur les importateurs et sur les distributeurs, mais aussi et surtout sur les consommateurs. Le montant à définir de la consigne aura-t-il pour autant un impact sur le changement des comportements ? Permettra-t-il de rendre vie aux 70 millions de téléphones qui dorment dans nos tiroirs ? Et c'est sans compter que cette consigne n'aurait de toute façon un impact que dans trente mois au plus tôt, délai moyen de remplacement d'un téléphone portable. De plus, cette consigne va à l'encontre des objectifs de l'économie circulaire en limitant la revente et le don entre particuliers. Je note que les expériences étrangères menées à cet égard ont été abandonnées, notamment en Corée du Sud, car le dispositif coûtait plus cher qu'il ne rapportait, aussi bien sur le plan financier que sur le plan environnemental.
Il faut certes régler le problème des téléphones qui dorment dans les tiroirs en incitant à leur retour dans le circuit d'utilisation, mais en travaillant avec la filière recyclage et reconditionnement.
Sur l'amendement n° 33 , je suis saisi par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Quel est l'avis de la commission sur l'amendement de suppression ?
Chère collègue, nous faisons le même constat : le système de la consigne est difficile à appliquer, notamment pour les smartphones et autres équipements électroniques. Une étude menée sur la collecte des téléphones portables, rendue publique à l'automne 2019, a montré qu'il n'avait pas donné les résultats escomptés. Et il est vrai, comme vous l'avez dit, que les systèmes de consigne mis en œuvre dans différents pays – je pense à l'Autriche et à la Corée du Sud – n'ont pas fonctionné et ont été abandonnés. Selon un sondage, seulement 5 % des consommateurs déclarent que la consigne pourrait être un facteur les incitant à revendre ou à rapporter en boutique un téléphone portable non utilisé. J'indique par ailleurs que la Commission européenne a lancé en juin 2020 une étude sur les systèmes de retour des téléphones portables.
Toutefois, je vous demanderai un retrait de votre amendement au profit des amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié qui suivent, parce que ceux-ci proposent de réécrire l'article et non plus de mettre en place une consigne : il s'agira de permettre aux éco-organismes de procéder à des opérations de collecte nationale accompagnées d'une prime au retour des appareils numériques lorsque cela sera nécessaire pour atteindre leurs objectifs de collecte, directement issus de cette fabuleuse loi AGEC et que nous renforçons. Demande de retrait. À défaut, l'avis sera défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 195 est retiré.
Je suis saisi de plusieurs amendements, n° 244 rectifié , 285 rectifié et 85 , pouvant être soumis à une discussion commune. L'amendement n° 244 rectifié fait l'objet d'un sous-amendement n° 364 .
Les amendements n° 244 rectifié et 285 rectifié sont identiques.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 244 rectifié .
Cet amendement déposé à titre personnel est défendu. Je laisse ma collègue Véronique Riotton, auteure d'un amendement identique cosigné par l'ensemble des députés du groupe La République en marche, en exposer les motifs.
La parole est à Mme Véronique Riotton, pour soutenir l'amendement n° 285 rectifié .
Cet amendement du groupe La République en marche, qui prévoit la possibilité d'offrir une prime au retour pour les particuliers rapportant leur anciens terminaux numériques, permet d'intégrer dans la loi l'objectif de réduction des stocks d'équipements usagés dormants. Nous avons tous dans nos tiroirs un stock de téléphones ; il est important qu'ils puissent être collectés. Nous souhaitons donc préciser que les opérations de collecte nationale seront menées par les producteurs d'équipements électriques et électroniques, et que la prime au retour sera destinée aux particuliers qui rapportent les équipements dont ils souhaitent se défaire, notamment les téléphones, les tablettes et les ordinateurs portables.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir le sous-amendement n° 364 .
Je soutenais la rédaction actuelle de l'article 12 bis A ; la réécriture qui nous est proposée me laisse donc dubitatif, même si je fais confiance à M. le rapporteur et ne doute pas de sa volonté. J'ai repris, sous la forme d'un sous-amendement, la précision rédactionnelle que je souhaitais apporter à cet article pour y inclure les connectiques informatiques, électroniques et électriques.
La parole est à Mme Véronique Riotton, pour soutenir l'amendement n° 85 .
Si les échanges avec les différents acteurs laissent subsister quelques doutes au sujet de la consigne de l'ensemble des appareils numériques que nous avons instaurée en commission, je reste convaincue que la consigne peut être un moyen efficace pour limiter le développement de futurs stocks – la nouvelle rédaction de l'article proposée par les amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié ne réglant que la situation des stocks dormants déjà constitués.
Je propose la mise en place, par la voie d'une expérimentation, d'une consigne sur la base du volontariat. Nous disposerons ainsi de données plus précises et plus pertinentes pour savoir si la consigne constitue, oui ou non, un levier intéressant pour favoriser la collecte des appareils dormants.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements en discussion commune et sur le sous-amendement ?
Je suis évidemment favorable à l'amendement n° 285 rectifié du groupe La République en marche, qui est identique à celui que j'ai moi-même déposé. Le sous-amendement de M. Lambert est quant à lui pleinement satisfait : les connectiques informatiques, électroniques et électriques font par définition partie des équipements électriques et électroniques auxquels se réfère la nouvelle rédaction proposée.
Madame Riotton, je sais votre attachement à l'idée d'une consigne. Néanmoins, vous avez participé aux auditions des éco-organismes, et notamment des reconditionneurs qui collectent ces objets : ils nous ont bien expliqué – et les études le prouvent – que les expérimentations qui ont pu être menées, en France comme à l'étranger, n'ont pas fonctionné. De plus, la mise en place d'un fonds de consigne pour les appareils électroniques et électriques serait un processus assez lourd. Je vous demande le retrait de votre amendement au profit de ceux que nous défendons ensemble ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Même avis que le rapporteur, monsieur le président : avis favorable aux amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié ; demande de retrait ou défavorable sur le sous-amendement et l'amendement n° 85 .
L'article 12 bis A vise à inciter les utilisateurs à retourner leurs appareils électroniques dans le magasin où ils les ont achetés, lorsqu'ils ne les utilisent plus, au moyen d'un système de consigne. On estime à environ 100 millions le nombre de téléphones mobiles qui dorment dans les tiroirs des Français ; le système constitue donc une bonne mesure. La rédaction du rapporteur me semble aller dans le bon sens.
Toutefois, beaucoup de nos compatriotes se posent la question du devenir de leurs données personnelles, à l'occasion par exemple du recyclage d'un vieux téléphone mobile. Ils ne souhaitent évidemment pas que ces données puissent être consultées ou utilisées à des fins commerciales. Je voulais évoquer cette question au travers de l'amendement n° 33 , qui va tomber si les amendements de rédaction globale sont adoptés.
Monsieur le rapporteur, ce que nous exprimons dans l'hémicycle au sujet des mesures que nous adoptons influencera par la suite leur mise en œuvre effective. Permettez-moi de relire le dispositif que vous proposez avec Mme Riotton : « Lorsque cela est nécessaire pour atteindre les objectifs de collecte qui leur sont fixés en application de la présente section et afin de réduire les stocks d'équipements usagés inutilisés, les producteurs d'équipements électriques et électroniques ou leur éco-organisme mènent chaque année des opérations de collecte nationale accompagnées d'une prime au retour pour les particuliers qui rapportent les équipements dont ils souhaitent se défaire, pour les téléphones, les tablettes et les ordinateurs portables. »
Il faut donc entendre, par la notion d'équipements, bien plus que les tablettes, les téléphones et les ordinateurs portables. Confirmez-vous que les connectiques nécessaires à leur utilisation en font bien partie ? Vous savez combien sont importantes les prises de position du ministre ou du rapporteur dans l'hémicycle et le poids qu'elles peuvent avoir pour l'interprétation des textes que nous adoptons.
Le sous-amendement n° 364 n'est pas adopté.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 47
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l'adoption 47
Contre 0
Les amendements identiques n° 244 rectifié et 285 rectifié sont adoptés à l'unanimité. En conséquence, l'article 12 bis A est ainsi rédigé, l'amendement n° 85 tombe et les amendements n° 145 et 33 deviennent sans objet.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 5 .
Permettez-moi de me remettre de l'absence totale de réponse à ma question concernant la reprise d'équipements électriques et électroniques. Un éclaircissement à ce sujet m'aurait permis de retirer mon sous-amendement et de clarifier la rédaction de l'article que nous venons – moi compris – de voter. En l'absence de réponse, j'ose espérer que les éléments de connectique sont bien compris dans le champ du dispositif.
Quant à cet amendement, il vise à ajouter un paragraphe à l'article L. 541-1 du code de l'environnement afin de permettre le développement de la consigne pour les appareils électriques. Je n'en dirai pas plus, je pense que vous avez tous compris le sens du dispositif proposé.
Je l'ai déjà indiqué : la mise en place d'un dispositif de consigne pose des difficultés, raison pour laquelle nous avons réécrit l'article 12 bis A. C'est pourquoi il convient de privilégier la mise en place d'opérations de collecte nationale, accompagnées d'une prime au retour des équipements, menées par les producteurs d'équipements électriques et électroniques ou leurs éco-organismes. C'était déjà possible dans le cadre de la loi AGEC, et nous venons de le rappeler dans la nouvelle rédaction de l'article 12 bis A. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
Même avis, monsieur le président. J'en profite pour confirmer à M. Lambert que les connectiques sont bien inclus dans les équipements concernés par la nouvelle rédaction de l'article 12 bis A.
La parole est à M. François-Michel Lambert, que voilà remis de ses émotions.
Il ne s'agit pas de mes émotions, monsieur le président. Je remercie très sincèrement M. le secrétaire d'État : il est important que les choses soient claires. Nous devons tous être à la hauteur du rendez-vous – et vous l'êtes, monsieur le secrétaire d'État –, parce que chacun sait combien de matières premières sont perdues dans des équipements qui finissent au fond des tiroirs ou, pire, dans des poubelles. Grâce à l'article 12 bis A, ils pourront être récupérés, réutilisés et recyclés si nécessaire. Je retire mon amendement.
L'amendement n° 5 est retiré.
Cet amendement déposé par mon collègue Michel Vialay vise à obliger les vendeurs en ligne de petits équipements électriques et électroniques à informer les acheteurs de la localisation des points de collecte situés autour de leur lieu de vie. Cette information permettrait de renforcer le recyclage de ces équipements, sachant que chaque année, les consommateurs français jettent environ 20 kilos de DEEE par personne et que moins d'un tiers est réutilisé ou recyclé.
Je défendrai ensemble les amendements n° 186 et 187 , qui portent sur l'enjeu des collectes des équipements électriques et électroniques. Le n° 186 rend obligatoire, pour les vendeurs en ligne de petits équipements électriques et électroniques, l'information du consommateur concernant les points de collecte situés à proximité de chez lui.
Avec le second amendement, nous proposons de façon plus décisive d'imposer aux grands magasins la mise en place de dispositifs de collecte de ces petits équipements électriques et électroniques, dont les Français jettent l'équivalent de 20 kilos par an. D'après l'ADEME et conformément aux règles fixées par la directive européenne sur les DEEE, 80 % des équipements électriques et électroniques français sont considérés comme recyclés dans les filières réglementées. Or ce chiffre est trompeur ; il ne rend pas compte du recyclage tel que l'usager peut l'imaginer : le plus souvent, les opérations de broyage et de tri ne permettent pas aux matériaux de repartir dans une filière de fabrication. Nous devons donc progresser en matière de recyclage, de façon à favoriser une boucle dans le cycle de vie de ces équipements. Cela passe par la mise en place et l'utilisation de points de collecte spécifique. Tel est le sens de ces deux amendements.
Chers collègues, j'ai une bonne nouvelle : vos amendements sont pleinement satisfaits par l'article L. 541-10-15 du code de l'environnement – créé toujours et encore par la fameuse loi AGEC –, qui prévoit la mise à disposition des consommateurs, par voie électronique, des coordonnées des lieux de collecte. Cet article va même plus loin que ce que vous proposez, puisqu'il vise également les lieux de réparation et les lieux de réemploi. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
La parole est à Mme Véronique Riotton, pour soutenir l'amendement n° 87 .
Je m'attaque toujours aux stocks dormants de téléphones. Il est essentiel de faire en sorte que les Français puissent rediriger leurs appareils usagés vers les filières du réemploi. Pour cela, il faut simplifier le travail. À l'instar de ce qui existe déjà pour l'électroménager, il s'agit donc de prévoir une obligation de reprise. Nous proposons que le distributeur soit chargé de mettre en place un système de récupération des biens numériques usagés lors de l'achat d'un nouvel appareil numérique. Il lui reviendrait également d'informer le consommateur sur la manière la plus pertinente de retourner ses équipements usagés. Rendre à la fois visible et accessible cette obligation de reprise permettrait de simplifier la restitution des anciens appareils pour tous les Français et de limiter ainsi l'accroissement du stock dormant.
La loi AGEC impose déjà aux distributeurs de reprendre sans frais les produits usagés lorsqu'ils vendent un produit neuf. En cas de vente avec livraison, il peut également être fait obligation aux distributeurs de proposer la reprise sans frais des produits usagés au point de livraison du produit vendu ou auprès d'un point de collecte de proximité. Il peut également être fait obligation aux distributeurs qui disposent d'une surface de vente d'au moins 400 mètres carrés consacrée à ces produits de reprendre sans frais les produits de même type, sans que cette possibilité soit conditionnée à une obligation d'achat. Pour ces raisons, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, l'avis sera défavorable.
L'amendement n° 87 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Il s'agit d'imposer l'installation d'un dispositif de collecte des petits DEEE dans l'ensemble des magasins ayant une surface de vente supérieure à 400 mètres carrés, c'est-à-dire l'équivalent des petits supermarchés.L'idée est de permettre un meilleur maillage, au plus près des citoyens.
Chaque année, les consommateurs jettent environ vingt kilos de déchets d'équipements électriques et électroniques, les fameux DEEE, par personne, dont moins d'un tiers sont réutilisés ou recyclés. Il faut absolument simplifier le parcours de récupération pour nos concitoyens. Le présent amendement impose l'installation d'un dispositif de collecte pour les petits DEEE dans l'ensemble des magasins d'une surface de vente supérieure ou égale à 400 mètres carrés – l'équivalent d'un petit supermarché. Aujourd'hui, la loi mentionne la possibilité de ces points de collecte ; il faudrait les rendre obligatoires si l'on veut que nos concitoyens recyclent leurs matériels.
Les dispositifs de la loi AGEC sont en cours de déploiement, certains décrets sont tout juste en train de sortir. Laissons ces mesures faire leurs preuves, d'autant que les obligations qui s'appliquent aux DEEE sont parmi les plus contraignantes si l'on regarde l'ensemble des filières à responsabilité élargie du producteur. Par ailleurs, étendre une telle obligation à tous les magasins de plus de 400 mètres carrés pourrait contraindre des distributeurs qui ne vendent aucun équipement électrique ou électronique à reprendre des appareils et à organiser la logistique nécessaire au stockage, ce qui peut être source de difficultés pratiques.
Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
L'amendement n° 69 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'une des solutions pour limiter l'empreinte environnementale des appareils numériques est de moins s'équiper, de réparer et de réemployer les appareils, et de mieux les collecter pour davantage recycler. Aujourd'hui, paradoxalement, le marché des reconditionneurs du numérique manque de gisements d'appareils usagés. C'est une situation aberrante puisque selon l'ADEME, 54 à 113 millions de smartphones dorment dans nos placards. J'invite ceux qui sont présents et ceux qui nous regardent à explorer leurs tiroirs pour les retrouver.
Le rapport proposé à l'article 12 bis sera l'occasion d'identifier les éventuels blocages, éventuellement grâce à des études comportementales, pour comprendre les freins à la collecte et à la réutilisation. Il permettra également de créer des incitations. Je pense en particulier à des campagnes d'information sur la possibilité de rendre l'appareil écologiquement vertueux, et pourquoi pas à des garanties sur la récupération des données personnelles ou la neutralisation des photos, des adresses, etc. Il faudrait également mieux informer l'utilisateur sur les lieux de collecte.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 255 .
L'article 12 bis , introduit en séance au Sénat, demande l'établissement d'un rapport sur les mesures à envisager pour améliorer le recyclage, le réemploi et la réutilisation des équipements. Le présent amendement propose d'y ajouter les mesures visant l'amélioration de la collecte.
La collecte est bien sûr un enjeu important mais, à mon sens, il entre déjà dans le champ du rapport. La collecte constitue bien une mesure visant à améliorer le recyclage, le réemploi et la réutilisation des équipements numériques. Votre amendement étant satisfait, j'en demande le retrait. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis. L'amendement est satisfait.
L'amendement n° 255 est retiré.
L'article 12 bis est adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 182 .
Il s'agit de s'assurer que l'approvisionnement en matières premières stratégiques pour la fabrication en France de produits électroniques se fait en constante amélioration en termes d'impacts environnementaux. Nous importons et fabriquons des matières premières stratégiques à l'usage de notre industrie microélectronique. L'entreprise Alteo, implantée dans ma circonscription, à Gardanne, seule entreprise au monde à fabriquer des alumines de spécialité, qui avait été fortement critiquée pour des rejets de boues rouges en mer, a été rachetée par un opérateur étranger qui ambitionne de délocaliser les deux tiers de la fabrication de l'hydrate d'alumine en Guinée ou dans d'autres pays, où la production aura des impacts environnementaux bien plus importants qu'en France.
J'estime que nous ne pouvons plus accepter que des dirigeants d'entreprise exportent vers d'autres pays des productions qui ont bénéficié d'investissements et souvent d'aides publiques. En l'occurrence, ce sont plusieurs dizaines de millions d'euros que les différentes agences de l'État ou l'État lui-même avaient versées à Alteo pour lui permettre d'accéder à un niveau élevé de performance en termes d'impact environnemental dans la production d'alumines de spécialité. Tout cela pour voir l'entreprise, une fois les procédés mis au point, arrêter les deux tiers de ses activités et délocaliser son processus de fabrication pour aller polluer d'autres mers ! Celles-ci seront certes loin de nous, mais la planète est unique et nous ne voulons plus de ce comportement de la part de certains chefs d'entreprise.
La feuille de route pour l'économie circulaire, la FREC, publiée en avril 2018, propose des actions concrètes pour réduire les impacts environnementaux et sociaux de l'extraction et de la production des métaux, et plus généralement de matières premières. Elle prévoit également une meilleure prise en compte de l'environnement et la participation du public dans les activités minières – mesures reprises par la réforme du code minier français, en cours de discussion dans le cadre de la loi « climat et résilience ». Elle mentionne enfin un accompagnement des entreprises françaises dans la mise en place d'une démarche de certification environnementale et sociale, pour réduire les impacts environnementaux et sociaux des matières premières, et d'une démarche de responsabilité sociale et environnementale spécifique à l'industrie minière.
Dans ce contexte, je vous demande, cher collègue, de retirer votre amendement. Sinon, j'émettrai un avis défavorable.
Même avis.
Je ne vais pas retirer l'amendement. Le faire reviendrait à expliquer à nos enfants qu'on a accepté de sacrifier une partie de notre industrie et de mettre cent personnes au chômage pour envoyer une pollution que nous avions fait disparaître sur notre sol, grâce à l'argent de nos concitoyens – car ce sont nos impôts qui ont permis les subventions versées à cette entreprise –, vers d'autres mers et océans. C'est et ce sera toujours incompatible avec mon engagement.
Les éléments que vous avez mentionnés, monsieur le secrétaire d'État, notamment la FREC dont j'étais grand témoin, donc l'un des garants, n'apportent pas de solution à ce problème. Au 1er janvier 2022, la pollution réapparaîtra au large de l'Afrique. Peut-on s'en satisfaire, simplement parce que ce ne sera pas à côté de chez nous ? Personnellement, je ne m'en satisfais pas. C'est pourquoi je maintiens l'amendement.
L'amendement n° 182 n'est pas adopté.
La parole est à M. François-Michel Lambert, pour soutenir l'amendement n° 175 .
Le présent amendement, que j'avais déjà présenté dans le cadre de la loi AGEC, concerne un autre domaine. Aujourd'hui, on exporte des déchets électroniques, de façon légale, mais sans égard pour la qualité des matières premières qu'ils contiennent. En effet, si on ne sait pas de quel appareil vient une carte électronique, on ne peut connaître sa composition exacte. Nous exportons donc beaucoup de valeur. Beaucoup de ces produits, tels que l'or, l'argent ou le platine, mériteraient de rester en France.
L'amendement demande que chaque exportation de ce type de déchets électroniques soit accompagnée d'une déclaration du poids et de la valeur des matières premières stratégiques qu'ils contiennent. C'est très important. On ne peut pas, d'un côté, monter toute une stratégie de résilience et même de souveraineté dans le domaine des matières premières stratégiques, et de l'autre, ne pas prêter attention aux déchets électroniques qui partent vers d'autres pays et continents.
Votre amendement me paraît satisfait. Le suivi, notamment celui des objets électroniques exportés, est déjà réalisé par les producteurs et les éco-organismes. Ainsi, le rapport de l'ADEME relatif aux équipements électriques et électroniques, daté de 2020 et portant sur les données de 2019, indique qu'en 2019, quelques producteurs et les éco-organismes ont déclaré, pour la quatrième fois, les quantités des équipements professionnels usagés exportés pour être réemployés hors de France, qui représentaient environ 7 300 tonnes. Le suivi effectué est donc assez précis. C'est pourquoi je propose le retrait de l'amendement ; sinon, avis défavorable.
Même avis.
M. le rapporteur et M. le secrétaire d'État doivent disposer d'éléments leur permettant de justifier les chiffres qu'ils avancent. Je retire donc l'amendement, mais je resterai très vigilant sur ce point, car je crains malgré tout que nous laissions partir des matières stratégiques avec les déchets exportés vers d'autres pays.
L'amendement n° 175 est retiré.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 334 portant suppression de l'article.
C'est un amendement de cohérence avec les mesures votées dans le cadre du projet de loi « climat et résilience ». L'Assemblée a décidé que les schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) devraient comporter « des indicateurs précis, exprimés en nombre de contrats ou en valeur et publiés annuellement, sur les taux réels d'achats publics relevant des catégories de l'achat socialement et écologiquement responsable parmi les achats publics réalisés par la collectivité ou l'acheteur concerné » et préciser « les objectifs cibles à atteindre pour chacune de ces catégories ». Il me semble, puisque qui peut le plus peut le moins, que l'article 13 A, qui apporte exactement la même précision mais uniquement pour le numérique, est par définition satisfait par cette disposition. Il est donc logique de le supprimer.
Au vu des éléments livrés par le Gouvernement, j'émets un avis favorable.
Je prends note de ce qui a été exposé par M. le secrétaire d'État. Néanmoins, le projet de loi « climat et résilience » n'a pour l'instant été examiné qu'en première lecture et n'est pas encore définitivement adopté. Il est un peu délicat de se référer à un texte encore en discussion. Malgré tout, je respecte la parole du Gouvernement et voterai l'amendement.
Lors de mon intervention dans la discussion générale, j'ai souligné que nous aurions peut-être dû généraliser l'approche adoptée face à l'impact environnemental du numérique dans le cadre de la loi « climat et résilience ». En effet, ce n'est pas la première fois qu'on nous y renvoie, expliquant qu'on y trouvera la réponse à nos questions. Néanmoins, quelle que soit ma confiance dans M. le rapporteur et M. le secrétaire d'État, et même si je compte retirer mon amendement n° 66 , je veux préciser que celui-ci aurait permis de dynamiser les stratégies de réutilisation et de réemploi, c'est-à-dire de reconditionnement. Nous ne devons pas fléchir dans ce domaine – or je crains que ce ne soit là le bilan de nos débats –, mais au contraire renforcer toute cette filière.
Nous sommes en train de débattre de l'amendement n° 334 du Gouvernement, mais le sens de votre intervention est clair.
Je comprends maintenant pourquoi vous hochiez la tête, monsieur le président ! En effet, je voterai l'amendement du Gouvernement, qui fera tomber le mien. Le résultat sera donc le même.
L'amendement n° 258 , ayant reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement, est retiré.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement n° 245 rectifié .
Cet amendement réécrit l'article 13 afin de préciser que les services de l'État et des collectivités territoriales prennent en compte l'indice de réparabilité, puis l'indice de durabilité, lors de l'achat public de biens numériques. La formulation proposée est plus cohérente avec la loi AGEC, qui est en train d'être mise en œuvre par différents décrets.
Par ailleurs, cet amendement supprime le renvoi à un décret pour fixer la manière dont l'indice de réparabilité et l'indice de durabilité seront pris en compte dans les marchés publics. Ce renvoi paraît en effet inutile, les modalités de prise en compte pouvant être précisées par le biais de guides à destination des acheteurs publics.
L'amendement n° 245 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté. En conséquence, l'amendement n° 38 devient sans objet.
L'article 13, amendé, est adopté.
Il s'agit d'un amendement de Matthieu Orphelin sur le très important sujet de l'obligation de réemploi des matériels informatiques par les administrations. Je remercie le rapporteur, car nous avons pu avancer ensemble sur cette question en commission. Nous présentons ici une série d'amendements visant à préciser le cadre, à commencer par la présente réécriture qui propose que l'obligation s'applique dès 2022.
La rédaction actuelle de l'article 13 bis , complétée par mes amendements n° 247 , 248 et 249 rectifié , que nous allons examiner ensuite, me paraît préférable à votre amendement de rédaction globale. Vous prévoyez de décaler l'entrée en vigueur au 1er janvier 2022 ; une entrée en vigueur immédiate du dispositif me paraît toutefois préférable à une entrée en vigueur différée.
Les modalités d'application de l'article doivent néanmoins être précisées. C'est pourquoi il convient de renvoyer à un décret à la fois le calendrier de mise en œuvre et la proportion des appareils concernés.
Enfin, je propose dans mon amendement n° 249 rectifié que les équipements informatiques de plus de dix ans soient orientés vers la filière de recyclage plutôt que vers le réemploi ou la réutilisation. Avis défavorable, à moins que vous ne souhaitiez retirer votre amendement.
Le Gouvernement est favorable aux amendements du rapporteur, qui concernent tous des sujets attenants aux amendements de M. Orphelin et Mme Forteza. Je propose donc à Mme Forteza de retirer ses amendements au profit de ceux du rapporteur.
L'amendement n° 91 n'est pas adopté.
L'amendement n° 51 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Le texte précise que l'obligation de rémploi ou de réutilisation sera mise en place dans des proportions variant selon un calendrier défini par un décret en Conseil d'État. Nous souhaitons que cette proportion ne puisse être inférieure à 50 % – c'est l'objet du premier amendement. Le second, qui est un amendement de repli, prévoit qu'elle ne peut être inférieure à 20 %.
L'amendement n° 249 rectifié , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 13 bis, amendé, est adopté.
Cet amendement dont le premier signataire est Dominique Potier propose de permettre aux organismes de réutilisation ou de réemploi labellisés « entreprise solidaire d'utilité sociale » – ESUS –, de bénéficier du matériel informatique dont les services de l'État ou de l'un de ses établissements publics n'ont plus l'usage. En effet, il semble pertinent d'autoriser les collectivités à céder leur matériel non utilisé à certaines structures ?uvrant à la fois pour la cohésion sociale et l'environnement. Cet amendement a été rédigé avec le Mouvement Impact France.
Je remercie les auteurs de ces amendements, notamment Sandrine Le Feur, qui en avait déposé plusieurs sur ce sujet en commission. Avis très favorable, sous réserve de l'adoption de mon sous-amendement, qui est rédactionnel.
Favorable aux deux amendements, sous réserve de l'adoption du sous-amendement du rapporteur.
Le sous-amendement n° 362 est adopté.
La parole est à M. le secrétaire d'État, pour soutenir l'amendement n° 203 de suppression de l'article.
L'article 14 postule un taux réduit de TVA pour les équipements reconditionnés. Le Gouvernement est favorable à un taux réduit de TVA, mais cela est couvert par le droit communautaire, avec lequel cet article serait incompatible – autant dire qu'il n'aurait aucune portée. J'ai eu l'occasion de le préciser à plusieurs reprises ici même, le Gouvernement agit au niveau européen, dans les négociations avec nos partenaires, en faveur d'un taux de TVA réduit pour les équipements reconditionnés. C'est la position très officielle de la France. En bonne légistique et afin d'éviter de voter des éléments dont nous savons qu'ils sont incompatibles avec le droit communautaire et seraient jugés tels dans le cadre de la discussion avec l'Union européenne, il me semble qu'il convient, pour la bonne tenue de la loi, de supprimer cet article.
L'amendement n° 203 , accepté par la commission, est adopté ; en conséquence, l'article 14 est supprimé.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 122 .
Cet amendement vise à prolonger la durée pendant laquelle les reconditionneurs bénéficient d'un accès non discriminatoire aux pièces détachées, modes d'emploi, informations techniques ou à tout autre instrument, équipement ou logiciel permettant la réparation des produits. L'allongement de la disponibilité des pièces détachées est un réel moyen d'améliorer la réparabilité et de lutter contre l'obsolescence programmée. L'amendement prévoit également que les particuliers puissent accéder à une liste de pièces détachées, d'informations et d'outils définis par décret.
Vous proposez d'étendre à dix ans la durée minimale de disponibilité des pièces détachées des petits équipements informatiques, qui a été fixée à cinq ans par la loi AGEC. Je rappelle que la durée de cinq ans est une durée minimale, mais qu'elle peut être supérieure – un décret prévu dans la loi « climat et résilience » le permettra.
Par ailleurs, l'article D. 111-4 du code de la consommation définit les conditions de l'information obligatoirement répercutée par le vendeur au consommateur : préalablement à la vente, le consommateur doit être en mesure de connaître l'existence des pièces détachées disponibles indispensables à l'utilisation du bien qu'il souhaite acheter. Cette information lui est délivrée de manière visible et lisible sur tout support adapté. Elle est reproduite lors de l'achat du bien sur le bon de commande, s'il existe. Je vous invite donc à retirer votre amendement, à défaut de quoi l'avis sera défavorable.
L'amendement n° 122 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement permet l'accès des reconditionneurs à l'impression en trois dimensions des pièces détachées non disponibles. C'est cohérent avec ce que nous avons voté en commission, puisque nous avons accordé aux reconditionneurs le même statut qu'aux réparateurs.
L'amendement n° 250 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'amendement n° 251 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 14 bis AA, amendé, est adopté.
L'amendement n° 160 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 6 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'objet de cet amendement est de prévoir l'interdiction de mise sur le marché des équipements électriques et électroniques dont l'indice de réparabilité et de durabilité serait trop faible. Il s'agit de nous doter d'un outil juridique supplémentaire afin de lutter contre l'obsolescence programmée en amont de la mise sur le marché. Une telle interdiction permettrait de mettre un frein à l'invasion de produits importés à la fois peu robustes et peu réparables qui concurrencent de manière souvent abusive les produits fabriqués sur le sol européen dans des conditions sociales et environnementales en général plus acceptables.
Elle éviterait de voir se multiplier les offres de biens numériques très bas de gamme, qui relèvent davantage du gadget que d'un authentique équipement. L'exposé des motifs de l'amendement cite l'exemple des tablettes numériques proposées gracieusement avec, par exemple, un abonnement d'un an à un périodique. Ces équipements qui n'en sont pas, distribués sous des marques ou des appellations douteuses, représentent un gaspillage inutile de ressources.
Je partage votre objectif. Toutefois, une interdiction des produits dont l'indice de réparabilité ou de durabilité est inférieur à un certain seuil me paraît excessive, voire inconstitutionnelle. Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
Cette proposition de loi sur l'empreinte environnementale du numérique vise à faire en sorte que chacun – nos concitoyens, nos entreprises, qu'il s'agisse de l'artisan, de la TPE, de la PME ou des grands comptes, l'administration publique – ait conscience de l'impact du numérique, qui n'est pas neutre. Il n'est pas neutre à l'usage, il n'est pas neutre à la fabrication. Il n'est pas concevable de laisser un pan de libre gaspillage du numérique à travers les tablettes offertes, comme celles que nous avons tous reçues, dans une boîte cartonnée, d'un lobby nous disant le plus grand bien de l'hyperconsommation. Cet objet finit malheureusement très souvent à la poubelle.
Nous ne pouvons pas, dans le même temps, faire pression sur les Français afin qu'ils limitent l'usage de leurs appareils électroniques et laisser certains acteurs économiques, en particulier des médias, entièrement libres de proposer des promotions indécentes et de distribuer des matériels de mauvaise qualité, à l'empreinte environnementale fortement négative, depuis l'extraction de la matière première et la fabrication jusqu'à la distribution.
L'amendement n° 190 n'est pas adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt.
Au sujet de l'article 14 bis B, qui concerne la rémunération pour copie privée (RCP), je veux rappeler quelques évidences pour couper court aux contre-vérités régulièrement répétées dans le but d'éviter un débat de fond légitime.
Premièrement, la proposition de loi qui nous est soumise ne supprime en aucun cas la rémunération pour copie privée. Elle confirme simplement que les terminaux reconditionnés n'y sont pas soumis. De ce point de vue, je ne peux que regretter la décision de la commission pour la rémunération de la copie privée, dite commission copie privée, qui a préempté les débats du Parlement en publiant un barème spécifique pour les appareils reconditionnés selon un calendrier pour le moins surprenant – elle a publié ce barème le 2 juin, c'est-à-dire mardi dernier.
Deuxièmement, la copie privée est une ressource particulièrement dynamique grâce à un système très performant, dont on pourrait résumer la logique de la façon suivante : pile je gagne, face tu perds !
Sourires.
La recette de la RCP est en effet passée de 36 millions d'euros en 1987 à 273 millions d'euros en 2020, en dépit de la crise sanitaire. Face à une croissance aussi forte, difficile d'affirmer que l'on s'en prend à la culture !
L'extension de la RCP aux appareils reconditionnés fait en revanche des victimes du côté de la filière des reconditionneurs – qui comprend des acteurs de l'économie sociale et solidaire comme les Ateliers du Bocage, une coopérative membre d'Emmaüs – tout en réduisant le pouvoir d'achat des consommateurs qui ont un comportement écologiquement vertueux. La suppression de l'article 14 bis B enverrait donc un message totalement contraire à l'objectif même de la proposition de loi.
Enfin, la copie privée est une compensation des pratiques de copie des particuliers. Or, d'une part, les professionnels ne parviennent que marginalement à se faire rembourser en raison d'un mécanisme délibérément sibyllin et, d'autre part, ces pratiques de copie se sont largement évanouies dans une économie de flux et non plus de stocks. Cette situation ne saurait donc justifier d'étendre la RCP aux appareils reconditionnés, d'autant que les enquêtes d'usage réalisées à la demande de Copie France reposent souvent sur des bases peu représentatives – je vous renvoie, sur ce point, aux commentaires de l'institut CSA.
Pour conclure, j'espère donc, chers collègues, que nous réussirons à refuser l'opposition entre environnement et culture, créée artificiellement par des groupes de pression aux intérêts bien compris, et à remplir notre mission : légiférer dans l'intérêt général, sur un sujet qui nous concerne tous, l'environnement.
Mmes Véronique Riotton et Virginie Duby-Muller et M. François-Michel Lambert applaudissent.
Et puisqu'il est question de musique, permettez-moi une dernière remarque. Les lobbys des télécoms et les grands acteurs du numérique sont parfois qualifiés de « puissants ». J'ai mesuré, au contraire, qu'ils étaient des enfants de cœur par rapport à d'autres acteurs économiques. Jamais, en effet, je n'ai été menacé par Orange ou Google dans le cadre de mes fonctions !
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – M. François-Michel Lambert et Mme Virginie Duby-Muller applaudissent également.
Nous en arrivons enfin à l'article 14 bis B relatif à la rémunération pour copie privée, qui a déjà fait couler beaucoup d'encre. Je pense en particulier à la tribune publiée il y a quelques jours dans le Journal du dimanche, qui a recueilli les signatures de plus de 1 600 artistes, auteurs et autres acteurs culturels.
Je défendrai tout à l'heure un amendement de suppression de cet article introduit par le Sénat mais je souhaite à mon tour, de nombreuses choses ayant été dites sur la copie privée, parfois de manière caricaturale, tronquée voire malhonnête, remettre quelques pendules à l'heure et rappeler quelques faits.
Tout d'abord, la rémunération pour copie privée n'est pas une taxe – c'est un mot que l'on a beaucoup entendu et même lu dans des courriels qui nous ont été adressés. Ensuite, maintenir la rémunération pour copie privée sur les appareils reconditionnés ne revient pas à payer deux fois, ce que l'on a également entendu dire et ce qui est mensonger. Un appareil reconditionné n'est pas un appareil d'occasion. C'est un appareil qui fait l'objet d'un nouvel usage et auquel s'attache donc à nouveau la capacité, en quelque sorte réinitialisée, de réaliser des copies. Par ailleurs, l'usage des copies privées n'a pas disparu avec l'ère du streaming. Enfin, il ne faut pas confondre, dans le même écosystème, les petits reconditionneurs locaux et les grandes places de marché, dont nous savons bien qu'elles ne tiennent pas toujours un discours honnête, complet et transparent.
J'y reviendrai tout à l'heure et je montrerai, à l'aide d'exemples précis, à quel point l'économie de la culture a besoin du système de la rémunération pour copie privée.
Je serai clair : je m'exprime à titre personnel et non au nom du groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés. Notre collègue Éric Bothorel a évoqué des faits que je souhaite à mon tour dénoncer, madame la ministre de la culture : jamais sur aucun autre texte n'ai-je ressenti autant de méchanceté, ni entendu autant de propos malveillants, de la part de personnalités qui occupent, pour certaines d'entre elles, les postes de directeurs généraux de sociétés d'ayants droit. Ces personnes se sont montrées insultantes envers les parlementaires, des députés comme des sénateurs, ce qui est inacceptable.
Que va devenir ce texte ? Cette question va se poser, madame la ministre, et j'aimerais connaître votre réponse. Pour que les mesures contenues dans la proposition de loi portent leurs fruits, il faudra que le texte soit promulgué. Si, pour une raison ou une autre, la procédure législative n'allait pas jusqu'au bout, c'est la décision rendue par Copie France mardi dernier qui s'appliquerait et les appareils reconditionnés seraient assujettis à la RCP, y compris dans la filière de l'économie sociale et solidaire – ce qui constituerait un véritable problème.
Autre question : comment seront gérées, au sein de Copie France, les cinq années de redevance pour copie privée non versées aux professionnels qui n'en ont pas encore demandé le remboursement ? Ces redevances représentent un total de 200 millions d'euros. Le commissaire aux comptes de Copie France a-t-il demandé le provisionnement de ce montant dans les comptes de la société ?
Je terminerai par une remarque de forme – mais nous y reviendrons tout à l'heure. À l'origine, l'activité de Copie France et la redevance pour copie privée faisaient l'objet d'un texte réglementaire, dans le cadre des travaux d'une commission réglementaire. Cette proposition de loi inscrit le dispositif dans la loi : celle-ci prendra désormais le pas sur le mécanisme réglementaire. Il s'agit d'une avancée novatrice, mais elle posera des problèmes juridiques s'agissant des conflits, aujourd'hui nombreux, entre les entreprises du reconditionné et Copie France. Des décisions judiciaires sont attendues et vous avez proposé des médiations pour régler les problèmes. Comment y parviendrez-vous, madame la ministre, et quel médiateur nommerez-vous pour faciliter le règlement des conflits ?
Cet article complexe vise à exclure les terminaux reconditionnés de l'assujettissement à la RCP. Il a provoqué un vif émoi dans le monde culturel ; étant membre de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire tout en étant sensible aux sujets économiques, je pensais moi-même à l'origine qu'une fois reconditionné, un produit ne devait pas être taxé de nouveau, et j'ai pris franchement position en ce sens en commission. Cependant, j'ai pris conscience de l'importance de cette redevance pour le secteur culturel après avoir été interpellée par certains de ses représentants : elle est susceptible de soutenir fortement la création, notamment dans le contexte la sortie de la crise sanitaire. J'ai été sensible à ces arguments.
Par ailleurs, je travaille avec la commission des affaires culturelles sur les questions liées au secteur de l'audiovisuel. Je sais combien il a été affecté et nous nous sommes battus, lors de l'examen du troisième PLFR l'an dernier, pour que soient engagés des moyens complémentaires au soutien de l'expression culturelle, de nos médias et de nos artistes. Je sais que la RCP a été un outil important pour les soutenir en 2020, et c'est encore le cas cette année. J'ai donc révisé ma position.
C'est un sujet complexe et il me paraît important, quelle que soit la décision que nous prendrons tout à l'heure, de ne pas opposer les deux mondes étroitement liés que sont la culture et l'économie sociale et solidaire. C'est quelque chose qui me tient à cœur : dans le milieu associatif, j'ai eu l'occasion de côtoyer étroitement les uns et les autres. Vous le savez, le monde culturel soutient énormément celui de la solidarité ; nos artistes et nos auteurs s'y investissent abondamment, à la fois dans leurs propres créations mais aussi en participant à des actions et à des événements solidaires.
Nous devons vraiment éviter de faire du présent article le théâtre d'un débat entre ces deux mondes, parce que je suis persuadée qu'ils ne s'opposent pas. Ils sont tous deux en difficulté et il faut trouver une voie médiane pour les soutenir. Il me semble que l'amendement n° 230 du Gouvernement ouvre une piste en ce sens ; j'ai pour ma part déposé un sous-amendement et je vous demanderai, madame la ministre, de faire preuve d'ouverture d'esprit en l'acceptant. Je sais que vous défendez le secteur culturel mais nous souhaitons aussi que cela ne se fasse pas au détriment des toutes petites entreprises qui produisent des supports reconditionnés – il y a un contentieux en cours et pour le moment, elles ne paient pas la RCP. Il faut trouver les voies permettant de protéger l'économie sociale et solidaire.
Sur l'amendement n° 230 du Gouvernement, je suis saisi par le groupe Libertés et territoires d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. François-Michel Lambert.
Tout d'abord, permettez-moi d'apporter mon plein soutien à Éric Bothorel, dont la liberté de député a été la cible de menaces puisque j'ai cru comprendre qu'il ne pourrait pas accéder à certains festivals si son comportement ne se conformait pas à ce qui est attendu par certains.
Il faut le dire, ce n'est pas acceptable ; je suis élu depuis bientôt neuf ans et je n'ai jamais entendu une chose pareille. Ensuite, nous devons essayer de réunir les deux mondes. Celui de la culture est en grande difficulté, nous n'en doutons pas, et le Gouvernement, par l'intermédiaire de Mme la ministre, engage des moyens conséquents pour venir à son soutien. Les acteurs et les élus des territoires font tous en sorte que l'activité culturelle puisse redémarrer. Des chiffres ont été cités mais permettez-moi, cher collègue Bothorel, de les compléter : s'agissant de la redevance pour copie privée, vous vous êtes arrêté au chiffre de 2020 – 273 millions d'euros – mais nous en sommes désormais à 290 millions. Autrement dit, 17 millions supplémentaires ont déjà été collectés en 2021 ! La RCP ne décroît pas ; au contraire, elle est en croissance et il faut le souligner.
On peut s'inquiéter du fait que cette croissance finira par s'arrêter un jour et prendre des dispositions susceptibles de la compenser, mais – je le dis en vertu de mon ancienneté – ce serait bien la première fois qu'on lancerait une nouvelle collecte fiscale pour en remplacer une qui est encore en croissance, simplement parce qu'on s'inquiète de la voir se tarir.
Enfin, permettez-moi de revenir sur les débats que nous avons eus ici même, d'autant que vous n'étiez pas présente à cette occasion, madame la ministre. Le crédit d'impôt à la numérisation a été supprimé alors qu'il était très favorable à l'acquisition d'équipements reconditionnés ; la TVA à 5,5 %, qui avait été instituée dans la loi et qui bénéficiait uniquement aux produits reconditionnés, a elle aussi été supprimée ; un recul s'observe également en matière d'achats publics. Le grand perdant, à l'instant où je vous parle, ce sont les articles reconditionnés et donc tous les opérateurs qui en vivent, qu'ils soient des acteurs de l'économie sociale et solidaire ou de petits artisans de quartier, ceux qui travaillent dans des boutiques de 10 mètres carrés et pour qui 200 euros de plus ou de moins à la fin du mois signifient la vie ou la mort de leur activité économique.
Vous avez bien fait, monsieur le député, de rappeler que la liberté de vote est évidemment totale dans cet hémicycle, et qu'il est inacceptable que des députés subissent des pressions ou des menaces au motif de leur vote. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, LR, Dem, SOC, UDI-I et LT.
Le sujet est essentiel et je suis venue ici pour trouver des solutions de conciliation entre des intérêts qui doivent pouvoir trouver un chemin commun. Bien entendu, je m'associe complètement à la condamnation qui vient d'être faite contre certaines manœuvres et pressions exercées à l'encontre de représentants de la nation ; elles sont évidemment tout à fait inacceptables. Elles permettent aussi de mesurer la passion soulevée par cette question qui entraîne beaucoup de confusion. Je veux donc redire des choses toutes simples.
Je le répète, à la suite de Constance Le Grip : la redevance pour copie privée n'est pas une taxe, c'est une rémunération de droits d'auteur.
Contrairement à ce que je viens d'entendre, ce n'est en aucun cas une mesure fiscale : elle ne tombe pas dans les poches de l'État. Je veux dire très solennellement – et j'espère qu'il en sera question lors de la prochaine campagne présidentielle – que la propriété intellectuelle est une question centrale pour le monde de la culture :
Applaudissements sur divers bancs
670 000 personnes vivent du secteur culturel qui représente 2,3 % du PIB, soit plus que l'industrie automobile.
J'en vois beaucoup se battre pour la relocalisation de l'industrie automobile ou pour la sauvegarde de l'aéronautique, mais ils ne le font pas pour la propriété intellectuelle, alors qu'elle fonde la valeur ajoutée de nos industries culturelles.
Mêmes mouvements.
Dans le monde actuel, au vu des menaces qui pèsent sur elles – les grandes plateformes, le piratage dont nous allons parler dans quelques jours –, nous savons bien à quel point cette question est centrale. Il faut donc que nous l'ayons bien en tête : il s'agit d'une rémunération de droits d'auteur, et je peux vous dire que si les sommes évoquées paraissent importantes quand elles sont exprimées globalement, ce sont en fait des dizaines voire des centaines de milliers de gens qui vivent grâce à elles, parfois avec quelques centaines d'euros par mois. Bien sûr, il semble que cela fasse beaucoup d'argent, mais tous ces droits sont répartis entre 200 000 personnes.
Ce n'est donc pas une taxe mais bien une rémunération. L'exception de copie privée a été consacrée par des textes nationaux mais aussi européens, en particulier – je le rappelle – par la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 ; elle constitue donc un élément important de notre droit. Elle impose une obligation de résultat : l'État membre qui a introduit l'exception de copie privée dans son droit national « est tenu d'assurer, dans le cadre de ses compétences, une perception effective de la compensation équitable destinée à indemniser les auteurs lésés du préjudice subi, notamment si celui-ci est né sur le territoire dudit État membre. »
C'est un mécanisme essentiel pour… excusez-moi, le covid a quelque peu altéré ma fluidité. C'est évidemment un mécanisme essentiel, disais-je, pour la création, et il est en outre favorable au consommateur : il prévoit – vous le savez, mais je le répète – que les organismes de gestion collective consacrent 25 % des sommes perçues au titre de la RCP à des actions d'aide à la création et à la diffusion du spectacle vivant, ainsi qu'à des actions de formation des artistes et d'éducation artistique.
En France, 10 000 manifestations culturelles sont financées par le mécanisme de la copie privée, ce qui explique peut-être les réactions de peur et de frustration qui s'observent ; je ne les soutiens pas mais elles sont en quelque sorte explicables, si l'on considère la perspective de voir certaines sources de financement se tarir durablement, d'autant qu'une ordonnance que nous avons prise a offert la possibilité d'utiliser une partie des 25 % pour financer des mesures d'urgence à l'égard d'artistes en grande difficulté. Si je ne les soutiens pas, je peux ainsi comprendre certaines réactions.
Je veux ensuite répondre à plusieurs questions qui ont été posées. D'après certains, les travaux de la commission de la copie privée ne seraient pas transparents. Pourtant, beaucoup a été fait pour renforcer leur transparence : depuis 2017, tous les comptes rendus des séances de la commission sont publiés sur le site du ministère de la culture et les documents qu'y échangent ses membres, y compris les propositions de barèmes, s'y trouvent régulièrement annexés. Les décisions adoptées par la commission sont publiées au Journal officiel ; elles détaillent la méthodologie et le calcul des barèmes. Un rapport annuel présentant son activité est également publié sur le site du ministère et adressé au Parlement ; celui qui concerne l'année 2020 l'a été il y a quelques semaines. Les ayants droit présentent tous les ans devant la commission l'état annuel des collectes de rémunération pour copie privée et ces chiffres sont rendus publics.
La loi « création » du 7 juillet 2016 a également permis de renforcer la transparence des travaux de la commission. Elle l'a fait d'abord en imposant la publication de son règlement intérieur au Journal officiel et la constitution d'une base de données qui est mise en ligne – elle est d'ailleurs commune à l'ensemble des organismes de gestion collective – et qui recense, avec le nom de leurs bénéficiaires, le montant et l'utilisation des 25 % affectés à des actions artistiques et culturelles. Pour renforcer la transparence des travaux de la commission vis-à-vis des pouvoirs publics, la loi prévoit également qu'y siègent trois personnes représentant les ministres chargés de la culture, de l'industrie et de la consommation. Enfin, elle a aussi veillé à prévenir d'éventuels conflits d'intérêts en imposant au président et aux membres de la commission de transmettre une déclaration d'intérêts au président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) dans un délai de deux mois suivant leur nomination.
De plus, si cette redevance a augmenté, c'est qu'elle a consacré au fil des ans la rémunération des droits d'auteur. Il ne faut pas s'étonner de voir des chiffres en augmentation :…
…c'est tout à fait normal puisque le principe même n'existait pas auparavant. Alors que nous étions dans le flou, nous avons progressivement légiféré pour rémunérer ces artistes et ces producteurs de biens culturels.
Un deuxième argument est avancé : les études d'usage et les barèmes ne seraient pas actualisés régulièrement. Dans une décision du 17 juin 2011, le Conseil d'État a affirmé l'obligation pour la commission copie privée d'actualiser régulièrement les enquêtes et les sondages sur lesquels elle se fonde pour fixer les barèmes. Elle respecte scrupuleusement cette obligation – nous y veillons : elle a ainsi achevé en 2020 l'actualisation des douze familles de supports assujettis à la rémunération, sur la base de nouvelles études d'usage. Le mandat des membres de la commission actuelle touche à sa fin en 2021 ; il appartiendra à la commission renouvelée cette année d'inscrire dans son programme de travail triennal l'actualisation des études d'usage menées ces dernières années.
J'entends souvent un troisième argument qui me semble curieux : une distorsion de concurrence résulterait de ce que les places de marché ne paient pas la RCP. La loi prévoit que sont redevables de la rémunération les fabricants de supports vierges et d'appareils d'enregistrement, ainsi que les personnes qui acquièrent ces supports à l'étranger et les importent en vue de les revendre sur le territoire français. En tant que place de marché, Back Market – appelons-le par son nom – est un intermédiaire qui met en relation des vendeurs et des acheteurs, mais il ne vend pas lui-même des supports.
N'étant pas un importateur au sens du code de la propriété intellectuelle, cette plateforme n'est donc pas redevable de la RCP. En revanche, les vendeurs présents sur cette place de marché, dont certains sont des professionnels, doivent s'acquitter de la RCP au même titre que de la TVA. Il n'y a donc pas de produits importés qui ne seraient pas soumis à la RCP comme je l'ai entendu de façon récurrente dans le débat actuel. Les produits reconditionnés sont assujettis, qu'ils aient été reconditionnés en France puis commercialisés sur le territoire, ou reconditionnés à l'étranger puis importés en France. Il n'y a pas de distorsion de concurrence à ce niveau.
Autre argument que je viens d'entendre : l'assujettissement des supports reconditionnés aboutirait à imposer un double paiement de la rémunération. La RCP vise à compenser le préjudice subi par les titulaires de droits qui découlent de la réalisation de copie privée.
Lorsqu'un support est réintroduit sur le marché à la suite de sa remise en état et de son reconditionnement, il permet la réalisation de nouvelles copies par un nouvel utilisateur. Il en résulte un nouveau préjudice qu'il convient de rémunérer.
En outre, les barèmes de la commission, notamment sur les téléphones multimédias neufs, ont été fixés sur la base d'une durée d'utilisation de deux ans. On ne saurait donc affirmer que ce barème couvre toute la durée de vie des téléphones mobiles et que tout assujettissement ultérieur à la première mise en vente constituera un double paiement. La durée de vie technique d'un téléphone mobile multimédia laisse à l'évidence la place à deux durées d'usage successives et à deux rémunérations distinctes.
Vous m'avez interrogée également sur la procédure de remboursement des professionnels, qui serait ineffective. Depuis la loi de 2011, la RCP n'est pas due pour les supports d'enregistrement acquis notamment à des fins professionnelles. Il existe deux procédures – l'exonération et le remboursement – qui ont la même finalité : traiter le non-assujettissement de supports d'enregistrement mis en circulation sur le territoire lorsqu'ils sont in fine exportés ou utilisés à des fins exclusivement professionnelles.
Les professionnels qui acquièrent de façon régulière une quantité importante de supports peuvent signer une convention d'exonération avec la société Copie France ; ceux qui acquièrent de tels supports de manière occasionnelle peuvent demander le remboursement de la RCP à Copie France. Depuis 2011, le volume des exonérations et remboursements des rémunérations pour usage professionnel n'a cessé d'augmenter. Je tiens évidemment les chiffres à la disposition de ceux, nombreux, que cela intéresse.
Dernier argument auquel je veux répondre à ce stade – j'apporterai d'autres réponses au cours de l'examen des amendements : l'assujettissement des supports reconditionnés aurait de lourdes répercussions sur l'activité des reconditionneurs du champ de l'économie sociale et solidaire. L'étude de l'institut GFK, réalisée en avril 2021 à la demande de la commission copie privée, a démontré que le marché du reconditionné concerne principalement des supports récents – de moins de deux ans – et de grandes marques – Apple et Samsung –, et qui présentent des capacités d'enregistrement assez importantes – 64 gigaoctets.
Les données recueillies ont mis en évidence la place prépondérante des plateformes sur ce marché et une nette domination de Back Market. Au regard de ces éléments, la part de marché des reconditionneurs solidaires tels qu'Emmaüs, qui commercialisent des supports plutôt anciens et de faible capacité, est donc très marginale. En outre, la mise en place d'un barème adapté aux supports reconditionnés, affecté d'un abattement important, permet de limiter l'impact de la RCP sur les reconditionneurs issus de l'économie sociale et solidaire.
C'est la voie que nous pourrions emprunter pour trouver une solution de consensus qui respecte la propriété intellectuelle, les droits de ceux qui ont produit ces biens culturels à se voir justement rémunérés, tout en protégeant l'économie sociale et solidaire.
Voilà la voie de compromis que je vous proposerai au cours de ce débat.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs des groupes Dem, SOC et UDI-I ; Mme Constance Le Grip applaudit également.
Merci, madame la ministre, d'avoir apporté des explications et des informations très claires, complètes et précises, qui éclaireront nos débats et permettront à chacun de se faire une opinion. Vous ne manquez pas de souffle, madame la ministre, pour défendre les causes qui vous sont chères.
Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs.
Cet amendement vise en effet supprimer l'article 14 bis B dont la rédaction me semble préjudiciable au système de RCP. Je pourrais vous lire, par exemple, le courrier que m'a adressé M. Laurent Petitgirard, secrétaire perpétuel de l'Académie des beaux-arts, dans lequel il insiste sur l'importance que son institution accorde à ce système qu'il juge essentiel à l'économie de la culture. Je ne sache pas que M. le secrétaire perpétuel de l'Académie des beaux-arts ait pour habitude de pratiquer quelque pression que ce soit sur qui que ce soit.
En écho aux propos de Mme la ministre, j'insiste à mon tour sur le fait que les sommes collectées au titre de la RCP financent aussi des projets culturels d'intérêt général : 75 % du produit de la RCP est reversé à des auteurs, artistes, éditeurs et producteurs ; le reste finance des projets culturels – festivals, salons du livre, expositions, projets d'éducation artistique et culturelle – partout sur notre territoire. C'est un élément structurant de la politique culturelle française et du financement de la création culturelle.
C'est pour toutes ces raisons que j'ai demandé la suppression de l'article 14 bis B tel que rédigé. J'ai vu avec beaucoup d'intérêt et de satisfaction se profiler des rédactions alternatives, notamment par le biais d'un amendement du Gouvernement. Je serai certainement amenée un peu plus tard à dire tout le bien que je pense de cette réécriture.
Madame la ministre, je vous remercie aussi pour vos explications.
Nous proposons de supprimer cet article qui prévoit que la RCP n'est pas due lorsque les supports d'enregistrement sont issus d'activités de préparation à la réutilisation ou au réemploi de produits. Cette disposition, introduite lors du débat au Sénat, soulève des questions.
Payée par les fabricants et les importateurs, cette redevance – qui n'est pas une taxe – finance non seulement des revenus compensatoires pour les ayants droit de tous les secteurs culturels, mais aussi des aides à la création. Dans une période où le secteur culturel a subi de plein fouet les conséquences de la crise sanitaire, cette disposition est un très mauvais signal.
En outre, et contrairement à ce qu'affirme l'article, le maintien de la redevance pour des produits reconditionnés n'est pas une forme de double imposition : la redevance ne s'attache pas au bien lui-même mais à son usage. En étant revendu, ce bien engendrera de nouveaux usages, ce qui justifie la perception de cette redevance.
Surtout, la commission copie privée, réunie le 1er juin, a décidé d'établir un tarif différencié modifiant les tarifs jusqu'alors applicables aux mémoires et disques durs intégrés aux téléphones et tablettes tactiles multimédias reconditionnés. Ces deux catégories de support bénéficieront, à compter de l'entrée en vigueur de la nouvelle décision, d'un abattement fixé respectivement à 40 % pour la première catégorie et à 35 % pour la seconde. Cette décision rend caduque la rédaction du présent article, en déterminant une position d'équilibre entre la préservation de la rémunération des ayants droit et la prise en compte des spécificités du marché du reconditionnement. En conséquence, nous demandons la suppression de cet article.
En abordant les débats très attendus sur cet article, j'apprécie le retour à un climat apaisé qui contraste avec celui des dernières semaines. À titre personnel, j'apporte mon total soutien à Éric Bothorel, rapporteur pour avis, qui a fait l'objet d'attaques. Pour avoir des goûts musicaux assez proches des siens, je sais qu'il est très sensible au sujet et très proche de la culture. Je n'en dirai pas plus.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Tu as tout mon soutien, Éric !
Au cours de la préparation de ce texte, notamment lors des travaux en commission, j'ai indiqué à tous que je regrettais la tournure hystérique qu'avaient pris les débats sur ce sujet qui suscite des réactions passionnées de part et d'autre. À titre personnel, il me semblait urgent d'attendre.
Au nom de la commission, je vais donner un avis défavorable à vos amendements de suppression afin de privilégier une solution de compromis : l'amendement du Gouvernement qui fait l'objet de plusieurs sous-amendements, dont l'un, auquel la commission est favorable, permet de protéger les acteurs de l'économie sociale et solidaire, élément essentiel auquel nous sommes très sensibles. L'amendement du Gouvernement permet aussi de protéger les reconditionneurs.
Les propos tenus montrent qu'il existe encore une difficulté concernant le statut de la RCP : est-ce une taxe ou une redevance ?
Cela étant posé, il faut que le débat se poursuive sur les amendements et les sous-amendements dans le même climat apaisé, ce qui permettra d'éclairer l'ensemble des acteurs et la représentation nationale. C'est pourquoi je demande le retrait de vos amendements. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Vous m'avez fait peur, monsieur le rapporteur : j'ai cru un moment que vous étiez défavorable à l'article et que vous souhaitiez sa suppression, ce qui aurait mis fin à la discussion sans que je puisse présenter de ma solution de compromis. Pourquoi suis-je venue, me suis-je alors demandé !
Sourires.
Je remercie Mme Le Grip, M. Bruneel et M. Minot. Ma première réaction, je ne vous le cache pas, aurait été d'aller directement dans votre sens, considérant que cette disposition n'était pas juste, mais ma position a évolué au cours des débats. Comme je l'ai dit, je suis venue avec l'idée d'aboutir à un compromis, de trouver une solution gagnant-gagnant.
J'ai entendu les craintes exprimées par certains acteurs du reconditionnement, non pas les gros bien entendu, mais ceux de l'économie sociale et solidaire.
La commission copie privée, commission indépendante mandatée pour cela, a travaillé depuis plusieurs mois sur la mise en place d'un barème différencié pour ces appareils. Il y a quelques jours, elle a annoncé ce barème, ce qui va dans le bon sens. Il faut évidemment inscrire de manière explicite dans la loi le principe d'un barème différencié : on ne peut pas le faire de manière subreptice. Je propose le retrait de ces amendements au bénéfice de celui que je vais présenter dans quelques instants.
Au vu des observations formulées par Mme la ministre et de l'esprit de conciliation qui l'inspire, je vais retirer mon amendement et celui de M. Minot au bénéfice de celui du Gouvernement.
Sourires.
Il aurait souhaité maintenir son amendement, mais il a entendu Mme la ministre, et il attend la proposition du Gouvernement. Si l'amendement à venir va dans le sens des propos des uns et des autres et de ce qu'a dit Mme la ministre, je lui fais confiance…
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Son intervention initiale sur l'article m'a rassuré et elle rassurera aussi le monde culturel. C'est pourquoi que je retire mon amendement.
L'amendement n° 185 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements, n° 230 , 304 et 100 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements n° 230 et 304 sont identiques.
L'amendement n° 230 fait l'objet des sous-amendements n° 361 , 339 358 , 363 et 341 . Les sous-amendements n° 358 et 363 sont identiques.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l'amendement n° 230 .
Nous avons déjà longuement parlé de cet amendement qui confie à la commission pour la rémunération de la copie privée le soin de déterminer une rémunération spécifique et différenciée, à l'aune des différences de capacité d'enregistrement, des usages, ainsi que de la durée d'utilisation des appareils reconditionnés, et de préserver les barèmes actuels jusqu'au 31 décembre 2022.
Je ne reviens pas sur tout ce qui fait le sel de cette affaire, c'est-à-dire une redevance qui permet de rémunérer les producteurs de biens culturels tout en en réservant une part substantielle pour soutenir des activités culturelles disséminées dans le territoire.
Après que nous avons entendu les craintes exprimées par les acteurs du reconditionnement, relayées par de nombreux parlementaires, je vous propose un amendement reposant sur trois principes qui déterminent une solution équilibrée alliant l'attention que nous portons au développement de la filière du reconditionnement, et notre attachement à la préservation du mécanisme essentiel de rémunération des droits d'auteur.
Il vise en premier lieu à confirmer l'assujettissement des supports reconditionnés à la rémunération pour copie privée en supprimant la mesure d'exonération votée par le Sénat. Il vise par ailleurs à conforter la décision prise par la commission copie privée de fixer des barèmes spécifiques pour les produits reconditionnés. L'amendement prévoit en effet que les barèmes doivent tenir compte des caractéristiques de ces supports, notamment en termes d'usages et de durée d'utilisation. Enfin, comme je le précisais en introduction, les barèmes récemment adoptés par la commission copie privée ne pourront pas être modifiés avant le 31 décembre 2022.
Des procédures contentieuses opposent aujourd'hui les ayants droit et certains reconditionneurs. Le Gouvernement est prêt à accompagner le dialogue entre ces acteurs dans les domaines à venir afin de faciliter la recherche d'accords avant la décision judiciaire. Je vous présenterai, dans un instant, un autre amendement qui permettra de tirer profit de cette période pour produire une étude relative aux impacts économiques de la rémunération pour copie privée, en particulier pour le secteur du reconditionné.
Je le répète, je suis venue ici dans un esprit d'apaisement pour parvenir à l'adoption de la solution la plus consensuelle possible. Il y va de l'héritage d'une loi fondatrice que nos prédécesseurs ont su adopter à l'unanimité…
…parce qu'elle engage notre responsabilité collective à l'égard de la création. Cet engagement commun pour la défense de nos créateurs prend un relief tout à fait particulier dans la période tragique que nous avons vécue et que nous continuons de vivre. Cet engagement n'est pas exclusif de la prise en compte d'autres préoccupations exprimées par les acteurs du reconditionnement – pas tous, nous sommes bien d'accord, mais notamment ceux de l'économie sociale et solidaire. Bien au contraire, car l'amendement du Gouvernement vise à ce que l'on puisse tenir compte de la spécificité des supports. Je vous propose une voie qui est vraiment celle de l'apaisement et de la conciliation d'intérêts qui sont les uns et les autres légitimes.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem. – Mmes Maina Sage et Constance Le Grip applaudissent également.
Avec un certain nombre de collègues du groupe La République en marche, nous présentons un amendement identique à celui du Gouvernement et nous abondons dans le sens de la ministre. Il vise à concilier deux objectifs essentiels pour notre pays, d'une part, en respectant notre trajectoire carbone – nous avons déjà longuement parlé de ce sujet et nous en reparlerons à l'occasion de la suite de l'examen du projet de loi « climat et résilience » –, d'autre part, en menant la bataille française pour l'exception culturelle et les enjeux évidents de soutien à la souveraineté et à la diversité culturelle.
Notre amendement de compromis permet d'emprunter une voie médiane qui garantit que la copie privée assure la juste rétribution et rémunération de ceux qui créent et qui font l'identité de notre pays, tout en faisant bénéficier les acteurs du reconditionné de barèmes actualisés. Cette voie permet d'affirmer pleinement notre attachement aux enjeux essentiels de la transition écologique et énergétique, notre attachement à certains secteurs, notamment celui de l'économie sociale et solidaire, tout en réaffirmant clairement que la copie privée n'est pas là pour faire plaisir à quelques-uns, qu'elle n'est pas une taxe, mais qu'elle est essentielle à la survie de centaines de milliers d'artistes et d'auteurs de notre pays, et à la vitalité de nos territoires – je rappelle que 64 % de nos festivals sont financés grâce à la rémunération pour copie privée. J'espère que cette voie médiane et juste pourra nous réconcilier.
Nous en venons aux sous-amendements. La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir le sous-amendement n° 361 .
Je profite de la défense de cet amendement rédactionnel pour réagir sur certains des arguments évoqués par Mme la ministre.
Personne dans cet hémicycle, même parmi ceux qui s'interrogent sur le fonctionnement de la RCP, n'affirme que nous avons affaire à une taxe. Si la presse reprend cet argument massue, c'est, après tout, sa liberté, même s'il faut le dénoncer. Quant à nous, nous avons bien compris qu'il s'agit d'une redevance autogérée, confiée à un organisme qui décide lui-même du barème et de l'assiette selon une organisation sur laquelle nous pourrons revenir.
Je ne rougis pas de ce que nous avons fait pour la culture et je suis très fier, madame la ministre, d'avoir ajouté ma voix à celle d'autres collègues pour orienter plus de 11 milliards d'euros vers secteur de la culture. Je ne suis pas de ceux qui vous diront : 300 millions, c'est trop ! Si demain il existait une modalité nouvelle de perception auprès des acteurs mondiaux du numérique, aujourd'hui faiblement contributeurs, en lieu et place d'un modèle fondé sur le stockage, qui date des années 1980 à 1990…
Je ne vais pas vous rejouer « Antisocial » de Trust pour nous ramener aux années 1980, comme en commission,…
Sourires.
…mais je m'interroge sur cette philosophie qui s'appuie sur la mise en service ou la mise en circulation d'un produit. On peut encore lire sur la page d'accueil de Copie France, qui n'a fait l'objet d'aucune mise à jour depuis 2011, que le fait générateur est la mise en circulation.
Dans les faits, les choses évoluent à la faveur de l'usage. Ce modèle se rapproche de celui de la redevance audiovisuelle : elle est appelée sur le fondement de l'usage, non sur celui de la mise en circulation, et personne ne s'interroge sur le fait qu'il faut la payer tous les ans.
Nous devons nous poser les questions suivantes. Comment, pour « rattraper » le reconditionné, passe-t-on de l'approche fondée sur la mise en circulation à celle des usages ? Quand, en 2018, Électro Dépôt avait demandé un remboursement de 5 000 euros de RCP au titre de la mise en circulation, Copie France avait adressé à l'entreprise un courrier de refus. J'aimerais comprendre les règles : quelles sont-elles, qui en décide ?
Si demain nous trouvons une modalité de perception qui permette d'allouer 1,5 milliard à la culture et aux auteurs, sur des bases comprises de tous, et qui fasse participer des acteurs qui échappent aujourd'hui à la contribution, je serai le premier à voter ces dispositions des deux mains.
Mme Virginie Duby-Muller, M. Philippe Latombe et M. Pierre-Alain Raphan applaudissent.
La parole est à Mme Paula Forteza, pour soutenir le sous-amendement n° 339 .
Dans le droit fil de ce que vient de dire M. le rapporteur, j'aurais préféré que cette question soit abordée lors de l'examen prochain du texte relatif à l'audiovisuel ; je m'étonne que nous en débattions dans le cadre de cette proposition de loi car, ce faisant, nous alimentons l'opposition historique entre le monde de la culture et celui du numérique, ce qui ne nous aide pas à réfléchir clairement.
Avec cette mesure, nous effaçons avec le coude ce que nous avons écrit dans ce texte avec la main. Nous avons débattu aujourd'hui de maintes dispositions destinées à consolider la filière du réemploi, et nous en venons à la menacer au péril de 2 500 emplois français. Je rappelle que cette filière très jeune a besoin de temps pour se consolider.
Afin qu'elle bénéficie de ce répit, je propose de plafonner le montant de la rémunération pour copie privée sur le reconditionné à 10 % maximum des barèmes établis pour les appareils neufs mais aussi, dans mon second sous-amendement – le n° 341 –, de décaler jusqu'à 2025 le délai durant lequel les barèmes ne pourront pas être modifiés.
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement n° 358 .
Nous proposons d'exonérer de rémunération pour copie privée les entreprises du secteur de l'économie sociale et solidaire. Comme vous l'avez souligné, madame la ministre, ces entreprises proposent des produits reconditionnés à un public qui n'irait pas acheter des iPhones ou plutôt des téléphones – je n'ai pas le droit de citer des marques – à plus de 500 ou 600 euros. Ces personnes vont chez Emmaüs – je pense aux Ateliers du Bocage – ou s'adressent à des réseaux comme Envie.
L'accès aux outils numériques est un véritable sujet social et nous pouvons nous féliciter de la présence des entreprises de l'ESS durant la crise sanitaire, car elles ont permis à des familles ne disposant pas de beaucoup de moyens de s'équiper en informatique pour un faible coût. Elles ont une véritable valeur sociale non seulement en matière d'insertion et en raison de leurs missions mais aussi du fait des produits qu'elles proposent.
Ce sous-amendement de M. Christophe Castaner, président du groupe La République en marche, reflète l'extrême sensibilité de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire à la question des entreprises de l'ESS. Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, présidente de commission ici présente et cosignataire du sous-amendement, ainsi que d'autres membres se sont largement investis sur le sujet.
La parole est à Mme Maina Sage, pour soutenir le sous-amendement n° 363 .
Il est identique au précédent. Vous proposez une solution judicieuse qui parvient à un point d'équilibre, madame la ministre, mais il nous faut veiller à ce que les plus faibles, en l'espèce les entreprises de l'économie sociale et solidaire, n'en subissent pas trop fortement les effets. Nous savons que ces entreprises qui ont pour objectif le partage, la solidarité et la redistribution de leurs bénéfices font de très faibles marges. Leur part de marché est assez faible, mais elles sont très nombreuses sur tout le territoire et elles contribuent à des œuvres sociales essentielles pour tous.
Nous soutenons évidemment l'amendement du Gouvernement mais nous souhaitons le sous-amender à la marge pour préserver un secteur en plein développement – Paula Forteza l'a rappelé. Il faut sécuriser ce développement et permettre aux entreprises concernées de passer le cap et de s'y retrouver face à la solution consensuelle que nous proposons.
S'agissant de l'amendement n° 230 du Gouvernement, nous avons compris tout l'intérêt du compromis qui a été trouvé, dont nous pouvons nous féliciter. Je peux comprendre les déceptions qui s'expriment de part et d'autre, mais aucune partie ne peut être totalement gagnante ou perdante : c'est bien une solution d'apaisement qui est proposée. Le Gouvernement y a œuvré, notamment en demandant à la commission copie privée de prévoir un tarif différencié pour les produits reconditionnés. L'amendement vise à entériner cet acquis, qui est d'autant plus important qu'un rapport et une étude des impacts économiques de la rémunération pour copie privée seront remis par le Gouvernement, conformément à l'article 14 bis C, que Mme la ministre vous proposera d'amender.
Au nom de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, j'émets donc un avis favorable à l'amendement du Gouvernement, sous réserve de l'adoption des sous-amendements identiques n° 358 et 363 . Je donne également un avis favorable au sous-amendement rédactionnel n° 361 de M. Bothorel. J'émets en revanche un avis défavorable aux sous-amendements n° 339 et 341 de Mme Forteza, qui en comprendra les raisons, même si j'ai bien entendu ses arguments.
Peut-être commencerai-je par rappeler quelques chiffres, car on a le sentiment, à écouter certains, que la redevance dont il est question atteint un niveau tel qu'elle pourrait conditionner les actes d'achat. La rémunération pour copie privée proposée le 1er juin 2021 par la commission compétente, qui prévoit un barème spécifique pour les appareils reconditionnés, s'élèverait à 7,20 euros pour les téléphones de 32 gigaoctets et à 8,40 euros pour ceux de 64 gigaoctets. Précisons que le secteur de l'économie sociale et solidaire commercialise le plus souvent des appareils de faible capacité. Le poids de la rémunération pour copie privée représente 2,4 % du prix de vente moyen. Pardonnez-moi, mais de tels coûts ne sont nullement de nature à conditionner l'acte d'achat !
L'enjeu est bien de préserver la propriété intellectuelle et le droit des producteurs de biens culturels à être rémunérés. Je ne comprends absolument pas comment des tarifs aussi faibles pourraient restreindre le reconditionnement d'appareils. Vous avez raison lorsque vous soulignez que, durant les périodes de confinement, il est apparu particulièrement important que chacun ait accès à un téléphone portable. En l'occurrence, la redevance prévue ne créera pas d'obstacle économique insurmontable, et la proposition de la commission copie privée me paraît tout à fait équilibrée.
Je suis favorable au sous-amendement n° 361 de M. Bothorel et défavorable au sous-amendement n° 339 de Mme Forteza, comme le rapporteur. S'agissant des amendements visant à n'exonérer de la rémunération pour copie privée que les acteurs de l'économie sociale et solidaire, si l'idée me semble sympathique, j'ai des doutes quant à sa robustesse juridique. Je m'en remets donc à la sagesse de l'Assemblée sur ce point. Mme Forteza a également proposé un gel du barème de la rémunération jusqu'en 2025. J'y suis défavorable : la fixation des barèmes intervient, précisément, sur la base d'études d'usage régulières. Ne pas prendre en considération l'évolution des usages entre 2021 et 2025 ne me paraît pas pertinent.
Je remercie la ministre d'avoir rappelé l'importance de la propriété intellectuelle : c'est bien une richesse pour notre pays, particulièrement le droit d'auteur, que la France a créé il y a plusieurs siècles et exporté dans de nombreux pays. Je me souviens ainsi d'une étude dans laquelle deux chercheurs de l'université de Stanford démontraient que l'âge d'or de l'opéra italien avait été permis par l'exportation du droit d'auteur par Napoléon dans les républiques italiennes, lesquelles furent le lieu de la plus forte créativité culturelle observée au XIX
Je me réjouis que vous ayez trouvé une position de consensus, notamment avec les représentants des professionnels. Les sociétés de gestion des droits ne sont pas uniquement des lobbyistes : elles défendent des auteurs, des créateurs, des producteurs, autant de personnes qui vivent souvent dans des situations très précaires. Heureusement qu'elles sont là ! Ce sont elles, par exemple, qui ont créé les régimes de retraite des auteurs. De tout temps, elles ont défendu les intérêts de toute la chaîne de création artistique, qu'il s'agisse des auteurs, des créateurs ou des interprètes,…
…y compris des interprètes secondaires – autant de professionnels qui connaissent d'importants aléas. J'estime que nous devons être du côté des artistes et de la chaîne de création.
La position défendue par la ministre me paraît équilibrée, y compris s'agissant de l'économie sociale et solidaire. En revanche, le barème à appliquer repose sur des études d'usage. Vous avez raison, monsieur Bothorel, de souligner qu'il faut les réactualiser régulièrement, car les usages évoluent. Néanmoins, même sur les smartphones, la copie privée existe toujours. Le Conseil d'État est là pour veiller à ce que les équilibres soient respectés.
Merci à Mme la ministre et aux auteurs de ces sous-amendements. Vous le savez, j'ai été auteur-réalisateur et j'ai bénéficié de la rémunération pour copie privée. J'ai aussi été président d'une association œuvrant dans le secteur de l'ESS et, comme vous le savez, je ne suis pas le moins écologiste des députés.
Murmures.
Le compromis qui nous est proposé me semble constituer une très bonne solution.
Pourquoi la rédaction initiale de l'article 14 bis B était-elle dangereuse ? Parce qu'elle mettait en péril la culture française et un modèle de société garantissant une juste rétribution des auteurs et du travail intellectuel. La rémunération pour copie privée, rappelons-le, constitue une exception au droit d'auteur : il s'agit d'un droit d'usage, qui a été accordé lorsqu'il est devenu possible de copier des œuvres de façon massive – c'est-à-dire peu ou prou lors de l'apparition de la cassette. On a ainsi protégé le droit d'auteur : lorsqu'une personne achetait un vinyle et copiait son contenu sur une cassette pour l'écouter dans sa voiture, la redevance pour copie privée s'appliquant à la cassette rémunérait l'auteur de façon proportionnelle – bref, vous connaissez le dispositif.
Croire que cette redevance devrait disparaître parce que les supports ont changé serait une erreur fondamentale, qui remettrait en cause le pacte qui lie notre société aux créateurs. Reconnaître que la situation a évolué et que des réglages doivent être effectués, pourquoi pas – la ministre s'est d'ailleurs exprimée en ce sens –, mais ne touchons pas à cet élément fondamental, qui est le fruit d'un équilibre et qui soutient la création en France. Ce secteur emploie de très nombreuses personnes, et pas seulement des grands artistes. La tribune parue dans Le Journal du dimanche a été signée par de grands noms de la culture, dont on peut penser qu'ils gagnent beaucoup d'argent, mais les auteurs sont un vivier, dont le travail nourrit notre pays. Comme le soulignait Mme Bachelot, le secteur culturel pèse autant dans l'économie française que l'industrie automobile : ce n'est vraiment pas rien.
Je me félicite moi aussi de ce débat apaisé, car je dois avouer avoir été assez choquée par la violence des échanges qui se sont tenus ces derniers jours. Je pourrais moi aussi, sans dévoiler mon CV, vous faire savoir que je me sens écartelée car je suis rapporteure spéciale du budget de la culture mais j'ai aussi beaucoup travaillé sur la question l'inclusion numérique.
Trois enjeux doivent s'articuler, en réalité : la préservation de l'environnement, la préservation de la culture et l'accompagnement de l'inclusion numérique. Il me semble que c'est à travers ce prisme qu'il faut aborder le problème, parce que les clients de Back Market ne sont pas les mêmes que ceux d'Emmaüs Connect ou du petit revendeur de quartier. Sans doute la solution serait-elle de compenser le coût de la rémunération pour copie privée en accordant une aide, par exemple dans le cadre du pass numérique, afin de permettre aux personnes en difficulté d'acquérir un équipement à bas prix.
Nous devons sortir de ce débat par le haut, en adoptant l'amendement du Gouvernement, et peut-être le sous-amendement n° 358 de Christophe Castaner, pour tenter de concilier ces trois enjeux.
Il est difficile d'intervenir après que plusieurs intervenants ont laissé entendre que la suppression de cette rémunération pour les appareils reconditionnés pourrait conduire à une aggravation notable de la situation du monde culturel, notamment de celle des festivals locaux – ce qui n'est absolument pas démontré au vu des flux observés. Vous avez indiqué, madame la ministre, que cette redevance « ne tombe pas dans les poches de l'État ». Elle sort néanmoins de la poche des petits artisans et elle réduira d'autant la marge qu'ils pourront espérer percevoir en revendant du matériel reconditionné.
Je rappelle qu'aucun pays européen n'applique la rémunération pour copie privée aux matériels reconditionnés, ce qui pourrait nous amener à nous interroger.
D'après ce que m'ont laissé entendre les acteurs du reconditionnement avec qui je suis en relation, ils n'ont pas été pleinement associés au compromis qui a été trouvé. Je ne peux cependant pas l'affirmer avec certitude, n'ayant pas participé à ces travaux.
En revanche, je conclurai par un point très important : établir une différence entre l'économie sociale et solidaire et les autres acteurs ne me semble pas constituer une bonne solution. Puisque nous parlons de culture et que l'art consiste parfois à reprendre, voire à parodier, les mots des grands auteurs, vous me permettrez cette formule : je préfère le bon sens de l'artisan réparateur de Tourcoing – le voisin du boucher-charcutier, sans doute – que les chiffres avancés par certains. Or, lui a très peur de ce qu'il adviendrait si la rémunération pour copie privée s'appliquait aux appareils reconditionnés.
En préambule, j'apporte mon soutien amical à Éric Bothorel, en regrettant les méthodes employées à son égard et en rappelant que tout mandat impératif est nul.
J'estime, comme Mme Forteza que la disposition qui donne lieu à ce débat – important mais au champ assez restreint au regard du reste de la proposition de loi – s'apparente à un cavalier législatif, ce que je ne peux que regretter.
S'agissant de la rédaction proposée par le Gouvernement, je rappelle que je siège moi aussi depuis des années à la commission des affaires culturelles et de l'éducation. J'ai donc bien conscience de la situation difficile à laquelle font face les acteurs du monde culturel, notamment dans la crise actuelle. Ils ont évidemment besoin de notre soutien. Je me bats d'ailleurs chaque année, à l'occasion de l'examen des textes budgétaires, pour leur assurer une juste reconnaissance, par exemple à travers la création du Centre national de la musique, dont le financement reste insuffisant.
Mais le fait qu'un secteur soit en difficulté ne justifie pas d'en saper un autre. Il a été rappelé que les montants collectés ont fortement augmenté ces dernières années. J'ajoute que la culture ne souffre nullement d'un manque à gagner, comme certains ministres ou artistes ont souhaité le faire croire, car la rémunération pour copie privée ne s'applique pas aux supports reconditionnés à l'heure actuelle.
En l'état du droit, seuls les appareils neufs sont assujettis à cette redevance. Mme la ministre nous a rappelé le montant de la rémunération pour copie privée et je tiens à dire qu'il reste beaucoup plus élevé que la moyenne européenne : pour un téléphone portable d'une capacité de 32 gigaoctets, cette rémunération s'élève à 6,25 euros en Allemagne, à 5,20 euros en Italie et à 1,20 euro en Espagne. Les montants beaucoup plus importants en France inquiètent fortement les acteurs de l'économie sociale et solidaire. Pour ma part, je regrette évidemment que l'on n'en soit pas resté à l'article tel qu'il a été adopté en commission.
Je remercie Mme la ministre pour la solution diplomatique et pacifique qu'elle a proposée. Cela n'a pas dû être simple ! Je salue par ailleurs le sous-amendement du président Castaner, que je trouve très astucieux car il valorise l'économie sociale et solidaire, qu'il faut soutenir. Le Gouvernement agit beaucoup à ce sujet, notamment Olivia Grégoire, que je salue.
J'ai cependant deux interrogations, dont la première rejoint celle de François-Michel Lambert : pourquoi ne pas exonérer aussi les TPE et les PME ?
De nombreuses sociétés qui ont été créées dans ce secteur ne comprendront pas l'incohérence politique qui existe entre l'incitation au reconditionnement contenue dans le projet de loi « climat et résilience » adopté il y a trois semaines et le fait de n'exonérer aujourd'hui que les entreprises de l'ESS.
Faudra-t-il que les entreprises soient requalifiées pour bénéficier de l'exonération ? J'aimerais avoir une réponse à ce sujet : les TPE et PME peuvent-elles être éligibles à l'exonération ?
Ma deuxième interrogation rejoint la proposition de notre collègue Bothorel : pourquoi ne pas parier aussi sur le neuf ? L'idée est de soutenir l'ensemble de la filière. Or je ne pense pas que celui qui achète un smartphone de dernière génération, pour un coût parfois supérieur à 1 000 euros, soit à quelques euros près. Un tel dispositif pourrait aussi soutenir tout le secteur culturel.
Je vais donc voter le sous-amendement du président Castaner, qui est astucieux…
…mais j'aimerais une réponse aux deux questions que je me pose, car je m'interroge encore sur la vision que nous proposons sur ces sujets. .
MM. David Corceiro et Jimmy Pahun applaudissent
J'aimerais corriger deux erreurs qui viennent d'être énoncées, dont l'une a été immédiatement rectifiée. D'abord, l'assujettissement des supports reconditionnés n'est pas prévu qu'en France : il est également prévu aux Pays-Bas, en Allemagne, en Autriche, en Belgique, au Portugal et en Italie, selon des modalités particulières. Certes, la France a peut-être été à l'avant-garde de cette démarche visant à préserver la propriété intellectuelle, mais elle n'est pas la seule. Mme Cariou a d'ailleurs rappelé l'Italie, Napoléon et l'opéra – des références auxquelles je suis extrêmement sensible.
Autre erreur : les supports reconditionnés ne seraient pas soumis à la redevance pour copie privée. Or ils y sont bien sûr assujettis. Je ne sais pas pourquoi ce canard vole encore, alors que les choses sont parfaitement claires ! Je comprends la confusion : elle vient de la plateforme Back Market, qui est un intermédiaire entre vendeurs et acheteurs mais ne vend pas elle-même les supports. N'étant pas un importateur au sens du code la propriété intellectuelle, comme je l'ai expliqué, cette plateforme n'est évidemment pas assujettie à la redevance pour copie privée. En revanche, les vendeurs présents sur cette place de marché, dont certains sont des professionnels, doivent s'en acquitter au même titre qu'ils s'acquittent de la TVA. Autrement dit, tout le monde paye donc la redevance pour copie privée – sauf peut-être ceux qui vendent des téléphones portables sous le manteau, mais c'est un autre problème. Quoi qu'il en soit, je vais vous dire un secret : si l'on voulait vraiment défendre l'environnement, il faudrait interdire les téléphones portables !
Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas et M. Erwan Balanant applaudissent.
Sourires
C'était une plaisanterie, bien entendu !
Je serai assez bref car beaucoup de choses ont déjà été dites. Chacun a pu s'exprimer et je vous remercie, chers collègues, pour ce débat apaisé qui nous fait du bien après les semaines passionnées que nous avons connues.
Je voudrais relativiser un peu le débat ; nous aurons cependant besoin que vous nous apportiez des réponses par la suite, madame la ministre. D'abord, la redevance dont nous parlons est une redevance d'usage. Si vous êtes équipés d'un téléviseur, vous payez tous une redevance audiovisuelle, que votre appareil soit neuf ou d'occasion. Bien sûr, on peut ensuite débattre du montant.
En réponse à certains propos que j'ai entendus, je voudrais dire que je regrette moi aussi, comme ma collègue Forteza, que ce débat qui ne concerne pas l'environnement se soit invité dans l'examen de cette proposition de loi. Il y est inclus, car ce texte nous vient du Sénat. J'aurais souhaité pour ma part que nous disposions de davantage de temps. Les rapports qui ont été demandés, auxquels le Gouvernement proposera d'ajouter des compléments, nous éclaireront sans doute et nous permettront peut-être de revenir sur ce débat.
Saluons la solution de sagesse qui nous est proposée, sur laquelle chacun votera en son âme et conscience. Il reste d'autres questions que nous devrons sans doute aborder mais elles ne relèvent pas du ministère de la culture : il faut absolument – et je tiens à le dire ici au banc – trouver les réponses qui permettront de soutenir la filière du reconditionnement en France, notamment les TPE et PME qui se créent actuellement, à la suite de la loi AGEC.
Mme Patricia Mirallès applaudit.
Je voudrais leur dire que nous ne les oublierons pas : nous serons vigilants quant aux mesures qui seront décidées. De nombreux députés ici présents sont investis avec moi au sein de la commission du développement durable et au-delà. En tant que membres de cette commission, madame la ministre, nous serons extrêmement vigilants sur ce sujet car nous voulons soutenir cette filière émergente qui crée de l'emploi dans nos territoires. Je tenais à le signaler.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et UDI-I et sur quelques bancs du groupe Dem.
Le sous-amendement n° 361 est adopté.
Le sous-amendement n° 339 n'est pas adopté.
Le sous-amendement n° 341 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 71
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l'adoption 58
Contre 8
L'amendement n° 207 de M. Éric Bothorel est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Même si l'adoption des amendements n° 230 et 304 a fait tomber tous les amendements suivants à l'article 14 bis B, je voudrais intervenir sur deux points afin que nous mesurions tous la portée légistique de ce qui vient d'être voté.
Vous prévoyez de modifier le code de la propriété intellectuelle dans un texte dont on ne sait pas quand il sera promulgué. Cela signifie d'abord, madame la ministre, que votre compromis n'est pas encore effectif puisque c'est la décision de la commission copie privée qui sera appliquée, avec son nouveau barème concernant les supports reconditionnés. L'économie sociale et solidaire n'est donc pas exonérée du barème applicable, et celui-ci n'est pas figé pour l'année 2022. Le fait que la délibération ait eu lieu la semaine dernière, avant l'adoption de la proposition de loi, va conduire à un décalage. De ce fait, les entreprises de l'ESS vont bien s'acquitter de la redevance pour copie privée, alors qu'elles pensaient en être exonérées.
Je voudrais vous dire ensuite, sans malveillance, que les grandes entreprises qui commercialisent des supports électroniques d'enregistrement de type clé USB ou disque dur en vendent très peu, car ce sont les places de marché qui le font. Je partage votre avis : les places de marché devraient payer la redevance pour copie privée. Mais dans les faits, elles ne la payent pas ! La plupart des produits sont commandés, arrivent par la poste et ne sont pas assujettis à la redevance. C'est ce qui explique l'inquiétude des entreprises qui pourraient être concernées par la RCP sur les produits reconditionnés : tout se passe sur des plateformes qui échappent à tout contrôle et à toute perception de la redevance ! Voilà le vrai problème.
Je vais bien sûr laisser Mme la ministre répondre mais nous n'allons pas débattre des amendements qui n'ont pas été défendus parce qu'ils sont tombés.
De toute façon, quelles que soient les décisions que nous aurions prises, elles n'auraient été opérationnelles qu'à la fin de leur examen par les deux chambres et après l'élaboration des diverses dispositions réglementaires. Cela vaut pour les amendements que nous venons de voter comme pour tous les autres !
L'amendement n° 207 est adopté.
Les problèmes dont nous débattons étant survenus de façon inopinée dans le débat public, nous avons besoin d'éclaircissements. Je vous propose donc une approche en deux temps, avec la remise d'un rapport avant le 31 décembre 2021 sur la RCP ainsi que sur le fonctionnement et la gouvernance de la commission copie privée, suivie de la remise d'une étude avant le 31 décembre 2022 sur les impacts économiques de la rémunération, en particulier sur les produits neufs et reconditionnés. Je pense que ces documents seront de nature à éclairer pleinement non seulement le Parlement, mais aussi l'opinion publique et les consommateurs.
Ce sous-amendement vise à préciser que le rapport formulera des propositions pour compenser les pertes financières liées aux évolutions envisagées par le Gouvernement. En effet, avec l'amendement qui vient d'être adopté, un flou persiste sur les évolutions à venir de la rémunération pour copie privée concernant les produits reconditionnés. À mon sens, deux points devront faire l'objet d'un examen particulier : d'abord les conséquences pour le monde du reconditionnement, en particulier pour les acteurs de l'économie sociale et solidaire, ensuite les conséquences pour le monde de la culture – si possible en détaillant les différents secteurs qui le composent.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements identiques et sur le sous-amendement ?
Si je suis favorable aux amendements identiques n° 232 et 302 au nom de la commission du développement durable, je suis plus réservé à titre personnel, car une étude est toujours plus utile avant le vote d'une disposition qu'après… Enfin, c'est ainsi, nous avons été soumis à un certain tempo et au moins cette étude éclairera-t-elle la représentation nationale en répondant aux interrogations qui persistent sur la commission copie privée, sur son fonctionnement, sur la façon dont elle prend ses décisions, ou encore sur l'obligation de transparence qui s'impose à elle.
L'étude nous informera sans doute également sur les effets produits sur l'économie du reconditionnement – ce qui me conduit à émettre un avis défavorable au sous-amendement n° 350 . En effet, il ne me paraît pas logique de commencer à faire des propositions avant même d'avoir pris connaissance de l'étude ayant vocation à nous éclairer. Au demeurant, j'estime que nous ne devons pas attendre que cette proposition de loi soit votée pour que des mesures énergiques de soutien des reconditionneurs soient prises – au besoin, il ne faudra pas hésiter à faire du lobbying en ce sens auprès du Gouvernement afin de les obtenir.
En résumé, je suis défavorable au sous-amendement n° 350 et favorable aux amendements identiques n° 232 et 302 .
Même avis, monsieur le président.
Le sous-amendement n° 350 n'est pas adopté.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 206 .
Sur le droit d'auteur, je ne suis pas susceptible, madame la ministre : l'amendement du Gouvernement que nous venons d'adopter me semble s'inspirer assez largement d'un rapport adopté à l'unanimité en commission du développement durable. Je m'en félicite, tout comme je me félicite de l'adoption à l'instant de mon amendement n° 207 , visant à augmenter la diffusion des données ouvertes – je pense notamment aux interfaces de programmation. Une telle mesure me paraît en effet de nature à contribuer à améliorer la nécessaire transparence que nous avons évoquée tout à l'heure.
Pour ce qui est de l'amendement n° 206 , il a vocation à améliorer les pratiques de remboursement de la RCP à destination des professionnels. Je vais vous donner un exemple, madame la ministre : j'ai un ami qui a un cancer et qui sort régulièrement du cabinet de radiologie avec les images de sa tumeur sur un CD-Rom, un support sur lequel le radiologue aura eu à payer 90 centimes d'euro de redevance de copie privée. Sans vouloir priver les artistes des droits qui leur reviennent, je souhaite que demain, le remboursement dont sont censés pouvoir bénéficier les professionnels soit plus simple à obtenir qu'il ne l'est actuellement. Lorsqu'on examine les chiffres, notamment ceux figurant dans le rapport de transparence de Copie France, on se rend compte qu'il existe une différence sensible entre ce qui aurait dû être remboursé et ce qui l'a effectivement été. Je vous remercie de bien vouloir soutenir cet amendement.
Les chiffres du remboursement de la redevance copie privée aux professionnels montrent effectivement que nous sommes très loin des estimations faites en 2011. Aujourd'hui encore, certains professionnels ignorent qu'ils ont la possibilité de demander le remboursement de la redevance. Estimant, comme vous, que les pratiques doivent s'améliorer en la matière, je soutiens pleinement votre demande de rapport et j'émets donc un avis favorable à votre amendement.
L'amendement n° 206 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
La parole est à M. Jean-Charles Colas-Roy, pour soutenir l'amendement n° 162 .
Cet amendement propose d'établir un moratoire sur la redevance s'appliquant aux équipements numériques reconditionnés, jusqu'à la remise du rapport faisant l'objet de l'article 14 bis C. Vous venez d'indiquer, madame la ministre, que ce rapport permettra de dissiper plusieurs zones d'ombre ; et vous, monsieur le rapporteur, que vous auriez bien aimé avoir ce rapport avant de légiférer – on vous a même entendu dire plusieurs fois en commission qu'il était urgent d'attendre.
Nous sommes tous d'accord sur le fait que nous devons aider le secteur de la culture et ne pas opposer culture et environnement. À mon sens, nous pouvons le faire sans pour autant pérenniser une redevance sur les produits reconditionnés. Il ne s'agit en aucune manière de remettre en cause la RCP sur l'ensemble des produits : il n'est ici question que des produits reconditionnés, qui représentent une part infime de l'assiette de la redevance. Maintenir cette redevance sur les produits reconditionnés revient à envoyer un mauvais signal, contraire au message que nous nous sommes efforcés de promouvoir avec la loi antigaspillage pour une économie circulaire, qui contenait plusieurs mesures en faveur du réemploi.
Madame la ministre, quand vous vous êtes exprimée sur l'article, vous avez rappelé que cette redevance avait initialement été instaurée pour rémunérer les auteurs sur les copies de leurs œuvres. Or, aujourd'hui, plus personne ne copie ! Si l'on veut traiter de la propriété intellectuelle et du droit d'auteur, alors faisons-le dans le cadre d'un texte portant spécifiquement sur ce sujet, mais pas en sanctionnant les produits reconditionnés.
Je salue la volonté du président Castaner d'exempter l'économie sociale et solidaire, même si le risque d'inconstitutionnalité fait peser un doute sur l'effectivité de ce qu'il propose.
Sur le même sujet, un projet de loi fait actuellement la navette entre l'Assemblée et le Sénat, tandis que des décisions réglementaires, issues des propositions de la commission pour la rémunération de la copie privée, sont en voie d'être prises.
Avec la loi antigaspillage, nous avons voulu favoriser le recyclage et la réparabilité. Continuons à en faire de même avec le présent texte, dans l'esprit voulu par les sénateurs, en soutenant la filière française du reconditionnement et en votant ce moratoire jusqu'à l'obtention du rapport demandé.
Certains reconditionneurs payent la redevance pour copie privée tandis que d'autres ne la payent pas. Avec votre amendement, vous proposez de geler totalement la situation et, ce faisant, de changer la donne. Une telle mesure va plus loin que ce que nous avons voté et n'est pas en cohérence avec le compromis qui a été trouvé par le Gouvernement au sujet des reconditionneurs.
Ce n'est pas à Mme la ministre, ici présente, d'apporter les réponses : il faut que nous soyons vigilants, et je peux vous assurer que je mènerai le combat avec vous pour que des mesures fortes soient prises en faveur de la filière du reconditionnement et du réemploi qui nous tient à cœur. Pour toutes ces raisons, je vous invite à retirer votre amendement, cher collègue ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Actuellement, les supports reconditionnés sont soumis à la redevance sur la copie privée, et je défends pour ma part le principe d'un assujettissement des supports d'enregistrement dans le cadre d'un barème adapté. Ce barème a été présenté par la commission copie privée, nous en avons longuement discuté et je l'ai soutenu dans un esprit d'apaisement et de conciliation. C'est pourquoi je ne peux être favorable à votre amendement – le préjudice subi par les ayants droit étant d'ores et déjà établi. Je souhaite donc le retrait de cet amendement et émettrai à défaut un avis défavorable.
L'amendement n° 162 n'est pas adopté.
L'article 14 bis C, amendé, est adopté.
La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour soutenir l'amendement n° 293 .
Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l'article 14 bis en proposant pour cela des pistes afin de trouver un point d'équilibre entre les différents impératifs exposés lors des nombreux débats et auditions – notamment celle de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) – qui ont eu lieu au sein de la commission du développement durable. Cet amendement me semble constituer le barycentre entre ce qui serait une soustransposition et ce qui serait une surtransposition de la directive 2018/1972 établissant le code des communications électroniques européen : en d'autres termes, c'est un amendement ayant pour objet d'apporter de l'équilibre à la rédaction de l'article 14 bis .
Effectivement, toute la difficulté avec ce texte consiste à assurer sa cohérence avec les lois en vigueur, ainsi qu'avec les directives européennes. Je suis donc favorable à cet amendement.
Même avis.
Cet amendement vise à préciser que l'obligation d'information du consommateur repose bien sur le distributeur d'équipements informatiques.
L'amendement n° 344 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
Cet amendement vise à préciser que l'information délivrée aux consommateurs d'équipements informatiques doit porter notamment sur les moyens d'améliorer le stockage des données et de réaliser ainsi des économies d'énergie.
Cet amendement me paraît satisfait par la rédaction actuelle de l'article 14 ter , qui précise que les conseils délivrés doivent permettre d'optimiser le stockage et la gestion de la mémoire des appareils informatiques et d'allonger leur durée de vie. Je vous invite donc à retirer cet amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.
L'amendement n° 291 , ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.
Cet amendement supprime la notion de support facilitant la réalisation des opérations d'entretien et de nettoyage, afin que l'article 14 ter soit en cohérence avec les directives européennes et puisse vivre pleinement sa vie après le vote de la loi.
L'amendement n° 345 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 14 ter, amendé, est adopté.
L'amendement n° 253 , accepté par le Gouvernement, est adopté.
L'article 14 quater, amendé, est adopté.
Cet amendement que je présente à titre personnel vise à préciser que le consommateur doit être informé des obligations de l'opérateur de plateforme et de l'annonceur en matière environnementale.
Je crains, monsieur le rapporteur, d'être en désaccord avec cet amendement que vous présentez à titre personnel, car s'il était adopté, les opérateurs de plateformes en ligne seraient tenus d'informer systématiquement le consommateur de leurs obligations en matière de responsabilité élargie du producteur. Je tiens à rappeler que les plateformes en ligne n'ont vocation à se substituer aux producteurs qu'en cas de carence de ces derniers en matière de responsabilité élargie. Votre proposition revient à réduire les responsabilités qui incombent aux producteurs puisqu'elle banalise le fait que l'information est du ressort des plateformes en ligne, autrement dit elle banalise la carence des producteurs. Une telle évolution va à rebours des objectifs de cette proposition de loi. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, que vous pourrez sans doute retravailler. À défaut, mon avis sera défavorable.
L'amendement n° 280 est retiré.
L'amendement n° 281 rectifié de M. le rapporteur est défendu.
Quel est l'avis du Gouvernement ?
Défavorable.
L'amendement n° 281 rectifié est retiré.
L'amendement n° 261 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement n° 94 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l'amendement n° 125 .
Il vise à définir des règles standard pour les chargeurs des appareils numériques de type tablettes et smartphones, enjeu d'importance qu'ont soulevé les sénateurs. J'avais déjà déposé un amendement à ce sujet en commission et l'avais retiré mais je le soumets à nouveau à la discussion, car les avancées préconisées ne me semblent pas opérantes.
Comme je vous l'ai déjà indiqué en commission, madame Jourdan, le Parlement européen va bientôt légiférer sur ce sujet et il nous faut attendre sa décision.
Par ailleurs, il ne vous aura pas échappé que chez l'ensemble des fabricants d'appareils numériques, notamment d'ordinateurs portables, un processus d'harmonisation est à l'œuvre autour de la norme USB-C, ce qui satisfait pour partie votre amendement.
Demande de retrait ou avis défavorable.
Même avis.
L'amendement n° 125 n'est pas adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion de la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale numérique en France.
La séance est levée.
La séance est levée à vingt heures.
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra